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EAN : 9782760509986
Presses de l'université du Québec (03/05/2000)
3/5   4 notes
Résumé :
Quelle est la représentation que le monde arabe se fait de l'Occident ? En retraçant les principaux événements historiques ayant eu un impact décisif sur cette perception, en identifiant le moment historique où l'on a pris conscience de l'existence de l'Occident et en relatant les phénomènes d'idéalisation et de rejet de cet autre monde, l'auteur, comme bon nombre de ses contemporains, nous renseigne sur l'étendue du débat tout en soulignant le désir de dialogue, ou... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
La vision qu'a l'Occident du monde arabe, on la connaît. On est passé depuis quelques années des enturbannés chargeant à dos de chameaux entre les palmiers et les danseuses du ventre aux terroristes assoiffés de sang. L'auteur propose cette fois-ci de passer de l'autre côté du miroir en décrivant les différentes visions qu'a le monde arabe de l'Occident.

Dans l'ensemble, la théorie du choc des civilisations domine largement les discours. Les deux blocs sont considérés comme des ennemis héréditaires, s'affrontant depuis la nuit des temps : les croisades, la conquête et re-conquête de l'Espagne, voire même l'invasion d'Alexandre le Grand reviennent fréquemment dans les discours officiels. Dans les exemples plus modernes, Israël cristallise toutes les rancoeurs : l'Occident continue d'envahir, de coloniser au mépris de toute justice.

Cet Occident, malgré tout, fascine. Son avance dans le domaine technologique force à reconnaître qu'il a mieux fait quelque chose que les autres. Reste à déterminer quoi ! Les dirigeants forçant leur peuple à une occidentalisation rapide ont fait leur temps, mais déterminer ce qui est à emprunter et les traditions qu'il faut conserver à tout prix est une tâche qui fait toujours débat, et varie selon les différentes sensibilités politiques.

Car au final, ces deux grands blocs « Occident » et « Orient » ne sont que des concepts assez grossiers qui masquent la complexité de chaque région. L'auteur regrette de ne pouvoir s'en débarrasser. Ces deux idées ont tellement imprégnés les mentalités que même les intellectuels qui tentent de les dénoncer finissent toujours par replacer des « L'Occident ceci » et des « Orient cela » un peu plus tard dans leur discours.

Il faudra beaucoup de courage de part et d'autre pour laisser tomber ces fantasmes, qui ont l'avantage de simplifier les discours, mais ne rendent pas hommage à la diversité des mentalités et placent des barrières infranchissables entre les peuples.
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L'auteur fournit un travail très personnel, guidé par son inspiration propre, qui l'amène à évoquer l'"Occident" qui peuple ses idées, sans le définir, au nom d'une communauté humaine tout aussi floue, la "conscience politique arabe". Cette expression serait la meilleure pour désigner ce sur quoi l'auteur souhaite disserter, mais sans qu'il soit en mesure de détailler ce qu'elle signifie : on sait seulement que "c'est un concept assez vaste pour incorporer les facteurs non arabes qui ont eu un impact sur cette conscience". On ne sait donc pas quelle est cette conscience qui potentiellement s'éveille chez tout habitant du monde, ce qui présage d'un travail tout de même assez ambitieux. Une citation, toujours en introduction révèle qu'"Occident" désigne "Alger, Tripoli, Oran et Grenade" et dans le premier chapitre, "Europe" remplace parfois "Occident" sans que cette permutation soit explicitée, ni détaillée les raisons du glissement entre l'Afrique du Nord et l'Europe. L'auteur emploie très souvent le personnel "nous" ("notre" civilisation), sans que l'on comprenne qui est ce "nous". On ne comprend pas davantage qui est ce "eux".
Enfin, toute énonciation est systématiquement suivie d'une modulation, voire d'une contradiction, ce qui multiplie les paradoxes et contribue à perdre le lecteur dans le "labyrinthe" des pensées de l'auteur où le "fil d'Ariane", pour reprendre son image, est introuvable.
Pour résumer, l'impression dominante est que l'auteur n'est pas parvenu à dépasser l'imaginaire qui l'habite mais qu'il se contente de décrire par des citations puisées au hasard de sa bibliothèque la "vision" (selon ses termes) clivante qui hante ses pensées. On perçoit une volonté chez lui de ménager les susceptibilité et de prôner la fraternité, mais malheureusement l'imprécision du travail pourrait bien au contraire véhiculer des certitudes et des principes de scission du monde qui s'éloignent de l'approche consensuelle qu'il défend avec ostentation.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
À force de nous répéter que l’Orient et l’Occident existent et de les représenter, nous les avons laissés envahir notre conscience. À force de nous sentir agressés au nom de l’Occident, nous avons laissé l’Occident s’établir dans notre haine. À force d’espérer en ses réalisations, nous avons laissé l’Occident occuper nos rêves. Bref, que nous soyons ses complices ou ses adversaires, que nous l’exaltions ou le rejetions, nous ne cessons de renforcer l’image d’un Gharb apparemment incontournable. Est-il possible de vivre un jour libéré de l’omniprésence de l’image de cet Occident ? Il est peut-être utopique de vouloir se débarrasser d’images et de jalons si fermement ancrés dans nos mémoires collectives, mais on peut au moins prendre conscience de l’ampleur de leur emprise sur notre vision de l’Autre et, finalement, sur notre vision de nous-mêmes. Une chose est claire, les images préconçues jointes à la dichotomie globalisante et réductrice du couple Charq/Gharb sont un handicap de taille à la formation d’une vision différente des rapports entre les peuples et entre les individus. Dans ce contexte, la dynamique d’observation directe, de dialogue et de débat est l’avenue que nous choisissons vers la Rencontre avec l’Autre, du moment que cette rencontre est, qu’on le veuille ou non, devenue omniprésente, et dans l’espoir qu’il soit possible de dépasser les limites qui caractérisent la Rencontre que nous avons examinée dans cette étude.
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Les images qui marquent notre conscience sont les seules réalités qui comptent, car [...] elles sont vivantes aujourd’hui. Ces images sont la réalité du moment et, dans notre imaginaire, l’idée d’un Occident unitaire et monolithique triomphe et demeure intacte. Un Arabe peut être informé de la présence de groupes qui s’opposent à la politique dominante dans al-andhima al-gharbiyya (les régimes occidentaux) pour ensuite les noyer rapidement dans le magma d’Al-Gharb [L'Occident]. Même à Bagdad où, en 1992, la télévision montrait chaque jour les manifestations hostiles à la guerre de certains groupes à Paris ou à Montréal, les médias dans leur ensemble ne pouvaient résister à la tentation de revenir sur l’usage du terme globalisant d’Al-Gharb.
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Dans une section intitulée Al-‘arab wa Al-Gharb (les Arabes et l’Occident), ‘Aflaq affirme que « L’Occident à repris le contact avec les Arabes lors de la campagne de Bonaparte ». Cela laisse supposer que le contact existait auparavant et qu’il a été rompu à un moment de l’histoire. Le message qui est livré au sujet de ce contact est un message de condamnation. Une condamnation qui vise aussi bien Napoléon que « les leaders locaux mais étrangers à l’arabité » et donc complices (al-rou’assâ’ al-doukhalâ’ ‘alâ al-’ouroubâ) :

« Depuis que ce malin [Napoléon] a associé des versets du Qour’ân aux concepts des droits de l’Homme, les Arabes [ou leurs leaders étrangers à l’arabité] poussent leur renaissance moderne dans cette fausse direction. Ils s’épuisent et épuisent leurs textes historiques et leur Qour’ân pour démontrer que les principes de leur civilisation et de leur croyance ne diffèrent pas des principes de la civilisation occidentale et même qu’ils étaient les premiers à les déclarer et à les appliquer. En faisant cela, ils se présentent à l’Occident comme un accusé qui reconnaît la justesse des principes occidentaux et leur prééminence. La conquête de la raison [al-‘aql] arabe par la civilisation occidentale vient à un moment où le tarissement de cette raison a atteint un degré tel qu’elle ne représentait plus que des moules vides prêts à recevoir cette civilisation et ses composantes... Le colonialisme européen [à noter le glissement terminologique d’Al-Gharb au colonialisme de l’Europe] a profité de la sclérose qui frappait la mentalité arabe et de son incapacité à créer pour lui imposer sa propre interprétation des concepts universels. Ainsi, nous n’avons pas de querelle avec les Européens sur le principe même de liberté, mais sur le fait qu’elle est réduite à ce que les Européens entendent par liberté.

L’Europe aujourd’hui, comme hier, a peur de l’Islam. Mais, elle réalise que la force de l’Islam (qui représentait, dans le passé, la force des Arabes) a resurgi dans le nationalisme arabe contemporain. Voici pourquoi l’Europe pointe toutes ses armes vers ce nationalisme et n’hésite pas à se lier d’amitié avec les tenants de la forme passéiste de l’Islam, à laquelle elle offre son soutien. Avec le tafarnorj graduel de l’Islam a-nationaliste et universalisant [al-oumami], réduit à l’adoration superficielle et aux généralisations banales, les nationalistes finiront par jouer le rôle des uniques défenseurs de l’Islam et devront lui donner un sens nouveau s’ils veulent que la nation arabe ait toujours une bonne raison d’être. » (pp. 118-119)
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Une section est réservée à « la catastrophe que représente la sujétion à l’Est ou à l’Occident » dans laquelle l’ayatoullâh dit : « Le colonialisme est un complot, parmi tant d’autres qui a laissé à ses victimes un héritage lourd de conséquences ; notamment, le problème identitaire qui fait qu’elles sont devenues éblouies par l’Occident et par l’Est au point de se dévaloriser elles-mêmes... » Bref, il dénonce le complexe d’infériorité « qui fait de la sujétion à l’un de ces deux pôles mondiaux une nécessité inévitable » pour ensuite se lancer dans un exposé des conséquences du colonialisme et une critique de la situation actuelle chez les victimes qui seraient :

« En proie au sous-développement, et transformées en sociétés de consommation qui ne valorisent que les produits des diverses industries occidentales ainsi que ceux de l’Est. La situation étant la même dans le domaine de la culture et de l’éducation où notre éblouissement par la culture de l’autre et par son éducation nous pousse à un mimétisme absurde et non réfléchi. Même nos enfants sont fiers de leurs prénoms occidentaux et sont embarrassés de leurs prénoms traditionnels... il en va ainsi pour les noms des rues, des ruelles, des commerces, des pharmacies, des bibliothèques publiques, des tissus... tout ce qui est production locale doit se trouver un nom étranger pour être acceptée. Ainsi, tout ce qui est traditionnel et local devient synonyme de réactionnaire et d’arriéré. »

Face à cette situation, le guide suprême de la révolution recommande « de sevrer la sujétion, de compter sur soi-même et de se fier aux expertises locales auxquelles la guerre imposée et le siège ont donné l’occasion de faire leurs preuves avec succès ». Une autre section est intitulée « L’Islam rejette le capitalisme sans limites ». Ici, et après avoir dénoncé la propagande qui s’applique à disséminer une image contraire de l’islam, il affirme que l’islam ne peut accepter « un système capitaliste à l’occidentale comme ceux qui prévalent aux États-Unis et en Grande-Bretagne ainsi que chez les autres brigands occidentaux ». En réalité, nous dit Al-Khoumayni, « l’islam est un système équilibré qui reconnaît le droit à la propriété privée mais avec des limites, de façon à favoriser une économie saine et à réaliser la justice sociale... alors que le système capitaliste occidental est injuste et voleur ». (p. 113)
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