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Danièle Valin (Traducteur)
EAN : 9782070348282
128 pages
Gallimard (10/04/2008)
3.69/5   73 notes
Résumé :
Nouvelle édition de l'ouvrage paru en 1992 sous le titre "Une fois, un jour"

« Maintenant l’autobus s’ébranle, la vitre tremble et je frissonne de froid. Je vois encore ton lourd manteau, ton sac, mais pas tes yeux. Je ne sais plus si tu regardes vers moi. Il ne te fut pas permis de reconnaître ton fils vieilli, tu n’as vu qu’un homme qui te regardait à travers une vitre. »

Dans ce récit d’une enfance napolitaine, la mémoire n’est pas ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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le narrateur , un homme de soixante ans, est à l'arrêt dans un bus et à travers la vitre, "voit" sa mère.

En s'adressant à elle, durant ce temps d'arrêt, il va se remémorer toute sa vie. Il évoquera sa petite enfance quand sa famille vivait pauvrement dans une ruelle de Naples, mais aussi son père, l'ami qu'il a perdu...

Erri de Luca dans une très belle écriture, fait le récit d'une enfance souvent douloureuse.

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Des souvenirs d'enfance « Ville, dimanches : d'aussi loin que je me souvienne, je n'ai su en faire partie », plus que cela : une remémoration/création « C'est possible, car le possible et la limite mouvante de ce qu'on est disposé à admettre ». Naples, le dialogue à travers le temps du fils à la mère « Je suis ton fils, l'étranger dont le profil s'est stylisé entre la vitre d'une maternité, qui sépare le nouveau-né de sa mère, et celle d'un autobus ».

L'auteur est cet adulte penché sur son passé et l'enfant de cette invention « Mes yeux se fermèrent comme ils le font quand une image imprévue pénètre en soi et qu'on cherche à la retenir dans le noir pour bien la comprendre ».

Les mots sortaient difficilement de la bouche, les mots absents pèsent encore au présent « Par les mots : contre eux on ne pouvait pleurer, on ne pouvait répondre et moi, quand tu intervenais, je ne parvenais pas à en prononcer un seul, entre l'apnée et le bégaiement . On apprend bien tard à se défendre des mots ».

Soit c'est toujours un peu l'autre « Une grande partie du destin de chacun dépend d'une question, d'une demande faite un jour par quelqu'un, personne chère ou inconnu : on réalise soudain qu'on attend depuis longtemps cette interrogation, peut-être banale, mais qui sonne comme une annonce et on sait qu'on tentera d'y répondre par toute sa vie », encore des mots, des mots non prononcés.

Naples, la pauvreté, les nouvelles maisons, l'école, ces moments (in)oubliables « L'enfant mettait tout ensemble et sa vie était pauvreté et lutte secrète pour lui résister, le petit tablier qui se couvrait de craie et les engelures, la fièvre et les caresses. Après rien ne fut pareil ».

Un texte d'une grande pudeur, une réelle création littéraire, pas des souvenirs étalés sur la place publique « Beaucoup de détail ne forment pas un souvenir, beaucoup de souvenirs ne constituent pas un passé ».
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Un homme la soixante est dans un bus à l'arrêt, derrière sa vitre il voit sa mère lorsqu'elle avait la trentaine.
Les souvenirs affleurent.
Lorsque l'auteur écrit ce premier livre il a 39 ans, mais qu'importe la réalité chronologique pour dire ce que sont les fondements de l'homme qu'il est devenu.
« La chaise s'est faite dure et une vitre nous sépare, une vitre d'autobus. Moi, je suis assis à l'intérieur, je suis tourné vers la fenêtre et toi tu me regardes.
Tu ne me reconnais pas. Je suis un homme entré dans la soixantaine et toi, tu as la moitié de mon âge.
C'est possible, car le possible est la limite mouvante de ce qu'on est disposé à admettre. C'est ce qui arrive et je n'en suis pas troublé. »
Le lecteur va suivre les souvenirs en errance de l'enfant déplacé que fut Erri de Luca.
Ses parents se sont trouvés ruinés après la guerre, leurs biens disparus ils ont installé leur famille dans un petit logement dans un quartier pauvre de Naples, Montedidio, l'enfant se rappelle ce logement comme la maison de la ruelle. Jusqu'à ses neuf ans et les parents ayant rétabli leur situation financière ont déménagé pour un quartier pavillonnaire résidentiel. C'est la fracture pour cet enfant.
La maison de la ruelle, ce sont les draps des voisins qui sèchent en obstruant les fenêtres et en dégageant une forte odeur de lessive, âpre qui vous prend à la gorge.
Parlons des odeurs de l'enfance, ce sont celles des foyers, un mélange de tout. Mais il y a l'odeur du café, une vraie poésie :
« Il manque celle du café. C'est un parfum secret, protégé : celui qui le fait ne le gaspille pas, rebouche la boîte, met son capuchon au bec de la cafetière, ferme la fenêtre de la cuisine. Celui qui le fait le respire entier, à l'abri, avant même de le boire. »
Dans l'espace réduit de cette maison de la ruelle, malgré la promiscuité l'enfant avait de bonne note.
Ensuite, dans le pavillon tout s'effondre, il devient bègue, les mots lui résistent, ils se sent déplacé.
Il a déjà de l'intérêt pour « les petites gens »
Filamena, la soixantaine passée, est au service de la famille.
Lui sait : « Elle avait eu des temps meilleurs, une boulangerie et un mari. Elle conservait dans son corps le souvenir des deux, les mains brulées par le four et dans les os les douleurs du bâton les soirs d'ivrognerie. Ses paumes étaient si insensibles au feu qu'elle se passait de torchon pour saisir les manches des casseroles en les retirant du fourneau. »
Erri de Luca nous promène dans ses souvenirs, il dit le père absent car absorbé par son travail, la mère omniprésente dans une éducation rigide basée sur les bons résultats scolaires et la bonne tenue pour tenir son rang.
Une place difficile à tenir pour un « enfant plus pensif que sage ».
Il n'était pas l'enfant des attentes de ses parents.
Il y a des bulles d'air dans cette enfance ce sont les étés à Ischia et la liberté enfin trouvée, celle des journées au grand air, des plongées avec les copains surtout avec l'ami Massimo. Celui qui était son opposé. Mais un jour c'est le drame.
Il va jusqu'à penser dans sa détresse d'enfant : « Mieux valaient les coups, mieux valait courir le risque de faire un peu de bruit quand un jeu me tentait. Pas les mots : contre eux on ne pouvait pleurer, on ne pouvait répondre et moi, quand tu intervenais je ne parvenais pas à en prononcer un seul, entre apnée et le bégaiement. On apprend bien tard à se défendre des mots. »
Une promenade qui nous entraîne dans le passé de l'auteur mais également dans nos propres souvenirs, les bulles remontent à la surface.
C'est une introspection emplie de cette poésie unique à cet écrivain majeur, il forge les mots, les images pour en faire sortir l'essence de ce qui l'a fait homme.
Un premier livre qui dit déjà l'écrivain en devenir.
Un flot d'émotions partagé.
©Chantal Lafon

Lien : https://jai2motsavousdire.wo..
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Non ora, non qui." Paru en 1989 et premier livre de Erri de Luca.

C'est dans cette sorte de lettre ouverte à sa mère , à travers une belle déclaration d'amour , à partir d'une vieille photo, que l'auteur évoque son enfance, son adolescence dans une famille d'abord ruinée par la guerre . C'est à Naples, dans un quartier pauvre et bruyant. La situation s'améliorera mais le jeune garçon perdra ses repères dans la nouvelle maison ;
Il révèle sa sensibilité et son inquiétude latente.
Erri de Luca nous offre toute une succession d'images de la pensée et du coeur dans un style non linéaire parfois difficile à suivre.
Cette lecture demande le silence environnant, de l'attention et une immersion dans ses pages;
Dans ce premier roman, ce sont déjà toutes les qualités des ouvrages suivants.
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Retour sur une enfance austère dans les quartiers pauvres de Naples, au sein d'une famille bourgeoise ruinée par la seconde guerre mondiale, et qui ne supporte ni la honte, ni la gêne matérielle, ni la promiscuité....Pour les enfants ce n'est jamais le moment ni le lieu de s'amuser, ni de faire du bruit. Les sentiments, les émotions doivent être refoulés, intériorisés.... Ce court et dense texte explique la genèse d'une vie et d'une oeuvre placées sous le signe de la pudeur et d'un éloquent et poétique silence, en même temps qu'il règle des comptes avec une famille aimante mais trop dure et exigeante.
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critiques presse (1)
Actualitte
17 avril 2018
Un homme regarde par la fenêtre de l’autobus dans lequel il est installé. Sur le trottoir, sa mère. C’est une jeune femme alors qu’il est déjà un vieil homme. Reviennent à la surface, comme des bulles, des images du passé, tendres et nostalgiques, anciennes et émues, tristes ou drôles.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Citations et extraits (42) Voir plus Ajouter une citation
C'est à ce moment-là que je pris l'habitude de ne pas terminer mes devoirs, d'en laisser une partie en blanc. Lors des interrogations aussi je gardais pour moi une partie de la réponse que je devais à l'enseignant. Je me réservais une part d'incomplétude, les choses allaient mal pour moi, je commençais à grandir.



Il y a des pauvres pour qui le riche n'est pas un idéal. Il y a des pauvres, matériellement et spirituellement, insoumis. Si de mon banc je ne répondais pas au professeur qui me posait la question laissée sans réponse par l'élève au tableau, ce n'était pas par sentiment de solidarité. Je n'en éprouvais aucun envers mes camarades. Par tempérament et par conviction, j'étais hostile à la méthode qui nous incitait à rivaliser entre nous.



Tendus vers un résultat, mes camarades agissaient et réagissaient de la même façon lors des nombreuses épreuves scolaires. Ils n'apprenaient pas à être les meilleurs, mais s'initiaient à des techniques d'hostilité.
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– Papa, si moi je ne veux pas être en attente et si je veux être sans attente, est-ce que je peux ?
Alors il cessa de se raser, ouvrit la porte en grand et, comme s'il avait compris quelque chose, je ne sais quoi, dit ces quelques mots : "Si tu es capable de vivre sans attente, tu verras des choses que les autres ne voient pas." Puis il ajouta encore : "Ce à quoi tu tiens, ce qui t'arrivera, ne parviendra pas par une attente." Il avait la moitié du visage rasée et l'autre encore pleine de savon, dans une main le rasoir et dans l'autre le blaireau. Il se pencha légèrement vers moi pour se faire comprendre.
Je le regardai de tous mes yeux. Ce n'était pas lui, même sa voix était différente. Quant à moi, je n'étais pas certain d'être celui qui avait posé la question.
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Alors, je ne sais comment cela se produisit, je compris que je n'étais pas témoin de tout ce mal et du monde, mais responsable. Toi, tu en faisais l'inventaire, m'en demandant compte rien qu'en parlant. Oui, maman, derrière son silence rêveur un enfant crut être la dernière parcelle de Dieu, fragment détaché d'un créateur qui avait laissé échapper son œuvre de sa bouche et de ses mains. En cet enfant, Dieu ne savait plus quoi faire ou quoi dire, sinon écouter.
Je ne l'ai pas fait exprès : c'est cela que je pensais, sans arrêt, sous le flot de tes histoires. C'était une bonne formule pour absoudre un enfant, mais bonne aussi pour enchaîner un Dieu aux malheurs du monde. Je ne l'ai pas fait exprès : je comprenais le monde, ne me souvenant plus l'avoir engendré. Je ne m'étonnais pas, puisque je n'avais même pas souvenir de ma naissance. Du reste aucun Dieu n'a souvenir de la sienne.
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Quand arriva le temps de la nouvelle maison, le soleil nous enveloppa et l'obscurité entra progressivement dans les yeux de papa. Il prenait beaucoup de photographies, il en fit par centaines, jusqu'à ce que son viseur s'offusque et que sa cible lui échappe.
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Tu regardes devant toi un point de l'autobus qui a surgi en face. Tu n'as pas ton visage de vent. Je nommais ainsi l'expression que tu prenais lorsque tu passais dans la rue, semblant affronter le siroco.... La chaise s'est faite dure... je suis assis à l'intérieur, je suis tourné vers la fenêtre et toi tu me regardes.
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Videos de Erri De Luca (86) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Erri De Luca
Rencontre animée par Olivia Gesbert
De la bibliothèque paternelle à l'ombre de laquelle il a grandi jusqu'aux chantiers où il a été ouvrier, Erri de Luca a noué avec la lecture, puis avec l'écriture un rapport particulier pour bâtir une oeuvre double, celle d'une fiction romanesque aux forts accents autobiographiques et celle d'une réflexion sur l'Écriture. Depuis trente ans, c'est une oeuvre foisonnante et protéiforme qu'il bâtit, caractérisée par un style limpide, poétique, épuré. Ponctués de pensées, de métaphores, d'aphorismes, ses récits endossent souvent la forme d'une fable, d'une parabole empreinte d'une touche de merveilleux, dans une langue unique. Pour cette édition Quarto, ont été retenus une dizaine de textes publiés auxquels s'adjoignent cinq textes inédits, qui portent en eux la puissance de l'écriture d'Erri de Luca dans des genres littéraires variés, sa réflexion sur l'appartenance et l'identité, le poids du passé et l'importance de l'histoire, sur la fragilité et l'importance des relations humaines.
« Nous apprenons des alphabets et nous ne savons pas lire les arbres. Les chênes sont des romans, les pins des grammaires, les vignes sont des psaumes, les plantes grimpantes des proverbes, les sapins sont des plaidoiries, les cyprès des accusations, le romarin est une chanson, le laurier une prophétie. » Trois chevaux, Erri de Luca
À lire – Erri de Luca, Itinéraires, Gallimard, coll. « Quarto », 2023.
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