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EAN : 9782020486248
160 pages
Seuil (03/02/2001)
3.75/5   67 notes
Résumé :

L'Afrique au temps du vertige des indépendances reconquises. De temps en temps, une grande et haute figure. Au Congo, celle de Patrice Lumumba. Homme politique. Sans doute le seul du Congo, et le plus grand de l'Afrique. C'est qu'il y a en lui du voyant et du poète. A travers cet homme que sa stature même semble désigner pour le mythe, toute l'histoire d'un continent et d'une humanité se joue de manière exemplaire et symboliq... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Aimé Césaire est une fine plume et possède une envergure de vue, de conviction et de culture rare. Il a donc beaucoup de choses à nous dire et — assertion toute personnelle — peut-être a-t-il voulu trop nous en dire dans Une Saison Au Congo.

C'est une pièce éminemment politique qui évoque le passage troublé de la colonisation belge à l'indépendance du Congo (plus tard nommé Zaïre puis de nos jours République Démocratique du Congo). Il se focalise sur un personnage-clé : Patrice Lumumba, figure mythique de l'indépendance, manière de Gandhi ou de Nelson Mandela congolais.

Il faut saluer la performance d'Aimé Césaire d'arriver, aussi peu d'années après les faits et avec la difficulté d'obtenir des informations fiables à l'époque, à nous dresser un tableau très réaliste de l'assassinat du leader indépendantiste Lumumba.

Cette pièce m'a donné grandement envie de me documenter sur cette période et cette région que je connais fort peu. Beaucoup de faits sont réels, beaucoup de noms également. Certains sont légèrement modifiés car à l'époque de l'écriture de la pièce, ces personnes réelles étaient encore en place, notamment l'adorable Mobutu, baptisé Mokutu dans la pièce, tyran et assassin notoire qui mit en place une bonne vieille dictature des familles, du début des années 1960 à sa mort en 1997 et saigna son pays autant qu'il le put.

Le propos de la pièce est réellement captivant pour qui s'intéresse aux questions politiques, aux prises de pouvoir, à l'indépendance africaine voire même, à la bonne compréhension de la mondialisation que nous vivons. le rôle sourd et pourtant déterminant de l'ancienne tutelle coloniale et des banquiers internationaux n'est pas omis.

Cependant, j'ai ressenti de la gène à la lecture car quelque chose me dérangeait. Certes Aimé Césaire se réapproprie la vieille tradition du théâtre engagé et je ne peux que l'en féliciter. Par contre, le théâtre a tout de même ses règles internes qui ne correspondent pas forcément au projet littéraire que s'est fixé l'auteur.

Un partage en trois actes très artificiel, pas d'unité de temps, ni de lieu, ni de ton, ni de mode narratif. Du coup, c'est assez confus, brouillon, une suite de tableaux pas très bien reliés entre eux, des scènes extraordinairement peu scéniques avec des personnages qui nous parlent des actions au lieu que nous les vivions et que nous les voyions jouer, des passages de la prose au chant ou aux dialogues en vers que je trouve assez mal maîtrisés, des échanges entre des personnages réels et des allégories dont la encore je questionne la pertinence.

En somme, à vouloir trop en mettre dans cette soupe, peut-être perd-on le goût des ingrédients de base qui étaient pourtant, pris indépendamment, de grande qualité. C'est le principal défaut que je trouve à cette pièce et d'où mon ultime question : le théâtre était-il la forme adéquate à donner à ce propos ? de mon point de vue non ; soit il aurait été préférable de basculer carrément vers l'essai politique, soit, si l'on souhaitait à tout prix conserver la forme dramatique, revenir à une forme plus simplifiée, plus allégorique et se détacher plus nettement de la réalité factuelle pour ne conserver que l'essence du propos.

Mais il me semble que je me permets beaucoup de bémols, du haut de mon insignifiance, alors lisez, dévorez Une Saison Au Congo et faites-vous en votre propre opinion, au besoin pour la contredire, car celle-ci n'est qu'une minuscule feuille tombée sur le géant fleuve Congo, autant dire, pas grand-chose.
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Quelle foule dans cette pièce de théatre! Ca fourmille comme sur une place de marché africaine, bariolée,bruyante,odorante,poussiéreuse.
Aimé Césaire, né en 1913 en Martinique,poète,dramaturge et homme politique qui a fondé avec Léopold Sédar Senghor la notion de négritude présente ici une pièce qui se déroule au temps de l'Indépendance du Congo.
Elisabethville.
Le bonimenteur harangue la foule, et c'est la voix d'Aimé Césaire, l'anticolonialiste qui s'élève:"pour le bon, il y a la bière !Buvez ! Buvez donc ! D'ailleurs n'est ce pas la seule liberté qu'ils nous laissent? On ne peut se réunir sans que ça se termine en prison".
Quelle bière? La bière Polar, celle de la liberté congolaise.Tac au tac.Provocation pour provocation!
On applaudit au bagout!
Il y a là Patrice Lumumba, l'homme politique visionaire qui veut rendre à son peuple la liberté perdue.
Le joueur de sanza fiché de la police chante que le Congo bouge.
Le "buffle", gouvernement des Belges et des flamands qui les menace.
Les femmes se joignent au bonimenteur car elles en ont assez de cette vie.
Mokutu, lui,invite à la révolution."Le Congo est un grand bordel".
Le premier policier affirme que le blanc violente, ennivre les guerriers, mais les belges leur ont appris à lire. Coups de matraque.
Les banquiers parlent en vers.L'indépendance ruine les finances.Mais vive l'uranium libre,le diamant,le cuivre,le cobalt.
La revendication prone:"fermez les oreilles au bourrage de crane"
Les soldats crient "A mort Lumumba!"
puis "Vive Lumumba"
Et là Mokutu criera "feu!"
C'est tout un pan d'histoire qui nous est donné à voir, l'Indépendance avec ses espoirs,ses angoisses et ses interrogations!
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Dans cette pièce de théâtre, Aimé Césaire nous entraîne au Congo dans les années 60. Les Belges qui ont régné en maître sur le pays pendant des années, pillant les richesses et assujetissant les populations, vont partir. Ils ont perdu la partie et malgré quelques soubresauts ils doivent laisser le pouvoir au congolais.
Plusieurs personnages vont alors se retrouver sur le devant de la scène, au premier rang desquels Patrice Lumumba, opposant de longue date, fraîchement libéré des geôles de l'occupant.
Aimé Césaire met en scène, essentiellement, le temps où Lumumba est au pouvoir et sa chute, trahi par ses proches et finalement assassiné.

Le texte est beau, prenant, mais il m'a manqué un petit quelque chose, la scène. Car oui c'est une pièce de théâtre et quoi de mieux pour une pièce que d'être jouée, surtout celle-ci dont on ressent toute l'énergie à la lecture.

Aimé Césaire fait revivre ici un grand homme politique noir africain, un homme qui lutta contre le colonialisme, les discriminations et tout ce que cela entraîne (corruption, exploitation...).

J'ai aimé le style, l'énergie du texte, la révolte qu'il contient et le personnage de Lumumba surtout que j'ai eu envie de connaître mieux.

C'est un très beau texte acheté aux château des ducs de Bretagne à Nantes.
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Traîtrise, perfidie, coup-bas, mensonge, hypocrisie, tous les ingrédients de la tragédie sont au menu de cette Saison au Congo. Une sorte de pièce shakespearienne au temps des indépendances. Patrice Lumumba, l'homme qui porte les espoirs de tout un peuple, est confronté aux résistances des cupidités intérieures et extérieures. Son intégrité ne tient pas face à la voracité des hommes. Toutes les désillusions des indépendances africaines s'expriment ici dans une langue toujours aussi virulente et torrentielle.
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C'est la première oeuvre du grand poète Aimé Césaire que je découvre, et mon avis est un peu mitigé. J'ai eu l'impression à la lecture que le fond l'avait emporté sur la forme, ou, pour dire autrement, que l'écriture théâtrale importe moins que le message politique sur l'indépendance, l'autodétermination, la corruption des politiques et la violence de l'armée. Je ne sais pas comment cette pièce fonctionne sur scène, une fois montée, mais à la lecture, j'ai ressenti une certaine confusion, entre les différentes scènes qui s'enchaînent sans véritable logique. On passe de l'ONU à New York à un bar de rue, d'un avion à un bureau présidentiel... Les personnages eux-mêmes, à part Lumumba, sont donc assez peu caractérisés, des figures effacées qui se succèdent - sa femme n'a que quelque répliques par exemples. J'ai néanmoins apprécié le musicien qui passe commenter chaque scène tel un troubadour. Lumumba, lui, est aussi un personnage très intéressant, un poète idéaliste confronté à la dureté du monde.
Finalement, c'est peut-être d'avoir voulu écrire une pièce sur des événements réels de la décolonisation qui empêche de généraliser et d'atteindre l'universel sur la conquête du pouvoir et sa conservation.
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Citations et extraits (35) Voir plus Ajouter une citation
PREMIER BANQUIER : C'est foutu. Un gouvernement de traîtres nous brade notre Empire.
DEUXIÈME BANQUIER : Ainsi, de l'Indépendance ils ont fixé la date !
TROISIÈME BANQUIER : Hélas ! ils ont de ce macaque, accepté le diktat !
QUATRIÈME BANQUIER : Du cran, messieurs, du cran, toujours du cran que diable !
Il faut épouser son temps ! Je ne dis pas l'aimer, il suffit d'épouser !
Cette indépendance n'a rien qui me déroute.
PREMIER BANQUIER : De ce qui constitue une calamité vraie
ruine l'État, assèche nos finances
ravale ce pays au rang d'infime puissance
c'est prendre son parti de manière longanime.
DEUXIÈME BANQUIER : Inquiétant paradoxe ou dangereuse maxime
Les deux sans doute ! Collègue, je le dis tout à trac
Je ne sais ce qu'il a au fond de votre sac !
Mais quand dans un vaste empire se propage le mal,
C'est mal choisir son temps pour faire le libéral !
QUATRIÈME BANQUIER : Quand dans un vaste empire se propage le mal
Les solutions hardies sont aussi les seules sages !
PREMIER BANQUIER : Rien de plus irritant, monsieur que ces obscurités !
Au fait ! pour sortir de nos difficultés,
Si vous avez un plan, dites, parlez, proposez
Au lieu de finasser.
DEUXIÈME BANQUIER : Oui-da ! Avez-vous ce qu'on appelle une politique ?
QUATRIÈME BANQUIER : Une politique ? Le mot est gros, mais un peu de jugeote,
çà et là des idées qui, par ma cervelle trottent ;
à cela nul mérite. Vingt ans de tropiques :
Pensez, je les connais. Axiome :
pour rendre traitable le Sauvage, il n'est que deux pratiques :
La trique, mon cher, ou bien le matabich !
PREMIER BANQUIER : Eh bien ?
QUATRIÈME BANQUIER : Eh ! bien tant pis, je vous croyais plus vifs.
Suivez l'idée. Que veulent-ils ? Des postes, des titres,
Présidents, députés, sénateurs, ministres !
Enfin le matabich ! Bon ! Auto, compte en banque
Villas, gros traitements, je ne lésine point.
Axiome, et c'est là l'important : qu'on les gave !
Résultat : leur cœur s'attendrit, leur humeur devient suave.
Vous voyez peu à peu où le système nous porte :
Entre leur peuple et nous, se dresse leur cohorte.
Si du moins avec eux, à défaut d'amitié
En ce siècle ingrat sentiment périmé
Nous savons nouer les nœuds de la complicité.
PREMIER BANQUIER : Il suffit ; bravo collègue ! Accord sans réticence !
CHŒUR DES BANQUIERS : Hurrah ! Hurrah ! Vive l'Indépendance !

Acte I, Scène 4.
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LE BONIMENTEUR : Mes enfants, les Blancs ont inventé beaucoup de choses et ils vous ont apporté ici, et du bon, et du mauvais. Sur le mauvais, je ne m'étendrai pas aujourd'hui. Mais ce qu'il y a de sûr et de certain, c'est que parmi le bon, il y a la bière ! Buvez ! Buvez donc ! D'ailleurs, n'est-ce pas la seule liberté qu'ils nous laissent ? On ne peut pas se réunir, sans que ça se termine en prison. Meeting, prison ! Écrire, prison ! Quittez le pays ? Prison ! Et tout à l'avenant ! Mais voyez, vous-mêmes ! Depuis un quart d'heure, je vous harangue et leurs flics me laissent faire... [...] Motif : Je vends de la bière et je place de la bière ! [...]
Mais attention ! Eh oui ! Comme il y a dans un même pays, des races différentes, comme en Belgique même, ils ont leurs Flamands et leurs Wallons, et chacun sait qu'il n'y a pas pire que les Flamands, il y a bière et bière ! Des races de bière ! des familles de bière ! Et je suis venu ici parler de la meilleure des bières, de la meilleure des bières du monde : la Polar ! — Polar, la fraîcheur des pôles sous les tropiques ! Polar, la bière de la liberté congolaise ! Polar la bière de l'amitié et de la fraternité congolaise !
[...]
PREMIER FLIC BELGE : Pas mal, son boniment ! Il a du bagou !
DEUXIÈME FLIC BELGE : Ouais ! Mais inquiétant ! Son bock de bière est une vraie boîte à malices ! Qu'est-ce qu'il en sort ? Je vais lui en toucher deux mots !
PREMIER FLIC BELGE : Fais gaffe ! Il faut vendre la Polar ! Tu sais qui est le patron de la Polar ?
DEUXIÈME FLIC BELGE : Comment veux-tu que je le sache ? Je sais seulement que ce nègre est dangereux !
PREMIER FLIC BELGE : Tu es jeune ! Je te le dis : derrière Polar, il y a le ministre... Eh oui... le ministre du Congo ! Ça te chiffonne ! Mais c'est comme ça ! Alors tu comprends ! Allons, viens prendre une chope !

Acte I, Scène 1.
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LUMUMBA : Quand je pense que pendant cinquante ans, ils ont rampé devant le Belge, et nous n'avons pas plus tôt posé notre cul sur un fauteuil, que les voici à nous mordre les jarrets.
UN MINISTRE : C'est gai ! elle commence bien, l'indépendance !
LUMUMBA : Imbécile ! Et comment croyais-tu qu'elle commencerait ? Et comment crois-tu qu'elle continuera ? Comment croyiez-vous que cela allait se passer ? Quand je vous ai nommés ministres, est-ce que vous avez eu l'impression que je vous invitais à une partie de plaisir ? En tout cas, je ne vous prends pas en traître. Tout. Nous aurons tout, et en même temps ! Et tout de suite : la révolte, le sabotage, la menace, la calomnie, le chantage, la trahison. Vous avez l'air étonnés ! C'est ça, le pouvoir : la trahison, la mort peut-être.

Acte I, Scène 8.
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LUMUMBA : Tu y penses à l'Afrique, quelquefois ? Tiens, regarde là ! pas besoin de carte épinglée au mur. Elle est gravée sur la paume de mes mains. Ici, la Rhodésie du Nord, son cœur le Copper Belt, la Ceinture de Cuivre, terre silencieuse, sauf de temps en temps, un juron de contremaître, un aboi de chien policier, le gargouillement d'un colt, c'est un nègre qu'on abat, et qui tombe sans mot dire. Regarde, à côté, la Rhodésie du Sud, je veux dire des millions de nègres spoliés, dépossédés, parqués dans les townships. Là, l'Angola ! principale exportation : ni le sucre ni le café, mais des esclaves ! Oui, mon colonel, des esclaves ! Deux cent mille hommes livrés chaque année aux mines de l'Afrique du Sud contre du bon argent qui tombe tout frais dans les caisses vides de papa Salazar ! Y pendant comme un haillon, cet îlot, ce rocher, San Tomé, sa petitesse bouffe du nègre que c'en est incroyable ! Par milliers ! Par millions ! C'est le bagne de l'Afrique !

Acte II, Scène 11.
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LUMUMBA : Vous êtes de la brimade et de la corvée, vous êtes de l'avenir bouché, vous êtes de la solde de famine, de la solde non payée ! Et c'est de votre maigreur que ces messieurs sont gras ! Hélas, oui ! quand j'ai nommé les premiers officiers noirs, le premier général, le premier colonel noir, je ne pensais pas que plus vite que ne pousse la lave du volcan, une caste serait née, de chiens voraces et insatiables, la caste des colonels et des nouveaux messieurs, et c'est cette caste qui a confisqué à son profit, à son seul profit, les avantages que vous étiez en droit d'attendre de notre révolution congolaise !

Acte III, Scène 1.
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Vidéo de Aimé Césaire
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Il y a des mots qui font scandale aujourd'hui et qui ne choquaient pas hier. le mot nègre, par exemple. Tiens, savez-vous quel écrivain a réussi à en ruiner le caractère insultant pour le faire sien, fièrement?
« Cahier d'un retour au pays natal », d'Aimé Césaire – C'est à lire aux Editions Présence africaine.
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