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Critique de Squirelito


Il y avait au Kimbavu, dans le palais présidentiel de Dembéla, un adjudant-chef de carrière à qui la nature avait donné les moeurs les plus infâmes. Son aspect ne reflétait en rien la noirceur de son âme. Il s'appelait Marchenot, Charles Marchenot. Point d'anciens domestiques pour soupçonner d'où il venait et peut-être que jamais une demoiselle ne voulût l'épouser. Même s'il n'était pas majoritaire dans l'entreprise forestière MKK appartenant au sieur Lepelletier, Charles était tel un seigneur d'une puissance illimitée et personne ne riait à son passage, il ne faisait pas de contes, il parsemait juste ici et là des gouttes de sang et morceaux de chair pour bâtir un empire au-delà du machiavélisme avec la bénédiction, de ceux qu'on nomme à l'injuste titre, les grands de ce monde.

« Succession » est « presque une histoire autour de ces vies faites d'une suite d'atrocités inutiles » aurait clamé Voltaire même si loin de moi toute tentative de prosopopée. Et même si le Kimbavu est un pays imaginé par l'auteur, il est aisé de reconnaître certains territoires africains tombés dans la corruption de leurs dirigeants avec des ogres occidentaux.

Varennes – pas un rendez-vous – est un déserteur de l'armée française reconverti dans les combats de boxe en République Démocratique du Congo. Après un match qui n'a pas tourné en sa faveur il est miraculeusement sauvé par Marchenot, un adjudant-chef de carrière – resté donc sous-officier – qui le soigne et l'héberge dans sa somptueuse villa. Mais son geste n'est en rien philanthropique, il pense que cet être sans scrupule sera parfait pour diriger une milice et faire la loi dans les forêts du pays voisin, le Kimbavu. L'exploitation du bois y est parfaitement illégale mais grâce aux relations entretenues avec le Président – à vie – du Kimbavu et de savants procédés administratifs, l'entreprise française MKK reste un emblème industriel et la proie de tous les partenariats possibles avec le gouvernement français et ses services secrets. La France va bientôt changer de Président de la République et, comme toujours, tous les coups seront permis. Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existé serait bien évidemment fortuite.

Patrick Cargnelutti signe un thriller à couper le souffle, une pure fiction dans l'insoutenable réalité de certains pays africains où l'exploitation, le travail des enfants, l'esclavage continuent en toute impunité et où meurtres et règlements de compte sont minutieusement orchestrés par la Grande faucheuse de la finance internationale et inénarrables autocrates. Peu importe le nombre d'innocents exécutés sur la grande table des nations, la richesse des sols et sous-sols valant bien quelques sacrifices humains.

Cynique et mordant, l'auteur réussit à tout de même faire sourire parfois grâce à sa plume laissant l'encre corrosive pour faire une pause dans celle de la légèreté, mais façon puzzle !

Dans ce récit d'une noirceur absolue, le lecteur cherchera les âmes pures. Certaines apparaissent mais la tragédie de leur destin chevauchant celui des autres font qu'elles se perdent dans ce pandémonium du XXI° siècle où seuls les cerbères affamés de chair, de sang et de pièces sonnantes et trébuchantes surfent sur la loi du pouvoir à tout prix sans vergogne aucune.

Si seulement certains se contentaient de cultiver leur jardin…


Lien : https://squirelito.blogspot...
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