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EAN : 9782953541724
Editions Ecorce (21/11/2011)
4.38/5   13 notes
Résumé :
Dix ans après, Suzanne se pointe comme une fleur, embrasse sa sœur Zia, la jette dans son fauteuil,
embarque quelques fringues, roule à toute allure dans le parc du Centre jusqu’à sa voiture où elle harnache Zia sur le siège avant, replie l’engin, démarre et dit : « Ma sœurette, on va voir du pays. »

Le fantôme de la fille en jaune plane sur l’itinéraire des deux sœurs lancées sur ses traces.
Qui était Zora Korps, celle dont tout le mo... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
La fille en jaune est morte - en tuant.
Ou a tué - en mourant.
Elle a tué celui que Suzanne aimait plus que tout au monde, Polo.

Suzanne reconstitue la courte vie de la fille en jaune, entre Lyon, Marseille et les Landes, entre une école de management, la famille et les dernières fréquentations de la jeune kamikaze de dix-neuf ans.
« Elle dit que son histoire l'intéresse. Elle dit qu'elle voudrait comprendre, en faire quelque chose. »

Après avoir lu 'Les mauvaises' de Séverine Chevalier, je m'attendais (j'espérais) le même style d'écriture, si intense.
'Recluses' est son premier roman publié ; il est assez différent par la forme, mais le propos est aussi sombre. L'auteur nous raconte une histoire douloureuse, sur fond de road-trip, de quêtes identitaires et de jeux de miroirs autour de personnages en marge, détruits/destructeurs.

J'ai eu des moments de doute, de léger découragement à la lecture, lorsque l'intrigue se complique, que les personnages se (dé)multiplient. Je me suis demandé si l'auteur savait où elle allait, si elle n'était pas en train de digresser n'importe comment, dans le simple but de brouiller les pistes.
Non, l'idée n'est pas de faire du 'polar efficace' à coup de grosses ficelles - pas le genre de Séverine Chevalier. Et comme le dit si bien Jérôme Leroy en préface : ce roman choral est « à l'image [d'un] corps déchiqueté, éclaté et parcellaire, raconté de différents points de vue dont aucun ne peut rendre compte totalement de la vérité puisque, dans un bon roman noir, il n'y a pas de vérité. »
Pas de vérité, et donc pas de réponse à des 'Pourquoi ?' assourdissants, comme souvent dans la vraie vie...

Le cheminement de l'histoire m'a fait penser à celui de contes initiatiques (tel que 'Hansel & Gretel' qui m'angoisse autant qu'il me fascine). L'intelligence du propos et la "présence" des protagonistes - y compris les plus en retrait, comme Zia et le psy - me rappellent quant à elles le talentueux et regretté Thierry Jonquet.
Mais la voix de Séverine Chevalier, faite d'explosions et de silences, est unique, tout comme la touche de couleur de ses histoires si noires (une robe jaune ici, une orange dans 'Les Mauvaises').

Je poursuis ma découverte avec 'Clouer l'ouest'.
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C'est pas Thelma et Louise
encore que…
C'est Suzanne et Zia
soeurs sur les routes
soeurs retrouvées
- dix ans après -
soeurs évadées
pour comprendre Zora
la fille en jaune
morte auto-explosée
auto-sacrifiée ?
Comprendre quoi ?
L'inexplicable
ces déflagrations
qui déchirent
nos chemins
et font exploser les vies
différemment selon le côté
où l'on était.

Tenter

d'expliquer
de comprendre
de pardonner
de repartir.
Pour cela,
chotter*, chotter
et chotter encore
accepter de ne pas
toujours comprendre,
et pourquoi
le faudrait-il ?

Toutes sont
meurtries
abîmées
décharnées.
Parfois elles
fument puis à défaut
de fumer, elles peuvent
alors mourir
ou survivre,
recluses
c'est selon.

Il y a tant de
filles en jaune
il y a tant de
cris poussés,
repoussés
justifiant de ne
jamais arrêter de
chotter.

Recluses fut le premier roman de Séverine Chevalier, l'histoire de deux soeurs partant sur les traces de la fille en jaune qui s'est fait exploser, les plongeant alors dans le drame. L'histoire de deux soeurs qui se retrouvent et tentent de repartir.

Un roman au style envoutant et bouleversant, style que l'on retrouve régulièrement dans les posts instagram de l'auteure qui réveillent et irradient mon fil, puissantes fulgurances qui nous rappellent combien nous ne sommes après tout, que « des trous traversés par le monde ».
* chotter : voir @sev.quichotte
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Découvrir par hasard, au détour des rayonnages d'une librairie, un ouvrage des Editions Ecorce/noir, c'est comme mettre à jour un écrin recelant quelques perles rares et délicates que sont ces instants précieux de lecture où l'on s'imprègne de textes ciselés à la perfection par des auteurs qui travaillent le mot, la phrase en forgeant, tels des artisans acharnés, les contes obscurs de notre temps. En maître d'oeuvre discret, Cyril Herry, directeur de la collection, vous propose une autre vision du roman noir avec une déclinaison d'auteurs aux essences particulières à l'instar de Séverine Chevalier et de son premier roman intitulé Recluses.

Il y a tout d'abord cette écriture épurée, presque magique qui oscille entre les instants lyriques et les passages scandés pour nous livrer un texte éclaté en une multitude de points de vue propres aux différents acteurs qui hantent les pages d'un livre où le silence et les non-dits sont autant de douleurs, de regrets et de désespoirs que rien ne peut atténuer. C'est en cela que la quête effrénée de Suzanne devient une cause perdue d'avance qui ne sert qu'à mettre en perspective la vacuité des souvenirs d'une jeunesse disloquée par l‘absence d'un père, la maladie d'une mère et la paralysie d'une soeur. Suzanne s'est donc mise en tête de recueillir tous les témoignages relatifs à la vie Zora Korps pour tenter de saisir l'inexplicable raison de son terrible geste.

Recluses traduit la déshérence psychique et physique de deux âmes esseulées bien trop éloignées les unes des autres pour parvenir à une quelconque résilience mutuelle. L'esprit comme le corps sont bien trop abîmés, mais seule Zia, emprisonnée dans ce corps absent, parvient à le percevoir en promenant son regard lucide, parfois cynique sur cette succession d'êtres désincarnés qu'elles croisent au cours de leur périple.

Récit solide construit sur une délicate dentelle de mots, Recluses égrène dans une narration éclatée, l'introspection bancale d'individus prostrés dans une déshérence de sentiments à l'égard des autres qui les conduisent parfois dans les tréfonds obscurs de l'abîme.

Roman dépourvu de clés narratives et de rebondissements époustouflants, Recluses contraint le lecteur à s'impliquer en s'immergeant dans un texte singulier et rythmé qui impose parfois une image tronquée d'une réalité forcément sujette à la subjectivité des différents personnages qui composent l'histoire. Comme des balises égarées dans ce naufrage de mutisme et de déni, la longue lettre du Dr Shaw, le rapport de police du capitaine Hame et la courte missive d'une détenue apporteront quelques éclaircissements à un ultime document intitulé Recluses. de cette manière, comme enfermé dans cercle infernale, Séverine Chevalier nous contraint à reconsidérer son récit dans la lumière trouble de nouvelles perspectives qui n'apporteront, de loin pas, toutes les réponses, laissant au lecteur une grande part d'interprétation tout en lui permettant de s'imprégner une nouvelle fois dans ce roman bâti sur une succession de sensations, d'images et de lumières que l'auteur égrène dans un style maîtrisé à la perfection, tout comme son second ouvrage Clouer l'Ouest, un autre bijou littéraire à découvrir impérativement.
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Du réalisme, d'accord, un peu, on prend. Une manière particulière de tordre la narration, les mots et le temps, on prend aussi. Il est des livres qui sortent de nulle part et qui vous étonnent à chaque page. Alors que d'autres romans se lovent sur vos genoux et ronronnent, celui de Séverine Chevalier vous brûle et vous glace en même temps. Il ne s'agit pourtant pas de violence ni de compassion comme on en voit si souvent dans les belles-lettres actuellement ou dans la littérature de genre. On est au-delà, hors des canons du polar habituels. Plus que le genre noir, la référence serait le blême, la poussière d'or des chemins de traverse en plus. Car de quoi est-il question? Une jeune femme a mené à terme une opération suicide dans un supermarché. Tout explose. Une autre, qui ne la connaît pas, veut chercher à comprendre, mais dans sa quête de la vérité, elle embarque avec elle sa soeur tétraplégique et muette en l'enlevant d'un établissement spécialisé. Ce qui explose cette fois-ci, ce sont les conventions, les habitudes, les esprits. Les rencontres, les points de vue se succèdent ou s'entremêlent. le style parle de lui-même. Il est désenchanté quand il doit l'être. Amusé sinon. Captivant, toujours. Voix originale et récit palpitant, voilà deux bonnes raisons d'accompagner “Recluses” quelques heures durant.
Jan Thirion
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Recluses est un road-trip, un roman psychologique et noir, tout à fait singulier. Je l'ai dévoré avec enthousiasme, impressionnée par le talent et l'habileté de Séverine Chevalier.

Dans les grandes lignes… mais non, parlons d'abord de voix, et de silences.

Dans ce roman, il y a Zia, enfermée dans son corps car lourdement handicapée, dont la pensée sublime l'ensemble : « Moi je peux tout faire, sauf parler et bouger. A part la tête, un peu. Ma vie se résume à des soustractions. Je n'ai pas besoin de savoir quoi faire de moi. On me meut. On me déplace. On me tire. On me pousse. On m'accompagne. On m'orne. On m'organise. On me met en place. On me nourrit. On me masse. On parle pour moi. Sans moi. En dehors de moi. En moi. Je suis un terrain vague, indéterminable, ouvert à tout vent. »

Elle est embarquée dans un road trip un peu dingue par sa soeur Suzanne. de St-Etienne à Marseille, la Camargue, les Landes puis dans les gorges du Tarn, elles vont croiser des êtres multiples, aux voix disparates. Suzanne, qui a tout perdu quand une jeune fille s'est fait exploser dans un supermarché de la banlieue Lyonnaise.

Suzanne, enfermée dans sa douleur, qui décide de suivre les traces de Zora, la terroriste en robe jaune, à travers la France et les souvenirs. Elle prend le volant en quête de sens. « Je ne sais pas pourquoi on en est là. A ce pont de non-retour. Je sais maintenant, précisément, qu'elle s'est bel et bien détachée, comme l'iceberg. C'est peut-être ça, la véritable errance ». Zora, « transparente et seule », étudiante en management, était-elle enfermée dans un sourire de façade ? Ou l'est-elle dorénavant dans son geste odieux, dans la boucle du traumatisme de Suzanne ?

L'écriture de Séverine Chevalier est tantôt dure, concise, puis soudain elle s'envole. Elle semble avoir émietté l'intrigue aux quatre vents de plusieurs narrations, avant de tout rassembler à la fin, bien serré, pour assommer son lecteur sidéré. La part belle est laissée à l'imagination. Quelques embryons de fausses pistes, des plongées pleines de vertige dans l'âme humaine et des vies cabossées… J'ai pris une grosse claque avec ce roman, je le conseille.

« Je me demande si elle sait que c'est fragile comme du verre, le silence. »

Nota Bene : « […] dans un bon roman noir, il n'y a pas de vérité », nous dit Jérôme Leroy en préambule (Oups tiens, d'ailleurs, effectivement…). Les éditions de la Table Ronde lui ont laissé « Carte Noire », rééditant au sein de la Petite Vermillon « des romans noirs qui méritent de retrouver une véritable audience auprès des amateurs du genre et de prouver aux autres qu'il s'agit là d'une littérature à part entière. ». Quelle géniale idée (et merci !)
Lien : https://lettresdirlandeetdai..
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
La mère fumait près de la fenêtre. Elle fuma et fuma et fuma sans relâche, et finit par tomber malade, comme tout le monde, mais la tumeur ne s'agrippa pas là où on aurait pu l'attendre. Elle se logea dans le sein gauche, le plus maigre, et pourtant le plus tombant.
On le coupa.
(...)
Elle insérait des mouchoirs en papier dans le bonnet gauche de son soutien-gorge, pour que ça sonne visuellement pareil, sous les pulls fins. Ou bien, parfois, quand elle en manquait, du papier toilette rose et rêche. Certains mouchoirs glissaient par en dessous, et on en trouvait de temps en temps par terre, sur le sol en lino gris moucheté de l'appartement. Des mouchoirs bien propres qui auraient pu resservir. On les disposait en tas, en cas de pleurs. Mais aucune des deux filles ne pleurait jamais. (...)
(p. 48-49)
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Elle me parle d'une star, au Japon, dont les innombrables fans se retrouvent en permanence pour commémorer les moindres actions : naissance, première dent, etc. Le pire ce n'est pas qu'elle ne soit pas morte, mais qu'elle n'existe pas. Elle a été créée de toutes pièces, visage et corps dans un remix savant et composite de traits orientaux et occidentaux, biographie ad hoc, événements purement inventés et relayés sur le Net.
[Elle] me dit : « C'est dingue, tu ne trouves pas, d'aimer à ce point des gens qui n'existent pas ? »
Je me demande si ce n'est pas toujours le cas. D'aimer des gens qui n'existent pas. De ne pas aimer les gens qui existent. Si ce n'est pas la condition nécessaire et indispensable pour. Et, quoi qu'il en soit, c'est toujours un peu désolant, les fêtes.
(p. 89)
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Elle avait couché avec quarante-deux types sur soixante-cinq rencontrés. Dans toutes les positions possibles, en évitant les « rencontres sérieuses avec personnes de qualité », avant de tomber enceinte. Cliquer sur des cases au hasard, faire semblant, insister si besoin pour ne pas ajouter de préservatif, pour les sensations.
Elle s'en fichait pas mal, des sensations. Elle s'arrangeait juste pour calculer les moments propices. Elle aurait pu coucher avec n'importe qui, n'importe comment, n'importe où.
Le bon, le fertile, le producteur, elle ne sut même pas lequel c'était. Aucune importance.
(...)
Tout ce qu'elle attendait, c'est qu'il éjacule en elle. Ici, et pas ailleurs. Que ça se propulse, que ça touche la cible. Qu'en elle, tout se fomente de sa vie à venir.
Un bébé, avec tous ses ingrédients de bébé, pour elle et elle seule. A elle purement et simplement dédié.
(p. 22-23)
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J’aurais pu dire pour son compte qu’on pourrait bien chercher un peu plus loin, sous les coupables faciles. Dire que la violence et l’horreur ne viennent jamais de nulle part. Dire que leurs crimes hantent nos cités troubles et qu’il ne suffit plus de leurs lapidations pour les rétablir, les conforter, nos brillantes sociétés. Elles se fissurent, peu à peu, et nous sommes des sourds et des aveugles assoiffés de leur sang, sans chiens ni cannes, tendus et raides, droits dans nos bottes au bord des précipices, incapables de nous regarder en face,
de nous sonder, de retourner la fange de nos ignominies, de nos pensées violentes.
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Moi je peux tout faire, sauf parler et bouger. A part la tête, un peu. Ma vie se résume à des soustractions. Je n’ai pas besoin de savoir quoi faire de moi. On me meut. On me déplace. On me tire. On me pousse. On m’accompagne. On m’orne. On m’organise. On me met en place. On me nourrit. On me masse. On parle pour moi. Sans moi. En dehors de moi. En moi. Je suis un terrain vague, indéterminable, ouvert à tout vent.
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Vidéo de Séverine Chevalier
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- Connemara, Nicolas Mathieu, Actes Sud, 22€ - Reine de cœur, Akira Mizubayashi, Gallimard, collection Blanche, 19€ - Jeannette et le crocodile, Séverine Chevalier, La Manufacture de livres, 16,90€
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