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EAN : 9782364370036
430 pages
Diane de Selliers (18/10/2012)
4.51/5   35 notes
Résumé :
Le Cantique des oiseaux, poème écrit en persan à la fin du siècle, chante le voyage de milliers d'oiseaux en quête de Sîmorgh, manifestation visible du Divin. La huppe, messagère de Salomon, les guide et les encourage en leur racontant des histoires de sagesse puisées parmi les classiques de la littérature profane ou inspirées du Coran. Chef-d'oeuvre de poésie mystique, Le Cantique des oiseaux est un récit initiatique : chacun peut voir dans les oiseaux le reflet de... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
De la littérature persane, chacun connait de près ou de loin les Mille et une nuits, contés nuit après nuit par la rusée Shéhérazade afin d'échapper au destin funeste que lui réserve son époux, le sultan Shahryar. Inspirés de la plus pure tradition orale, ces contes font appel à l'imaginaire collectif et populaire afin d'enseigner et de divertir. On retrouve chez ‘Attâr un même procédé littéraire qui consiste à imbriquer les récits les uns dans les autres et à les mettre en miroir afin d'en souligner l'unité et le sens profond. En revanche, son ambition littéraire et sa volonté d'enseigner au lecteur sont beaucoup plus marquées et affirmées.

Ecrit au XIIème siècle, « le Cantique des oiseaux » est un long poème mystique composé de 4726 vers. On y retrouve l'imaginaire fantastique et merveilleux des contes et celui, plus mythologique, inspiré des légendes. Les références religieuses sont omniprésentes et pour cause, puisque le poète ‘Attâr tend à rendre gloire à la toute-puissance de l'Eternel dans cette parabole mystique qui s'inspire d'épisodes tirés à la fois du Coran et de la Bible.

Il nous conte ainsi la quête longue et dangereuse de milliers d'oiseaux qui, guidés par la huppe, vont devoir traverser les sept vallées, placées chacune sous un sceau, celui du Désir, de l'Amour, de la Connaissance, de la Plénitude, de l'Unicité pure, de la Perplexité et pour finir celui du Dénuement et de l'Anéantissement, s'ils veulent espérer rencontrer la majestueuse Sîmorgh, l'être suprême parmi les oiseaux. Pour parvenir à leur but, chacun va devoir se libérer de toutes ses attaches terrestres et s'oublier lui-même afin d'élever son âme et d'accéder au royaume céleste. Mais le doute et la peur ne cessent de réapparaître au cours de leur long voyage et c'est à travers des fables et des paraboles que la huppe parvient peu à peu à purifier le coeur des plus téméraires, jusqu'à leur permettre d'atteindre l'extase suprême…

A la fois grand classique de la littérature persane et grand manifeste soufi, « le Cantique des oiseaux » est un récit initiatique sublime et puissant, véritable ode à la gloire divine. La poésie de la langue se mêle avec délice à celle des images. Paraboles, métaphores, allégories se succèdent pour dépeindre avec la plus grande pertinence un état d'âme, un trait de caractère ou une passion dévorante. Tout est magnifiquement imagé, jusqu'au texte illustré par des tableaux, des gravures et des représentations empruntés à l'art arabe qui permettent de mettre en lumière avec beaucoup de finesse et d'élégance certaines scènes du poème. A souligner à ce propos le magnifique travail d'édition de Diane de Selliers qui a su conserver les couleurs chatoyantes et la splendeur des oeuvres des artistes de l'époque.

« le Cantique des oiseaux » a donc été pour moi une étonnante découverte. J'ai été complètement séduite par la traduction de Leili Anvar qui rend à merveille la poésie et l'harmonie du texte. En revanche, et ‘Attâr lui-même le dit très bien vers 4511 :

« Mon oeuvre porte en elle une vertu étrange
C'est que plus tu la lis, plus elle est généreuse
Plus tu pourras la lire, sans cesse y revenir
Et plus à chaque fois tu goûteras ses mérites »

Ainsi donc, de par sa forme et ses nombreuses références historiques, littéraires et religieuses, « le Cantique des oiseaux » est un ouvrage dense et ardu pour les non-initiés, dont je fais partie. Un texte qui se goûte, s'apprécie, se digère et qui demande une certaine patience avant de se révéler et de se laisser approprier, temps qui m'a malheureusement manqué en raison des délais convenus par le partenariat. Il est frustrant d'avoir l'impression d'être passée à côté de tant de choses lors de cette première lecture et ce, malgré les nombreuses notes explicatives particulièrement passionnantes que l'on trouve à la fin du poème. La préface, quant à elle, est tout aussi riche et intéressante et permet de remettre l'oeuvre et son auteur dans leur contexte. C'est donc un ouvrage vers lequel je reviendrai, souvent, dans l'espoir d'en apprendre chaque fois un peu plus…

Je tiens à remercier vivement Babelio et les éditions Diane de Selliers pour ce partenariat des plus enrichissants !
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Connaissant la qualité exceptionnelle de son ouvrage sur Malek Jan Nemati et de la traduction de Paroles de Vérité, cela faisait longtemps que je voulais lire le Manteq ol-Tayq d'Attâr et profiter la traduction en français par Leili Anvar aux éditions Diane de Sellier. Cependant, si l'on veut une version du Manteq ut-Tayr correspondant plus au texte en persan, je crois que qu'il faut se diriger vers le Langage des oiseaux, par Manijeh Nouri, aux Cerf (2012) : https://www.placedeslibraires.fr/livre/9782204096362-le-langage-des-oiseaux-manteq-ut-tayr-farid-ud-din-attar/ (à ne pas confondre avec celle adaptée par Gougaud). M. R. S. Kadkani, auteur de la dernière version savante de référence en persan, sur laquelle L. A. dit elle aussi se fonder, dit d'ailleurs dans la préface à l'édition critique de M. N. (Cerf) « louer et estimer » ce travail « fiable ». Il faut remercie L. A. d'avoir entamé ce travail à une époque où il n'y avait pas d'autre traduction en français, mais entre temps celle de M. N. est sortie.
Cette édition de Diane Sellers réussit plutôt dans ses très belles illustrations et aussi peut-être que si l'on ne connaît pas l'univers de la poésie iranienne, le style en alexandrins peut donner à certains une meilleure idée de la conjonction entre forme et fond que l'on trouve en persan, quitte à sacrifier une partie du fond ; pour ma part, je n'ai pas aimé la forme, mais c'est une appréciation très personnelle. Je crois qu'en anglais, Sholeh Wolpé, poétesse, réussit à mieux concilier forme et fond, mais peut-être que l'anglais permet cela plus naturellement du fait de sa plus grande souplesse sonore. Cependant, cela signifie que peut-être la meilleure manière de découvrir Attâr si le style est important à cette découverte est de le lire en anglais avec Sholeh Wolpé.
Aussi, je lisais récemment qu'une bonne traduction est celle où le traducteur s'efface devant ce qui est traduit, où il se fait oublier. Or, justement, j'ai tenu la lecture un moment, mais à force la « présence » de la traductrice était de plus en plus visible, jusqu'à ce qu'il devienne trop manifeste que je ne lisais pas Attâr, mais que je lisais L. A. qui lit Attâr. La plupart des problèmes s'expliquent peut-être par la volonté de traduire en quasi-alexandrins, mais je n'ai pas trouvé le texte agréable ou avec du « souffle » (je connais la poésie persane en même temps). En tout cas, il faudrait alors mettre beaucoup plus en avant qu'il s'agit d'une traduction sous les contraintes de l'alexandrin.
Il y a déjà le problème du sens choisi pour les textes. Pour le peu que j'ai essayé de comparer avec le persan, je crois que l'auteur traduit des textes ayant potentiellement plusieurs sens avec un sens très précis qu'ils peuvent avoir, sachant qu'il faut alors comprendre le bon sens précis que peut avoir le texte français. Alors que, pour ma part, je crois qu'un texte polysémique doit être traduit au possible par un texte aussi polysémique, afin de garder la richesse du texte originel et de permettre au lecteur de se l'approprier. Par exemple, la première ligne du corps du texte (vers 617). M. N. traduit exactement ce que dit le texte très clair en persan « Toi qui fus en vérité la messagère de chaque vallée » L. A. traduit par « Toi en chaque vallée messagère du Vrai ». On peut estimer que c'est la signification du texte (je ne pense pas), mais ce n'est pas ce qu'il dit. Et parfois, ces libres interprétations sont vraiment problématiques. Par exemple, le vers 1640 de L. A. parle des vents d'un « Dieu jaloux » pour un mot qui signifie avant tout Celui qui se suffit à lui-même (et c'est quelque chose de proche de cela que l'on trouve dans la traduction de M. N.). On m'a dit que le mot original peut effectivement avoir le sens d'exclusivité avec sa racine arabe. Et je vois sur internet que l'expression « Dieu jaloux » semble exister dans la tradition chrétienne et peut-être que la traductrice pense ici à un public pour qui cette expression serait familière. Mais on peut comprendre tout à fait autre chose en français, alors même que le « bon » sens ne semble pas l'unique sens en langue persane.
L'exemple est d'ailleurs très significatif car on croit clairement voir la volonté de christianiser le texte d'Attâr. Dans sa traduction en anglais, Sholeh Wolpé semble dé-islamiser le texte : le mot islam semble plutôt caché, elle dit dans l'introduction ne pas utiliser le mot Dieu qui n'est pas compris tel que ce désigne Attâr, et je ne pense pas que ces choix sont critiquables, d'autant plus qu'ils sont très explicitement annoncés (l'introduction de L. A. est d'ailleurs lacunaire sur les orientations intellectuelles choisies). Elle veut rendre à un certain public le sens de ce qui voulait dire Attâr dans un contexte et une époque spécifique, et à ce titre l'islam et le mot Dieu peuvent être considérés comme des détails. Mais christianiser est bien autre chose. Dans l'exemple de Dieu jaloux, d'autant plus si l'on n'a aucune idée sur l'islam et le soufisme, on peut comprendre qu'Attâr attribue à Dieu un des défauts humains les plus délétères, tels les dieux des légendes de la Grèce antique, que l'on retrouve un peu dans la Bible. D'ailleurs, christianiser ne correspond pas, à mon avis, au public occidental actuel, en général très peu impliqué dans ces mythologies chrétiennes. le problème est réel car on ne parle pas de la traduction d'un roman policier, mais de ce que les gens croiront être de la plume de pas n'importe qui et dans pas n'importe quel ouvrage.
La première ligne de la traduction (vers 0) est aussi problématique et est un élément du problème de l'orientation féministe de la traductrice, féminisme tout à fait positif en général mais dont on peut discuter la place qu'il a ici. Que Simorgh s'accorde au féminin, soit, c'est probablement la meilleure option. Mais il y a une trop grande insistance, avec par exemple « la Simorgh » (vers 714). Sholeh Wolpé, elle, n'a pas à choisir en anglais, mais elle va plus loin et insiste dans son introduction qu'elle se passe à dessein de mots désignant un homme ou une femme, puisque Dieu n'a pas de sexe, et je crois qu'il faudrait faire cela au possible, ce qui ressemble à ce que fait Henry Corbin. Quant à la première ligne (bismillah…), outre la volonté de féminiser à tout-va, la traductrice la justifie en présentant sa traduction comme un juste milieu avec la traduction d'André Chouraqui… qui est tout à fait déraisonnable et donc dont la moitié n'est pas raisonnable non plus. Que la traductrice vive cette formule ainsi, c'est tout à fait respectable, mais ce n'est pas en soi ce que dit l'arabe.
Parfois, la traduction est étrangement trop vague. Par exemple, vers 3188, L. A. traduit par « sainte soumission », influence chrétienne mêlé d'une volonté de faire un effet de style peut-être, alors que S. W. par « worship of angels » et M. N. par « prière des êtres célestes », qui sont des traductions bien plus fidèles. La traduction en anglais semble néanmoins en général moins littérale, mais S. W. justifie de manière convaincante et en toute humilité ses choix dans l'introduction. Il faut dire néanmoins qu'une « traduction » du texte fait encore pire que celle chez D. de S. C'est celle « adaptée » par Gougaud à partir d'une traduction de Manijeh Nouri (ce qui brouille encore plus les pistes). Vers le vers 1805, on voit qu'une sainte est « indisposée » dans la traduction de L. A. Connaissant un peu la tradition islamique, je supposais ce que cela signifiait, mais je n'étais pas certain s'il s'agissait d'une envie d'uriner, de règles ou d'une maladie. La note m'a clarifié la chose, mais elle ne donne pas de réponse explicite et je ne suis pas certain que même avec la note ce soit clair pour un lecteur qui ne connait pas le judaïsme ou l'islam. Pourtant, le persan est très clair. Mais la version de Gougaud fait pire : on y lit que les femmes n'ont pas (jamais) le droit d'entrer dans le lieu saint islamique (la Ka'ba) ! Ce qui est tellement faux qu'une femme sainte y a donné naissance. Les traductions de M. N. et S. W. donnent une version simple et claire et il n'y a rien de honteux à ce que les femmes, y compris saintes, aient des règles.
Et puis, il y a un problème de style. le style de L. A. est lourd à mon goût, et cela vient, je crois, de la tendance à être trop compliqué, dans les mots ou la structure des phrases, même lorsque le persan original semble simple et clair. Accumuler les mots et les tournures compliqués ne crée pas de la haute littérature. Cela m'avait fait d'ailleurs croire au début que je n'aimais pas le texte d'Attâr, jusqu'à ce que je comprenne que le problème vient du français de la traductrice. Concernant les mots, dans une traduction de Mollâ Sadrâ, il serait normal d'avoir des mots précis et compliqués, mais en poésie sans rimes, même si cela s'expliquait par la volonté d'utiliser des quasi-alexandrins, l'utilisation de mots artificiellement soutenus et de tournures de phrases compliquées, même lorsque l'original est simple et clair, sont loin à mon sens de faire vivre l'aspect poétique du texte. le style de S. W. semble au contraire excellent, et d'ailleurs ses magnifiques premières lignes sur l'art de traduire dans l'introduction montre son talent de poétesse. de ce que j'ai pu voir, celui de M. N. semble bon, simple et efficace. En plus, le fait de mettre abondamment en note en bas de page (et non de fin de livre) des explications de sens mais aussi les mots persans nous laissent percevoir le persan derrière le français et donc nous laisse être au plus près d'Attâr et le cas échéant comprendre les multiples sens possibles des expressions.
Néanmoins, les notes en fin de livre de L. A. contiennent des commentaires intéressants qui ne se trouvent pas dans l'édition critique de M. N.
« Last, but not the least », le travail de la maison d'édition est à revoir (j'ai l'édition illustrée souple de 2016). Certes, il est très agréable d'avoir les illustrations mais à quoi sert d'avoir la cerise si l'on n'a pas le gâteau ? Il n'y a pas de table des matières. J'ai eu entre mes mains un certain nombre de livres, des cinq derniers siècles d'ailleurs, je crois n'avoir jamais eu de livre sans table des matières (sauf lorsqu'il s'agit d'un beau livre avec peu de texte, un glossaire, ou une chose de ce genre). Avec un livre dont la structure est si importante, avec tant d'histoires imbriquées, à quel moment on se dit qu'il est acceptable de ne pas avoir de table des matières ? D'autant plus qu'on est souvent perdu dans l'histoire et qu'en plus la version illustrée (avec des textes de commentaires des illustrations) fait que les morceaux de textes de l'ouvrage sont dispersés. J'ai plusieurs fois re-cherché la table en me disant que j'ai dû mal regarder (ou simplement par réflexe prolongé en oubliant qu'une telle chose puisse exister, un livre sans table des matières), mais non (ou un « ah oui c'est vrai, pas de table »). Cela avec les titres qui ne suivent pas les titres courants persans (ce qui n'est pas une critique) et au fur et à mesure que je me méfiais de traductions de certains vers et voulait regarder, j'ai passé un temps fou à retrouver les passages en persan. Jusqu'à ce qu'à un moment, j'ai décidé d'arrêter les frais avec cette édition-traduction. J'ai alors commandé ce qui était mon second choix, la traduction en anglais de Sholeh Wolpé (sans avoir vu la traduction de M. Nouri), et là, non seulement, il y a une table des matières mais encore au début de chaque partie il y a la table de la partie. Parce que la structure est, au moins pour un lecteur contemporain, fondamentale, et cette traductrice éditrice l'a compris. Tout ceci alors que la traduction date de 2012 et que j'ai une réédition de 2016. Concernant l'éditeur, il faut aussi noter que l'on passe son temps à compter les lignes pour y faire référence, puisqu'il n'y a pas de numérotation en début de section mais en début de pages (alors que M. N. numérote tous les vers).
En fin de compte, entre les deux dernières traductions françaises, les introductions montrent une optique assez différente. Celle de M. N. est une traduction de qualité universitaire, avec une introduction dans laquelle l'auteur réfléchit de manière universitaire à sa démarche. Elle explique aussi sa démarche à la radio : https://www.franceculture.fr/emissions/cultures-dislam/des-oiseaux-qui-parlent . Cependant, malheureusement, la traduction de M. N. a une très faible visibilité en ligne, et donc fait l'objet d'un très mauvais marketing. Sur Place des Librairies, on ne trouve même pas l'ouvrage si on met le nom de la traductrice, il faut taper le titre. La multiplication des titres avait fait noyer dans mes recherches l'existence de cette traduction de référence. Sans compter le parasitage de l'« adaptation » de Gougaud à partir d'une traduction de M. N. Ce n'est pas parce qu'il s'agit de spiritualité qu'il ne faut pas faire attention aux opérations marketing des maisons d'éditions, bien au contraire. Les Éditions Diane de Selliers ont, à mon avis, pris un traducteur avec une forte notoriété, font un bel emballage, utilisent un titre qui plaira à un certain milieu (puisqu'il évoque la Bible), font une édition initiale (épuisée en français) très onéreuse (couverture carton) et donc créent l'effet Veblen (plus c'est cher, plus on croit que cela a de la valeur).
Qu'une personne qui suscite la sympathie comme L. A. publie sa lecture personnelle en alexandrins d'une grande oeuvre, c'est faisable et intéressant, mais alors il faudrait le présenter ainsi.
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C'est un livre, un gros livre qui recueille un long poème qui mélange épisodes religieux et l'histoire des oiseaux qui doivent affronter diverses épreuves pour se libérer et se découvrir à Dieu.
C'est donc un livre qui se veut initiatique, qui cherche à donner des leçons dans un souci de libérer l'homme de son malheur et de le rendre meilleur. Cela est beau, c'est un fait l'intention est louable, mais la trop grande présence de la religion m'a bloquée dans le voyage que j'ai finalement fait d'une manière quasiment superficielle. En effet, le fait que l'homme doit automatiquement passé par Dieu pour être libre et beau me dérange énormément, tout comme l'idée qui veut que Dieu soit à l'essence de toute chose, et ceci même si le texte date du 12ième siècle.
En fait ce n'est pas une surprise de voir la trop grande présence de Dieu ici, ce texte est à forte tendance soufisme donc c'est logique, mais pour la personne du 21ème siècle et l'athée que je suis j'ai malgré tout eu du mal à faire l'impasse sur mes sentiments et me plonger dans ce livre entièrement sans rire de cette naïveté divine. Honnêtement je pense que c'est une épreuve de le lire pour quelqu'un qui croit que la nature humaine peut arriver à être libre et parfaite sans Dieu. Mais j'ai tenté.
Outre cela ce livre est quand même très beau à lire, il est évident que le but, même si je déplore Dieu et parfois la manière et la solution, est tout à fait honorable. Cela étant c'est vrai qu'il est un peu dur à lire, car il est rédigé entièrement en vers et en plus il est très long. Ce n'est vraiment pas un livre qui se lit comme un roman, comme toute poésie il faut du temps, des pauses, et je pense aussi un certain état d'esprit (que je n'avais probablement pas ( ?))

Là je parle de l'écriture, mais à regarder ce livre est magnifique. Alors je ne suis pas forcément fan de tous les dessins, car ils ne sont pas forcément tous bien dessinés surtout si on compare avec l'art occidental à certaines époques (l'inverse peut marcher aussi), cependant j'ai retrouvé une forte influence chinoise dedans qui m'a beaucoup plu, qui m'a invitée aux voyages et aux merveilles - même si aucun art au monde ne surpassera pour moi l'art chinois.
En fait, le fait que les dessins soient vieux fait déjà tout le charme même si imparfait. En effet ses dessins sont déjà des trésors par leur âge et je ne peux que remercier les éditions Diane de Selliers de les faire découvrir et d'en orner ce livre, et ainsi d'en faire son écrin. Surtout qu'ils sont accompagnés de petites histoires très instructives.

Bref. Je ne suis pas certaine d'avoir parlé de ce livre comme il le fallait, un certain point de vue personnel me l'a gâché, mais pour sa culture, par curiosité ou autre, il est à lire.

Je remercie les éditions Diane de Selliers et Babelio.
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Chef-d'oeuvre de la spiritualité soufie ( branche mystique de l'Islam) le Cantique des oiseaux est écrit en 1177 par Farîd od-dîn Attâ, poète apothicaire de Nichapur en Iran actuel.
Le soufisme est fondé sur les principes de la sagesse universelle plutôt qu'une théologie stricte et c'est dans ce sens que l'envie de lire Attâr m'est venue. L'accomplissement suprême du soufisme prône l'anéantissement de soi. Son expression la plus aboutie se retrouve sous la plume d'Attâr.
Le Cantique des oiseaux est un poème méditatif. Chaque distique renvoie à une image, convoque la pensée et sollicite les sens.
L'histoire est celle d'une aventure exaltante . Des oiseaux se décident à partir à la recherche de l'Etre suprême et pour cela ils suivent la huppe, messagère du roi Salomon. Ils abandonnent tout sauf peut-être dans un premier temps leurs désirs et leurs peurs. Ils semblent proches de nous dans leurs craintes et contradictions. La huppe leur insuffle le courage et l'abnégation en contant des histoires choisies dans les classiques de la littérature ou inspirées du Coran.
Ce chant sacré dans l'edition traduite par Leili Anvar s'accompagne des merveilles de la peinture en Islam d'Orient. Ce poème a nourri la créativité de nombreux artistes persans, turcs et indo-musulmans.
C'est une belle épopée spirituelle construite comme une symphonie dont l' écoute est multiple et infinie.
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De Farid Od-din Attar
Traduit par Leili Anvar
Publié par Diane Sellier éditions
Edité en 2013
398 pages annexes incluses

Les oiseaux, sous la guidance de la huppe, hésitent à partir en quête de Simorgh, allégorie du créateur. A travers de nombreux contes, l'oiseau de Salomon leur expliquera pourquoi il faut entreprendre cette quête, aussi dure soit-elle, et comment parvenir au bout des sept vallées derrière laquelle se tient Simorgh…

Un poème du XII° siècle qui chante une quête de la foi.
Entièrement en vers, ce poème vous emmène au milieu de la littérature persane et vous invite à un voyage initiatique. Entrecoupé de récits qui illustrent le discours de la huppe, on a parfois l'impression d'une certaine répétition des idées, et cela peut rendre le tout un peu compliqué à lire, surtout si, comme nous, vous n'avez pas l'habitude de ce genre de littérature. Il nous était arrivé le même problème avec les Contes de Mille-et-une nuits que nous n'avions pas su finir.
Cependant, si on passe au-delà, on découvre un poème magnifique aux images surprenantes.

Là où le livre est vraiment sympa, c'est qu'il nous livre beaucoup de clefs pour comprendre le texte. En plus des deux introductions, le texte regorge de note qui rappellent les grands récits auxquels se réfèrent Attar, où les images récurrentes en poésie persane. Enfin, on trouve en annexes les versets du Coran évoqué dans le poème, ainsi qu'un glossaire des personnages cités.

Bref, ça n'est pas un ouvrage facile, mais c'est un livre extrêmement intéressant qu'on a pris plaisir à lire (même si nous avons été plus longue que d'habitude)
Lien : http://les9muses.wordpress.c..
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critiques presse (2)
LeFigaro
06 avril 2023
Plus qu’un livre, c’est un miroir. Miroir de soi, miroir de l’autre, miroir de l’amour. Tout l’objet de ces pages, où se reflètent nos envies, nos défauts et nos souffrances, est de savoir si le lecteur saura le voir.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LeMonde
24 mars 2023
De cet ample et beau texte de 4 724 distiques, Leili Anvar offre une somptueuse traduction en vers, des alexandrins plus ou moins stricts qui rendent la musique, le rythme ­d’Attar. Une première édition richement illustrée avait été publiée en 2012. Cette nouvelle version révisée et enrichie, sans illustration mais plus abordable, permet de s’immerger avec ­félicité dans le « persan des oiseaux ».
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Si tu ouvrais enfin les yeux de l’invisible
Les atomes de l’univers te diraient leurs secrets

Mais si l’oeil que tu ouvres est l’oeil de la raison
Tu ne pourras jamais voir l’amour tel qu’il est

Seule une âme éprouvée peut éprouver l’amour
Seul qui s’est libéré peut entrer dans l’amour

Toi qui n’est pas amant, qui n’as rien éprouvé
Tu n’es qu’une âme morte, indigne de l’amour !

Dans ce chemin il faut un coeur mille fois vivant
Qui puisse à chaque instant faire don de cent vies !

La vallée de l’Amour - Distique 3375
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"J'ai survolé longtemps les plaines et les mers
J'avançais pas à pas, la tête dans les cieux
J'ai franchi les montagnes, les vallées, les déserts
J'ai parcouru un monde dans le temps du déluge" (Distiques 705 et 706)

Il faut, pour aborder Le Cantique des oiseaux, oublier ses repères. Accepter le voyage. Se lancer dans l'inconnu. Se perdre. Se brûler. S'anéantir. Prendre son envol, l'envol de l'âme, vers des contrées inconnues. Avec humilité...Humilité face à une langue nouvelle dont les métaphores sont souvent teintées de larmes et de sang, humilité au coeur d'un texte où poésie et mystique sont intimement mêlées.
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« Or, ils virent un jour, tout en haut d’un balcon
Une jeune fille assise. C’était une chrétienne
Un être à l’âme pure, avancée dans la gnose
Et dans la connaissance de la voie du Christ
Au ciel de la beauté, elle était un soleil
Mais un soleil de gloire qui n’a pas de couchant
Jaloux de son reflet l’astre du jour était
Plus jaune que les amants languissant dans sa rue.
Quiconque avait le cœur accroché à ses boucles
Ceignait dans son désir la ceinture des chrétiens
Quiconque pesait son âme au rubis de ses lèvres
Perdait la tête avant de faire un passionnante
Ses cheveux embaumaient la brise du matin
Et plongeaient tout Byzance dans un frisson de musc
Ses yeux jetaient le trouble en plein cœur des amants
Sous les deux arcs parfaits formés par ses sourcils
Un seul de ses regards décoché aux amants
Leur faisait oublier et leur âme et leur vie
Arches sur son visage aussi beau que la Lune
Ses sourcils attiraient tous les regards épris
Et quand elle accordait un regard de douceur
Elle prenait au filet centaines d’amoureux
Sous ses boucles de jais, son visage éclatant
Était d’une braise, d’ardeur débordante
Le rubis de ses lèvres assoiffait ses amants
ses yeux, narcisses ivres, offraient mille poignards
Tous ceux qui, assoiffés, aspiraient à sa source
Avaient le cœur percé par des fils acérés
De sa bouche aussi menue que le chas d’une aiguille
Ainsi ceux qui disaient qu’ils en savaient quoi dire
Ne savaient pas, les ignorants, ce qu’ils disaient !
Sa taille était très fine, ceinte comme un cheveu
Elle avait au menton une fossette argentée
Semblables aux mots du Christ, ses mots soufflaient la vie.» 

(p. 120 et 121 trad Leili Anvar)
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Quand disparaît l'ego : anéantissement
Puis quand le néant même dépasse le néant
Ce qui advient alors : survivance éternelle
Si tu veux arriver à ce point du chemin
Il te faut arriver au néant et au rien
Annihile le soi, anéantis l'ego
Revêts-toi d'un manteau tissé dans le non-être
Et bois jusqu'à plus soif à la coupe du rien
Porte sur toi le voile de l'indignité
Et rabats sur ta tête la cape du non-être
Le pied à l'étrier de la dissolution
Monte sur la monture de l'insignifiance
Pars de rien, va vers rien et accomplis le rien
Ceins ta taille de rien et sens dessus dessous
D'une belle ceinture tressée de beau néant
Ferme bien les deux yeux et après ouvre-les
Pour les enduire alors du kohl noir du néant
Perds-toi et, plus encore, perds que tu t'es perdu
Et puis de cela même ne garde aucune trace
Avance ainsi, toujours, dans un pur abandon
Pour atteindre à la fin au monde où tout se perd
Mais s'il reste dans toi une trace d'ici-bas
Tu ne trouveras pas trace de l'autre monde.
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Khezr et le fou

Il y avait un fou excellent en sagesse
À qui Kherz dit un jour : "Ô toi, homme parfait

Pourrais-tu devenir mon compagnon intime ?"
"Cela est impossible , lui répondit le fou

Tu as buà longs traits l'eau d'immortalité
Afin de pouvoir vivre pour l'éternité

Or moi, sans relâche, je cherche à quitter la vie
Car sans l'Âme de l'Âme, non, je ne saurais vivre !

Toi, tu as décidé de protéger tes jours
Et moi, j'ai décidé de les perdre pour toujours

Ainsi, il vaut bien mieux, comme la cage et l'oiseau
Que nous restions très loin l'un de l'autre.
Adieu, donc !",

Ainsi il vaut mieux
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Vidéo de Farîd al-Dîn Attâr
Lors de l'émission “Cultures d'Islam”, diffusée sur France Culture le 24 janvier 2014, Abdelwahab Meddeb s'entretenait avec Leili Anvar autour de sa nouvelle traduction du “Cantique des Oiseaux” du poète mystique persan Farîd od-dîn ‘Attâr. Réalisation : Rafik Zénine. Avant d’arriver à l’Absolu, demeure du Sîmorgh, des milliers d’oiseaux traversent sept vallées : celles du désir, de l’amour, de la connaissance, de la plénitude, de l’unicité, de la perplexité, du dénuement, de l’anéantissement. Presque tous meurent ou abandonnent en chemin. Seuls trente arrivent au but : sî morgh, « trente oiseaux ». A travers ce jeu de mots (sî morgh, Sîmorgh), ‘Attâr nous signifie que les sept vallées ne sont que les étapes d’un cheminement intérieur. Au bout, les âmes ne pouvaient que se voir elles-mêmes. Même à ce stade ultime, les oiseaux restent noyés en eux-mêmes. « Vous avez cherché l’Autre en cheminant longtemps / Vous ne voyez pourtant que vous, rien que vous ! » (distique 4277). C’est que l’objet de la quête n’est pas en dehors de vous, il est en vous. Simorgh demeure invisible pour les yeux, indicible par la parole, inaudible à l’ouïe. Il ne vous reste qu’à plonger dans le feu de sa Présence et disparaître. De cet état, personne n’est revenu. Comment en faire alors le récit ? s’interroge ‘Attâr (circa1158-1221), l’immense poète de Nishapur dont le “Mantiq at-Tayr” nous est donné ici en vers en conservant le paradoxe qui habite l’original : Comment dire l’indicible ? Comment figurer l’invisible ? Comment penser l’impensable ? La tâche du traducteur est de rendre l’œuvre dans son ambivalence entre l’opacité et la transparence, où se déploie sa densité. Farîd od-dîn ‘Attâr, “Le Cantique des Oiseaux” : traduction Leili Anvar, choix d’illustrations de peintures islamiques d’Orient analysées et commentées par Michael Barry. (éd. Diane de Selliers)
Invitée : Leili Anvar, de l'INALCO
“Cultures d’Islam” participe à la levée d’une méconnaissance pour que les références islamiques circulent dans le sens commun et, d’une façon plus ouverte, moderne et polyphonique, approche l’Islam en tant que phénomène de civilisation. Abdelwahab Meddeb, le producteur de “Cultures d'Islam”, s'est éteint dans la nuit du 5 au 6 novembre 2014. Abdelwahab Meddeb était romancier, essayiste, scénariste, traducteur et poète, et il était devenu au fil des années l'une des voix marquantes de France Culture.
Thèmes : Idées| Civilisation| Peinture| Poésie| Islam
Source : France Culture
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