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Critique de raton-liseur


Si j'avais vu le titre sous lequel ce livre est habituellement traduit en français, La conquête du courage, je ne suis pas sûre que je l'aurais lu. Ce titre montre trop l'évolution inexorable du soldat vers le parfait petit homme de troupe, désabusé certes, mais en tout point conforme à ce que l'on peut attendre de chaire à canon consentante.
La première partie du livre, parce qu'elle fait place aux sentiments d'un jeune homme qui découvre la réalité de la guerre et ne réagit pas naturellement en accord avec l'image du brave que le discours populaire ne cesse de renvoyer comme une évidence, est assez intéressant et me semble assez rare dans la littérature guerrière (mais je suis loin d'être une spécialiste du genre).
Stephen Crane n'a certes pas connu la guerre de Sécession, mais il a couvert plusieurs conflits en tant que journaliste, et ce récit se veut universel, celui de toutes les guerres et de tous les soldats. Il est d'ailleurs intéressant de noter que les lieux de la bataille ne sont jamais identifiés. Des arbres, des champs, une barrière, partout et nulle part. de même, sous la plume du narrateur, on suit les états d'âme et les actions de l'adolescent, jamais nommé autrement. Seuls ses camarades l'identifient dans leurs conversations comme Henri Flemming, seuls ses camarades, ses semblables lui donnent un nom, alors que pour le lecteur confortablement assis dans son fauteuil moelleux, il ne sera que cet adolescent, ce jeune anonyme qui croit partir défendre des idées et protéger la liberté des autres.
Si la première partie est relativement intéressante, les choses se gâtent à mon avis par la suite, lorsque, apprenant ce qu'est le courage, devenant un homme, l'adolescent devient peu à peu ce qui est attendu de lui. Bien sûr, il apprend en route, l'apprentissage de la réalité de la guerre et les désillusions s'accumulent, et c'est elles et sa façon de les intégrer dans son système de pensée qui font de lui un homme, un vrai, un héros ordinaire que le livre peut glorifier en terme à peine couverts. le livre devient alors pour moi sans grand intérêt, pareil à la majorité des livres qui glorifient la guerre et le courage du simple soldat, sans même laisser envisager autre chose. Les sentiments de l'adolescent ne sont certes pas toujours nobles, et c'est finalement un personnage assez horripilant, et ce quelque soit son état d'âme, trouvant toujours des raisons à sa conduite même lorsqu'il condamne une conduite identique chez ses camarades, mais au fond, l'honneur est sauf, et c'est là que ce livre, qui aurait pu être marquant, n'est qu'un nième livre d'apprentissage et surtout de guerre.
Ce fut donc une lecture assez poussive (probablement due à une traduction maladroite) et décevante car j'attendais, à tort probablement, autre chose de ce livre. Je préfère finalement de loin les descriptions de l'incohérence du champ de bataille de Tolstoi dans La Guerre et la paix, et je serai presque tentée de lire La Chartreuse de Parme, car quitte à lire du classique, autant le lire bien écrit.
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