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Critique de finitysend


Ce n'est peut-être pas le meilleur récit de l'auteur cependant je l'ai dévoré tout cru ….

Je dis cela parce que s'il elle sillonne le Népal , c'est dans le cadre d'excursions passionnantes . Elle n'est pas lancée comme à son habitude sur la grande route et elle n'est pas tout à fait libre de ses mouvements.
Ce n'est pas pour autant du tourisme dans ce début du vingtième siècle , mais dans ce texte un peu singulier dans sa bibliographie , elle un peu pour une fois , une touriste.
Mais elle reste fondamentalement elle-même pour le plus grand plaisir du lecteur , par exemple lorsqu'elle se rend sur les lieux de naissance du Bouddha . En effet ce personnage fondateur de religion est originaire du Térai actuellement népalais.

J'ai lu toute sa bibliographie , sauf sa correspondance avec son mari . J'ai donc accompagné l'auteur en inde , en chine , au Népal , au Tibet .
Ce fut de fabuleux voyages dans le temps , dans l'espace et dans des univers religieux qu'elle a contribué à m'ouvrir , alors qu'ils me semblaient autrement , irrémédiablement opaques .
Des voyages en compagnie d'une personne infiniment sympathique , pragmatique , compétente , curieuse et surtout assez au clair avec ses cadres de références et les effets et interférences qu'ils sont susceptibles de produire sur ses observations , ses témoignages et ses réflexions .
Suivre l'auteur , c'est se situer dans le sillage d'une bouddhiste sincère (de sensibilité tantrique) , qui connait aussi pas mal la pensée indienne , notamment les univers du yogisme tantrique qui s'épanouissant dans l'inde , matrice de cultes et véritable bouillon de culture religieuse , qui ont donné le bouddhisme tantrique.

L'auteur explore le pays dans toute sa variété géographique et culturelle , vallée centrale , Terai tropical à lisière de l'inde , et les massifs himalayens .
Le pays est de religion hindou dominante , mais il y a aussi beaucoup de bouddhistes tantriques exclusifs . Les langues à tons asiatiques côtoient l'univers indo-aryen dominant . Bref , c'est la fin de l'inde et le début du Tibet , la fin des plaines tropicales et le début des contreforts élancés des Himalayas , véritables forteresses bouddhistes tantriques . Une mosaïque culturelle à l'histoire mouvementée et conflictuelle , où les cultures se mêlent , se mélangent sans pour autant être solubles les unes dans les autres , bref c'est le monde indien avec ses types de cohabitations religio-culturels tellement particuliers et tellement difficiles à appréhender …

Bon , ce texte possède aussi un intérêt particulier dans la bibliographie de l'auteur , avec L'Inde où j'ai vécue , c'est le seul texte où l'auteur arpente un pays de culture hindoue dominante.
Le reste de sa bibliographie étant dédiée au bouddhisme tantrique et au Tibet , un peu à la chine aussi …
D'une façon générale quand l'auteur aborde l'hindouisme , c'est avec un positionnement assez élitiste et critique sur la religion populaire le plus souvent . Elle est plus amène sur la religion populaire du Tibet qui pourtant n'est pas moins « charbonnière « que l'hindouisme populaire. Une petite visite au musée Guimet vous en persuadera , d'ailleurs …
De plus concernant l'Inde et on la comprend , elle très dérangée par les problématiques socio-culturelles induites par les castes qui sont néanmoins plus subtiles et compliquées qu'elle veut bien nous le dire.

Pour ma part je suis plutôt un connaisseur empathique du monde hindou , et moins du bouddhisme (un peu le contraire de l'auteur donc) , alors je me permet ici d'apporter ici quelques billes sur lesquelles , l'auteur n'insiste pas du fait de ses dynamiques intimes personnelles et ce malgré sa grande et indiscutable honnêteté intellectuelle.

Sachez que le bouddhisme est principalement une philosophie religieuse intégralement indienne . On peut le classer comme un bourgeon de l'hindouisme qui a fait fortune . Il est relativement divergent d'avec sa matrice originelle , mais il reste intrinsèquement hindou , et notamment pour le bouddhisme tantrique . La langue sacrée et les textes importants et fondateurs de cette religion sont en sanskrit , la langue sacrée de l'Inde .
Le bouddhisme est parfaitement intégré dans l'hindutva (l'indianité) . il n'est pas une pensée ou une religion étrangère à l'Inde et le dialogue avec la philosophie indienne n'a jamais été rompu et cela par nécessité structurelle . Si le bouddhisme indien est si faible aujourd'hui , c'est qu'il a été sauvagement réprimé et persécuté par les envahisseurs musulmans et que son sort fut dramatiquement lié à celui des centres politiques du nord de l'Inde.

Par ailleurs l'auteur présente le bouddhisme comme l'islam très occasionnellement , ou même aussi le christianisme en Inde , comme étant étrangers au système des castes . Hors c'est mal connaitre l'Inde que de l'affirmer , et c'est une curieuse erreur de jugement de la part de l'auteur .
Tous les cultes religieux de l'Inde comprennent une dimension en rapport avec les castes . Les castes sous leurs formes spécifiques propres aux différents cultes , s'imposent et s'enchevêtrent partout dans le sous-continent indien .
De plus les castes ne sont pas figées , elles évoluent socialement ( déclassement comme ascension sociale) , de plus elles ne sont pas par nature synonymes de groupes socio-économiques .

Par ailleurs certaines catégories sociales comme les gens qualifiables de sanyassins ou de sâdhus , des ascètes indous plus ou moins accomplis , sont hors castes dans un sens positifs . Ils sont au-delà des castes.
Par ailleurs le statut d'intouchables est loin d'être toujours un drame pour beaucoup de hors castes , car leur statut peut se lire dans un cadre de référence parallèle diffèrent , à l'hindouisme dominant , comme par exemple sur un mode ethnico-religieux . S'ils sont adivashis ( aborigènes) et donc les membres d'un univers religieux plus ou moins indépendants des grands cultes hindous . Un monde qui est assez cloisonnés par rapport à ces cultes hindous dominants . Finalement ces cultes « marginaux » placent de fait leur ressortissants dans un cadre religieux et social décalé par rapports aux fidèles de cultes plus rependus que les leurs , encore que ce n'est pas toujours vrai localement , et de loin . Dans de vastes secteurs géographiques , les hors castes dominent largement les terroirs et ils constituent quasiment la norme locale.

Donc voilà , un beau voyage au Népal …
Un beau voyage , si on ne tient pas trop compte des difficultés structurelles de l'auteur à aborder sainement l'hindouisme.
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