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EAN : 9782070412211
252 pages
Gallimard (21/01/2000)
3.56/5   790 notes
Résumé :
La scène est quelque part en Touraine, dans la grotte du magicien Alcandre, qu'un père vient consulter sur le sort de son fils disparu. La grotte se métamorphose alors en théâtre et le jeune homme apparaît, sous l'habit de comédien, en serviteur rusé du bouillant capitaine Matamore... La fantasmagorie commence, pièce follement originale toute en reflets et jeux de miroir que Corneille lui-même qualifiait d'étrange monstre et d' extravagante galanterie. Après quelque... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (58) Voir plus Ajouter une critique
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sur 790 notes
La comédie. Voilà un registre où l'on n'attend pas forcément le grand Corneille de prime abord et pourtant d'un battement d'aile le voici nous servant une tragi-comédie pleine d'humour et de finesse.

Par le biais d'une mise en abîme que j'ai peu l'habitude de croiser au théâtre, l'illustre tragédien donne donc dans le comique. Pour ce faire, et comme le nom de la pièce l'indique, le jeu des illusions est de mise.

J'ai particulièrement aimé les personnages secondaires, Lyse, la servante d'Isabelle, et le capitaine Matamore (le bien-nommé) qui m'ont fait beaucoup sourire. Les amours plus ou moins crédibles s'entrecroisent et les espoirs tournent casaque à chaque scène. le pied-de-nez final est croustillant, je ne vous en dirais donc rien.

Alcandre, le mage grand illusionniste qui coordonne tout le récit, aura ce mot fataliste et philosophe que je goûte tout particulièrement parce qu'il nie sa capacité à dévier le destin par sa magie :
"Ainsi de notre espoir la fortune se joue :
Tout s'élève ou s'abaisse au branle de sa roue :
Et son ordre inégal, qui régit l'univers,
Au milieu du bonheur a ses plus grands revers."

Une belle découverte classique.
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Une pièce de théâtre sur le théâtre. Par une double mise en abîme, l'auteur nous fait voir dans le temps de la représentation, le pouvoir du spectacle théâtral.
Pridamant, par sa sévérité, a poussé son fils à partir. Pris de remord il a cherché à le retrouver, en vain. Sur conseil d'un ami, il se rend à la grotte du magicien Alcandre pour le consulter. Celui-ci lui fait voir la vie de son fils Clindor jusqu'à la mort de celui-ci. Mais n'est-ce pas le privilège du théâtre que de faire vivre au spectateur des aventures, des amours et de lui faire ressentir toutes les émotions qui en découlent, alors qu'elles sont irréelles ?
Bien sûr que serait une représentation sans intrigue amoureuse ? La belle Isabelle a trois prétendants : Adraste, Clindor, et Matamore. Lyse sa suivante trouve Clindor, valet de Matamore, à son goût et doutant de sa qualité de gentilhomme pense qu'il lui serait mieux assorti qu'à sa maitresse. Hésitant entre la vengeance et l'amour, elle le sauve pourtant. Et l'on n'échappe pas non plus au père autoritaire qui entend que sa fille épouse qui il choisit pour elle.
Soit une intrigue classique dans une mise en scène, interne à la pièce tout à fait originale.
Dans cette comédie apparaît entre autres le personnage de Matamore, soldat pleutre mais fanfaron, que Corneille a repris du théâtre espagnol et de la Commedia dell'arte, que l'on peut aussi faire remonter à Plaute, et dont le nom est resté dans le langage courant.

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«Sous une illusion vous pourriez voir sa vie» (p. 16)

Pridamant consulte un magicien pour avoir des nouvelles de son fils, banni par trop de sévérité. Celui-ci vit loin de son pays, amoureux d'Isabelle que deux seigneurs se disputent. Mais la servante d'Isabelle, amoureuse de lui, projette de le trahir par dépit.

Pièce écrite en alexandrins dans une langue de toute beauté, on pourrait la penser vieillotte et c'est tout le contraire! Quelle modernité je trouve à ce texte qui mêle avec brio les personnages de la Commedia dell'Arte à cet art du théâtre dans le théâtre, pour nous exposer le jeu des sentiments et des passions amoureuses.
Qu'il est loin le fameux théâtre classique avec ses règles strictes!
A cette lecture, j'imagine des tas d'effets spéciaux possibles pour rendre sur scène l'illusion créée par le magicien. Les possibilités de mise en scène sont énormes et en même temps, une scène quasiment nue, juste quelques accessoires pourrait être tout aussi efficace, tellement le texte se suffit à lui-même par sa teneur.
Coup de coeur particulier pour le personnage de Matamore, grandiose!!!

J'ai adoré cette lecture que je repoussais toujours à plus tard, et je vous la recommande d'urgence !!! N'attendez plus !!!
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Corneille a commencé sa carrière au théâtre par les comédies, qui ont connu en leur temps un grand succès. La seule que l'on continue à jouer encore maintenant assez régulièrement, est cette Illusion comique, pourtant atypique parmi les comédies de l'auteur.

Corneille a été un grand inventeur de formes, le théâtre français à son époque se cherche énormément. Après le modèle antique, mis à l'honneur par le XVIe siècle, l'imitation des pièces italiennes, vient celle des espagnoles. Corneille met en scène une comédie citadine, que l'on pourrait appeler une comédie de moeurs, qui remplace un comique outré par un comique plus délicat, censé utiliser le langage véritablement pratiqué de son temps, « l'enjouement » remplaçant le gros rire, et les scènes se passent dans un décor connu de tous, comme le montre les titres de certaines de ces pièces évoquant des lieux parisens « La place Royale » « La galerie du palais ».

L'illusion comique, assez unique dans l'oeuvre de l'auteur, est bien plus originale. Un père qui a chassé son fils désobéissant regrette maintenant son geste et voudrait le réparer. Un magicien promet de lui montrer, grâce à sa magie, les aventures de ce fils chassé. Nous suivons d'abord des scènes dans lequel Clindor (le fils en question) est entré au service de Matamore, un fanfaron, qui raconte en permanence des exploits héroïques imaginaires, tout en prétendant à l'amour d'une belle jeune fille. Ce personnage est habituel, stéréotypé, on le retrouve dans bon nombre de comédies de son temps. Bien évidemment, c'est Clindor qui est aimé par Isabelle. Mais le père lui destine un autre homme, que Clindor assailli tue. Il se retrouve en prison, mais peut fuir avec sa bien aimée grâce à la servante qui a séduit le geôlier. le magien fait voir ensuite au père une autre scène, dans laquelle, Clindor, devenu infidèle, a une intrigue amoureuse avec la femme d'un prince, et qui se termine par la mort des deux amants. le père est accablé, mais le magicien lui montre la scène suivante, dans laquelle Clindor partage avec ses compagnons la recette de la soirée : il est devenu comédien, et les deux scènes précédentes, sont des morceaux de représentations auxquelles il participait. le père n'a plus qu'à se rendre à Paris pour retrouver son fils.

Théâtre dans le théâtre, devenu plus banal aujourd'hui, mais bien plus novateur à l'époque, la pièce nous montre également des morceaux choisis de l'art théâtral de l'époque, ses artifices et charmes. Et met en valeur le théâtre, ce métier de comédien, réprouvé à l'époque, par l'église, par la loi (il est frappé d'infamie).

Passionnant.
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Ah, quel bonheur !

Il y avait bien longtemps que je n'avais lu un classique, comme on aime à les nommer de nos jours.
Et me voilà ! Je viens tout juste de rejoindre le monde de Corneille pour découvrir avec enthousiasme l'Illusion Comique.
L'auteur en personne présentait la pièce comme une oeuvre inattendue, plus ou moins inclassable, tout à la fois comique et tragique.

À mon sens, c'est globalement une comédie avec une part de tragique. J'en retiendrai, comme il se doit avec la plupart des classiques, le plaisir de la lecture en
alexandrins. Je me suis même surprise à lire, voire relire, certains passages à voix haute.
La dimension poétique de ce théâtre-là est indéniable.

J'ajouterai sans trop déflorer la fin de la pièce
que je me suis laissée cueillir.
Et d'une certaine manière, je regrette déjà de ne pas avoir mis la main plutôt sur cette oeuvre-là.

En moi vivent encore Cinna, Polyeucte et le Cid, parmi d'autres. Je les ai lus très tôt en commençant par le Cid au collège. Et je me rappelle avoir littéralement
dévalisé une librairie proche de mon université. Elle proposait
des vieux livres au papier vieilli et cassant, majoritairement en violet, ceux de la très vieille édition des classiques Larousse. Leur tout petit prix permettait à l'étudiante pas très riche que j'étais, de se promener aisément avec un texte de référence en poche.
Le presque tout Corneille y est passé sauf L'illusion Comique.

L'auteur disait lui-même que la pièce ne pourrair être imitée sous peine de ridicule. Et c'est exact. Je ne peux pas en dire plus car cela reviendrait à trop en dire. Dans notre cas précis, ce serait tellement dommage.

Ainsi, me voilà ravie d'avoir retrouvé un classique après avoir lu longtemps toutes sortes d'ouvrages, des essais, de la littérature jeunesse, des albums, des bandes dessinées, de la poésie et des romans et particulièrement des séries policières haletantes, noires ou drôles, ou tout à la fois.
Peut-être, mon investissement professionnel m'a-t-il éloigné des classiques en privé. En effet, j'ai dû durablement dans mes fonctions d'enseignante de français, puis de documentaliste les fréquenter assidûment au service des élèves. La plupart du temps avec plaisir. Je les ai aussi retrouvé sous forme de spectacles vivants.

Je concède que c'est une erreur de les avoir pour ainsi dire ignorés dans mes choix de lectures toutes personnelles à mon insu si longtemps.
Je conseille aux jeunes lecteurs et jeunes étudiants amoureux de théâtre (classique ou pas) ou curieux en tout cas de cet univers de se plonger dans cette pièce
qui n'est pas qu'une comédie, Elle a quelque chose de l'essai
critique sur ce que peut-être le théâtre, sur ce qu'il peut révéler et surtout sur ce qu'il y a de particulièrement différent des autres genres littéraires.

Alors, dans mon immense joie de lecture du jour, laissez-moi jouer les camelots. Amis lecteurs, retrouvez ou découvrez Pierre Corneille dans l'Illusion Comique à peu de frais, moins de 2 euros. Surprises et rebondissements garantis !
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Citations et extraits (71) Voir plus Ajouter une citation
ALCANDRE
Dorante, c’est assez, je sais ce qui l’amène ;
Ce fils est aujourd’hui le sujet de sa peine.
Vieillard, n’est-il pas vrai que son éloignement
Par un juste remords te gêne incessamment ?
Qu’une obstination à te montrer sévère
L’a banni de ta vue, et cause ta misère ?
Qu’en vain, au repentir de ta sévérité,
Tu cherches en tous lieux ce fils si maltraité ?
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DORANTE.
Ce mage, qui d’un mot renverse la nature, N’a choisi pour palais que cette grotte obscure. La nuit qu’il entretient sur cet affreux séjour, N’ouvrant son voile épais qu’aux rayons d’un faux jour, De leur éclat douteux n’admet en ces lieux sombres Que ce qu’en peut souffrir le commerce des ombres. N’avancez pas : son art au pied de ce rocher A mis de quoi punir qui s’en ose approcher ; Et cette large bouche est un mur invisible, Où l’air en sa faveur devient inaccessible, Et lui fait un rempart, dont les funestes bords Sur un peu de poussière étalent mille morts. Jaloux de son repos plus que de sa défense, Il perd qui l’importune, ainsi que qui l’offense ; Malgré l’empressement d’un curieux désir, Il faut, pour lui parler, attendre son loisir : Chaque jour il se montre, et nous touchons à l’heure Où pour se divertir il sort de sa demeure.
PRIDAMANT.
J’en attends peu de chose, et brûle de le voir. J’ai de l’impatience, et je manque d’espoir. Ce fils, ce cher objet de mes inquiétudes, Qu’ont éloigné de moi des traitements trop rudes,Et que depuis dix ans je cherche en tant de lieux, A caché pour jamais sa présence à mes yeux. Sous ombre qu’il prenait un peu trop de licence, Contre ses libertés je roidis ma puissance ; Je croyais le dompter à force de punir, Et ma sévérité ne fit que le bannir. Mon âme vit l’erreur dont elle était séduite : Je l’outrageais présent, et je pleurai sa fuite ; Et l’amour paternel me fit bientôt sentir Il l’a fallu chercher : j’ai vu dans mon voyage Le Pô, le Rhin, la Meuse, et la Seine, et le Tage : Toujours le même soin travaille mes esprits ; Et ces longues erreurs ne m’en ont rien appris. Enfin, au désespoir de perdre tant de peine, Et n’attendant plus rien de la prudence humaine, Pour trouver quelque borne à tant de maux soufferts, J’ai déjà sur ce point consulté les enfers. J’ai vu les plus fameux en la haute science Dont vous dites qu’Alcandre a tant d’expérience : On m’en faisait l’état que vous faites de lui, Et pas un d’eux n’a pu soulager mon ennui. L’enfer devient muet quand il me faut répondre, Ou ne me répond rien qu’afin de me confondre.
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MATAMORE:
Je te donne le choix de trois ou quatre morts.
Je vais d'un coup de poing te briser comme verre,
ou t'enfoncer tout vif au centre de la terre,
ou te fendre en dix parts d'un seul coup de revers,
ou te jeter si haut au-dessus des éclairs
que tu sois dévoré des feux élémentaires.
Choisis donc promptement, et songe à tes affaires.

p.51
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ALCANDRE

Cessez de vous en plaindre. À présent le théâtre

Est en un point si haut que chacun l’idolâtre,

Et ce que votre temps voyait avec mépris

Est aujourd’hui l’amour de tous les bons esprits,

L’entretien de Paris, le souhait des provinces,

Le divertissement le plus doux de nos princes,

Les délices du peuple, et le plaisir des grands :

Il tient le premier rang parmi leurs passe-temps ;
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LYSE
[...]
Qui cache sa colère assure sa vengeance ;
Et ma feinte douceur prépare beaucoup mieux
Ce piège où tu vas choir, et bientôt, à mes yeux.
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Vidéo de Pierre Corneille
Lecture par l'auteur
Rencontre animée par Marie-Madeleine Rigopoulos
« Ce livre est un ensemble de nouvelles autobiographiques, classées par âge de la vie, de la petite enfance à aujourd'hui. Ces nouvelles sont souvent, pas toujours, des mésaventures dans lesquelles j'éprouve peur et honte, qui me sont assez naturelles et me donnent paradoxalement l'énergie d'écrire. Scènes de gêne ou de honte, scènes de culpabilité, scènes chargées de remords et de ridicule, mais aussi scènes, plus rares forcément, de pur bonheur, comme celle qui donne son nom au livre, Célidan disparu : personnage à la fois pusillanime et enflammé d'une pièce de Corneille que j'ai jouée à mes débuts d'acteur, dont je découvris lors de l'audition pour l'obtenir, qu'il me révélait à moi-même, et faisait de moi un acteur heureux. »
Denis Podalydès
À lire – Denis Podalydès, Célidan disparu, Mercure de France, 2022.
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