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EAN : 9782070404179
377 pages
Gallimard (25/04/2000)
3.5/5   15 notes
Résumé :


" Quoi ? même en disant vrai vous mentiez en effet ? " Le héros, Dorante, par la seule puissance de sa parole, réorganise le réel à sa guise. En remplaçant le monde de la réalité par celui de la feinte, Corneille donne à voir le théâtre même.

Dorante ment pour devenir un jeune noble parisien, pour se créer un personnage et des exploits, ceux du héros galant. Il ment en toute sincérité : pour paraître. Dans la Suite, de nouvelles avent... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
J'aime bien terminer l'année par un classique plaisant et non-violent, en résonance avec l'aspect festif de la période. Cette fois j'ai choisi une compilation de deux comédies de Corneille. « le Menteur » et « la Suite du Menteur ».

« le Menteur » (1643) est une petite perle. Dorante, tout juste débarqué de Poitiers avec son valet Cliton, n'a pas sitôt posé le pied à Paris qu'il déclame des calembredaines à qui il croise ; aux belles inconnues Clarice et Lucrèce : il est un soldat aguerri des Guerres d'Allemagne ; à ses amis Alcippe et Philiste : il est à Paris depuis longtemps et y a donné la veille une fête à tout casser ; à son père Géronte qui veut le marier : il est déjà engagé à Poitiers. Chaque fois la fable est servie avec moults détails. Lorsqu'un mensonge est reconnu comme tel, Dorante le renforce par un autre plus gros. C'est une maladie.
On se régale à voir Dorante essayer de se dépêtrer de l'écheveau qu'il a lui-même embrouillé et s'enfoncer dans la vase du quiproquo qui sous-tend la pièce : il pense que Clarice est Lucrèce. Il écrit ses sentiments à Lucrèce (en pensant à Clarice) mais face à face c'est à Clarice qu'il s'adresse et les deux jeunes femmes ne savent plus sur quel pied danser.
La fin est un peu difficile à avaler cependant ; c'est un beau happy-end forcé bien que tous les mensonges aient été dévoilés. Dorante s'en sort par le haut. C'est une véritable apologie du mensonge. Comme l'explique Corneille dans son « examen » (1660), la pièce originale de l'espagnol Alarcón dont « le Menteur » est inspiré se révélait plus sévère pour Dorante, et on sent que si Corneille avait simplement laissé la mécanique agir Dorante aurait été puni. Mais l'auteur trouvait cette fin trop violente pour les codes de la comédie.

La « Suite » (1644) est d'un plus faible niveau. Elle ressemble à ces épisodes 2 des blockbusters américains. Corneille a voulu surfer sur la vague de succès du Menteur et s'est pris les pieds dans sa planche. Il le dit lui-même dans son examen (1660) : la pièce eut beaucoup moins de succès car l'on a retiré l'essentiel de ce qui faisait l'attrait du « Menteur ». Dorante s'est assagi ; il ne ment plus que pour épargner à son prochain une vérité difficile ou un destin tragique. Une fois supprimé le ressort doux-amer du pêché de mensonge, qui attire et repousse à la fois, il ne reste qu'une histoire assez mièvre finissant un peu gravement sur le ton de la tragi-comédie que les gesticulations verbales du valet Cliton ne suffisent pas à rattraper. La mélodie des vers elle-même, parfois ardus à comprendre, contient des fausses notes. Et les multiples références aux évènements « Menteur », si elles forment une mise en abîme amusante (car les personnages apprennent que leurs tribulations passées ont donné lieu à une pièce d'un auteur respectable) empêchent l'oeuvre d'être autonome, trop accrochée à son ainée.

Une pièce excellente et une moyenne, pas trop mal comme fin d'année.
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Mensonges d'âmes et de coeurs, libertinage d'époque et de société à découvrir sans hésitations.

Succès d'un temps révolu aux accents de modernité surprenants.
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Le Menteur est une comédie basée sur les mensonges à répétition du personnage principal, Dorante. C'est amusant et bien écrit même si cela fait un peu comédie de boulevard et n'est donc pas à la hauteur d'autres pièces de Corneille.
La Suite du menteur a plus de mal à trouver son genre. C'est encore une comédie, mais les personnages retrouvent des traits du héros cornélien habituel qui fait ce qu'il doit et pas ce qu'il se doit. C'est plaisant de retrouver cet aspect mais c'est aussi déroutant, on a même un peu de mal à croire à ces grands élans entre deux passages comiques.
En résumé j'ai apprécié ces pièces mais pas adoré, ce n'est pas le meilleur de Corneille.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
CLITON
...
Mais pour venir au point que vous voulez savoir,
Êtes-vous libéral? (*)

DORANTE

Je ne suis point avare.

CLITON

C'est un secret d'amour et bien grand et bien rare,
Mais il faut de l'adresse à le bien débiter,
Autrement on s'y perd au lieu d'en profiter.
Tel donne à pleines mains qui n'oblige personne,
La façon de donner vaut mieux que ce qu'on donne:
L'un perd exprès au jeu son présent déguisé,
L'autre oublie un bijou qu'on aurait refusé,
Un lourdaud libéral auprès d'une maîtresse
Semble donner l'aumône alors qu'il fait largesse,
Et d'un tel contretemps (**) il fait tout ce qu'il fait,
Que quand il tâche à plaire, il offense en effet.

(Le Menteur, Acte I, scène 1)

(*): libéral: prodigue, généreux
(**) contretemps: mauvais usage de son temps
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ISABELLE (tentant d'expliquer pourquoi Dorante a menti en prétendant être soldat alors qu'il a suivi des études de juriste)

...
Il aura cru sans doute, ou je suis fort trompée,
Que les filles de cœur aiment les gens d'épée,
Et vous prenant pour telle, il a jugé soudain
Qu'une plume au chapeau vous plaît mieux qu'à la main.

(Le Menteur, Acte III, scène 3)
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(Mélisse souhaite savoir si Dorante l'aime. Elle s'adresse à Lyse, sa femme de chambre)

Porte-lui mon portrait, et comme sans dessein
Fais qu'il puisse aisément le surprendre en ton sein.
Feins lors pour le ravoir un déplaisir extrême,
S'il le rend, c'en est fait ; s'il le retient, il m'aime.

(la Suite du Menteur, Acte II, scène 3)
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MÉLISSE : Avec tant de façons que veux-tu que j'attrape ?
Je possède son cœur, je ne veux rien de plus,
Et je perdrais le temps en débats superflus.
Quelquefois en amour trop de finesse abuse.

LA SUITE DU MENTEUR, Acte IV, Scène 3.
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CLITON
Monsieur, quand une femme a le don de se taire,
Elle a des qualités au-dessus du vulgaire.
C'est un effort du Ciel qu'on a peine à trouver,
Sans un petit miracle il ne peut l'achever,
Et la nature souffre extrême violence,
Lorsqu'il en fait d'humeur à garder le silence.
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Vidéo de Pierre Corneille
Lecture par l'auteur
Rencontre animée par Marie-Madeleine Rigopoulos
« Ce livre est un ensemble de nouvelles autobiographiques, classées par âge de la vie, de la petite enfance à aujourd'hui. Ces nouvelles sont souvent, pas toujours, des mésaventures dans lesquelles j'éprouve peur et honte, qui me sont assez naturelles et me donnent paradoxalement l'énergie d'écrire. Scènes de gêne ou de honte, scènes de culpabilité, scènes chargées de remords et de ridicule, mais aussi scènes, plus rares forcément, de pur bonheur, comme celle qui donne son nom au livre, Célidan disparu : personnage à la fois pusillanime et enflammé d'une pièce de Corneille que j'ai jouée à mes débuts d'acteur, dont je découvris lors de l'audition pour l'obtenir, qu'il me révélait à moi-même, et faisait de moi un acteur heureux. »
Denis Podalydès
À lire – Denis Podalydès, Célidan disparu, Mercure de France, 2022.
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