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EAN : 9782253154587
254 pages
Le Livre de Poche (03/11/2003)
4.05/5   624 notes
Résumé :
A XVIIe siècle, à la fin de la dynastie Ming – époque de bouillonnement et de bouleversement, où l’Occident même était présent avec la venue des premiers missionnaires jésuites en Chine -, dans un monastère de haute montagne, un homme qui n’a pas encore prononcé ses vœux se décide à quitter ce lieu de paix et de silence pour retrouver, trente ans plus tard, la seule femme qu’il ait jamais aimée.
Un roman d’envoûtement et de vérité, récit d’une passion – celle... >Voir plus
Que lire après L'éternité n'est pas de tropVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (93) Voir plus Ajouter une critique
4,05

sur 624 notes
Rien à dire, il faut juste le lire
Rien à prétendre, juste l'entreprendre
Rien à défendre, juste le comprendre
Rien à rajouter, juste le prolonger
Juste voir et surtout recevoir

"Contempler, ici, c'est communier,
c'est faire advenir la beauté"
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Dès les premières lignes de lecture, j'ai été saisie par un sentiment d'apaisement, la sensation de basculer dans une autre dimension, au XVIIème siècle, à la fin de la Dynastie Ming.

L'histoire en elle-même n'a rien d'exceptionnel, elle a été racontée par de nombreux auteurs à travers des couples célèbres à l'image de Tristan et Iseult mais écrite par François Cheng, la narration atteint des sommets d'une grande poésie où se reconstitue sous nos yeux tout un paysage qui se modifie au gré des saisons et où évoluent des moines, des paysans, des seigneurs. L'écriture est d'un esthétisme à couper le souffle.

Cet amour éternel va naître d'un simple regard entre Lan-Ying et Dao-Sheng et c'est à partir de cet instant que cet amour, entravé par leur environnement, va grandir au fil des séparations et des retrouvailles jusqu'à être sublimé.

Il y a des instants de grâce, d'une grande sensualité, lorsque Dao-Sheng, médecin itinérant et devin, est au chevet de dame Lan-Ying, étendue sur son lit, derrière un rideau (page 86) :
« Lan-Ying ne voit pas ; Dao-Sheng lui voit. Il voit sa propre main jadis fine et rendue rude par les labeurs, superposée à celle de Lan-Ying, blanche et lisse et qui, à cause de sa maigreur, laisse transparaître les os. Indéniablement, il y là contraste et pourtant quelle harmonie provenant sans doute du fait que chacune est dans l'élan de consoler l'autre. Lan-Ying ne se lasse pas de caresser la peau passablement rugueuse de l'homme. Dao-sheng, de son côté, se dit que la main si tendre, offerte là, redeviendra pleine et charnue. Car la voie du devin, plus que celle du médecin, lui chuchote à l'oreille « Maintenant que les deux prédestinés se sont véritablement retrouvées, aucun obstacle, aucune maladie, ne pourra plus entraver leur route ». de fait, durant le mois qui suit, ce seront bien les médicaments et la force de l'amour conjugués qui vont agir sur la malade et la tirer de l'abîme. A chaque rencontre, à travers le rideau, la main de Lan-Ying rejoint sans retenue celle de Dao-Sheng. C'est tout ce qu'ils peuvent faire. Ce qu'ils peuvent faire est d'une terrible audace, ils le savent. »

François Cheng abolit les limites matérielles qui pèsent sur l'amour de Lan-Ying et de Dao-Sheng pour mieux créer en eux la vacuité intérieure qui permet de recevoir l'intemporalité de l'amour. Mais c'est un long chemin de souffrance qui les attend avant de parvenir aux épousailles de leur âme respective.

L'écriture est très belle, elle est envoûtante, il en émane une lumière pareille à celle que j'ai ressentie à la lecture de certains passages de la « Nature Exposée d' Erri de Luca ». J'en déduis que cette clarté provient de leur quête spirituelle, d'un questionnement intérieur, de la recherche de l'élévation des sentiments humains.

Je remercie « Kawane » qui m'a conseillée de lire ce livre sublime. Son conseil est arrivé au moment où je venais de visiter le Musée Guimet de Paris où est particulièrement bien expliquée et retracée l'évolution des périodes bouddhistes à travers l'Asie et une exposition de porcelaine qui s'est développée particulièrement sous la dynastie Ming.
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Magnifique histoire d'amour contrarié sur fond de philosophie taoïste, qui se déroule dans la Chine du XVIIème siècle. L'écriture de François Cheng est toute en subtilités et en finesse. L'auteur nous immerge dans ce monde où le trivial côtoie la spiritualité et il en émane une grande poésie. Parfois, le temps s'arrête et reste en suspend, moment propice à une réflexion. de plus, à travers la vie de ce moine et la sublimation de son amour, la philosophie taoïste nous est présentée au quotidien. A ce sujet, la rencontre avec les pères jésuites nous permet également de faire le parallèle entre cette philosophie et la religion catholique. On découvre alors qu'elles ont beaucoup de points communs.
De la grande littérature. Un très grand roman à lire immédiatement.
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Merveilleux ! François Cheng arrête la course du temps et nous fait toucher du doigt l'éternité.

En Chine, au XVIIème siècle, Dao-sheng a connu mille vies. Joueur de violon vendu enfant à une troupe de comédiens itinérants, il a été envoyé au bagne pour avoir osé sourire à la jeune Lang-ying, promise au seigneur Zhao. Ayant réussi à s'échapper après bien des souffrances, il trouve refuge dans un monastère taoïste où il apprend l'art de la médecine et de la divination. Parvenu à l'âge mûr, il part à la rencontre de celle qui n'a jamais cessé d'habiter son coeur....

Présentée comme le "Tristan et Iseult" chinois, L'éternité n'est pas de trop est bien plus que cela. L'histoire d'amour interdite entre Dao-sheng et Dame Ying transcende l'humain et montre la puissance de l'esprit, qu'il soit appelé Souffle par les taoïstes ou âme par les chrétiens. Citons pour exemple le passage où les deux amants joignent la paume de leur main : de ce simple contact naît une communion des âmes qui irradie de sensualité comme l'acte d'amour ultime.

A contre-courant de notre société matérialiste et impatiente, François Cheng fait un délicat éloge de la patience et de la spiritualité. Il n'a pas son pareil pour disséquer les comportements humains dans ce qu'ils ont de plus vil comme de plus noble. J'ai savouré son style imagé, atypique et envoûtant, qui sonne comme des extraits de poèmes mis bout à bout.

Je recommande à tous cette parenthèse enchantée, véritable quête de sens qui nous élève.
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Quelle belle lecture !
Un amour impossible sublimé .
J'ai beaucoup aimé la rencontre deux mondes qui semblent incompatibles , deux civilisations différentes mais qui peuvent tant s'enrichir dans l'échange , sous la personne de ce missionnaire jésuite , épris d'absolu qui vient prêcher si loin de ceux qu'il aime et de Dao - sheng , qui n'a jamais oublié la femme aimée , la seule femme qu'il a réellement aimée .
Cet amour qui est partagé mais qui est impossible va néanmoins être vécu par la communion des âmes .
Sublime .
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Citations et extraits (193) Voir plus Ajouter une citation
"A ces mots, Lan-Ying ouvre sa paume et laisse Dao-Cheng y coller la sienne. Instant de muette communion et d’extase hors paroles. L’intimité née de deux mains en symbiose est bien celle même de deux visages qui se rapprochent, ou de deux cœurs qui s’impriment l’un dans l’autre. La corolle à cinq pétales, quand elle éclot, est un gant retourné de l’intérieur vers l’extérieur, elle livre son fond secret, se laisse effleurer par la brise tiède qui sans cesse passe, ou butiner sans fin par d’avides papillons et abeilles qui accourent. Entre deux mains aux doigts noués, le moindre frémissement bruit de battements d’ailes ; la moindre pression provoque une onde qui s’élargit de cercle en cercle. La main, ce digne organe de la caresse, ce qu’elle caresse ici n’est pas seulement une autre main, mais la caresse même de l’autre. Caressant réciproquement la caresse, les deux partenaires basculent dans un état d’ivresse qui a peut-être été rêvé dans l’enfance, ou alors dans une avant-vie. Les veines entremêlées irriguant le désir se relient aux racines profondes de la vie ; les lignes entrecroisées qui prédisent le destin tendent vers le lointain, jusqu’à rejoindre l’infini des étoiles."
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C'est l'esprit totalement dépouillé que Lan-Ying apparaît dans l'embrasure de la porte, lotus d'automne en sa suprême éclosion. Devant la singulière image que la circonstance rend unique, Dao-Sheng reste interdit. Le sentiment qui l'envahit est celui même qu'éprouverait la terre recevant l'eau lustrale : la gratitude. La gorge nouée, il avance d'un pas, sans rien dire. Toute initiative doit venir de la femme, laquelle, après une hésitation, tend sa main droite. L'homme y joint la sienne et dit simplement "Lang-Ying"! La réponse de la femme est inaudible ; seul le mouvement de ses lèvres fait deviner le nom de Dao-Sheng. Il s'ensuit un silence que la femme rompt en posant sa main gauche sur le dos de la main de l'homme, lequel, à son tour, fait de même. Voici les quatre mains superposées, imprimant entre elles leur harmonieuses respiration. C'est ce que les deux êtres en présence veulent faire : c'est ce que pour l'heure ils peuvent faire. Ils renouvellent là ce qu'il ont fait au bord d'un lit dont le souvenir les hante, les laisse dans une soif qu'ils ne pensaient pas pouvoir jamais étancher.
Cette fois ci, ils sont debout, la circulation entre eux se fait plus entière encore. Les mains douces et lisses comme le jade se blottissent dans les mains qui ont la rugosité d'un vieil arbre. Veine à veine, fibre à fibre, feuille à feuille, banche à branche, ce qui se ressent au bout des doigts, au cœur des paumes, parcourt à travers les méridiens tout le corps. Immergés dans les ondes rythmiques qui proviennent d'eux et qui les portent, les deux amants basculent dans un état second. Ils resteraient là indéfiniment.
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Pour lui, les femmes n'étaient qu'un tas de chairs appétissantes, à leur vue, il avait envie de les croquer, il se précipitait dessus. Avait-il vraiment la patience de regarder une femme calmement, humblement, silencieusement? Regarder comment elle vit, comment elle rêve, comment elle se recueille et se transforme. Comment elle impulse son rythme et déploie son espace, à l'instar d'un éventail, dans les plis duquel sa beauté originelle propage son rayonnement. Cette exigence-là relevait d'un autre ordre, lequel n'était pas à la portée du Deuxième Seigneur.
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Pour la première fois, il réfléchit sur l’être de la femme, sur l’essence du féminin. Il a la révélation que le charme de la femme, quand celle-ci n’est pas rabaissée par toutes sortes de conditions extérieures, vient de ce qu’elle est la magique transformatrice, virtuellement capable de tout retourner en grâce aérienne, et aucune tentative de l’avilir n’y peut rien. Elle est chair certes, mais combien cette chair se transmue sans cesse en murmures, en parfums, en radiance, en ondes infinies dont il importe de ne pas étouffer la musique. À bien y réfléchir, le corps de la femme incarne le plus ardent miracle de la nature. Ou, plus précisément, c’est la nature qui en elle se résume en miracle. N’est-il pas vrai que toute beauté de la nature s’y trouve : douce colline, secrète vallée, source et prairie, fleur et fruit ? Ne faut-il pas alors appréhender ce corps comme un paysage ?
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Ce que les morts laissent aux vivants, c'est certes un chagrin inconsolable, mais aussi un surcroît de devoir de vivre, d'accomplir la part de vie dont les morts ont dû apparemment se séparer, mais qui reste intacte. C'est la manière pour les vivants de remettre les morts dans la Voie de la Vie; c'est la manière pour eux de ne pas succomber à la mort.
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« Cinq méditations sur la mort autrement dit sur la vie » de François Cheng c'est à lire chez Albin Michel.
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