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Avril 194.., la peste s'installe en Algérie dans la ville d'Oran, chaque jour des cas mortels se multiplient. Pourtant la préfecture tarde à faire la déclaration de « l'état de la peste » car elle ne veut pas inquiéter l'opinion publique. Mais au bout de quelques semaines, face à l'urgence le préfet ordonne de fermer les portes de la ville.
Oran est isolée, séparée et coupée du reste du monde, les habitants deviennent « les prisonniers de la peste », la ville ressemble à une condamnée à mort.
L'épidémie progresse... La peste frappe partout et garde la ville repliée sous elle. Elle devient une « affaire collective » et même ceux qui ne portent pas « cette cochonnerie de maladie » la porte dans leur coeur.
La peste ouvre les yeux des habitants et force à penser et à réagir. Chaque individu choisit son camp et adopte une attitude propre à lui-même.
Albert Camus illustre son récit avec des personnages principaux comme Rieux le docteur, Cottard le trafiquant, Grand l'employé de mairie, Paneloux le prêtre, Tarrou le chroniqueur, Rambert le journaliste etc... Chacun de ces protagonistes incarne une morale différente face au fléau et même si ces hommes sont en désaccord sur différents plans, ils s'avèrent des « hommes de bonne volonté » qui agissent pour vaincre ensemble la peste.

Camus fait un rapprochement (sans le citer) de la peste à la guerre et la montée du nazisme, et la lutte des hommes face au fléau représente la résistance.
Les hommes occupent une place prépondérante dans son livre, comme si la peste ne concernait que les hommes. Par conséquent on peut en déduire que les conflits ne sont qu'une histoire d'hommes ! La femme a une place au second rang, effacée, elle n'apparaît de temps à autre comme une douceur, un réconfort voire juste un soutien pour l'homme et non un être pensant.

Dans son oeuvre, l'auteur dépeint une communauté qui partage la même lutte, il démontre que les effets du fléau sur l'homme peuvent changer des mentalités, des sentiments et une vision du monde. Il démontre surtout qu'on est tous égaux devant la mort.

Une oeuvre de grande qualité, certains passages sont d'un réalisme terrifiant, la progression et les ravages de la peste sont décrits dans les moindres détails.
La scène de l'agonie de l'enfant est un des passages les plus douloureux car nous assistons, impuissants, à sa souffrance et inévitablement à sa mort.
L'enfant représente le symbole de l'innocence et pour le coup Camus frappe là où ça fait mal !
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La Peste ne parlerait que de la peste ? Ce serait éluder un peu trop rapidement le talent d'Albert Camus. Ses livres sont des strates qui entrecroisent plusieurs récits à plusieurs niveaux, tous étant essentiels les uns aux autres.


La trame de l'histoire est simple et respecte la thématique annoncée. Dans les années 1940, la peste se déclare à Oran et force ses habitants à une mise en quarantaine qui déchaîne d'abord des réactions passionnées, avant de céder place à une indifférence de plus en plus tenace à mesure que la période de réclusion se prolonge. La peste semble alors ne jamais devoir finir et les habitants se résignent à ne plus revoir ceux dont ils sont coupés et –c'est peut-être le plus difficile- à devenir des personnages anhistoriques. Pourtant, autour d'eux, la peste continue à faire des ravages et ne laisse jamais deviner l'identité de ses futures victimes.


Le récit, pris en charge par un narrateur d'abord mystérieux, se concentre sur le personnage du docteur Rieux. Technique, ne laissant jamais transparaître ses émotions et effaçant toujours son individualité en face des vagues que provoque l'ensemble de ses congénères, ce personnage est d'autant plus crédible qu'Albert Camus semble s'être directement inspiré de sa propre personnalité avant de l'intégrer à son récit. le docteur Rieux impose une distance qui convient aux évènements. En temps de peste, il s'agit de prendre son rôle au sérieux, de tout faire pour guérir les malades et pour soulager les familles, sans jamais s'impliquer au point de détruire sa propre santé ou de sacrifier son équilibre mental aux passions de l'affection. Pourtant, derrière ce professionnalisme intransigeant qui nous permettra de connaître la progression de la maladie jour après jour –ses lois absurdes, son imprévisibilité de la gratuité de ses engouements à ses rémissions inespérées-, une menace plus grande que celle de la peste se profile.


Si la plupart des habitants d'Oran se méfient les uns des autres et doivent être mis en quarantaine dans leur propre foyer à chaque fois qu'un proche se révèle atteint de la maladie, le docteur Rieux ne peut pas se permettre la prudence. du premier jusqu'au dernier jour de l'épidémie –si tant est que le dernier jour existe vraiment-, sa profession lui aura permis de mieux connaître les hommes. Les malades, en général, mais aussi le père Paneloux et sa théorie du fléau divin, Raymond Rambert et ses désirs d'évasion, Joseph Grand et son intérêt monomaniaque pour la grammaire ou encore Mme Rieux, mère du docteur et double de la propre mère d'Albert Camus. Mais le docteur ne se laisse jamais abuser par les états d'âme de chacun et c'est toujours en sa qualité de technicien physiologiste qu'il décrit le comportement de ses semblables et de lui-même. Il nous arrache ainsi brutalement à nos croyances d'une identité propre à chacun. Nous sommes tous les mêmes, régis par des lois internes que nous ne maîtrisons pas mais qui nous incitent à trouver la meilleure ruse pour prolonger notre existence par-delà les fléaux. le docteur Rieux, froidement attendri par les effusions sentimentales qui demeurent toutefois en dépit des situations désespérées, ne place pas le salut dans ces considérations sans âme. Si le détachement lui semble salvateur, il ne fait que prolonger une existence sans saveur.


« Il était juste que, de temps en temps au moins, la joie vînt récompenser ceux qui se suffisent de l'homme et de son pauvre et terrible amour. »


C'est d'ailleurs là où souhaite en venir Albert Camus. Que la peste soit terrible parce qu'elle constitue un mal invisible qui touche indifféremment toutes les catégories de population, nous le savons tous et nous pouvons même l'accepter dans une certaine mesure. En revanche, le docteur Rieux ne semble pas pouvoir accepter le climat d'indifférence qui s'installe peu à peu dans la ville recluse d'Oran. La peste devient le symbole d'un autre fléau qui touche les âmes et ce mal porte le nom d'indifférence.


« Nos concitoyens s'étaient mis au pas, ils s'étaient adaptés, comme on dit, parce qu'il n'y avait pas moyen de faire autrement. Ils avaient encore, naturellement, l'attitude du malheur et de la souffrance, mais ils n'en ressentaient plus la pointe. du reste, le docteur Rieux, par exemple, considérait que c'était cela le malheur, justement, et que l'habitude du désespoir est pire que le désespoir lui-même. »


L'écrivain de l'absurde ne délaisse jamais sa volonté –absurde elle aussi- de décrire ce sentiment de détachement qui fait percevoir la vie à la manière d'un plateau de jeu régi par des lois guindées qu'on ne respecte plus que par habitude, avec une acceptation du corps mais sans l'approbation de l'âme. le désenchantement d'une ville se laisse à voir à travers le récit du docteur Rieux. Des décennies plus tard, cette peste mentale semble s'être propagée et avoir contaminé une plus grande partie du monde. Albert Camus ne décrit-il pas le sentiment général d'une société industrielle qui fonctionne parfaitement en apparence –ainsi que les rescapés de la maladie- mais qui est privée de toute âme, et qui ne sait plus vers où se diriger ?


« La peste avait supprimé les jugements de valeur. Et cela se voyait à la façon dont personne ne s'occupait plus de la qualité des vêtements ou des aliments qu'on achetait. On acceptait tout en bloc. »


La peste nous emporte dans son sillage beaucoup plus loin que prévu. Même lorsqu'elle se résorbe, elle n'empêche pas de laisser des séquelles dans les âmes qui ont connu le néant. Il s'agit ensuite de retrouver son humanité, à la manière d'Albert Camus qui se bat à chaque page pour ne pas laisser l'indifférence reprendre le dessus sur la gratuité superbe de la vie.
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Professeur de français, je n'avais pas lu La Peste (ouhhh, sortez-la !) Honteuse de cette faille, je l'ai finalement acheté et tenté de le lire il y a trois ans. Impossible, trop ennuyeux. Mais que m'arrivait-il donc ? Cet été, cela a été mon défi: "tu lis La peste jusqu'au bout où la honte s'abattra sur toi et ta descendance !" Commencé deux jours avant l'attentat de Nice, le propos de la peste s'est subitement illuminé devant mes yeux le 15 juillet: le voilà ce mal qu'on ne veut nommer parce qu'on n'en a pas le courage, parce que le nommer nous obligerait à agir ! le voilà ce mal qui en arrange bien quelques uns, dont d'autres se désintéressent parce qu'ils s'imaginent que ça ne les concernera pas, le voilà ce mal dont certains nient l'évidence ! Quel choc.
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Ce livre trônait depuis bien trop longtemps sur ma liste de livre à lire mais je retardais à chaque fois le moment de le lire. Pourquoi ? Ce n'était jamais le bon moment et je peux même dire, une fois l'avoir lu qu'il n'y a jamais de bon moment pour lire un de ces ouvrage où toute la misère humaine y est décrit dans toute sa grandeur.

Oran dans les années '40, de plus en plus de personnes meurent jour après jour mais de quoi ? Je crois qu'il est très difficile de lutter contre un fléau tant qu'on n'y a pas mis un nom dessus car on ignore contre quoi on se bat. le docteur Rieux, l'un des protagonistes de ce roman, se fera un point d'honneur à appeler les choses par leur nom. Nous font-elles moins peur alors ? Pas forcément mais on peut alors mettre toutes les chances de son côté afin de l'enrayer. le fléau qui fait rage ici se prénomme Peste. Aussi, Rieux, accompagné de ses amis de fortune, à savoir l'employé de mairie Grand, Cottard, Tarrou et le journaliste Rambert ainsi que de nombreuses autres personnes du corps médical ou volontaires vont-ils lutter de toutes leurs forces afin de vaincre la maladie. Après avoir pris des mesures radicales comme fermer les portes de la ville et empêcher tout envoi de courrier,ou du moins le réduire au strict minimum, tout comme pour les moyens de transport et l'utilisation de l'électricité, les habitants doivent apprendre à vivre en autarcie, coupés du monde. Aussi, en dépit des séparations déchirantes qui eurent lieu dans certaines familles ou entre deux amants, les habitants d'Oran vont voir naître en eux un sentiment nouveau : celui de l'entraide. C'est dans ces moments là que l'on se rend compte que les hommes sont tous égaux. Oui, tous égaux face à la mort et ils doivent donc se liguer contre une telle injustice lorsque celle-ci vient frapper les plus jeunes ou les plus faibles.

Roman que j'ai trouvé rempli d'humanisme et très émouvant. L'écriture de Camus, que je ne connaissais jusqu'alors qu'à travers des extraits, est parfois ambigüe puisque le lecteur n'arrive pas toujours à cerner les sentiments propres de l'auteur mais elle est agréable à lire et poignante de vérité !
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Ce roman publié en 1947 a rencontré un grand succès dès sa sortie.
« Rien n'est moins spectaculaire qu'un fléau et, par leur durée même, les grands malheurs sont monotones » écrit Camus. C'est donc avec un souci constant d'objectivité que l'auteur nous entraîne dans ce qu'il appelle l'ordre de la peste « d'autant plus efficace qu'il était plus médiocre. ». C'est aussi la raison pour laquelle le style reste un peu « plat » sans réelle accroche. Les répétitions ne manquent pas à l'image de l'épidémie qui revient inexorablement avec la même rigueur sinistre et la même violence acharnée.

« Tout le malheur du monde vient du fait que les hommes ne tiennent pas un langage clair et simplifié ». Nous dit Camus qui lui, utilise des mots simples dans ce roman.
Le narrateur suit le docteur Rieux, personnage central de cette histoire. Il relate les choses telles qu'il les voit « selon la justice, la hideuse et dérisoire justice ».
Oran est décrite comme une ville algérienne active mais sans attrait spécifique. Deux ou trois rats apparaissent agonisants sur le trottoir. le docteur Rieux constate impuissant qu'ils sont de plus en plus nombreux. Il comprend vite et ne baisse pas la garde .Des malades l'appellent. Les symptômes se répètent. Il tente de les soigner, en vain. Il lutte avec détermination contre la maladie, contre la souffrance mais les victimes se multiplient allant jusqu'à plus de cinq cents morts par jour. Il n'a plus d'illusions et la fatigue l'anéantit. Ses sentiments sont dit-il durcis et desséchés.
Les habitants sont mis en quarantaine. Ils sont confinés. Soit ils acceptent soit ils s'évadent. La ville est fermée. Très vite les ressources manquent .C'est la misère.

« La peste avait supprimé les jugements de valeur. On acceptait tout en bloc. »
C'est dans ce contexte déprimé, dans cette ambiance lourde que Camus illustre la solitude, l'isolement, la résignation pour certains, la violence pour d'autres. le courage ou la lâcheté s'animent au gré des portes qui se ferment, des cimetières qui s'ouvrent. C'est aussi un roman de combat, qui souligne la solidarité, la générosité, la solitude plus ou moins bien vécue, mais aussi les trafics en tous genres parce que l'homme s'adapte parfois aux opportunités qui s'offrent à lui.

Camus a été journaliste avant de devenir écrivain. Cette fresque morbide, ce champ de l'horreur je l'ai lu comme un savant reportage. Savant, parce que tout est probablement juste, tant les descriptions cliniques que les mécanismes psychologiques. le plan est soigneusement travaillé et l'ordre quasiment militaire de l'avancement du fléau s'impose sans que le lecteur n'ait besoin de chercher d'autres sources. L'homme est seul, ou en groupe selon les parties du récit.

Oran a connu la peste en 1557 et le Cimetière des pestiférés date d'ailleurs de cette période. Ce livre ne pourrait être que ce sinistre reportage d'une période de l'histoire. Albert Camus a probablement eu une autre étincelle en tête. Ce roman semble être aussi une allégorie de la guerre de 39-45.
Je viens d'évoquer un ordre quasi-militaire. Alors oui, il y a clairement dans ce récit l'évocation du nazisme, de la guerre. La peste c'est aussi la folie des hommes. le chaos, l'embrigadement. le docteur Rieux se présente avec ses soldats : Tarrou, Panneloux, Cottard. Certains sont résignés d'autres deviennent de valeureux résistants. le confinement ressemble à s'y méprendre à un enfermement. Nous retrouvons : Les fosses communes, le four crématoire, « Les combattants des grandes guerres seulement appliqués à ne pas défaillir dans leur devoir et n'espérant plus ni opération décisive ni l'armistice. » « On peut voir passer « au coeur de chaque nuit d'étranges convois de tramways sans voyageurs, brimbalant au-dessus de la mer. « « de longues queues aux quatre coins de la ville devant les boutiques d'alimentation. » un peu plus loin « Plusieurs centaines de milliers d'hommes piétinèrent encore, pendant des semaines qui n'en finissaient pas. » On parle de peloton d'exécution et pire encore « Ils sont tous dans la fureur du meurtre et ils ne peuvent faire autrement.» « La sentinelle de la peste qui illumine le four peuplait les camps d'ombre aux mains vides. ». Un vocabulaire soigneusement choisi pour sa puissance évocatrice.
La peste c'est aussi le mal. L'homme n'est plus confronté à une épidémie mais au mal par excellence. Camus saisit l'occasion de glisser un passage sur la religion, un autre sur la politique, sur la médecine. Il faut lutter nous dit-il. Lutter avec humilité et lucidité. Les grands discours sont vains. Il faut agir.

J'ai relu avec jubilation Voyage au bout de la nuit il y a très peu de temps. Si l'ambiance générale du roman met en évidence le fait que Céline ne croit pas du tout dans la bonté des hommes Camus nous dit au contraire qu "il y a dans les hommes plus de choses à admirer que de choses à mépriser. ». C'est je crois, la colonne vertébrale de toute son oeuvre même lorsqu'il évoque le pire des fléaux. Son empathie allège parfois le sujet de l'histoire qu'il raconte.

Ce roman n'est pas un moment de plaisir j'en conviens et je ne suis pas étonnée de voir qu'au fil des années qui passent les élèves peinent toujours à lire « La peste ». Mais je l'ai vécu comme un roman d'étude lucide et convaincant. Un roman ou les mots simples, directs sont souvent l'occasion de méditer sur de grands sujets, sur de grands sentiments.
Un récit sur l'amour, sur la souffrance et sur l'exil. Un livre d'action ou l'auteur nous demande d'ouvrir les yeux et de rester humain. C'est à mon avis un très grand roman qui occupera encore très longtemps une place de choix dans le classement des livres qui comptent et qu'il faut avoir lus.
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Il paraît que c'est l'un des livres les plus lus en ce moment dans le monde. Cet intérêt croissant voire inattendu est justifié puisqu'il s'agit d'une épidémie comme celle que nous vivons en ce moment.

"La peste" d'Albert Camus est présenté sous forme d'une chronique qui se veut objective et sans fard. Elle présente le cheminement logique et presque scientifique de la propagation de l'épidémie de la peste à travers la ville d'Oran. Mais ce roman est l'oeuvre d'un philosophe de la révolte et cette peste n'est qu'un prétexte pour le développement d'une pensée plus complexe. Car ce roman raconte une lutte; celle de l'homme pour la survie; celle de l'homme à la recherche de son humanité. Cette créature qui se veut Homme. Un peu plus qu'un saint! Et le chemin qui peut la mener là ; c'est la souffrance et la douleur collectives. Ce partage d'émotions semblables, cette peur et cette recherche de bonheur qui ne peut être individuelle mais collective, tout cela a pu transformer ces habitants d'Oran en être humain.

Jean-Paul Sartre avait dit dans l'un de ses ouvrages qu' « il paraît que les bananes ont meilleur goût quand on vient de les cueillir: les ouvrages de l'esprit, pareillement, doivent se consommer sur place ». Cela est juste, surtout pour les oeuvres de circonstances. Or, personnellement je ne veux pas considérer "La peste" comme telles, puisque cela nous mènera à opter pour cette lecture que même l'auteur a approuvé jadis. Celle de l'allégorie de la montée du nazisme à travers l'Europe. Pour moi, La peste est un ouvrage universel et intemporel envers lequel on serait bien injuste de l'emprisonner dans l'étiquette d'oeuvre de circonstance qui traiterait un sujet d'actualité d'alors. Cet ouvrage a su décrire la situation humanitaire de chacun de nous pendant l'épidémie du Coronavirus et les mesures prophylactiques qui sont presque les mêmes dans tous les pays du monde. La peste qui est publié dans les années 40 nous parle directement dans notre gloire et faiblesse, notre grandeur et petitesse.
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Le bacille de la peste ne meurt ni ne disparait jamais.
C'est l'écoute du "gai savoir" de Raphaël Enthoven sur France Culture qui m'a poussé à ouvrir les pages de ce livre, dont évidemment je connaissais l'existence. Mais lire Camus, en ce qui me concerne, représente toujours un sacrifice. Et "La peste" n'échappe pas à la règle. Camus, une lecture exigeante et complexe, qui demande un effort que, peut-être, je ne suis pas capable d'accomplir. J'ai aimé "la peste" mais ai-je bien saisi tout le sens du texte ?

La peste c'est une longue parabole, où la maladie représente la guerre, la tyrannie, l'idéologie destructrice. La peste c'est aussi l'histoire d'une résistance, opiniâtre, acharnée. La peste c'est aussi le repli et la peur. Mais la peste c'est aussi le révélateur, en négatif en quelque sorte, du caractère profond de l'homme avec ses grandeurs et ses bassesses, de l'humanité qui vaincra, même si "le bacille de la peste ne meurt ni ne disparaît jamais".

Camus brosse un tableau en nuances de gris (et la description d'Oran dans les premières pages donne le ton) à partir de quelques personnages qui évolueront au rythme de la propagation de la maladie. C'est long et parfois un peu répétitif, comme cette ville close, comme cette vie qui oscille entre fatalité et combat, mais la réflexion du lecteur est toujours sollicitée.

Moins abordable que "l'étranger", "la peste" est un récit froid qui véhicule mal l'émotion et qui, malgré sa concision et un style plutôt sobre, est long à lire. Un chef d'oeuvre quand à l'ingéniosité de la parabole qui n'en fait pas, à mon sens, un chef d'oeuvre de la littérature.
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A mon goût, le meilleur roman de Camus et un des meilleurs de tous les temps. Dans ce roman, chacun peut aborder l'histoire sous des angles différents et y trouver son compte.

D'abord, il y a l'histoire : faire réapparaître la peste au XXème siècle dans une ville d'Algérie, Oran, montre un choix de Camus de frapper fort avec un fléau que l'on croyait disparu ou, en tout cas, que personne n'imaginait voir atteindre le nord de l'Afrique, l'Algérie française de l'époque. Camus n'a pas lésiné sur la documentation par rapport à la maladie, symptômes, contagion, issue fatale ou guérison aléatoire. Elle plonge les personnages et les lecteurs dans une terreur inattendue pour cette époque.

Ensuite, les personnages : des statures, le docteur Rieux, le père Paneloux, Tarrou, Rambert. chacun joue un rôle majeur dans le roman. Il y a également la femme, plus discrète comme la mère du docteur Rieux. Trois personnages m'ont paru émerger: le docteur Rieux, Tarrou et le père Paneloux.

La douleur est également présente pour les victimes et leurs proches, l'agonie d'un enfant prend une dimension atroce à travers laquelle Camus porte un message, probablement celui du mal qui ne distingue pas ses victimes.

Les deux sermons du père Paneloux sont des morceaux d'anthologie, ils véhiculent aussi l'absurde de Camus tout en pouvant apporter réconfort à certains, désespoir à d'autres.

Et, surtout, c'est la richesse et la puissance des dialogues entre les personnages qui constitue l'une des forces extraordinaires de ce roman. L'analyse de l'indifférence est également très poussée, l'absurde n'est pas indifférent, les croyances non plus; le fléau divin suggéré dans l'un des sermons permet d'engager le débat : Dieu, le mal, le bien et l'homme.

Ce roman aux multiples facettes, très élaboré dans son écriture est un chef d'oeuvre de construction, de progression littéraire et psychologique à lire absolument.
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Cela avait commencé tranquillement, lors d'un printemps comme les autres. Quelques malades, quelques décès. Rien de grave, rien d'important, pas de quoi bouleverser le quotidien, pas de quoi se sentir concerné. Et puis, le nombre de malades a augmenté, s'est envolé...Finalement, il fallait peut-être s'y intéresser à cette maladie mortelle. Prises au dépourvu, les autorités ont mis du temps à prendre la mesure du problème, ont tâtonné, ont esquivé, pour enfin décréter prendre des mesures radicales :une mise en quarantaine généralisée, l'isolement des malades, l'ouverture de lieux entièrement dédiés aux nouveaux patients. Et le quotidien a bel et bien été bouleversé. Par l'isolement, la séparation d'avec des êtres chers. Par la peur d'être infecté. Par les chiffres de plus en plus hauts énoncés tous les jours. Par la possibilité que cela n'arrive pas qu'aux autres. Dans les hôpitaux surchargés, les médecins n'ont pu que constater l'absence de lits, la pénurie de matériel, le manque de médicaments, certes commandés mais qui tardent à arriver, les tentatives pour trouver un remède efficace. Et ils ont du s'habituer à l'impuissance, à la mort. Dans l'épreuve, certains se sont révélés égoïstes, centrés sur eux-mêmes, prêts à tout pour briser la quarantaine ou à tirer profit de la crise. D'autres ont remué des montagnes pour aider, soulager, se mettre à la disposition de la communauté. La maladie touchait tout le monde, les riches, les pauvres, les vieux, les jeunes. Mais bien sûr les plus pauvres, entassés dans des appartements exigus, étaient les premiers atteints. Dans les commerces, les vivres manquaient et des queues se formaient devant les vitrines de moins en moins approvisionnées. Les familles tentaient de voir leurs malades mais les hôpitaux étaient interdits au public. Les enterrements se faisaient à huis-clos, les larmes étaient solitaires. On espérait qu'avec l'été, la maladie perdrait peut-être en virulence mais cet espoir fut vain. La chaleur écrasante exacerbait les susceptibilités mais laissait le virus de marbre. Et les plages fermées ne pouvaient être une consolation pour ces confinés en mal de liberté. Les médecins qui attendaient une baisse significative des cas se retrouvèrent avec un ''plateau'', maigre résultat mais qui constituait une respiration pour ces pauvres hères confrontés quotidiennement à la mort, ne comptant plus les heures passées aux côtés de patients agonisants.
Ainsi les médecins soignaient, les bénévoles aidaient, les curés priaient, les fossoyeurs enterraient et le miracle eut lieu. La maladie se retira lentement, laissant derrière elle la peine et le deuil. On disait qu'il y aurait un avant et un après l'épidémie. Et on avait pensé à l'après, forcément. On le voyait joyeux, festif. Il fut doux-amer...

Bien sûr c'était Oran, c'étaient les années 40, c'était la peste comme métaphore du nazisme...
Mais cela pourrait être la France, l'année 2020, le coronavirus. Et c'était inquiétant, voire angoissant, de constater que l'impuissance face à une épidémie est la même, que les moyens mis en oeuvre pour la combattre sont les mêmes, que ce texte aurait pu être écrit aujourd'hui.
Lire cette oeuvre dans le contexte actuel lui apporte une lumière particulière. Il y a quelques mois encore, on aurait parlé de la guerre, du nazisme, des camps, on aurait analysé les personnalités du docteur Rieux et des divers protagonistes, on aurait peut-être évoqué une lecture laborieuse, un texte exigeant, une certaine lenteur, une absence d'intrigue. Mais menacé par un virus potentiellement mortel, confiné, privé de libertés, le lecteur de 2020 cherche (et trouve) dans La peste, les similitudes avec ce qu'il expérimente au quotidien et se trouve immergé dans un classique qui entre en résonance avec son propre vécu.une expérience dramatiquement étrange.
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Délibérément, j'ai choisi ce titre d'Albert CAMUS, pour comprendre comment à Oran dans
les années 40, on a vécu et vaincu la peste.

C'est je dois en convenir certainement ma première véritable rencontre avec cet auteur et de surcroît une lecture en version numérique….

Parce que le sujet est d'une troublante actualité, je suis rentrée dans cette histoire avec beaucoup de retenue, découvrant le talent de son auteur et m'apprivoisant si on peut dire avec les rats vecteur de la maladie.

Personnage central, le Dr Rieux reste très prudent quant à l'évocation d'une maladie qui s'accroit. La Préfecture, elle-même reste sur la réserve. La population s'interroge sur ce qui se trame, mais elle continue sa vie, en se rendant chez les amis, dans les cafés, les restaurants, les cinémas.
«à Oran, les excès du climat, l'importance des affaires qu'on y traite, l'insignifiance du décor, la rapidité du crépuscule et la qualité des plaisirs, tout demande la bonne santé ».

Les habitants finissent par courber l'échine, face aux mesures radicales : les portes de la ville fermées, la gare silencieuse, le courrier réduit. C'est l'autarcie.

Le Dr Rieux est accompagné de sa mère et de colistiers : Cottard le trafiquant, Grand employé de mairie, Tarrou le chroniqueur, Rambert le journaliste, Paneloux le prêtre. Tous sont différents et en désaccord, mais ils sont un pour vaincre la peste. Cette brigade gravite auteur du Dr Rieux.

J'ai aimé ce personnage, humble, impuissant, combattant, aidant, lucide, qui garde patience face à l'épuisement, et constate toutes ces vies affreusement perdues . «Dans le souvenir de ceux qui les ont vécues, les journées terribles de la peste n'apparaissaient pas comme de grandes flammes somptueuses et cruelles mais plutôt comme un interminable piétinement qui écrasait tout sur son passage. »

L'auteur nous plonge dans l'horreur de ce fléau, qui semble invincible. La persévérance, la pugnacité face au néant, réduit au silence ces combattants.

Chacun de ces amis, se porte volontaire pour soutenir et vaincre la maladie dans des centres d'isolements. le Dr Rieux est tous les jours à l'hôpital ou auprès des malades confinés chez eux. La vie s'organise autour de la mort qui ne capitule pas. C'est déconcertant et décourageant.

Faire face coûte beaucoup à chacun et le moral est au plus bas. « du reste le Dr Rieux, par exemple considérait que c'était cela le malheur justement, et que l'habitude du désespoir est pire que le désespoir lui-même. »

« A la vérité, tout leur devenait présent. Il faut bien le dire, la peste avait enlevé à tous le pouvoir de l'amour et même de l'amitié. Car l'amour demande un peu d'avenir, et il n'y avait plus pour nous que des instants ».

La peste nous entraine vers l'inconnu, lorsqu'elle faiblit, elle laisse des âmes meurtries, et la vie triomphe prudemment…
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