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Critique de hannah851


Avec ce roman au ton ironique et malicieux, Laurence Cossé traite un sujet d'actualité: le coût financier du patrimoine en France. En pleine période de récession budgétaire, ce domaine apparaît de plus en plus délaissé par les pouvoirs publics d'autant plus que les grandes heures d'euphorie patrimoniale sont désormais loin derrière nous.

Comment trouver des fonds pour financer la restauration sans fin des cathédrales? C'est la question que se pose jour et nuit Jean-Léger Tuffeau, responsable du Patrimoine au Ministère de la Culture. Haut fonctionnaire à la conscience professionnelle exacerbée qui frise l'absurde, il ne dort plus et délaisse même sa vie familiale en quête de LA solution. Cette question l'obsède tellement qu'il en vient à une solution extrême. Si il ne peut pas les sauver toutes, il doit choisir de préserver les plus emblématiques et de supprimer les autres. Détruire 100 cathédrales sur les 170 que comptent le territoire lui permettra de sauver un patrimoine beaucoup moins emblématique mais tout aussi conséquent : les châteaux. Voilà la cause que décide de revêtir notre énarque idéaliste mais aussi pragmatique car il sait que cet acte "terroriste" qu'il s'apprête à mener doit être rapide, irrémédiable et monté en douce pour éviter tout scandale. Il fait donc appel pour les aspects techniques à un ancien camarade de Science-Po, militant marxiste dans sa jeunesse, Léon Beauju aujourd'hui spécialisé dans les missions diplomatiques un peu spéciales à l'étranger.

Après avoir choisi les 100 cibles, Tuffeau tente de rallier des personnages clés à sa cause mais sans succès. C'est l'occasion pour la romancière de relancer l'éternel débat sur la conservation excessive ou non du patrimoine "de la petite cuillère à la cathédrale" comme disait Malraux en introduisant l'historien Régis Debray sous les traits de Régy Debrais et son colloque sur "L'abus monumental".

Cependant, la lente progression de Jean-Léger vers la folie et l'absurdité de l'aventure qu'il va vivre tendent à reléguer au second plan la question de la sauvegarde du patrimoine. L'arrivée d'une mécène richissime femme d'affaires mexicaine, cantatrice à ses heures perdues, et bienfaitrice d'Anaïs, l'assistante de Jean-Léger, ne permet malheureusement pas de déjouer son plan mais plutôt de l'accélérer.

Si l'intrigue vire parfois à l'absurde, c'est que la romancière peut se le permettre par sa maîtrise des arcanes du Ministère de la Culture et de son mode de fonctionnement tant dans les grandes lignes que dans les détails (fonctionnement du mobilier national, nature des réserves du musée du Louvre, procédures administratives dans les DRAC...). Elle ose aussi dénoncer les dérives désormais courantes dans le patrimoine des phénomènes de privatisation, de commercialisation des monuments emblématiques comme le Louvre ou Versailles et de l'inflation des spectacles sons et lumières qui défigurent les monuments.
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