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Critique de Sando


Sando
12 septembre 2012
Attention coup de coeur !
Tout commence dans un décor somptueux, dans une ville enchanteresse qui va être le théâtre d'une tragédie humaine irrévocable… Alger la Blanche, dans les années 50, est pour Louise, tout juste âgée de 16 ans, un havre de paix dans lequel elle s'épanouit aux côtés de Paul, son neveu qu'elle aime tendrement. Malgré ses origines Pied-Noir, la jeune fille a grandi bercée par les histoires kabyles des femmes de ménage et maîtrise parfaitement la langue des indigènes. Mais la mort de Paul dans un accident en 1958 va bouleverser la vie de Louise. Sa rencontre et son mariage avec Kader, un militant algérien, vont l'aider à légitimer sa place sur cette terre qui l'a vue naître, à une époque où les français et les juifs sont contraints de fuir l'Algérie pour sauver leur vie…
C'est de ce passé à la fois enchanté et tumultueux que Louise, devenue vieille femme, témoigne avec une douleur palpable. Elle nous décrit une époque pas si éloignée de la nôtre, qu'elle a connu, qu'elle a aimé puis qu'elle a vu disparaître au profit d'un radicalisme opprimant et intransigeant. Elle nous conte la déchéance d'une ville qui n'avait rien à envier aux grandes métropoles européennes, d'une ville qui a perdu sa richesse en même temps que son multiculturalisme. Louise représente le passé révolu, tandis qu'à ses côtés, Sofiane, son protégé, est tourné vers l'avenir et vers l'Europe et ne rêve que de richesses et d'aventures. Lui aussi fait entendre sa voix et témoigne de la déchéance dans laquelle est tombée Louise, ainsi que de l'affection qu'il lui porte. Entre eux, il y a Marc, le troisième narrateur de ce roman aux multiples facettes. Il est le second neveu de Louise et se tient éloigné de l'Algérie depuis dix ans. Ce brillant réalisateur français, effrayé à l'idée de renouer avec ses racines, sera lui aussi contraint d'affronter ses démons…
« Alger sans Mozart » est un magnifique roman choral écrit à quatre mains par Canesi et Rahmani. La petite histoire n'a de cesse d'être entremêlée à la grande Histoire, dans un récit passionnant et bouleversant mené avec une extrême habileté. On voyage ainsi dans le passé et dans le présent avec la plus grande facilité, entraîné par l'énergie et la puissance que dégagent les différents narrateurs. le regard nostalgique et plein de rancoeur de Louise n'a de cesse de se heurter à celui plein d'espoir et de candeur de Sofiane. Chaque destin apporte au récit une nouvelle épaisseur qui l'enrichit et l'alimente. le lecteur ne peut qu'être captivé fasse aux différents témoignages d'une extrême justesse qui contrastent les uns avec les autres. La haine et l'admiration, l'attirance et le rejet sont autant de sentiments ambivalents qui ont construit l'Algérie indépendante et qui s'affrontent dans un récit à couper le souffle ! le personnage de Louise est réellement passionnant dans son évolution et offre une magnifique personnification d'Alger. Cette femme à l'enveloppe ruinée par des années de solitude reflète avec horreur la déperdition d'une ville étouffée par la répression. Un pur bonheur de lecture qui donnera peut-être à certains l'envie de découvrir Mozart…
Un énorme merci aux éditions Naïve et à Libfly pour ce partenariat qui m'a permis de faire cette superbe découverte!
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