Sans nouvelles de Winifred est le huitième opus de la série Kate Fansler écrit par
Amanda Cross en 1986 et publié en France en 1992. Son intrigue, comme toutes celles de la série, se situe au coeur d'une Amérique en pleine mutation, prise entre ses valeurs puritaines et le modernisme prôné par ses jeunes générations. Ambivalence très bien illustrée par les romans de Carolyn Heilbrun, allias
Amanda Cross, dont la construction classique développe des thèmes très modernes.
L'histoire, qui se déroule des deux côtés de l'Atlantique, met en scène des femmes remarquables, que ce soit pour leurs intérêts intellectuels que pour leur grande indépendance d'esprit et leur don pour l'amitié, en particulier avec d'autres femmes, tout aussi remarquables.
Les dialogues, souvent emprunts d'un humour quelque peu ironique, voire grinçant, sont savoureux, notamment ceux entre Kate et son mari Reed. le regard que l'auteur porte sur le monde dans lequel elle et son héroïne évoluent se teinte souvent d'ironie: « Des présidents exclusivement: présidents des Etats-Unis – sortis de Harvard s'entend – présidents de Harvard, présidents du Harvard Club. Existe-t-il autre chose au monde ? » ( page 23).
Les romans de Carolyn Heilbrun constituent un agréable prétexte à donner sa vision sans complaisance de la société américaine de l'époque, mais jamais sur un ton agressif: « C'était différent, à l'époque. Sans nous faire d'illusions sur le monde dans lequel nous vivions, nous remontions nos manches pour tenter de l'améliorer. Aujourd'hui, les jeunes ne songent qu'à réussir, et là se limitent leurs ambitions. » (…) « Ce n'est pas que je conteste le droit des grosses sociétés à se défendre lorsqu'on leur intente un procès, mais certaines de ces affaires – voyez celle de l'amiante et tant d'autres – sont si proprement écoeurantes que même nos jeunes loups refusent d'y salir leur nom. Mais c'est pour mieux perdre leur temps dans de subtiles affaires de sociétés qui s'absorbent les unes les autres sans qu'on sache trop bien à qui ces manoeuvres profitent. » (Page 24).
Amanda Cross, professeur de littérature anglaise à l'université de Columbia, émaille ses romans de fréquentes références littéraires , toujours d'une manière ludique. Ici, elle fait allusion, entre autres, au poème de Tennyson « The Lady of Shallot » ainsi qu'au roman de
Charlotte Brontë «
Villette ».
L'intrigue:
Kate et Reed, son mari, sont invités à la réception annuelle organisée par Lawrence, le frère de Kate, juriste dans un cabinet. Elle y rencontre Leighton, sa nièce, qui lui fait part de la mystérieuse disparition de la responsable du service traitement de texte du cabinet où travaille Lawrence. Connaissant les facultés de déduction de sa tante, elle lui demande de mener une enquête sur cette disparition qu'elle trouve suspecte.
C'est alors que Toby, l'associé de Lawrence, lui demande à son tour de mener une enquête sur la disparition d'une personne: il s'agit de Winifred Ashby, nièce de la célèbre romancière Charlotte Stanton. Il lui confie la mission de la retrouver car, après sa dernière lettre, elle a littéralement disparu sans laisser d'adresse et sans que personne ne l'ait aperçue. Pour l'aider dans son enquête, il lui fournit l'extrait de son journal intime ainsi que les lettres qu'elle lui a envoyées.
=> Originalité de l'intrigue : qui dissimule une authentique disparition derrière une fausse alerte: « Tu sais, je crois que nous ferions mieux de laisser l'affaire se décanter quelque temps. Trois ou quatre semaines au minimum. Tout ce que nous avons, pour l'instant, c'est une absence: pas de Winifred. En dehors de cela, aucun mobile, aucune preuve qu'il lui soit arrivé quoi que ce soit. »
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