Rose habite « une petite maison de banlieue parisienne, seule avec [ses] jumeaux » Martin et Lucas, âgés de dix ans. Un soir un ami lui présente Oleg qui, comme pour plaisanter, lui demande sa main, « comme ça, sans nous connaître, entre deux bouchées de steak tartare ». « Ce matin-là, dans ma maison de banlieue, un peu sonnée par la proposition de mariage, j'ai répondu à la question d'Oleg. Oui. J'ai dit oui. Ma vie allait changer. Je donnais un beau-père à mes fils dont je m'occupais quasiment seule depuis qu'ils avaient dix-huit mois, et m'offrais un mari d'amour. »
Oleg est beau (il ressemble à
Bernard Giraudeau), mystérieux, il possède une galerie d'art à Biarritz, il aime découvrir de nouveaux artistes, la famille vivra heureuse dans une petite maison aux volets verts, non loin de la Côte des Basques, où les jumeaux deviendront de vrais champions de surf. Mais, quand les volets sont fermés, « ma tête heurte le mur derrière le canapé du salon, j'entends le bruit sec, le choc d'un maillet contre la boule en bois d'un jeu de croquet (…) Oleg m'attrape à la gorge, animal enragé, l'étau de ses doigts se resserre, presse mon cou à me faire tousser. »
Les dix-sept chapitres du roman commencent par une phrase en épigraphe qui annonce la teneur de ce qui va suivre. Dans une table des matières, ils portent un titre qui n'apparaît pas dans le corps de l'ouvrage.
Dès la première phrase, on est glacé : « Le geste part de loin, dans la pénombre de la maison aux volets verts. C'est tout un trajet de lever la main sur l'autre et de l'abattre sur son crâne, ou sa mâchoire, son oreille, ça tombe où ça tombe. »
« Propres au littoral aquitain, les
baïnes ou « petites bassines » ressemblent à des piscines naturelles réparties le long de la plage. A marée montante et descendante, le fort courant qu'elles génèrent constitue un danger mortel pour les baigneurs. »
Comme ces nageurs imprudents qui se prélassent dans une baïne à l'eau tiède et calme, Rose est aspirée dans un siphon, avant de s'être aperçue du danger. Se débattre, c'est se noyer. Une seule possibilité : se laisser porter par le courant et, avec un peu de chance, être rejetée quelque part sur le rivage, pantelante, mais vivante.
Ce livre m'a fait penser au film « L'Emprise » basé sur l'histoire vraie d'
Alexandra Lange, battue, torturée, avilie chaque jour par un époux sympathique à première vue.
En France, une femme sur dix est victime de violences conjugales et bien plus nombreuses celles qui subissent en silence.
J'ai donc beaucoup aimé cette oeuvre pourtant terrifiante, angoissante, dure, mais tellement bien écrite que, projeté aux côtés de Rose, on vit avec elle tous les événements qu'elle traverse, on ressent ses sentiments.
Il faut du temps pour se remettre d'une telle lecture.