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EAN : 9782226484444
Albin Michel (27/09/2023)
4/5   204 notes
Résumé :
Au printemps de 1939, dans ce village du vignoble du Jura, on a vu arriver un réfugié espagnol : Pablo. C'est un homme brisé par la guerre, qui semble avoir perdu même le courage de vivre. Dans la ferme où il est placé, il s'efforce seulement de faire correctement son travail.
Le fils est parti pour la guerre, le père est mort ; Pablo reste seul avec la femme, une fille simple d'esprit et un vieux journalier. Il s'est attaché à cette terre qui lui a redonné l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Bernard Clavel, c'est pour moi l'humanisme à hauteur d'homme, l'humanisme du quotidien que j'ai découvert adolescente dans le roman Miséréré puis dans le petit opuscule le Massacre des Innocents. J'avais envie d'un livre facile à lire, reposant, et quand je suis tombée sur ce livre dans une des rares librairies où je peux trouver des livres en français, je me suis dit, pourquoi pas. Les livres d'occasion portent bien leur nom, on tombe sur des livres auxquels on n'avait pas pensé, dont on n'a même parfois jamais entendu parler et on se dit « tiens, pourquoi pas ? », l'occasion fait le larron. Et un roman de Bernard Clavel me semblait pouvoir être ce livre facile et reposant que je cherchais, c'est-à-dire une histoire basée sur une pensée simple et exaltante, sans être naïve (voilà à gros traits mon idée des livres reposants…).

J'étais curieuse de voir ce que Bernard Clavel dirait sur le Jura, sa région d'origine. Et me voilà donc plongée par inadvertance dans la vie d'un petit village de basse montagne, alors que la Seconde Guerre Mondiale débute. Les descriptions du paysage et du travail de la terre traversent le livre, lui donnant un rythme relativement lent, voire immobile, qui se marie bien avec le sujet et cette vie qui s'égraine comme un cycle au rythme des saisons et du travail qui emplit tout entier et ne laisse pas le temps à la pensée d'errer et de torturer. Je me suis demandée, avec un petit sourire interrogateur, ce que le précédent propriétaire de ce livre, s'il était mexicain, avait bien pu penser de la description du vin jaune et de sa consommation presque religieuse, en tout cas ritualisée, et s'il avait vraiment cru que cela existait, des vins que l'on boit avec des noix et du comté, ou s'il a cru à une affabulation de l'auteur...
Alors voilà cette histoire, celle d'un Espagnol, appelé de manière presque anonyme Pablo, archétype des Espagnols ayant fui leur pays après la défaite de 1936, parce qu'il était du mauvais côté de l'idéologie. Après quelques années dans les camps en France (une réalité que je ne soupçonnais pas et que j'ai découverte récemment dans la bande dessinée L'Art de voler d'Antonio Altarriba), le voilà envoyé comme ouvrier agricole dans une ferme du Jura. Lui le citadin marqué de façon indélébile par la guerre dans son pays se met peu à peu à aimer cette terre, à la comprendre, à s'y couler. le travail physique et la fatigue qui l'accompagne l'empêchent de penser et lui évitent de ruminer les souvenirs qui ne l'ont pas quitté depuis sa fuite et depuis la fin de la guerre. Reprend-t-il goût à la vie comme le proclame la quatrième de couverture, je n'en suis pour ma part pas sûre, mais il apprend à remplir ses jours, à les utiliser, faisant du travail agricole un anesthésiant plus qu'un pansement : « Il savait qu'il n'aimerait plus jamais. Il avait aimé Mariana. Il avait aimé l'enfant qu'elle portait dans son ventre et que la mort avait pris en même temps qu'elle. Maintenant, il n'était plus question d'aimer. Pablo vivait. Il acceptait de vivre, c'était tout. Et il vivait ici parce que le hasard l'avait fait échouer ici. Il s'y trouvait bien. Il ne souffrait ni du froid ni de la faim et la fatigue était devenue pour lui une alliée. Il le savait. Il tenait à elle comme un malade tient au médicament qui calme sa souffrance. » (p. 149, Chapitre 15, Première partie).
Mais la guerre, qui pourtant semblait passer loin de ce petit village en marge de tout, le rattrape, et se pose alors la question de reprendre les armes. Pacifisme, lassitude, lâcheté, chacun donnera le nom qu'il souhaite à l'attitude de Pablo, mais l'on sent un peu de Giono dans cet homme venu du Sud, dans son attitude face à la guerre, lui qui en a vu une en face. Et il se remémore un camarade, « un de ceux qui avaient été tués près de Madrid, au moment où beaucoup avaient vraiment compris ce qui se passait. C'était un homme d'une cinquantaine d'années qui répétait toujours : « Il n'y a qu'une vraie raison de se battre, une seule ; c'est l'espoir que la guerre qu'on fait sera la dernière. Seulement, une fois qu'on sait qu'il n'y aura pas de dernière, qu'une guerre en prépare une autre, alors là… » (p. 394-395, Chapitre 49, Sixième partie).

J'ai beaucoup aimé les deux premiers tiers du livre, là la terre est un personnage aussi important que Pablo lui-même. La fin du livre, depuis l'irruption de la guerre dans le quotidien de Pablo jusqu'à la chute finale m'a par contre semblée moins convaincante, un peu bâclée même pour tout dire, alors que c'est probablement là que Clavel veut mettre l'essentiel de son message pacifiste, et où il fait vivre à Pablo des scènes que lui-même a vécu pendant la guerre et qui ont forgé sa conviction de pacifiste.
Le livre demeure tout de même intéressant, sans être de trop haut vol, juste ce qu'il me fallait de réflexion et de simplicité. Peut-être devrais-je lire plus souvent Bernard Clavel, sans attendre de le découvrir par surprise au détour d'une pile de livres sentant la poussière chez un bouquiniste branché de la Calle Álvaro Obregón !
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De tous les romans de Bernard Clavel (et Dieu sait s'il en a écrit), « L'Espagnol » est pour moi un des plus forts, un des plus attachants, en tous cas un des plus caractéristiques de son auteur : on y trouve à la fois son côté humaniste, son attachement à sa terre natale, et son souci de témoigner sur des êtres que la vie a malmenés et qui cherchent un nouveau départ, à la fois socialement et sentimentalement.
« L'Espagnol », si l'on s'en tient à l'intrigue, ne se différencie pas tellement des « romans de terroir » tels qu'en écrivent (avec bonheur le plus souvent) des écrivains comme Claude Michelet, Christian Signol ou Gilbert Bordes (pour ne citer que trois noms). le terroir, c'est cette terre jurassienne où est né Bernard Clavel en 1923, et qu'il a chantée toute sa vie. le vignoble décrit dans le roman, c'est celui du fameux « vin jaune » aux délicieuses saveurs. Une terre qui est souvent âpre et ingrate quand les circonstances climatiques sont contraires. Et encore plus quand les circonstances politiques s'en mêlent (guerre, exode, résistance…)
Car « L'Espagnol » est aussi un roman de guerre : Pablo le héros, porte en lui « sa » Guerre d'Espagne, avec entre autres drames, la mort de sa femme. Et l'autre guerre est là, avec son cortège d'horreurs, de trahisons, d'engagements et de renoncements. La guerre n'est pas seulement un décor, elle déclenche les évènements privés aussi bien que ceux liés à l'Histoire. Avec bien entendu, toutes les conséquences qu'on peut en redouter…
Et ce serait négliger un grand pan du roman, si l'on omettait de parler de l'amour. Il ne s'agit pas ici de passion, les circonstances font qu'il y a une fatalité qui pousse les êtres à se rejoindre, mais l'amour reste sincère, l'attachement de Pablo pour Germaine, pour Jeannette (surtout pour Jeannette, si fragile), pour ces gens de la vigne, durs, mais pleins de bon sens, pour cette terre d'adoption, enfin, qui devient sa deuxième patrie.
« L'Espagnol » c'est Pablo Sanchez. Avec son ami Enrique, tous deux réfugiés de la Guerre d'Espagne, ils échouent dans un vignoble du Jura, où ils travaillent chez Lucien Bichat, sa femme Germaine, et leur fille Jeannette, un peu simple d'esprit. le travail est dur et éprouvant. Enrique repart. Pablo reste et finit par s'attacher à cette terre et à ces gens qui lui font oublier les horreurs qu'il a laissées derrière lui, en particulier la mort de sa femme. Mais les évènements se précipitent : Lucien meurt, victime d'une attaque, la guerre arrive à grands pas. Les liens se resserrent entre Pablo, Germaine et Jeannette. Mais Enrique revient et entraîne Pablo au maquis… Quand il revient, le fils de Germaine est revenu et veut vendre la ferme. C'est la fin du rêve pour Pablo et Germaine, ainsi que pour Jeannette, placée dans un « établissement spécialisé ».
Un grand roman, où le souffle de l'Histoire bouscule les destinées individuelles. Où on en revient toujours à l'essentiel, la terre, et les gens. C'est un humanisme écologique que prône Bernard Clavel (comme dans la plupart de ses livres), il se place constamment au niveau de ses personnages : ceux-ci n'ont pas d'autre ambition que d'avoir une terre à eux, pour y vivre heureux et en paix. le bonheur et la paix, n'est-ce pas notre souhait à tous ?
Pour les téléphiles, rappelons cet excellent téléfilm réalisé par Jean Prat en 1967, avec Jean-Claude Rolland et Dominique Davray (disponible sur le site de l'Ina).
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Printemps 1939. Pablo et Enrique ont fui la guerre d'Espagne, dans laquelle ils ont tout perdu. Ils se présentent à une ferme jurassienne dans laquelle ils sont attendus pour exploiter le vignoble. Très vite, leurs nouveaux patrons repèrent que le premier est courageux à l'ouvrage, alors que le second évite les tâches. Après quelques jours, ce dernier déclare qu'il part, qu'il veut s'engager pour aller à la guerre, celle qui s'annonce en France. Pablo, lui, préfère rester. le travail de la terre l'aide à fuir ses pensées ; Marianna, sacrifiée sur l'autel de la dictature.

Rapidement, Pablo se rend indispensable. Et c'est tout naturellement qu'il prend en charge la famille quand il devient le seul homme valide de la maison. le patron est mourant et le fils est sur le front. Il épaule la patronne, ne ménage pas ses efforts, il tente de communiquer avec la fille de celle-ci, atteinte d'un handicap et que personne, excepté son père, n'a pris la peine de comprendre, et il apprend de Clopineau, un vieux journalier. Malgré l'approche des Allemands, le jeune homme oeuvre pour protéger les biens de sa patronne. Il s'investit corps et âme dans la propriété, il lui semble avoir trouvé un foyer et une passion : la terre. La vigne le rattache à la vie, alors qu'il n'avait plus d'espoir. Mais la guerre lance un appel…

Dans la première partie, nous ressentons l'amour de Bernard Clavel pour le terroir et le monde agricole. Les descriptions sont magnifiques et poétiques. Elles sont emplies de passion, de respect et de reconnaissance envers les cadeaux de la nature à ceux qui en prennent soin. L'auteur rend, également, hommage, à ces derniers. Il décrit leurs difficultés, leurs joies et leur connaissance du milieu qu'ils exploitent. Ils observent le ciel, le sol et leur environnement, avec lesquels ils vivent en harmonie et au rythme des éléments. Malheureusement pour Pablo, dans la dernière partie, la guerre l'appelle, lui qui ne supporte pas de vivre avec ses souvenirs de la précédente. Les descriptions de ses tourments et de ses peurs sont éblouissantes de sincérité et de véracité.

L'Espagnol est une fresque magnifique de la vie dans les campagnes. Je lui reconnais des qualités immenses, hélas, elles ne correspondent pas à ce que je recherchais. Quand j'étais au collège, j'avais étudié Malataverne de Bernard Clavel et je n'avais pas du tout aimé. Trente ans après, j'avais envie de savoir si ce sentiment était lié à la plume ou à l'étude de l'oeuvre. Malheureusement, même si je perçois la force des descriptions, elles sont trop riches pour moi, ce qui amoindrit mon exaltation. J'ai, cependant, passé un bon roman avec ce roman, superbement écrit, mais cela confirme que les livres de l'auteur ne sont pas pour moi.

Lien : https://valmyvoyoulit.com/20..
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Bernard Clavel L'Espagnol

Ce roman de Bernard Clavel, écrit en 1958-1959, édité chez Laffont en 1959, fera partie de mes coups de coeur 2020. bien que ne faisant pas partie des nouveautés, ce roman évoque de sombres années. Mais il témoigne d'une vie rurale, hélas disparue, où la place des hommes, des femmes était très grande. C'était avant la mécanisation intensive de ce domaine...J'ai lu, il y a de nombreuses années des précédents livres de cet écrivain, dont « Brutus ». Je m'engage même à le relire. Dans ce récit, Bernard Clavel narre l'odyssée d'un taureau, qui suit le cours du Rhône pour rejoindre la Camargue….Je vous ferai une critique le moment venu. Mais trêve de digressions, je dois me cantonner à mon sujet.

Dans L'Espagnol, l'action se situe en France, dans la plaine bressane, au cours des années 1940-1950. Un couple de viticulteurs, les Bichat, Paul et Lucienne, reçoivent deux réfugiés espagnols qui ont ufit leur pays à cause de la guerre civile, Enrique et Pablo, pour pallier à l'absence de main-d'oeuvre due à la deuxième guerre mondiale. le fils, Pierre est mobilisé. La fille, Jeannette est malheureusement handicapée mentale. Enrique et Pablo vont participer aux vendanges. le travail est pénible et Enrique quittera la ferme vigneronne dès le deuxième jour. Il ne peut assurer son emploi. Pablo demeure le seul employé. Il va rapidement s'intégrer à la famille. A l'époque, il existe une grande solidarité dans le monde rural. Les « anciens », hommes et femmes donnent un coup de main à leurs voisins lors des coups de chauffe. Les vendanges se font donc en parfaite harmonie. le patron, Lucien est sujet d'une attaque. Il reste alité et à moitié paralysé. le fils se voit accorder une permission exceptionnelle. Il n'a qu'une hâte : rejoindre le front. … en effet là où il est affecté la guerre est loin. Il passe ses journées à jouer au foot, aux cartes et attend patiemment les colis de victuailles que lui envoie sa famille…
Pablo va seconder son patron. Il se jette dans ces lourds travaux, jusqu'à s'étourdir pour tenter d'oublier ses peines . Pendant la guerre civile qui a dévastée son pays natal, il a perdu son épouse et l'enfant qu'elle portait. Grâce à celui que tous dans le village appelle « le vieux », Chopineau, il sera initier aux travaux agricoles, aux vendanges, à la vinification de fameux « vin de paille ». C'est un bon employé, qui travaille beaucoup et ne craint pas sa peine. La vendange terminée, il sera embauché à plein temps. le patron décède au cours de l'hiver. Il fait si froid qu'il est impossible d'organiser l'enterrement, faute de personnes, et pour creuser la tombe et pour porter le cercueil…
Chopineau et Marguerite, deux personnes âgées résidant dans le hameau constituent une main-d'oeuvre quasi gratuite. Un repas, un verre de vin ce sont les moyens de paiements en vigueur dans cette vie rurale fraternelle, solidaire. Mais ils sont toujours présents. A la suite du décès du patron, Pablo va devenir un véritable agriculteur. de plus c'est un visionnaire. Il incite Lucienne,la veuve, à investir, à acheter du nouveau matériel, à acquérir des terrains jouxtant les vignes et à agrandir ainsi la ferme vigneronne. Mais à la fin de la guerre, au retour du fils qui a été retenu prisonnier en Allemagne , Lucienne sera entièrement dépossédée de ses biens. Elle intégrera le domicile de son fils Pierre et de sa bru, à la grande ville. La ferme sera vendue et Jeannette, placée dans une institution religieuse. Pablo se réfugiera dans une petite maison que Lucienne lui a offert en guise de gages et de rémunération pour toutes les années passées sur le domaine. Une passion amoureuse a même existé entre ces deux êtres, épris de travail. Pablo a participé à la résistance dans le Jura et il a retrouvé Enrique dans le maquis. Et désormais retiré dans sa maisonnette des bois il rendra visite à Jeannette tous les dimanches.
Un très beau roman qui résume la vie rurale, l'entraide, la solidarité, la pénibilité des travaux agricoles d'antan, un hymne à la nature. Beaucoup de poésie, d'humanité, d'humilité, de fierté de ces hommes et des ces femmes qui au travers du temps ont occupé les lieux, accompli leur travail quotidien avec application et sont à l'origine de notre bien-être, de notre confort…
Ce récit évoque également les méfaits des guerres, qu'il s'agisse de la guerre civile espagnole ou de la deuxième guerre mondiale. Les progrès, la mécanisation, la fin des petites propriétés, l'apparition du confort à la campagne, l'exode des jeunes vers la ville, la désertification du monde rural figurent également dans ce livre. Je recommande la lecture de ce volume qui nous permet de nous imprégner dans cette atmosphère d'antan, où vivre en communauté, en bon voisinage, en harmonie les uns avec les autres…. Je le répète, un coup de coeur du au confinement…. Bonne journée à tous.


Lien : https://lucette.dutour@orang..
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l'Espagnol de Bernard Clavel : Je viens de relire ce beau roman de Bernard Clavel :
Pablo, réfugié espagnol à la sortie d'un camp de prisonniers est embauché comme ouvrier agricole dans une ferme du Jura. Il a vécu un drame, traumatisé par la guerre, il a perdu le goût de vivre.
Homme de la ville, il ne connait rien à la terre. Avec l'aide d'un vieil ouvrier , il apprendra à revivre.avec la nature, le travail, les animaux.
On s'attache à son parcours avec émotion.
On retrouve ici tout le talent de B.Clavel, son humanité, la description de la nature, des saisons, la précision des portraits des personnages.
De belles critiques de lecteurs de Babelio, complêteront ce petit descriptif. Un beau livre d'une écriture claire et simple.
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Citations et extraits (24) Voir plus Ajouter une citation
Un roman simple, écrit avec patience et douceur. Comme à chaque fois l'auteur saisit la nature, la décrit, la fait vivre pour montrer à tout un chacun ce qu'elle cache de plus simple et finalement de plus beau. Mené tranquillement, avec justesse et précision. C'est l'histoire simple d'un homme qui fuit la guerre, que la nature aide à rétablir, à retrouver une vie, à oublier un monde qui n'est plus le sien au moins pour un temps. C'est cette nature sage et violente, mais toujours constante qui l'aide à se reconstruire petit à petit. C'est simplement un roman de Clavel comme personne d'autre ne réussit à en écrire.
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Il aimait à l’entendre parler de la terre. D’abord, ce qu’il disait était utile, et puis il y avait le plaisir. Le vieux ne savait guère parler que de la terre, mais, au moins, il en parlait bien. Les mots lui venaient comme une eau claire qui sort d’un rocher. Parfois, il arrivait même à Pablo de l’entendre sans plus faire attention à ce qu’il disait. C’était comme une musique venue d’entre terre et nuit, d’entre ciel et vent. Pablo se laissait aller à rêver, et il se disait que c’était le jour finissant qui l’accompagnait, en lui racontant des histoires. (p. 278, Chapitre 33, Troisième partie).
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Pablo essayait de chasser de sa tête des images d'exode...Il revoyait la frontière, les femmes, les gosses. La faim. Les blessés. Et les morts. Des morts qu'on enveloppait dans des couvertures et qui restaient là, allongés sur le bord de la route. Des morts à moitié nus, la tête enfouie dans la boue des fossés. Des morts desséchés, boursouflés, et d'autres qui semblaient prêts à se lever pour repartir. Et puis d'autres encore, qui continuaient à marcher, s'accrochant aux vivants. Ceux-là, ils avaient vraiment des visages de mort, avec simplement les deux points des yeux qui vivaient encore intensément. Mais, au moment où leurs yeux venaient de s'éteindre, il suffisait de les allonger au bord de la route pour comprendre qu'ils étaient morts depuis longtemps. Ceux-là, la guerre ne les avait pas tués en les frappant; elle les avait rongés, usés, vidés lentement.
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Le vent était partout autour de lui. C'était un de ces vents faibles mais réguliers et d'humeur égale. Un vent comme ces coureurs de marathon qui vont toujours de leur même foulée longue et souple, suivant le rythme de leur respiration bien réglée. Un instant, Pablo pensa que le vent était pareil à ces chiens qui sont toujours dans vos jambes : parfois ils vous agacent, mais quand ils ne sont pas là, on se dépêche de les appeler. On peut tout faire avec le vent autour de soi. On peut passer des jours à travailler, des nuits à veiller ou à dormir ou à faire l'amour.
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Le vieux ne savait guère parler que de la terre, mais, au moins, il en parlait bien. Les mots lui venaient comme une eau claire qui sort d’un rocher.
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