J'ai été un peu ambitieux en me précipitant dans une maison de presse pour acheter ce magazine sur l'évolution des langues dès informé de sa sortie. Je m'attendais (je fais souvent cette erreur) à ce que la connaissance coule fluide depuis les phrases imprimées dans mes petits neurones de moins en moins efficaces.
Mais on a affaire à "Pour la Science", qui ne cherche pas à pré-digérer un savoir abscons et à le régurgiter sous forme d'un sirop sucré à l'adresse d'un public vulgaire et néophyte. Il vaut mieux avoir des notions du sujet quand on ouvre ce magazine. Ce n'est pas mon cas en linguistique; mon niveau de grammaire a même régressé depuis le collège. J'en ai donc plutôt bavé, c'était souvent fastidieux, mais j'ai tenu (yesss!).
On nous présente l'état d'avancement des recherches sur la façon dont les langues du monde naissent, s'épanouissent et meurent, et les nouvelles techniques d'analyse du sujet, par exemple la très visuelle théorie des réseaux qui montre que toute langue amène naturellement à la polysémie (l'existence de mots ayant plusieurs sens) ou la génétique. La plupart font largement débat dans la communauté scientifique et celui qui vient ici chercher des certitudes s'est trompé de chemin (je fais souvent cette erreur).
Mine de rien on apprend beaucoup quand on est néophyte: par exemple la facilité avec laquelle les langues des signes peuvent naître, les langues indo-européennes arrivées en Europe il y a 8000 ans avec l'agriculture (et non pas à coups d'épée), la quantité d'information transportée par une langue indépendante de son débit, le nombre faramineux de langues existantes (6000!), l'existence des langues sifflées, des langues à clic, des langues tambourinées, des langues SMS, etc.
La partie qui ne m'a pas convaincu concerne l'insistance avec laquelle les linguistes insistent sur le drame de la disparition de plus en plus rapide des langues, considérée comme une perte irrécupérable de la culture humaine. Je n'ai pas d'empathie envers l'idée de devoir tout tenter pour sauvegarder les langues vu, comme on nous l'explique, la facilité avec laquelle de nouvelles naissent. Mais j'ai aussi conscience que mon argument est fallacieux. Après tout je suis sensible au souhait de conservation du patrimoine architectural mondial, mais pas de son patrimoine linguistique. Pourquoi? Bonne question. Faut que j'y réfléchisse.
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Le mythe de Babel, connu à l'intérieur des croyances judéo-chrétiennes, était fondé sur l'idée que les réalités observables de la parole humaine, en matière de communication, étaient le résultat de l'orgueil humain, destructeur de la parole unique de Dieu... L'existence de nombreuses langues différentes, bloquant l'harmonie universelle de l'humanité, reflétait alors l'imperfection humaine face à la perfection unitaire du Dieu monothéiste.
Ce mythe angoissant de l'incommunicable agit peut-être encore pour stimuler des hypothèses par ailleurs rationnelles sur l'origine des langues. L'idée d'une langue originelle unique, contredite par toutes les données de la science de la préhistoire, est en effet plus rassurante que celle d'une infinité d'adaptations dans des groupes différents.
(Alain Rey, article "De la pluralité des langues)
Au village d'Al-Sayyid, dans le désert du Néguev, en Israël, 150 sourds vivent et utilisent une langue des signes qui est propre à cette localité et que pratique également une fraction importante de la population bien entendante du village, qui s'élève à plus de 3500 individus.
Les langues se distinguent notamment par le débit de la parole. Cependant, plus ce débit est rapide, moins chaque syllabe véhicule d'information. Ainsi, quelle que soit la langue, la vitesse de transmission de l'information est quasi constante.
Environ 96 pour cent des langues du monde seraient parlées par seulement trois pour cent de la population