François Cheng est un sensuel. Les sonorités l'enchantent, les formes l'émerveillent. Avec une fougue juvénile, il décortique le mot « arbre » et les mouvements ascendant et descendant auxquels les deux syllabes obligent. Les promesses d'« échancrure » le rendent lyrique. « le pouvoir virtuel du langage humain, qui nous permet de joindre le dire à l'indicible, le fini à l'infini, et surtout l'humain au divin » contient une dimension mystique, soutient-il, entraînant son interlocutrice sur la voie de ses méditations. A ses yeux, constater le beau ou s'effrayer du mal ne saurait suffire ; il faut repenser les principaux « mystères » du monde et comprendre que « la beauté apprend à aimer » ; que la mort confère tout son sens, et sa valeur, à la vie.
Passé par mille douleurs (l'exil, la faim, la maladie), le sage célèbre en même temps les nourritures concrètes. Non sans espièglerie, il évoque sa passion pour une pâtisserie en voie de disparition, une espèce de « cornet rempli de crème pâtissière », puis décrit, ébloui, les plaisirs de la dégustation d'un
Ispahan, un
macaron aux parfums de rose, de framboise et de litchi de
Pierre Hermé. Après l'avoir entendu, on saisit mieux la portée de son premier quatrain écrit en français : « Nous avons bu tant de rosée / en échange de notre sang / que la terre cent fois brûlée / nous sait gré d'être vivants. »
Lien :
https://www.telerama.fr/radi..