Encoooooooooore un récit de marche!(si, vous l'avez pensé!) Oui mais là il s'agit de parcourir le Brésil du sud (Chui, proche de l'Uruguay) au nord (Oiapoque, près de chez nous, enfin, la Guyane). Des milliers de kilomètres en sept mois et demi. de la pampa à la forêt équatoriale, le long d'une route (voire une piste) sillonnée par les camions et généralement bordée de clôtures (comme quoi il n'y a pas que la Sologne...), et donc au bord de laquelle il s'avère délicat de monter en toute sécurité Rotunda, la petite tente censée abriter notre marcheur, qui souvent se rabat sur les nombreuses stations-services, offrant eau, nourriture, douches, et rencontres.
Découvertes intérieures du marcheur qui ne s'appesantira pas sur ses difficultés et comme Rufin découvre le 'bonheur de se sentir allégé'. Cependant par prudence il fallait bien prévoir eau et nourriture pour quelques longues étapes...
"Tout d'abord, admettre ne rien maîtriser de l'instant qui suit. Sillonner chaque journée sans savoir ni où ni comment on dormira le soir venu. Et, à l'encontre des inquiétantes chimères ourdies par l'imagination, constater que tout se déroule invariablement."
Frank Degoul est docteur en anthropologie et à ce titre a déjà roulé sa bosse dans pas mal d'endroits. Mais là, il ne s'agissait pas de séjourner en un lieu et d'étudier longuement, mais de "passer plutôt que demeurer". Au fil du voyage, des paysages, des rencontres, se révèle un Brésil multiforme. Multiracial, on le savait, et les rencontres avec des indigènes déracinés sont tristes. Mais j'ignorais totalement l'existence de villes établies il y a 200 ou 100 ans par des immigrants allemands, italiens...
Aux moments de découragement, que de belles (et courtes) rencontres faisant oublier les déceptions d'autres. L'auteur a l'art de la description de ces moments parfois fugitifs, brefs en tout cas.
"Il semble qu'au Brésil, marcher soit le symptôme d'une déchéance. Marche celui que la misère met au pas- le vagabond, l'errant; marche encore celui qui s'ensauve, qui s'évade. La marche n'est pas l'instrument d'une découverte mais une sentence, la bannière des réprouvés."
Voleurs de grands chemins, pumas, les dangers guettaient notre voyageur. Intrépide, il a continué!
"Cette longue marche n'est pas prestigieuse
Cette longue marche n'est pas humanitaire
Cette longue marche n'est pas dans les pas de ...
(...)
Cette longue marche ne fera pas un succès de librairie
où un aventurier solitaire, apollinien,
au regard aussi pur que les pays qu'il parcourt
(...)
Mais parvient avec son entier courage et ses ultimes ressources
à regagner Paris pour y briller au Salon du livre.
(...)
Cette longue marche est aussi vaine qu'une oeuvre d'art
et sans doute aussi indispensable à son auteur."
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