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Critique de Renod


Renod
04 novembre 2015
Les rues de Belfast ont une odeur singulière, un mariage d’âtre brûlant, de terre et de friture. L’air est épais de tourbe, de charbon et d’humidité. De modestes maisons ouvrières construites en briques sales et en ardoises s'agglutinent, identiques, le long des routes pavées. Les rues ont un « goût de briques, un goût de guerre, un goût de tristesse et de colère ». Les enfants de ces quartiers grandissent dans la pauvreté et la violence. Une violence quotidienne aux nombreux visages : répression policière, attentats meurtriers, émeutes, lynchages menés par des loyalistes. Entrer dans un pub permet de quitter ces rues grises et froides. Dans ces foyers où la fraternité est reine, les clients chantent, prononcent des discours militants, chacun se reconnaît, se salue, les tournées de Guinness se succèdent. Antoine, un jeune artisan parisien, va se prendre de passion pour ce pays. Le voilà plongé au cœur d’une guerre, il adhère complètement à cause républicaine. Un nouveau monde s’ajoute à son terne quotidien de luthier. Il se fait une place au sein d'une communauté républicaine très soudée face à l’adversité. Au cours de ses séjours, il va se lier d’amitié avec deux couples. Jim et Cathy O'Leary vivent modestement. Ils hébergent Antoine dans la chambre de leur fils abattu d'une balle en plastique par un soldat britannique. Il rencontrera ensuite Tyrone Meehan, un responsable respecté de l’I.R.A. et son épouse, Sheila. L’homme le traite comme un fils mais le met en garde contre tant d’engouement. Ce conflit n’est pas le sien et toute guerre est sale ; qu’Antoine conserve sa sympathie pour la cause et son amour pour l’Irlande, mais qu’il reste en dehors des opérations.
Trente ans plus tard, Antoine apprend que Tyrone Meehan, qu’il a continué à fréquenter régulièrement, trahissait son camp depuis de nombreuses années. C’est un choc. Cette traitrise brise tout un univers bâti autour d'une cause politique et d’amitiés solides. Que reste t’il quand vous découvrez que la personne en qui vous avez cru depuis tant d'années est en fait un mouchard ? Qu’est-ce qui était vrai ? L’amitié et les sentiments étaient-ils sincères ?
Les récits de Sorj Chalandon ont toujours un contenu fortement autobiographique et une visée cathartique. Ce texte lui permet de revenir sur son engagement et son amitié trahie pour Denis Donaldson. Il lui permet aussi de faire le deuil d’un ami qui ne lui a pas donné toutes les réponses mais pour lequel il conserve, malgré tout, des sentiments fidèles et sincères.
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