Citations sur Le Siècle des chimères, Tome 3 : Les Anges de Palerme (8)
De ma vie, je n'avais vu jusque-là qu'un seul ouvrage: la Bible, que le curé portait en permanence sous son coude ou, quand ses grandes mains étaient occupées, qu'il passait négligemment dans sa ceinture. Naïvement, je pensais qu'il n'existait pas d'autre livre au monde.
- Les livres sont aussi nombreux que les hommes sur terre, m'apprit Vittorio en me voyant ébahi et fasciné. Ils forment un peuple sage et fort comme nul autre, mais ce sont nos yeux à nous, les hommes, qui les font exister... Bientôt, quand tu sauras vraiment lire, ton regard les portera à son tour à la vie, et c'est un pouvoir immense que tu possèderas alors...
Il l’aimait autant qu’il la haïssait. Elle avait fait de lui ce qu’il était. Elle l’avait sauvé de la mort et rendu libre – plus libre que personne ne l’avait peut-être jamais été. Mais cette liberté avait pour prix une totale soumission à ses désirs erratiques et à ses ambitions folles...
Laüme était son opium, son éther, sa drogue bienfaisante et terrifiante à la fois.
Quittant Berlin, Dalibor avait pris le chemin du sud. Seul, sans aide – mais un homme tel que lui n’en avait pas besoin –, il s’était faufilé hors des frontières d’une Allemagne assaillie de toutes parts. Pas une route, pas un sentier alors qui ne fût défoncé par les chenilles des blindés ; pas un horizon qui fût dégagé de lueurs d’incendie ou de panaches de fumée ; pas un carrefour, pas un chemin qui ne fût encombré de réfugiés ou de soldats aux traits hâves, au visage décomposé par la peur et l’épuisement... Aurait-il été invisible cependant qu’il n’aurait pas eu plus de facilité à se frayer une voie hors de ce chaos. Nulle part on ne le remarqua. Nulle part on ne l’arrêta. Les Allemands en déroute pas plus que les Soviétiques victorieux ne l’inquiétèrent. Silhouette opaque dans un monde qui s’était couvert de ténèbres, il atteignit en quelques jours les Portes de Fer du Danube, suivit le fleuve jusqu’à Varna et gagna l’autre rive de l’Euxin sans qu’on lui adressât une seule fois la parole...
À nouveau ils s’étaient séparés. S’il avait choisi de quitter l’Europe, elle, bien sûr, avait préféré rester. Ce n’était pas la première fois. Leur couple était depuis longtemps rompu à de tels déchirements. Leurs adieux s’étaient déroulés comme toujours, sans cris, sans paroles même. Cela n’avait été qu’une ombre rapide passant sur leurs pupilles. Rien d’autre. Un signe perceptible d’eux seuls pour exprimer une lassitude, un désespoir au-delà des mots.
De ma vie, je n'avais vu jusque-là qu'un seul ouvrage: la Bible, que le curé portait en permanence sous son coude ou, quand ses grandes mains étaient occupées, qu'il passait négligemment dans sa ceinture. Naïvement, je pensais qu'il n'existait pas d'autre livre au monde.
- Les livres sont aussi nombreux que les hommes sur terre, m'apprit Vittorio en me voyant ébahi et fasciné. Ils forment un peuple sage et fort comme nul autre, mais ce sont nos yeux à nous, les hommes, qui les font exister... Bientôt, quand tu sauras vraiment lire, ton regard les portera à son tour à la vie, et c'est un pouvoir immense que tu possèderas alors...
En prison, nulle part où se cacher. En prison, nulle part où où fuir. Dans la cour des condamnés à mort encore moins qu'ailleurs.
Mon âme, oui… Mais les religions mentent, les hommes n’ont pas d’âme… Cela, je le savais depuis longtemps.