"Mes mignonnettes,
"Vous accrochez pas à vos poules, et vous cramponnez pas non plus à vos oies : quand on peut plus se tenir à la crinière, c'est point la queue qui vous gardera le cul en selle. Donc, que les gélines aussi jouissent de la vie en kolkhoz ! Au printemps, nous commanderons une "cubatrice", laquelle remplace les poules et va nous sortir des cents et des milles de poussins, vu que la "cubatrice" c'est une machine qui vous couve des petits comme personne. Alors, hein, regimbez plus ! D'autant que ça restera vos mêmes volailles, sauf qu'en basse-cour collective. A bas la propriété poulaillère !
Dehors le vent sifflait dans les fils du téléphone. Sur le dos d'un cheval attaché par sa longe à la palissade, une pie trottinait de guingois, tout le long de l'épine dorsale, en picorant. La bise lui retroussait la queue, lui rebroussait l'aile. Obstiné, l'oiseau se cramponnait aux reins de l'antique rosse trop épuisée pour réagir, et promenait alentour un regard cynique de vainqueur.
Le village, c'était pour lui comme un moteur compliqué de construction nouvelle, et il s'appliquait de toute son attention à essayer de le connaître, de l'étudier, de toucher du doigt chaque pièce, de percevoir chaque raté dans la pulsation quotidienne inlassable, haletante de cette ingénieuse machine...
Le Don paisible (en russe Тихий Дон), film de Sergueï Guerassimov récompensé en 1958 par le prix de la mise en scène et le Premier prix au Festival international du film de Moscou. Extrait