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Voilà un très grand roman : très structuré dans sa construction, très sensible dans le rendu psychologique complexe des personnages, très finement observateur dans sa peinture de la société américaine. D'ailleurs, vous en connaissez beaucoup des romans américains qui s'attaquent au mythe fondateur de leur nation : le rêve ?


Parfois lorsque je vois une belle critique sur un livre intéressant, je classe ce dernier en pense-bête, j'en ai 36 actuellement, j'en ai extrait une bonne vingtaine sur une liste que j'emmène avec moi. Figurez-vous que je n'en ai trouvé aucun disponible à la Bibliothèque. C'est donc sans influence, ni d'une émission littéraire, ni d'une critique quelconque, ni d'un avis babelien, en totale liberté que j'ai choisi ce livre. Ou bien la liberté ne serait qu'une illusion, car j'avais « envie » d'un livre et « besoin » d'en emprunter un pour ne pas couper la permanence du cycle vertueux, emprunter-rendre-emprunter... Choisir un livre, c'est prendre le risque de la déception, comme pour un premier baiser qui conduit éventuellement au risque de s'engager dans une relation profonde et d’aliéner sa liberté. Troublant quand ces sujets : envie, besoin, liberté, relation, déception se retrouvent par la suite au cœur même de l'ouvrage sélectionné.


Rétrospectivement l'on se demande pourquoi celui-là ? Je me souviens sur le coup de quelque extrait lu devant le rayonnage avoir fait une association au bûcher des vanités de Tom Wolfe et à Andy Warhol, beaux présages effectivement. Ma seule hésitation a été qu'il ne soit pas dans la langue de Shakespeare, mais comme il y a peu de chances que je me rende encore aux Etats-Unis, elle a été de très courte durée. Si la langue n'y est pas, les accents eux y seront (en français forcément), car ce récit a tout d'une tragédie sauf la fin; ici il n'y a pas vraiment de fin, plutôt une longue fuite en avant que l'on pressent plus tragique encore. En langue originale, le titre Palladio, plus court, plus énigmatique, porte au questionnement et aux regrets d'une Utopie avortée.


Rideau : Molly Howe, John Wheelwright, Mal Osbourne. John aime Molly et John admire Mal jusqu'à la fascination, John qui veut sauver Molly, illusion. Mal aime Mal et veut l'inaccessible entre autre Molly, Mal qui veut changer le monde, illusion. Molly sait fasciner, sait qu'elle fascine, mais ne sait pas aimer car elle ne s'aime pas. Ah, Molly qui n'arrive pas à s'engager, qui fuit pour garder sa liberté, illusion.
«La grande roue n'attend pas
Regarde là, comme c'est beau
Mais pourquoi restes-tu en bas?
Elle veut t'emmener là-haut
Elle tourne, elle tourne
Et mes larmes de joie
Qui coulent, qui coulent, sont si amères
Pourquoi?
Illusions » (Pierre Rapsat)


Je ne serais pas complet sans vous parler un peu d'Andy Warhol. Mon premier contact a été à l'Art Institute of Chicago, il y avait ses images de boite de soupe, ses images de Marilyn Monroe, peut-être bien des Maos et il me semble des images de dollars. Ce que je me souviens en tout cas fort bien c'est de ma perception : ce n'est pas de l'art, mais de la récupération pour faire du fric facile, bien commercial, bien américain. Bien plus tard grâce à une visite guidée de la très thématique exposition Life, Death and Beauty au BAM à Mons aujourd'hui capitale Européenne 2015 de la culture, j'ai revu mon jugement. Grâce aux explications sur le rouge à lèvre expressément excessif des Marilyn et surtout aux tableaux où les squelettes apparaissent sous la peau, j'ai compris que Warhol pouvait véhiculer un message subversif et critique sur le made in America. Car dans cette tragédie, il est beaucoup question d'art plus encore que de pub.


En résumé, un petit coup de pub pour un tout grand roman qu'il faut avoir lu et pour Mons 2015 qu'il faut avoir vu.
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A vrai dire, je ne saurais dire si j'ai aimé ce long pavé mais je n'ai pas détesté non plus.
L'histoire est intéressante car la fabrique des illusions nous parle du rêve américain, des espoirs et des désillusions de ceux qui ont pu y croire..
le personnage de Molly Howe ainsi que les membres de sa famille sont très bien construits et remonter à l' enfance de Molly ,et y consacrer autant de temps est judicieux mais ces longueurs sont parfois lassantes .
Le chassé croisé narratif est appréciable car on se met facilement dans la peau des personnages ce qui fait que l'on est absolument pas surpris de la fin du livre. On a appris à connaître le personnage de Molly Howe et on sait d'avance ce qu'elle fera.
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Tout ça pour ça. C'est l'impression globale qui ressort de cette longue lecture dont l'originalité principale est la construction.

Nous sommes au Etats-Unis, de nos jours. Deux histoires cheminent en parallèle, et l'on pressent qu'elles vont converger, même si rien ne le laisse présager au départ. John travaille dans la publicité à New-York puis suit dans le Sud un transfuge de sa boite qui se lance dans une entreprise très novatrice et révolutionnaire dans le domaine de la communication publicitaire. Molly est une ado sulfureuse, qui sème la zizanie partout où elle passe, et quitte le Sud pour rejoindre son frère en Californie. Ni l'un ni l'autre ne se conforment à ce qui devrait être leur emploi du temps d'étudiants, l'une squatte les cours au hasard, l'autre prend la tête d'une secte évangéliste.

Revenons à ce qui fait l'originalité du roman : un premier chapitre interminable, plus de 350 pages sans respiration, avec pour seul artifice le raccourcissement progressif des passages alternés de l'histoire des deux protagonistes, un deuxième chapitre sur le même mode, pendant 150 pages, puis un dernier en épilogue sur 70 pages qui donne un peu l'impression que l'auteur lui même s'est lassé. Ajoutons à cela des dialogues sans tirets ou guillemets. C'est tout de même une rude épreuve ....

Tout n'est pas négatif pour autant : l'écriture sauve l'ensemble par sa fluidité. Et puis il est intéressant d'explorer ce milieu de la publicité, où art et finances se côtoient pour le meilleur et pour le pire. Les personnages sont bien campés et leur destin ne laisse pas indifférent, tout Côme le désarroi de cette société déboussolée par les affres de cette interminable crise mondiale.

Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Si y'a un truc qui m'horripile au quotidien, c'est bien la PUB !
Les slogans racoleurs, les effets de mode, le matraquage permanent, les campagnes ciblées et les spots vides de sens rediffusés à l'envi, la marchandisation du "temps de cerveau disponible", le "j'achète donc je suis", beurk beurk et beurk. Très peu pour moi.
Alors pourquoi, me direz-vous, m'être tourné vers ce roman dont les personnages, si l'on en croit la 4ème de couverture, semblent évoluer dans un monde de consumérisme et de superficialité de mon point de vue très peu engageant ?
Eh ben tout simplement parce que je garde un très bon souvenir de ma première rencontre avec Jonathan Dee (Ceux d'ici), et que j'étais curieux de voir s'il arriverait à me convaincre à nouveau dans cet exercice autrement plus périlleux : celui de m'intéresser à la pub ! Allait-il trouver une porte dérobée pour me faire entrer dans cet univers que je m'efforce généralement d'occulter (avec plus ou moins de succès...) ? Allait-il réussir à démonter pour moi les rouages secrets de cette fameuse "fabrique à illusions" afin de m'aider à y voir un moyen d'expression artistique exaltant et débridé, aussi "respectable" que les autres ?

440 pages plus tard, il me faut bien admettre que la réponse est oui, Jonathan Dee a encore gagné son pari !
Comme la première fois, j'ai eu un peu de mal à m'acclimater à sa prose plutôt décousue, avant de me laisser complètement embarquer par ce roman. L'auteur y met en lumière, avec un cynisme qui m'a beaucoup plu, tout un pan de la société américaine, "laquelle masque son absence de racines culturelles sous la consternante exaltation de la nouveauté et laquelle, au lieu de se soucier d'éternité, a parachevé l'art d'oublier, de manière à pouvoir réapprendre les mêmes choses à l'infini avec un enchantement sans cesse ravivé."

Son histoire, très bien menée, met en scène deux personnages principaux aux caractères finement analysés et aux états d'âme soigneusement disséqués.
La belle Molly, éprise de liberté et d'émancipation totale, multiplie les aventures sans lendemain. L'autodénigrement maladif dont elle fait preuve l'empêche de concevoir que les hommes puissent sincèrement lui vouloir du bien.
John, quant à lui, plaque le même jour sa compagne et son agence de pub "traditionnelle" pour suivre son patron, l'excentrique et charismatique Mal Osbourne, dans un nouveau projet aussi ambitieux qu'incertain. le bonhomme s'est en effet mis en tête de révolutionner de fond en comble le monde de la publicité ("le plus grand mode d'expression de notre époque [dont le budget annuel mondial, entre parenthèse, est plus important que celui dévolu à l'éducation publique]") : adieu les accroches creuses et les spots pré-formatés, place aux véritables oeuvres d'art, aux performances spectaculaires et complètement décorrélées des marques qu'elles sont censées représenter. Il est en effet entendu que "les publicités n'ont rien à voir avec la qualité, la valeur ou la nature du produit qu'elles promeuvent, et ce depuis très longtemps. Cette relation est totalement caduque." C'est le début d'une expérience sociale et artistique inédite, qui évidemment ne se déroulera pas tout à fait comme prévu...

Bien sûr aussi, comme on le devine vite, les destins de Molly et John se trouvent inextricablement liés sans pour autant - et pour moi c'est heureux ! - que l'auteur ne verse de manière trop caricaturale dans la romance bébête. Bien au contraire, la relation qui se développe entre elle (l'Insaisissable) et lui (l'Idéaliste) se révèle être d'une étonnante complexité, et j'ai pris beaucoup de plaisir à suivre leur curieux pas de deux.

Le principal point fort du roman n'en reste pas moins cette double réflexion très pertinente autour de l'art (la conception d'une oeuvre, la façon dont elle est diffusée et celle dont le public se l'approprie) et de la publicité, que Mal Osbourne qualifie non sans une certaine justesse "d'authentique parasite mental".
Pour lui, "nous vivons dans une époque où l'avant-garde a cessé d'exister, où plus rien ne choque personne parce que nous avons tout vu, tout fait, tout enfreint, tout renversé. [...] Pour retrouver cette puissance avant-gardiste, il faut, paradoxalement, travailler dans le plus banal de tous les médias. [...] Si on veut faire quelque chose d'intéressant, quelque chose de nouveau, on doit oublier les livres, oublier la peinture, la sculpture, le théâtre, le journaliste, le cinéma. On doit s'intéresser à la publicité. On doit annexer son incroyable capacité de destruction."
Tout un programme, n'est-ce pas ?
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Avant de commencer ma critique, je pourrais citer des bribes de jean-louis Aubert : elle avait à peine avalé ses 15 ans, elle parlait plus à ses parents, nan, depuis son histoire d'amant etc.etc, elle c'est Molly, figure incarnée de la Vie ou de la jeunesse qui empli la vie des hommes et de manière inexorable les quittera, les laissant pantois et sur leurs faims. Bon roman, sans doute un peu expédié rapidement sur la fin, à nouveau l'Amérique et ses montagnes-russes constituées de réussites et d'échecs, une famille moderne dont le père travaille chez IBM, une éducation un peu ratée de leurs marmaille, une sorte de Xanadu de la publicité réunissant des artistes, graphistes, romanciers qui oeuvrent pour l'art nouveau, la publicité ne vendant rien. Des chassés croisés entre les personnages, des activistes un peu frapa dingues. Une vision cynique de l'art, de la manipulation des masses. Un bon roman exalté, on peut y retrouver un peu de Don Delillo et de Tom Wolfe, quoique un peu en dessous, il n'empêche ce livre est solidement construit, les personnages sont bien troussés, vraiment plaisant.
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Le livre s'ouvre et se referme avec le personnage de Molly, un être à part, elle traverse tout le roman comme une étoile filante, dégageant un magnétisme troublant pour son entourage. Dans cette période, déjà difficile, de l'adolescence, elle va avoir une aventure fugitive avec un père de famille. Se sentant déjà différente, elle va pourtant prendre de plein fouet un rejet généralisé au sein même de sa famille, pourtant « cette espèce d'ostracisme sidéré n'était pas grave », elle éprouve toujours un certain détachement. Alors que, de son côté, elle est capable d'évaluer un homme en moins de cinq minutes, de leur côté les hommes « ne cesseraient jamais d'essayer de pénétrer un mystère qu'ils n'avaient aucune chance de comprendre ». de plus, cette place de paria qu'on lui assigne, va devenir un mode de vie, elle existe désormais dans la marge, elle se veut presque invisible, en fuite permanente. Elle va même jusqu'à éprouver de la douleur qu'on puisse se soucier d'elle, elle n'éprouve pas vraiment de l'amour, mais une seule fois, « une envie éperdue d'être normale ».
L'auteur opère une coupure en alternance dans la narration, pour présenter un autre personnage qui travaille dans le milieu de la publicité, on va suivre un moment crucial de sa carrière, sa rencontre avec un personnage emblématique de ce milieu qui lui propose de travailler avec lui. Ce gourou cherche à opérer un rapprochement entre les pratiques artistiques et la culture de masse, les objets ou les entreprises à promouvoir passant au second plan, la publicité devenant elle-même une oeuvre d'art à part entière. L'auteur leur oppose le discours de la contre-culture à travers les personnages d'un cinéaste et de deux universitaires activistes. Cette collusion entre art et publicité est un discours typiquement américain, alors que l'Europe a une culture ancestrale, « contrairement à l'Amérique; laquelle masquait son absence de racines culturelles sous la constante exaltation de la nouveauté, laquelle, au lieu de se soucier d'éternité, avait parachevé l'art d'oublier, de manière à pouvoir réapprendre les mêmes choses à l'infini avec un enchantement sans cesse renouvelé ». La lecture du roman m'a beaucoup fait penser à l'ouvrage d'Umberto Eco, La guerre du faux.
Les deux histoires vont se rejoindre, la troublante Molly créant le manque sur son passage, ne laissant aux hommes qu'elles croisent que la possibilité de constater cette perte et de résoudre l'aporétique de l'amour, entre maîtrise et autonomie, la singularité de cette jeune femme étant qu'elle se refuse à subir cette dialectique, pour elle « (…) il vaut mieux ne pas être aimée du tout que d'être aimée d'une manière qui n'est pas authentique ». L'écriture se déploie avec beaucoup d'aisance malgré sa densité, la description de la psychologie des personnages est très élaborée, la tentative d'écriture expérimentale sur le dernier quart du livre est superflue.
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Molly Howe grandit dans la petite ville d'Ulster, dans l'État de New York. Ville née uniquement grâce à l'arrivée d'IBM dans les années 1960-70 et qui s'avèrera aussi fragile qu'une coquille vide. C'est dans ce décor au bord du déclin que s'installe la famille Howe et qui sera comme une illustration de Ulster : une mère dépressive, un père jouant les hommes heureux à tout prix, un fils qui deviendra gourou et Molly, insaisissable et distante.

A dix ans de là, à New York, John Wheelwright travaille dans une agence de publicité après avoir fait des études d'histoire de l'art. Malgré son succès, John est un peu insatisfait de l'univers de la pub. Il se fait alors remarquer par l'un des fondateurs de l'agence où il travaille : Mal Osbourne. Ce dernier a une vision singulière de la pub : « le langage de la publicité est le langage de la vie américaine : de l'art américain, de la politique américaine, des médias américains, de la loi américaine, des entreprises américaines. En changeant ce langage, par voie de conséquence, nous changerons le monde. » Osbourne décide de créer une communauté d'artistes à Charlottesville pour réinventer la pub et John décide le suivre.

Ce deuxième roman de Jonathan Dee traduit en français fait montre des mêmes qualités et défauts que « Les privilèges ». La construction du livre est encore une fois brillante. La première partie alterne les vies de Molly et de John sans rapport apparent et à des époques différentes. L'alternance s'accélère petit à petit pour en arriver à leur rencontre. La deuxième partie est le journal de John à Charlottesville. La dernière reprend la voix d'un narrateur neutre pour clôturer le roman. Ces choix apportent beaucoup de rythme au livre et Jonathan Dee est passé maître dans l'art d'alterner les points de vue.

« La fabrique des illusions » est une critique du monde des images et de la pub en particulier à travers la colonie d'Osbourne. le personnage fait bien entendu penser à Oliviero Toscani (le créateur des campagnes de Benetton qui avait fait beaucoup de bruit à l'époque). Il veut changer le monde mais sa démarche finit par être cynique. Remplacer la pub par des oeuvres d'art dévalorise le travail intellectuel des artistes et annihile tout message subversif porté par l'art. le consumérisme galopant n'en est en rien modifié, la pub a au moins l'honnêteté de son objectif. Elle ne peut utiliser le langage subtil et intelligent des artistes. Dans cet univers voué au désastre, se retrouvent Molly et John. Deux personnages extrêmement intéressants et décortiqués sous la plume de Jonathan Dee. Molly semble ne faire que passer, instable et indifférente, elle est dans l'incapacité d'aimer. John est notre Candide, plein d'illusions, d'envies, il ira de déception en catastrophes. Serait-il à l'image du rêve américain ?

Malgré sa brillante construction et sa fine analyse sociétale, je suis restée un peu extérieure au roman. Comme pour « Les privilèges », Jonathan Dee regarde son monde avec beaucoup de distance et laisse peu de place à son lecteur. J'aurais aimé ressentir de l'empathie ou de l'antipathie pour les personnages, me sentir plus impliquée dans leur histoire.

« La fabrique des illusions » nous montre encore une fois le grand talent de Jonathan Dee, auteur brillant et lucide sur notre époque. S'il laisse un peu plus son lecteur rentrer dans son monde, ce sera grandiose. J'attends donc la suite.
Lien : http://plaisirsacultiver.wor..
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« le seul moyen de rester pure en ce monde était de vivre au coeur d'un mensonge. » Molly a vite appris à cultiver le mensonge comme un art de vivre, d'abord au sein de sa famille où le vernis de l'apparence se cultive au quotidien, puis auprès des hommes que sa route croise. John, étudiant fade et transparent, va l'apprendre à ses dépens, qui s'éprend de la jeune femme. Après un temps de vie commune, Molly décide de rompre brutalement et ne donne plus signe de vie. Dix ans s'écoulent. John est devenu un publicitaire renommé, le bras droit de Mal Osbourne, un homme à la personnalité et aux idées aussi peu conventionnelles que géniales. Molly, qui a le don de semer la destruction partout où elle passe, va alors faire retour dans la vie de John…

« La fabrique des illusions » est un roman époustouflant qui tire de sa longueur (un peu plus de 400 pages) toute sa saveur, mais aussi ses limites. Il se présente comme un objet complexe, porteur de multiples facettes, que savent souligner les mots.
Un objet attachant parce qu'il présente d'abord des individus, des êtres singuliers : l'auteur brosse le portrait d'une famille américaine, conte également une histoire d'amour au goût de démesure. Mais derrière chaque individu, c'est une société, dans ses formes extrêmes ou décalées, qui est ici pointée du doigt : en ce sens, ce roman se veut une satire du monde de la publicité et des artistes, une dénonciation d'une forme d'extrémisme religieux, avec un fil conducteur, porté par le titre : l'apparence et ses fragilités. Quelle illusion de soi donne-t-on à voir à l'endroit même où l'on s'efforce de dénoncer l'illusion des êtres et du monde ?
Avec une plume habile, et une grande finesse psychologique, l'auteur sait peindre la folie ordinaire, les failles humaines qui prennent d'abord naissance au sein des familles, les mensonges quotidiens qui savent mener jusqu'à l'absurde.
Une oeuvre tout en complexité, à l'image du message qu'il porte : au final, l'auteur s'interroge sur les mots, peut-être eux-mêmes vecteurs d'illusion… habile mise en abyme de cette « fabrique des illusions » ?
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Pas très emballée par ce roman sur le monde de la pub.
J'avais découvert avec plaisir Jonhattan Dee avec "les Privilèges", ce deuxième essai aura été beaucoup moins concluant.
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La fabrique des illusions, c'est sans doute d'abord Palladio, la boîte de pub qui donne son nom originel au livre. C'est aussi la publicité, bien entendu. Et la famille ? Et l'amour ? Et même le fait, pas si simple, d'écrire un livre.
J'ai été dévasté par le fait qu'il existe des familles qui créent des monstres de silence comme Molly. Pas même un jeune homme aimant et compréhensif ne peut lui être d'aucune utilité. Pire, l'amour le plus naturel, sexe et présence et tissage du cocon, est ressenti presque comme pervers par quelqu'un qui n'a pas été aimé dans son enfance (ou mal).
Par ailleurs, l'art est subversif et la pub, même révolutionnaire, est conservatrice. Mais surtout c'est le temps qui donne son aval, qui créée les échelles de valeur, et elles sont mouvantes. Peut-être que du monceau de sottises que l'on grave, dessine, chante, crache ou pire, quelques tendances, quels noms et quelques oeuvres survivront, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, ou sans aucune raison. Mais la pub, comme art, mourra. Elle est déjà morte.
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