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Laure Hinckel (Traducteur)
EAN : 9782207260647
624 pages
Denoël (27/08/2009)
3.72/5   9 notes
Résumé :

" C'était en l'an de grâce 1989. Les hommes entendaient parler de guerres et de révoltes, mais rien ne les effrayait, car tout cela devait advenir. " Premier grand roman sur la révolution roumaine de 1989, L'Aile tatouée est une œuvre monstre, incandescente, merveilleusement servie par la richesse de la langue et la maîtrise du style de Mircea Cartarescu. Parachevant la trilogie entamée il y a quinze ans avec Orbito... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Orbitor (qui veut dire aveuglant en roumain) est une trilogie qui a été traduite en français et qui comprend, dans l'ordre : Orbitor (titre original Orbitor. Aripa Stîngă), L'Oeil en feu (titre original Orbitor. Corpul), L'Aile tatouée (titre original Orbitor. Aripa dreaptă). Une somme de plus de 1500 pages dans un style très onirique certes, mais pas que.
Pour le résumé j'appelle Mircea Cartarescu lui-même. Dans FRUMOASELE STRAINE (Les belles étrangères) à la page 199, il écrit (dans ma traduction française) : « Je sortirai une fois une édition de seulement 37 pages, réduite à l'histoire initiale, sans aucune sorte d'élucubrations, en plus richement illustrée. […] Ou, mieux encore, une édition de quelques lignes, dans laquelle on montre comment une ouvrière, Maria, met au monde des jumeaux. L'un d'entre eux, Mircea, vit à Bucarest sous le communisme, tombe sous l'emprise d'un ivrogne, Herman, qui délire de manière inintelligible de temps en temps, manque de peu d'être violé par un collègue et ensuite erre par-ci par-là jusqu'à la révolution [de 1989]. L'autre, Victor est enlevé pendant l'enfance et emmené à Amsterdam où il est élevé dans la promiscuité pour finir dans la Légion étrangère. Les deux se retrouvent à Bucarest pendant la révolution roumaine et... arrive la fin du monde. Comme dit l'autre less is more. »
Pour l'avis je partage celui d'un critique à qui Cartarescu doit beaucoup et que je traduis partiellement ici. Il s'agit de Nicolae Manolescu, Istoria critică a literaturii române (p. 1347). « Orbitor est le résultat superbe [d'un] projet paranoïaque, unique dans toute notre littérature. La construction de la trilogie est plutôt symbolique que rigoureuse. le roman est inégal et désarticulé. le troisième volume est beaucoup en dessous des deux premiers, descendant de manière vertigineuse, jusqu'à un reportage par endroit vulgaire de notre révolution de 1989. [...]

En conclusion, une oeuvre hétéroclite, mais fabuleuse dont il faut avoir lu au moins quelques pages, même au hasard.

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Un roman foisonnant, où Cartarescu devient expérimental par moments, à force de digressions, de vocabulaire vertigineux. Il s'agit de Bucarest après la révolution roumaine de 1989, au moins à la base. Après le récit s'étend tous azimuts. C'est un peu à l'image du célèbre palindrome (cf. Guy Debord), on est à la foi en terrain connu et en pleine énigme. Il s'agit alors de se laisser porter par l'aile en question. Pour moi en tout cas, ça a marché.
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Le troisième tome éblouissant d'un phénomène littéraire total.

Sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2015/06/16/note-de-lecture-laile-tatouee-orbitor-iii-mircea-cartarescu/

Lien : http://charybde2.wordpress.c..
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Mircea était venu au cénacle à reculons, amené presque de force par Hermann. Même s’il écrivait — et il avait déjà écrit des milliers de pages —, il sentait que ce n’était pas dans les poèmes ou les romans qu’il fallait chercher la vérité, que ce n’était pas la voie pour y arriver. Bien entendu, dans son adolescence, il avait lui aussi écrit de la littérature, il y avait cru, que le monde n’existe que pour permettre l’écriture d’un beau vers et il avait rêvé au roman qui remplacerait l’univers. Il avait écrit des poèmes d’amour désespérés qu’il n’adressait à personne, de fantasques allégories, il avait chanté librement la mort, les cyprès, les enfers. Mais il avait surtout rêvé des livres, des livres entiers, qui portaient son nom mais dont il ne se souvenait pas de les avoir écrits. Une nuit, il avait rêvé tout un livre de nouvelles, au sujets gracieux, inattendus, enthousiasmants, émouvants jusqu’à l’horreur sacrée, jusqu’au vertige, un livre écrit à la main, de son écriture, et qu’il avait passé sa nuit à lire, fébrilement. [...] et rien de la gloire et de la turpitude de la vie ne lui était étranger.
(p.241/243)
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L'univers vieillit, se flétrit et doit finir, mais je ne peux accepter que maman aussi, c'est injuste, c'est ridicule. Elle perçoit elle aussi cette perversité astrale, le temps dans son irréversible dilatation éloignant les hommes, noyant les photos, détruisant l'amour, la vie, la jeunesse, l'espérance et, surtout, nous séparant de nous-mêmes, l'exilant, elle, de Maria, la fille d'un cil de lumière à l'aube de ses jours, comme si nous tous, qui un jour jugerons les anges, nous vivions ici, sur terre, une tragique métamorphose à rebours : de paresseux lépidoptères naviguant sur les mers d'iridium au seuil de notre jeunesse, nous devenons chenilles, lombrics, vers aveugles, mille-pattes et scolopendres, notre peau vieillit, vaincue, porteuse de mille blessures de notre corps répugnant, suppurant d'inutiles salives.
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Les papillons, disait Hermann. Ce n’est pas l’oiseau, mais le papillon qui a été pour les Grecs et pour ceux qui les ont précédés le symbole de l’âme et de l’immortalité. Sans son image symétrique et étrange (les insectes, qui sont comme nous, faits d’ADN, de protéines et d’instinct de survie, représentent pourtant tout ce qu’il y a de plus monstrueux et de plus fascinant, car ce sont des mécanismes de chair, de nerfs, des vacuoles, des dards et des appareils buccaux fonctionnant en dehors de toute conscience), sans son image, donc, nous n’aurions jamais compris la logique de la résurrection et, c’est certain, nous aurions ignoré le fait que nous avons une âme immortelle. Le papillon a inventé l’âme humaine. Il nous a été donné comme symbole vivant et parfait de notre situation sur cette terre où coulent lait, miel, sang et urine.
(p. 231-232)
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Chaque matin, elle disparaît quelque part. Elle rentre bleuie de froid, des cernes sous les yeux. Même si elle rapporte un paquet de griffes et de cous de poulet, même si elle a réussi ce miracle-là, elle a l’air perdu et mauvais : elle nous a apporté à becqueter, qu’on s’en mette jusque-là, qu’est-ce qu’on sait, nous, de ce que ça veut dire faire la queue de cinq heures du matin à… regarde, il est presque midi ! Qu’ils aillent tous au diable, qu’est-ce qu’y veulent qu’on mange ? Ça non, ça non… regarde pour quoi j’ai attendu à me geler les os ! Et maman déballe sur la toile cirée un petit tas humide de pattes de poulet, cadavéreuses, aux griffes crispées, coupées juste sous le manchon, car le manchon part avec les cuisses, à l’exportation… Les gens se battent pour ces morceaux pleins d’écailles qui ressemblent à des reptiles. Une autre fois, elle pose sur la table un gros morceau de « jambon ». Personne ne sait de quoi c’est fait. Ça tremble comme de la gelée. On y trouve comme du chiffon. Dans la bouche, ça fond en cartilages et en quelque chose de farineux. On ne peut déterminer si l’odeur d’essence provient du camion qui l’a transporté ou s’il est composé de je ne sais quels produits artificiels. « Qu’ils aillent se faire voir ! » Maman ne se retient plus. Elle en a assez. Elle ne parvient plus à faire face. Et ce n’est pas de morfler, de se bousiller les jambes à faire la queue ni de rentrer avec des glaçons dans les sourcils, non, c’est de ne plus avoir quoi nous donner à manger alors que c’est toute sa raison d’être depuis qu’elle est en âge de comprendre. Et ça la rend folle.
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« Malheureusement, les amis, il faut regarder la réalité en face : nous sommes fatigués, malades, ruinés. Les pluies nous ont lavés, les vents nous ont léchés. Je… vous aurais bien guidés dans l’assaut final, car je ne suis plus à un Palais d’Hiver près, mais… (ici la statue se voûta et des gouttes de métal fondu lui coulèrent le long des joues) … je suis compromis, mes frères, les capitalistes m’ont totalement démonétisé… » Lénine était secoué de sanglots, appuyé contre les murs de l’université, si bien que de plus en plus de guirlandes et de mascarons de plâtre se brisaient sur son dos. Le bâtiment entier vibrait d’ailleurs dangereusement. Dans une des tours de tôle donnant sur la place, un terroriste en costume noir de tankiste et la cagoule sur la tête tressaillit dans son sommeil, serrant plus fort contre lui son pistolet automatique. C’était pas juste ! Le boulot ne devait commencer qu’à six heures du matin ! Il passa la tête par l’œil-de-bœuf et contempla d’un air las l’océan de statues. Que voulaient encore ces merdeux couverts de fientes ?
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Nicolas Cavaillès lit Mircea Cărtărescu.
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