AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Madamedub


Parmi la grande foule des romans dits historiques, il est certains auteurs que l'on a plaisir à retrouver, et dont on attend avec impatience le prochain voyage dans le temps.

Françoise Chandernagor, a priori, est de ceux-là. Avec elle on s'attend à être entraîné dans une époque, à s'imprégner des décors, des évènements et des personnages que l'on croit connaître mais qu'on ne demande qu'à redécouvrir. N'avez-vous pas eu l'impression de faire partie de la splendeur et des intrigues du grand Versailles en lisant L'allée du Roi, avec sa précision historique, son vocabulaire d'époque, ses descriptions ?

Pari réussi pour cette plongée dans l'Alexandrie de la fin du Ier siècle avant Jésus Christ, époque charnière s'il en est, où la face du monde (occidental) est bouleversée par l'apogée de Rome, en passe de devenir un empire.

Pari difficile surtout, après tant de récits, d'adaptations cinématographiques comme livresques, de présumer à nouveau de la personnalité de figures mythiques telles que Cléopâtre ou Marc Antoine. L'auteur fait le choix de l'intime, de la petite histoire mêlée à la grande, pour essayer de nous décrire aussi vraisemblablement que possible la « vie de famille » de cette tribu atypique.

Marc et Cléopâtre étaient-ils un vrai couple, ou seul le calcul politique les unissait-ils ? Qui était vraiment Césarion, fils de la reine et du grand Jules, enfant pharaon écrasé trop tôt sous le poids des responsabilités, impuissant face à la perte des siens ? L'extrapolation est peut-être plus facile pour ses cadets, dont on ne sait pratiquement rien hors des sources officielles, et même là …

Cléopâtre-Séléné, Alexandre-Hélios et le petit Ptolémée-Philadelphe pour les enfants du couple dirigeant, entourés d'Antyllus, fils de Marc Antoine et d'une de ses précédentes épouses, et d'Iotapa, petite fiancée mède d'Alexandre, sont les vrais héros du récit. Séléné surtout, car c'est à travers ses yeux que l'on suit le cours des choses, et parce que c'est elle que l'on retrouvera à Rome dans le tome suivant.

Ces enfants sont les témoins innocents des ravages de la guerre politique et fratricide qui se joue entre Antoine et Octave, pourtant anciens alliés. Les enjeux de ce conflit, pour le pouvoir sur l'empire en gestation, et pour la succession De César, sont le décor et le moteur de l'histoire.

Romancé mais jamais délirant, Chandernagor nous fait grâce d'un scénario hollywoodien et nous épargne les clichés habituels sur les sulfureux amants. Mais elle nous démontre que c'est dès ce moment, et grâce à la propagande redoutable d'Octave, futur Auguste, que cette image leur colle encore à la peau 2000 ans plus tard !

Dommage cependant, qu'en cherchant à expliquer ses choix narratifs par un exposé des faits et des sources de son travail, il semble qu'elle cherche à se justifier. Tout comme par de petites incursions du narrateur / auteur au coeur même du récit, elle a presque l'air de s'excuser. S'excuser de faire parler ses personnages comme des humains, parfois crûment, parfois simplement ; s'excuser de devoir imaginer les parties du récit que l'Histoire a gardé pour elle, ou d'attribuer à ses héros les pensées qui peuvent expliquer leurs actes.

Elle a pourtant fait un travail d'historien, un travail de fourmi dont on ne peut que reconnaître la valeur, et on ne saurait lui reprocher les suppositions nécessaires à la conduite logique de son récit.

Le propre d'un grand roman historique, c'est de savoir créer le suspens dans un récit dont tout le monde connaît déjà la fin !

C'est ce que fait ici Françoise Chandernagor, académicienne Goncourt pour le titre officiel, et sans aucun doute référence du récit historique. L'ampleur de ce morceau d'Histoire méritait une vraie fresque, et elle lui donne toute sa mesure en préparant les deux suites de cette trilogie méditerranéenne, à suivre…

S.L.
Lien : http://madamedub.com/WordPre..
Commenter  J’apprécie          140



Ont apprécié cette critique (9)voir plus




{* *}