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EAN : 9782070573288
128 pages
Gallimard Jeunesse (17/03/2016)
4.16/5   52 notes
Résumé :
1980, Portland, Oregon. Jewel ne comprend pas. Où est passée Maman ? Devra-t-elle rester avec Papa, maintenant ? Cette perspective lui fait peur. Mais il ne faut pas qu'Esther le sente. C'est sa petite soeur, elle doit la protéger. En fait, Maman est à l'hôpital psychiatrique. Parce que Papa lui fait du mal. Parce que Papa les terrorise. En grandissant, Jewel comprend peu à peu qui si son père est malfaisant, d'autres personnes sur la terre méritent qu'on les aime e... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (26) Voir plus Ajouter une critique
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J'ai été complètement chamboulée par cette lecture... C'est une histoire « comme tant d'autres », celle d'un père violent et d'un mari indigne qui bat sa femme et ses enfants. Il existe beaucoup de témoignages de ce genre, mais celui-ci est véritablement « un coup de poing », comme dit l'éditeur. L'histoire est racontée du point de vue de Grace, la mère, ainsi que de Jewel, l'aînée. Toutes deux sont le bastion qui protège Esther, la cadette.
Mais Grace n'en peut plus. L'humiliation, les viols et violences répétés, le mépris, l'indifférence des proches viennent à bout de sa raison. Un jour, dans un magasin, elle s'effondre, se met à hurler et à pleurer. Elle est aussitôt enfermée dans un hôpital psychiatrique et bourrée de médicaments. Ses deux filles sont seules avec « le monstre ».

Mais à l'inverse de sa mère, Jewel est forte. Elle fait avec les insultes, les cris et les coups de son père, elle serre les dents en attendant de pouvoir lui rendre la pareille. On la voit évoluer au fil des années, tout d'abord petite fille qui se raccroche encore à l'espoir que sa mère trouve le courage de les protéger, puis jeune fille, quand c'est elle qui défend les autres. En conséquence, son père la rabaisse à l'état d'animal : « Retiens ta chienne, Grace ! Retiens ta chienne ou ça va mal finir ! »
Mais la violence de William ne s'arrête pas là, il s'applique également à priver tout le monde de liberté. Les filles sont contraintes d'aller à la messe, d'avoir l'air joyeux dans la rue parce qu'une bonne chrétienne ne doit jamais tirer la tronche (sous peine de se faire traiter de petite saloperie), d'écouter régulièrement la musique qu'aime Monsieur, les sketches que Monsieur veut voir, les émissions télé ridicules et médiatiques dont Monsieur a envie, de respirer la fumée du cigare de Monsieur parce qu'il n'a pas envie de conduire avec la fenêtre ouverte, et ainsi de suite.

Tout au long de ma lecture, je n'ai pas pu m'empêcher de me demander ce qui poussait William à persécuter sa famille.

Je ne comprends pas non plus comment on peut ne pas plaquer cette pourriture et s'enfuir avec ses enfants sous le bras.
Mais Grace est dans un piège psychologique très complexe qui l'empêche de partir : elle a honte de son choix de mariage et elle ne veut pas que les gens sachent à quel point l'homme qu'elle a épousé est raciste, grossier et violent. Par la suite, elle a peur qu'il fasse du mal aux filles si elles s'enfuient et qu'il les retrouve – d'ailleurs elle ne sait même pas où aller, elle n'a pas d'amis et son frère ne la soutient pas – ; puis elle a honte d'avoir laissé se dérouler toute cette horreur sous son toit (les gens ne comprendraient pas qu'elle ne soit pas allée au commissariat plus tôt) ; et enfin, elle a peur de ne plus avoir la garde de ses filles – chose qui arrivera très sûrement, à présent qu'elle a longuement séjourné en hôpital psychiatrique.
J'ai beau avoir conscience de toutes ces difficultés qui sont sur la route de Grace, je ne comprends pas comment elle fait pour supporter cette énergumène qui ne mérite même pas le nom d'homme. Le seul moyen de s'en sortir est de se rendre compte qu'il n'est JAMAIS trop tard.
Je ne sais pas que ce que ça fait d'être une femme battue et de croire qu'on est coincée pour toujours avec ce type. Je ne sais pas que ce que ça fait de penser que c'est tout ce qu'on mérite, qu'on l'a bien cherché, et je prie pour que ça n'arrive jamais. C'est pourquoi je ne peux me permettre de juger – personne n'en a le droit. Je souhaite juste à toutes les femmes qui subissent ça de réaliser qu'elles n'ont pas à souffrir de leur mariage, que personne ne mérite cette vie et que ce qui leur paraît hors de portée n'est pas toujours si inatteignable.



J'ai été stupéfaite quand je me suis rendue compte que c'est un homme qui a écrit cette histoire. Les sentiments des personnages sont tellement bien retranscrits, les deux protagonistes sont si profondes et humaines que j'ai réellement cru que c'était une femme qui parlait en connaissance de cause. Le sentiment que cette histoire est basée sur des faits réels, voire des souvenirs, n'arrive pas à me quitter. A-t-il vu une proche souffrir de cette situation ? L'a-t-il lui-même subi différemment ?

Pour finir, je pense que la couverture correspond parfaitement à l'ambiance du livre. C'est noir, c'est gris, cet arbre est terriblement menaçant. Son ombre fait penser à une main – presque une serre – qui s'étend jusqu'à son fruit. Cette orange, pourtant, est en parfaite santé : sa couleur est insolemment vive à côté de l'obscurité. Ça représente terriblement bien Jewel et son père : il veut la contraindre, la plier à ses volontés, mais elle lui résiste, refuse les vérités qu'il veut lui imposer. Et finalement, elle sort grandie de cette expérience, avec ses convictions propres. Elle devient une fille ouverte et tolérante, quoique méfiante envers les inconnus – fatalement.

Le livre de Jean-François Chabas est un véritable appel à la force et à la volonté. Quand les filles s'en sortent, c'est d'une manière tellement simple (presque banale !) que c'en est aberrant de voir le nombre d'années que Grace a tenu sans rien faire. Je suis mortifiée pour elle, qui était trop terrorisée pour agir, et j'espère de tout mon coeur que les femmes qui sont dans sa situation trouveront le courage de ne pas se laisser abattre.
Un livre terriblement marquant...
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Grace est terrorisée par les violences physiques et psychologiques que lui fait subir son mari. Fille de déportés, elle tente en vain de s'opposer et de protéger ses deux petites filles.

Un jour, alors qu'elle se réfugie dans une boutique pour se protéger d'une averse, ses digues se fissurent. Elle est amenée dans un hôpital psychiatrique.

Jewel et Esther vont devoir lutter seule contre un quotidien incertain...

Un magnifique roman qui nous plonge dans l'existence d'une famille fragilisée par un père violent et manipulateur.

Une ellipse nous amène rapidement huit après avec une situation qui a peu évolué. Mais comment échapper au tyran ou tout au moins comment protéger sa mère, son enfant, sa soeur.... ?

Des destins brisés par un étau qui les ensèrent et quelques lueurs d'espoir !

Un roman à découvrir absolument...
Lien : http://www.nouveautes-jeunes..
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J'aime beaucoup les romans de ce auteur et la puissance de ce qu'ils évoquent. Ici la violence conjugale et l'emprise d'un type de pervers narcissique sur sa femme et ses filles mais également un regard porté sur l'hôpital psychiatrique pas vraiment tendre.
L'histoire alterne entre le point de vue de Jewel, fillette de 5 ans au début du récit et celui de Grace, sa mère. Tout commence par l'internement de cette belle femme active, océanographe et professeur émérite, mère de deux enfants qui se retrouvent seules à la maison avec un père autoritaire et même violent.
En parallèle de la prise de conscience de la situation par Jewel qui, en grandissant, réussit à mettre des mots sur ce qu'elle observe et subit, le lecteur suit la dégringolade de Grace qui n'a plus prise sur sa vie dont elle a totalement perdu le contrôle. C'est très dur à supporter et le détail de la violence conjugale est surtout implicite. Heureusement, le personnage de Jewel est fort et attachant et comme c'est publié en littérature jeunesse il y a de la lumière au bout du couloir pour les filles.
Mais comprendre comment la descente aux enfers se produit et ce qu'elle peut avoir d'inéluctable faute d'écoute et de bienveillance ce qui pousse les victimes au silence... c'est presque insupportable...
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Un texte court, qui marque, comme un uppercut.
Je ne vais pas m'étendre, c'est inutile. Peut-être parce que cette thématique, la violence familiale, résonne un peu trop en moi. Jean-François Chabas a du talent, beaucoup. La lutte de la mère et la fille contre elles-mêmes, leurs tentatives sont exprimées avec beaucoup de sensibilité mais sans pathos excessif. Chaque phrase, chaque mot fait mouche. le titre trouve sa réponse à la fin, une belle réponse.
Un livre à lire.
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Attention, coup de poing. Petit livre d'une centaine de pages, magnifique lecture à deux voix de l'enfer et de l'étouffement d'un homme vis à vis de sa famille. La mère et la fille se livrent à une étude profonde de leur sentiment et de leur vécu face à leur histoire personnelle et contrebalance les points de vue ressentis.

Dans un climat de violence quotidien, deux filles et leur mère subissent la tyrannie du père, figure autoritaire et brutale. Au regard de la société, cet homme est parfait, au regard de sa famille, il est un monstre. La mère se renferme, persuadée de ne pouvoir échapper à son sort et décide même de subir des enfermements volontaires en hôpital psychiatrique, où l'éloignement et les médicaments lui permettent d'oublier cet homme.

Ces filles elles, restent, et se construisent face à la peur que leur inspire ce père et l'absence réconfortante d'une mère. Choisiront-elles le même chemin que leur mère ? Céderont-elles face à la crainte, où choisiront-elles de s'émanciper pour se construire une autre vie ?

Le fait de faire converser la mère et la fille face à des situations pareillement vécue mais auxquelles elles n'apportent pas la même réponse est une richesse d'écriture qui permet à l'auteur de développer les situations et les ressentis de différentes manières. Ainsi, personne ne peut juger ni la mère ni la fille pour les choix qu'elles font puisque finalement, au sein de leur intimité, nous comprenons ce que toutes les deux ressentent. Nous ne pouvons même pas blâmer la mère d'abandonner ses filles puisqu'elle même le vit très difficilement et explique ses choix et ses faiblesses.

Court uppercut à la lecture abordable mais au message bien plus complexe. Ce livre offre la possibilité de délivrer une parole qui souvent reste enfermée et propose une solution finale à un public de jeunes adolescent qui pourrait être confronté à cette problématique.
Lien : https://lechampdesabeilles.w..
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critiques presse (1)
Ricochet
25 mai 2016
Un magnifique et effrayant roman sur l’intime et ses dérives, qui doivent beaucoup à l’expérience personnelle de l’auteur.
Lire la critique sur le site : Ricochet
Citations et extraits (39) Voir plus Ajouter une citation
Je me demande si c'est pareil pour les autres femmes battues, quand elles parlent de ça avec leurs enfants. Si elles refusent le dialogue, et s'énervent. Peut-être que oui. Tout est une question d'humiliation, de peur et de choses non dites. Mais après tout, moi aussi je me suis tue. La perspective de parler à quelqu'un, à un adulte surtout, de ce qui se passait chez nous, était terrifiante. Les victimes ont honte et se terrent. C'est ainsi que les bourreaux prospèrent. (p.117)
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De quoi cet homme souffre-t-il ? A-t-il sa place dans cet affreux endroit ?
Cette question, je me la suis posée mille fois à mon propre sujet, et sans cesse elle revient, à chacun des malades que j'observe. L'hôpital psychiatrique est pathogène. Il fait naître les troubles mentaux autant qu'il prétend les guérir.
(...)
La folie est contagieuse, surtout quand on est affaibli par le stress et les médicaments. Je crois, à force d'observer les malades depuis maintenant tant d'années, que certains sont arrivés en ces lieux à peu près sains d'esprit, avec par exemple une grande fatigue morale, mais que l'hôpital psychiatrique les a brisés. Ces personnes fragiles sont devenues de plus en plus aliénées dans cet endroit où on était censé les guérir.
Comment pourrait-il en être autrement ? Les patients sont abandonnés à une inaction absolue, posés sur des chaises comme des pantins, à dialoguer perpétuellement avec leurs démons. (p.93)
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- Pourquoi est-ce que vous mélangez les psychotiques avec les dépressifs et les mélancoliques ? C'est presque un appel aux agressions.
Il s'est penché par-dessus son bureau avec un sourire gourmand, et il a répondu :
- Mais... c'est que c'est très stimulant ! C'est l'école de la vie !
Parfois je me demande si, en psychiatrie, le personnel soignant n'est pas aussi perturbé que ceux dont il a la charge. (p.76)
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Comment avais-je pu épouser cet homme ? Quelque chose de secret, d'innommable, d'indigne à mes yeux, pour tout dire, m'empêchait de prendre sous mon bras Esther et Jewel, puis de m'enfuir comme si j'avais à mes trousses le diable et ses légions. Je voulais croire que la raison principale de cet immobilisme n'était pas la simple honte d'avoir à reconnaître, devant les gens que je connaissais, que je m'étais mariée à un monstre, si opposé en tout à ce qu'on m'avait enseigné depuis ma petite enfance.
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Toutes ces années, notre mère a dû
supporter cela, et je crois que c’est ce qui l’a le plus détruite : la laideur.
Quand on partage la vie de ce genre de personne, on n’est pas seulement
touché par le mal qui nous est fait directement. C’est le côtoiement constant
de l’infamie qui ronge. On respire un gaz mortel, celui qui a tué Maman.
Je prends Esther dans mes bras, et je la serre.
Notre amour est notre force. Nous sommes une citadelle.
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