"Il y a des rêves qui, une fois dérangés, ne laissent aucune place à l'espoir."
Non, la douleur n'est pas un naufrage. Elle n'engloutit pas, elle déferle, elle frappe. L'espace d'un éclair et se sentir vidée de son sang, le souffle et les jambes coupées, des crocs dans l'estomac, c'est cela la douleur.
"La mort a des ruses étranges. Elle masque sa démarche, et les signes avant-coureurs de sa victoire peuvent souvent être interprétés à faux."
A New York, cela étonnait un homme en noir assis sur le pas de la porte. Même dans la ville basse, même au coin de Mulberry Street cela étonnait. Je reverrai toujours Carmine Bonnavia tel qu'il m'est apparu ce jour là, borne sombre contre laquelle j'ai buté.
Car il arrive ainsi, souvent, que la banalité exprimée à haute voix finisse par étouffer la vérité tenue secrète.
On me dira q'un tel aveuglement relève de l'anomalie, que cette vieille fille ne faisait illusion qu'à elle-même. Cela est vrai. Car, à parler franc, Tante Rosie était pire que vieille. L'aveu de son âge se situait du côté de sa bouche. Un nid à rides, sa bouche, le Waterloo des plus célèbres esthéticiens, une feuille de papier en soie prête à craquer, un désastre. Les frisons qui voletaient autour de son front lisse, sa frange, ses joues sans âge, sa démarche sautillante ne faisaient qu'accuser la ruine d'un bas de visage dolent, affaissé. Tante Rosie en était consciente. Cela se lisait au fond de son regard comme une question sans cesse posée.
Amer mystère des souvenirs... Cette impossibilité de prévoir d'où viendra l'assaut.
"On devient curieux d'autrui lorsqu'une élémentaire hygiène mentale exige de se désintéresser de soi-même."
Que je suis lente à comprendre : Antonio ne reviendra pas. Je suis seule. Je me donne à ces mots, à leur vide sans faille. Ils m'accueillent et m'enveloppent. Ils pèsent autant qu'un bras autour de mes épaules : je ne connaîtrai jamais d'étreinte plus durable.
Lecteur, je suis allée à Solanto, ce jour-là, pour la dernière fois.
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Mais oui, c'est ce personnage crépu, au teint basané, aux lèvres charnues. Il est là-le voyez vous? Là, vous y êtes, il prend appui sur le gros orteil de la Madone...
Quoi qu'il en soit la sœur Rita en est certaine: les seigneurs agenouillés aux pieds de la Madone ne sont pas des donateurs.