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EAN : 9782917817278
96 pages
Editions La Contre Allée (28/08/2014)
3.87/5   85 notes
Résumé :
Tiré d'un poème de l'auteure, ce titre souligne à la fois la charge érotique du texte et la rebellion extraordinaire d'une femme face à l'ambiance étouffante qui règne en Tchécoslovaquie d'après-guerre. Probablement écrite en 1962, cette lettre est un véritable manifeste pour la liberté individuelle. Dans les années qui précèdent le Printemps de Prague, Jana Černá livrait dans cette lettre à Egon Bondy sa volonté de révolutionner les codes de conduite, de reche... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (21) Voir plus Ajouter une critique
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“Je t'écris des mots purs, j'ai gommé les ratures, je ne suis pas vraiment sure qu'aucune éclaboussure, de tes yeux jaillira… de tes mains tu va me décolleter” chantait Liane Foly sur un air de jazz pianoté par André Manoukian. Chaste rengaine comparé à l'explosive missive érotique que l'on s'apprête à décacheter ici.

L'écrivaine et poétesse tchèque est la fille de la femme de lettre Milena Jesenská, un temps amante de Kafka, déportée et décédée dans les camps nazis. Peu de textes nous sont parvenus traduits, et par les mystères de la postérité, son ouvrage le plus célèbre en français est une lettre de 1962, qui n'était sans doute pas destinée à publication posthume, que Jana Černá adresse à son amant, le philosophe Egon Bondy.

Černá, Bondy ou encore Bohumil Hrabal, font partie de “l'underground” artistique de la Tchécoslovaquie communiste des années soixante, publiant leurs textes en samizdat clandestins.

“Le vrai charlatanisme, ce sont ces écoles à produire des philosophes diplômés, ceux qui ont obtenu leur brevet de pensée philosophique – quelle ignoble et effroyable absurdité que de tester quelqu'un sur la connaissance de x manuels et de lui octroyer le titre de philosophe”.

L'écrivaine commence par des considérations sur l'écriture, qu'elle soit philosophique ou poétique. Černá donne fièrement, avec humour et provocation, sa conception de la pensée à son philosophe d'amant. Est-elle en train de rabrouer la philosophie, sa rivale dans le coeur d'Egon ou alors sommes-nous les fugaces témoins d'une émulation permanente entre les amants, dont les conversations philosophiques et littéraires devaient être foisonnantes dans un contexte affamé de renverser la table et de faire du neuf : “la poésie laborieuse, c'est une suante niaiserie destinée aux manuels de classe, propre à exciter les institutrices standardisées dont elle sert à adoucir la destinée, par ailleurs plutôt amère.”

De ces considérations, la poète tchèque en vient à vanter leur relation, à la fois la transparence, mais aussi l'indulgence, et la fusion des corps et des esprits ce qui préfigure la césure érotique à venir, qui pour l'auteure n'en est pas une : “Il est vraiment difficile de faire la part entre l'excitation due à ton corps que je connais si intimement, et celle qui vient de n'importe laquelle de nos discussions.”

“J'estime qu'un désir aussi fort que le mien aujourd'hui ne se contente pas d'attendre sa satisfaction, mais la revendique à cor et à cri.” Puis, quelques pages plus tard, d'une façon assez impromptue, la lettre s'enflamme, le fantasme prend le relai, l'émettrice veut que son courrier brûle entre les cuisses du destinataire. Elle veut faire son effet, et par l'énumération des pratiques, rituels et fantasmes jetés frénétiquement sur le papier elle veut, tout comme lors des préliminaires philosophiques stimuler son amant : “Je regarderais par moments ton visage et par moments en coulisse ton sexe, en sachant que l'un et l'autre réagiront visiblement à la lecture de cette dissertation.” le sexe et l'intellect fonctionnent pour l'écrivaine comme un miroir renversé, l'un amène à l'autre, et il fait peu de doute que les deux amants soient ce qu'on pourrait dire “sapiosexuels” : “je veux passer des heures à bavasser pour pouvoir coucher avec toi et je veux baiser avec toi pour parvenir à ces heures de discussion.”

“Pour la première fois de ma vie j'ai une liaison amoureuse ingénue.” Son style direct, l'emploi de mots très crus, l'enchainement virevoltant et explosif d'images pornographiques (qu'on aurait utilement pu demander à la peintre tchèque Toyen, dont les dessins érotico-comiques sont fascinants, d'illustrer!) mais encore son recul permanent sur ce qu'elle est en train d'écrire et son humour, en font une correspondance tout à fait singulière, nous enjoignant à peut-être dire ce qu'habituellement on n'ose pas exposer si clairement car après tout “perfection ne peut être vertueuse”.

“Je n'ai pas appris à considérer l'excitation comme quelque chose qu'il faille supprimer dans le renoncement.”

Rappelons encore une fois que ce courrier obscène, à ma connaissance, n'était pas destinée à publication. Černá, dont la poésie semble également d'inspiration érotique, ayant bien conscience que la parution d'un texte de la sorte était impossible en raison notamment de ceux qu'elle qualifie de “censeurs de moeurs”.

Pas dans le cul aujourd'hui j'ai mal
Et puis j'aimerais d'abord discuter un peu avec toi
car j'ai de l'estime pour ton intellect
On peut supposer que ce soit suffisant pour baiser en direction de la stratosphère”

Décédée dans un accident de voiture, mariée cinq fois, et de plus en plus ésotérique, Egon Bondy dira de la poétesse pragoise qu'elle a été “ce que l'homme peut atteindre de plus grand.” Et Černá de conclure sa babillarde par un conseil : “Fais-toi donc vite du bien en t'accordant une bonne branlette si tu ne l'as pas encore fait”, conseil que, malgré une panne (…d'inspiration bien sûr) je n'ose reprendre à mon compte pour vous le prodiguer en guise de conclusion ici, vous imaginez bien…

Sur ces prolégomènes, bonne Saint-Valentin !

Qu'en pensez-vous ?
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Pas dans le cul aujourd'hui
j'ai mal
et puis j'aimerais d‘abord discuter un peu avec toi
car j'ai de l'estime pour ton intellect.

Ainsi commence ma lecture, par les vers de ce poème qui s'introduisent pernicieusement dans mon esprit. Dès les premières lignes, je suis accroché, l'instinct bestial que je ressens et pressens que cette lecture fera date, comme une rencontre entre la philosophie et mon sexe.

Une longue lettre de Jana Cerna à son homme, qui bouscule mon intimité, car elle sait me parler « philosophie » avec son parfum d'amour, de chatte et de foutre. Les mots sont crus, bandant même, mais quel plaisir incommensurable, j'ai eu à lire cette lettre. Sans aucune poussière de voyeurisme, les phrases s'échappent de la feuille de papier au doux grammage des éditions La Contre Allée et se transforment en images sensuelles dans ma tête. Je fais le vide, respire, débouche une bouteille. Bruit du jeu du bouchon et du tire-bouchon, je me sers un verre. Continuer la lecture, prendre ce plaisir, une main tenant le verre, l'autre main…

Philosopher avec un verre à la main, ou ma langue sur ta chatte, c'est plutôt mon truc, effectivement. Peut-être même est-ce comme cela que la philosophie doit être conçue. La dépoussiérer, la rendre moins austère. Pas sûr que j'y comprenne mieux, mais sûr que j'y serai plus attentif. Sûr que j'y trouverai plus de plaisir. La vie sous un autre jour, la philosophie de la chatte.

Une lettre sur l'absence.
Une lettre sur le désir.
Une lettre sur « lâche-toi ! ».
Une lettre sur la liberté.
Une lettre sensuelle, érotique, pornographique. Je la relirai à l'occasion. La magie opérera de nouveau. Parce que la lettre va bien au-delà des mots. Elle affirme le droit à la femme, le droit à la passion, le droit à la vie tout simplement en toute liberté au-delà des impressions et des préjugés.

Sacredieu, le bonheur n'est pas dans le pré mais dans les rues de Prague. Il s'affiche ostensiblement dans la crudité de ces mots, une manière en soi d'effacer un peu la distance qui sépare ces deux amants. Comme l'exutoire d'une passion débordante en attendant des jours où ces deux–là se retrouveront.

Pas dans le cul aujourd'hui ?
Lien : http://memoiresdebison.blogs..
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Ne vous fiez pas à la poésie du titre. Il ne s'agit ni des mémoires de Brigitte Lahaie ni de l'énième opus de Christine Angot. Je ne me serais jamais intéressée à cette missive en forme de missile si ma libraire préférée ne l'avait pas recommandé, si l'auteure n'était pas une figure emblématique de l'underground pragois d'après-guerre, fille de Milena à qui Kafka destina sa correspondance.
Jana Černà se languit de son amant, Egon Bondy. Elle lui adresse cette lettre, témoignage d'une passion ignifuge, d'un amour inconditionnel dont la violence est d'autant plus forte que la liberté est en jeu. Liberté de penser et d'aimer. Car voyez-vous, en ces temps de guerre froide, une sexualité assumée est une arme (contre)-révolutionnaire.
La lettre commence par des considérations méthodologiques, une invitation à la légèreté. Jana somme son amant de se laisser aller, de chercher son inspiration dans les bars, dans ses bras, plutôt que d'aller traîner dans les bibliothèques.
Et puis, page 58, tout s'accélère, des phrases d'un érotisme torride s'enchaînent. La crudité des mots porte, outre le cri du coeur et du corps, la révolte de cette figure féministe, opposée à la complicité du stalinisme et du patriarcat, à la séparation de l'intellect et de la sexualité. C'est d'une beauté rare et nue. Quand le désir s'exprime avec une telle force, il détruit tout sur son passage, la morale et la politique. Les digues rompent.
Il faudrait que les ados à la libido naissante lisent ces quelques pages. Leur pouvoir suggestif est infiniment plus grand que les sites où ils consomment leur prêt-à-bander.
Une lettre qui restera dans les annales – évidemment.
Bilan : 🌹🌹
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« Pas dans le cul aujourd'hui » … Mais que peut bien contenir un livre au titre si provocateur ?
C'est évidemment la première question que l'on se pose… Et la réponse est : une lettre d'amour enflammée, passionnée, sans retenue, et d'une totale sincérité !

Libre, libertaire, indomptable, insoumise, exaltée et follement amoureuse, voilà à mon sens quelques qualificatifs qui conviennent pour définir le caractère de Jana Černá, qui est l'auteure de cette lettre tout à fait singulière, qu'elle adresse à son amant Egon Bondy en 1962.

Mais pour bien saisir tout l'intérêt de cette lettre très étonnante par sa fougue et sa vitalité, il me paraît indispensable de bien cerner ce qui a façonné les personnalités de celle qui a émis cette lettre, de celui qui l'a reçue et de connaître le contexte historique, social et politique de l'époque.

Alors qui est-elle au juste, Jana Černá ? C'est la fille de Milena Jesenská, qui est mondialement connue pour avoir correspondu avec Franz Kafka, grande journaliste, grande figure de l'antinazisme dans la Tchécoslovaquie de l'entre-deux-guerres, résistante, qui a fini sa vie à Ravensbrück en 1944. Milena Jesenská était rebelle, anticonformiste.
Elle avait soif de justice.

Cet esprit rebelle, cette vigueur, Jana Černá l'a certainement hérité de sa mère !
Elle va partager étroitement l'existence de sa mère jusqu'à son arrestation par la Gestapo en 1939, alors qu'elle n'a que 11 ans. Mère et fille sont alors unies par une grande complicité, Milena Jesenská, confiant à sa fille la tâche de distribuer clandestinement la presse antifasciste dans Prague occupée. Plus tard, la vie d'adulte de Jana Černá sera empreinte d'un anticonformisme souvent provocateur, d'un mépris pour le rôle subalterne de la femme, d'un sens aigu de la débrouille, d'un culte de l'indépendance et d'une passion pour les idées et les arts.

Jana était quelqu'un d'exceptionnel qui a eu une vie incroyable : elle a fait plein de petits métiers différents et a eu plusieurs enfants qui lui ont été enlevés parce qu'elle ne pouvait s'en occuper.
Mais elle ne sort pas de nulle part, étant donné son milieu familial où plusieurs cultures se mêlaient
- tchèque, allemande et juive, et le fait que ses parents qui étaient engagés sur le front culturel et politique, recevaient chez eux toute l'avant-garde tchèque.

De fait, l'esprit de Jana va s'aiguiser à ces contacts, et elle va participer à un mouvement underground qui n'est pas sans analogie avec la Beat Generation américaine.
L'underground pragois connaît sa période la plus prolifique durant les années de terreur stalinienne. Cet underground rejette les sociétés hyperpolitisées, avec leur fanatisme et leur chasse aux sorcières, et revendique un espace indépendant de la politique dédié à l'art et à la vie privée et s'adonne à l'expérimentation.
On est dans les années sombres d'après-guerre, des années de terreur au cours desquelles la société semble anéantie, incapable de penser, de créer, mais voilà qu'une femme, à Prague, Jana Černá, écrit non seulement sur le sexe et le désir féminin, mais au-delà de l'écriture, met en pratique ses idées non conformistes. C'est dans le cercle d'intellectuels dissidents dont elle fait partie, qu'elle va rencontrer Egon Bondy, le destinataire de sa lettre, auquel elle va vouer un amour total.

Cette lettre qu'elle lui adresse est très personnelle et intime. C'est une lettre sublime, qu'on peut dire porno-philosophico-érotico-amoureuse ! Jana est une âme sauvage. Tout chez elle informe tout, et tout chez Egon Bondy est source de plaisirs, dans un va et vient permanent entre l'intellect et le corps. « Pas dans le cul aujourd'hui », c'est l'amour moins le pouvoir, c'est le sexe à foison, le désir exalté et crié pour chaque partie du corps de l'autre, c'est un terrain de jeu et d'expérimentation infini, des discussions philosophiques à bâtons rompus qui se terminent sur l'oreiller, c'est polisson, généreux, capricieux, et ce n'est vraiment pas raisonnable… (voir ma citation pour le caractère irraisonnable de Jana).

Par sa lettre, tel un cri, Jana Černá exprime la nécessité de briser les carcans sociaux de tous bords, pour laisser à l'amour et à la création artistique et intellectuelle la possibilité d'être et de s'épanouir, c'est-à-dire de revendiquer leur profonde singularité.
Pour elle, l'amour est exclusivement libre, ou il n'est pas, point barre !

Cette lettre est une énergique invitation à lier poésie et philosophie, vie et littérature, sexe et art. Elle révèle une puissante défense de la liberté de l'individu face au stalinisme, et témoigne de l'extraordinaire réaction d'une intellectuelle libertaire face à la situation politique de l'époque.
C'est un texte écrit dans un langage extrêmement cru, pendant plusieurs pages, mais qui n'est pas vulgaire du tout, car il est question de sensualité et de sentiments exprimés de façon sincère.
C'est un écrit intime pour quelqu'un qu'elle connaît parfaitement. Dès lors, cette sensualité-là passe sans problème.
Jana ne fait pas de provocation facile, elle dit les choses comme elle les pense, tout simplement.

Quant à Egon Bondy (alias Zbyněk Fišer), lui est considéré comme une figure emblématique de l'underground musical, littéraire et politique tchécoslovaque à partir des années 50. Il a été influencé par Dada et le surréalisme. Presque toute sa vie, il a vécu en marge de la société et son existence a parfois ressemblé à celle d'un clochard, alors qu'il était à l'origine ce qu'on appelle un « fils de famille », ayant passé son enfance à Prague dans une famille aisée. Mais cette enfance heureuse a été interrompue par la 2e guerre mondiale. Il perd sa mère et son éducation change beaucoup, car son père cherche à lui imposer une discipline plus rigoureuse, presque militaire. C'est probablement là qu'il faut chercher les racines d'une certaine résistance contre l'autorité et de son anticonformisme, plus tard à l'âge adulte. En 1947, il avait adhéré au parti communiste et espérait que la révolution changerait le monde. La même année, il quitte le lycée et adopte un pseudonyme juif, Bondy, pour protester contre l'antisémitisme. Dès l'année 1948, après l'avènement du régime communiste en Tchécoslovaquie, il quitte le parti. Il doit se rendre à l'évidence, la liberté n'est pas venue et un régime rigoureux a été remplacé par un autre régime plus dur encore !
Il renonce à la vie dans ce qu'on appelle la bonne société, cherche l'inspiration et le refuge dans la bière, et pendant un certain temps, il mendie même pour subsister.
En 1957, la vie d'Egon prend un tournant inattendu. Il passe son bac et va étudier la philo et la psychologie. Il devient Docteur en philosophie et s'impose comme un des penseurs tchèques remarquables. Sa poésie et sa prose expriment entre autres son écoeurement de la vie sous le
« socialisme réel » de la période de la "normalisation", mais il jette un regard corrosif sur la civilisation humaine dans son ensemble.

Je trouve qu'il n'est pas étonnant que Jana Černá et Egon Bondy soient tombés follement amoureux l'un de l'autre, car il y a beaucoup de choses qui les rapprochent, beaucoup de similitudes, que ce soit au niveau de leurs parcours de vie, de leurs enfances, de leurs éducations, de leurs souffrances, de leurs caractères, et de leurs intérêts pour la culture.
Bien sûr, leur liaison tellement passionnée a été parfois orageuse et destructrice, mais elle a fait l'objet de moments exquis qui l'ont fait renaître de ses cendres ! Un magnétisme les a reliés !

Par son mode de vie puis son oeuvre, Jana Černá a incarné aux yeux des nouvelles générations une forme d'érotisme proto-féministe. On pourrait affirmer en grossissant le trait, que ce premier vers d'un de ses poèmes, « Pas dans le cul aujourd'hui », est une métaphore du féminisme.
Aujourd'hui, le féminisme connaît sous diverses formes un véritable regain. le texte de cette lettre est aussi en résonnance avec des affirmations féministes actuelles… Les choses évoluent, mais il y a aussi des retours en arrière par rapport au désir féminin, au consentement, à toutes ces questions.

Je pense que ça fait du bien aux hommes de lire un texte comme celui-ci.
Il ne faut pas oublier que ce texte a été écrit en 1962, et je trouve qu'il n'a pas pris une ride, que ce soit au niveau du vocabulaire ou des thématiques.
Cela reste encore apparemment dérangeant de dire des choses comme celles-ci avec cette absolue liberté de ton !

Jana Černá « était un cygne blanc avec une aile blessée, mais avec des yeux splendides, grands, tristes et le coeur d'une poétesse maudite », dira d'elle un de ses amis, Bohumil Hrabal.
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Le titre a très sérieusement de quoi surprendre et pourtant il annonce le programme de l'ouvrage dès le début. Tiré d'un poème même de l'auteure que je redonne juste ensuite, "Pas dans le cul aujourd'hui" n'est pas un roman mais une immense lettre d'amour qui se lit et doit se lire d'une traite, comme pris dans le tourbillon convulsif des sentiments.

"Pas dans le cul aujourd'hui, j'ai mal,
Et puis j'aimerais d'abord discuter un peu avec toi
car j'ai de l'estime pour ton intellect
On peut supposer que ce soit suffisant
pour baiser en direction de la stratosphère"

C'est donc une discussion ouverte de Jana Cerny envers son amant, Egon Bondy, clamant son amour, sa frustration amoureuse, l'admiration qu'elle a pour cet homme mais aussi sa jalousie (elle sait qu'il va en voir une autre), sa colère, son mysticisme tout comme sa bonté, sa chaleur, ses coups de gueule non feints, sa générosité.

Cela file donc très vite, pas de chapitrage, tout se suit, l'auteure a à peine le temps de se relire pour émettre une courte critique sur ce qu'elle a écrit (avec toutefois beaucoup de lucidité) avant que tout reparte de plus belle, pris dans une analyse du sentiment amoureux dans ce qu'il peut avoir de plus cru et trivial saupoudré de considérations sur la société de l'époque et le milieu où Egon et elle évoluaient. Donc du cul, bien sûr et d'une force à ne pas laisser aux enfants mais pas que. Au delà, la dimension amoureuse est restituée dans une sphère humaine et mystique qui par moment confine à la même beauté crade mais incroyable que chez Bukowski. Assurément à lire même si ça ne plaira pas forcément à tous-toutes.
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Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
S’il te plait, c’est quoi, cette bêtise, pourquoi n’es-tu pas là ? Qu’est-ce que c’est cette connerie ? Que je ne puisse pas t’embrasser, que je ne puisse pas m’étendre près de toi, te caresser, t’exciter et m’exciter par toi, que je ne puisse pas te sucer jusqu’à l’orgasme et te sentir entre mes jambes et rire ensuite avec toi parce que ta barbe empeste au point de donner une érection au contrôleur du tram qui poinçonnera ton billet ? Que je ne puisse pas livrer tout mon corps à ta dévastation à commencer par mes nichons et ma chatte et jusqu’à mon cul, pour que tu les baises et rebaises, et puis te forcer, de ma langue artistement plongée dans ton cul, à balancer ta sauce, le visage tordue par le spasme ? Pourquoi est-ce que je ne peux pas te sentir en moi, presque immobile dans une tendresse poignante, érotique au point d’être sentimentale, que je ne peux pas coincer ta queue entre mes nichons et les essuyer ensuite toute fière, pleins de sperme visqueux ? Pourquoi sacredieu n’ai-je pas ta langue dans ma chatte alors que c’est mon plus ardent désir…
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Tout ce que j'ai fait dans ma vie et dont j'ai eu honte, je l'ai fait parce que c'était raisonnable. Non merci, sans façon, gardez-moi de la peste, du typhus et de l'esprit raisonnable. Le raisonnable, ce sont les affiches anti-alcooliques, la gestion d’État, les préservatifs et la télévision, c'est la poésie stérile qui sert la bonne cause ; pour l'amour du ciel, épargnez-moi le raisonnable, j'ai assez de vitalité pour en supporter plus que n'importe qui d'autre, mais le raisonnable me ferait mourir en moins d'une semaine de la mort la plus triste qui soit, le raisonnable détruit en moi tout ce qui fait sens, il m'ôte toutes mes forces, qu'elles soient érotiques, intellectuelles ou autres.
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Pourquoi est-ce que je ne peux pas te pomper et faire passer ton sperme de ma bouche jusqu’à la tienne, pour te faire avaler et que tu t’engoues de son goût pénétrant qui me reste toujours sur la langue longtemps après, si bien que toutes les bouffes ont la saveur de ta queue et quand je mange une tartine de pain, ça a le goût du foutre ?
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« Je n’ai jamais été portée à me comporter de manière raisonnable, sans doute simplement parce que je ne suis pas du tout raisonnable ou parce que tout ce qui est sain et raisonnable me répugne de manière presque physique.(…) J’ai assez de vitalité pour supporter plus que n’importe qui d’autre, mais le raisonnable me ferait mourir en moins d’une semaine de la mort la plus triste qui soit, le raisonnable détruit en moi tout ce qui fait sens, il m’ôte toutes mes forces, qu’elles soient érotiques, intellectuelles ou autres. »
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Je ne sais pas m'imposer de limites, ou plus exactement je refuse de m'en imposer.
Elles ne sont pas de mon monde. Si je sens ton baiser, je veux un autre baiser et je me dis qu'il doit en être ainsi.
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