Ce petit livre au format militant – couverture rouge et gros titre en blanc - a pour vocation de constituer une somme d'exemples pratiques d'application de la laïcité en France.
Les premières pages sont consacrées à un bref rappel (à l'ordre) de ce qu'est cette laïcité. Un extrait vaut mieux ici que n'importe quelle périphrase :
« De l'hypocrisie souvent, de l'hystérie au pire. Et beaucoup de malentendus. Sans évoquer l'absurde confusion entre athéisme et laïcité, disons d'emblée que la laïcité n'est pas la tolérance, cette indulgence d'Ancien Régime, cette royale condescendance par laquelle un supérieur, qui pourrait ne pas le faire, lève un interdit ou octroie telle ou telle impunité à un sujet. (…) [La laïcité] est avant tout une construction juridique fondée sur une exigence de raison : l'égalité en droit de tous les êtres humains. »
Le ton est donné. Ce guide s'emploie ensuite à détailler en ordre alphabétique un certain nombre de cas de figures pour lesquels la laïcité entre en compte : aumôneries, autorisation d'absence, blessure, bureau de vote, calendrier civil, cantine scolaire, caricature, cérémonie religieuse, cimetière, circoncision, cloches et muezzin, crèche de Noël, département concordataire, dimanche, édifices cultuels, entreprise de tendance, entreprise privée, financemennt, foulard, funérailles nationales, histoire et mémoire, hommes de foi, imams, injure et blasphème, jupe longue, liberté de l'art, mariage, naissance et mort, non-mixité, nourriture, politique et foi, prétoire, publicité, sectes, services au public, services publics, vues de l'étranger, zèle (excès de).
Pour chacun de ces points, les auteurs s'attachent à reprendre le contexte historique et législatif propre aux premiers questionnements sur le sujet abordé. Il peut s'agir de la loi de 1905, mais aussi de pratiques plus anciennes, ou de revendications récentes. Dans tous les cas, ils prennent également en compte l'évolution actuelle de ces contextes et établissent successivement des réponses laïques à donner pour chaque problématique soulevée, quitte à déléguer parfois cette réponse au règlement intérieur de l'entreprise concernée par exemple. Ainsi, ils s'attachent, dans le dernier chapitre notamment, à poser les limites à ne pas dépasser pour cette laïcité de l'Etat active sans être militante.
Les réponses données de manière systématique pour chaque cas peuvent heurter ou paraître brusques au premier abord - la tolérance frisant le relâchement n'est pas de mise chez Régis Debray et Didier Leschi. Force est de constater toutefois que ces réponses sont toujours argumentées, illustrées et nuancées. Si le désaccord est possible, la rigueur et le raisonnement des auteurs invitent le lecteur offusqué à faire taire ses émotions premières au profit – en bon humaniste - d'une argumentation solide et rationnelle.
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Ce petit guide pratique de la laïcité examine un certain nombre de points délicats dans l'application du principe de laïcité en France. C'est factuel, précis, parfois terre-à-terre et sans considérations générales. Parmi les sujets épineux, je citerai par exemple: les menus de cantine scolaire; le blasphème; les problèmes liés à la naissance, le mariage, la fin de vie; la non-mixité; la formation des imams; les pratiques très particulières en Alsace-Lorraine, etc. Quoiqu'un peu sec, ce petit livre me semble le bienvenu dans un contexte où les polémiques franco-françaises se succèdent, notamment au sujet de la visibilité de l'Islam dans notre pays.
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De l'hypocrisie souvent, de l'hystérie au pire. Et beaucoup de malentendus. Sans évoquer l'absurde confusion entre athéisme et laïcité, disons d'emblée que la laïcité n'est pas la tolérance, cette indulgence d'Ancien Régime, cette royale condescendance par laquelle un supérieur, qui pourrait ne pas le faire, lève un interdit ou octroie telle ou telle impunité à un sujet. (…) [La laïcité] est avant tout une construction juridique fondée sur une exigence de raison : l'égalité en droit de tous les êtres humains.
Rien ne m’empêche de dire ou d’écrire sous notre latitude « L’Islam est la religion la plus con » - appréciation pour le moins sommaire, certainement indéfendable, mais légalement inattaquable. Dire ou écrire bêtement « Les musulmans sont des cons » tomberait en revanche en tant qu’outrage sous le coup de la loi et éventuellement du gendarme. (p. 101)
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