Pardon les enfants

Rose a déjà subi un viol à l'adolescence. Puis un second, mais le mot n'a jamais été prononcé. Cette fois ci un enfant germe en elle.
Cependant, le remède est pire que le mal. Victime d'une relation non consentie, elle est alors victime de choix non consentis, l'implacable machine du droit à l'avortement s'est muée en un devoir d'avortement. On la pousse, on l'assoit, on l'examine, on lui fait avaler ce redoutable cachet qui fait passer l'enfant. Après lui avoir volé son innocence, on lui vole sa maternité.

C'est ainsi que débute l'itinéraire de l'auteure qui nous confie, avec une simplicité quasi factuelle, son histoire de femme, de mère. Je ne suis pas d'accord avec l'étiquette "livre religieux", c'est un livre humain, un point c'est tout.
Je ne suis pas d'accord avec la religion non plus, mais j'ai beaucoup apprécié ce témoignage émouvant d'une femme dont le combat et les choix s'expliquent par son vécu. Bien sûr on flirte avec la limite entre laïcité, religion, droit républicain, éthique, droit de la femme, droit de l'enfant à venir. C'est un livre qui remet en question mes positions fermes car on n'a rarement la voix de l'adversaire autrement que par les extrémistes. Cette fois ci je suis touché par ce témoignage.
Je souhaite à ce livre une belle vie, qu'il aille porter sa parole, différente du consensus, et que Rose vous questionne avec douceur et respect comme elle l'a fait avec moi.

Un récit de vie et de foi qui met en lumière les questions éthiques que pose l'avortement.
Rose est une femme qui rencontre des hommes comme tout autre femme normale. Malheureusement, une entrevue se passe mal. Elle est touchée et pénétrée dans sa chair sans son consentement. Au retour de ce séjour à la Réunion, à la suite de ce viol, elle s'aperçoit qu'elle est enceinte. Elle vit alors un second traumatisme puisqu'elle avorte de cet enfant, suite à la demande de son compagnon qui était resté en France. La suite des événements est tortueuse, difficile et remplie d'obstacles que Rose apprendra à surmonter grâce à la foi.
Il est difficile d'être critique face à un récit de vie. Les péripéties qui se déroulent dans l'esprit du lecteur ont réellement été vécues voire subies par l'auteur. le style est saisissant, les paroles tombent et les mots sont durs. Les métaphores utilisées par l'auteur sont particulièrement poignantes notamment lorsqu'elle compare la pénétration non consentie comme un venin...
Au niveau de la narration, la façon de rapporter les événements amène une certaine lourdeur au milieu du roman. La succession des péripéties et des déboires amoureux peuvent perdre le lecteur et amener de l'incompréhension face à la naïveté de Rose... mais au fil du récit, la quête que mène l'auteur pour se trouver donne de nombreuses réponses. Rose rencontre des difficultés à exprimer et se sentir aimé c'est pourquoi elle ne sait pas toujours comment agir avec les hommes qui l'environnent.
Autrement, ce récit permet de mettre en avant de quelle façon il est aisé d'avorter que ce soit au niveau médical ou au niveau des valeurs et de la psychologie des gens. Avorter devient finalement aussi facile qu'un acte anodin du quotidien mais pourtant il s'agit de supprimer ou non la vie d'un embryon... Rose, par son vécu, nous rappelle que la vie se glisse dans l'embryon dès les 3 premières semaines dans le corps de sa mère.
Il permet aussi de familiariser le lecteur avec la foi, la religion comme une source de vie qui rassemble et aide à se relever. Malheureusement, la foi de Rose a tendance à se manifester avec austérité notamment au regard des épigraphes extraits de la bible et souvent assez lourds. Ces épigraphes apportent une certaine originalité au récit et une certaine illustration mais cela peut complexifier la lecture. J'ai été touché par la foi de Rose mais je pense que son rapport à Dieu est particulièrement profond et développé ce qui peut ne pas être le cas pour le lecteur du récit. Cette forte spiritualité peut amener la perte du lecteur qui ne pourra pas nécessairement s'identifier en Rose et ses relations avec l'Eglise. Peut-être qu'une présentation de la foi comme lieu de vie, d'échange et de légèreté aurait rendue la lecture plus légère.
En conclusion, un beau récit dont je remercie l'auteur pour le partage mais dont je crains un lectorat particulièrement restreint.
Je recommande cet ouvrage pour des élèves de terminales voire pour des étudiants.

Je ne sais jamais comment aborder une histoire vraie, et je ne suis jamais très à l'aise lorsqu'il s'agit de la critiquer, me disant toujours "mais qui tu es, toi, pour te permettre de juger ainsi ?"
Ce récit se lit comme un roman, le style est facile et agréable et quelque chose nous pousse à vouloir aller jusqu'au bout. Et on aurait envie de secouer l'héroïne qui semble vouée à ne rencontrer que des hommes égoïstes, manquant de maturité, pas prêts à assumer leurs responsabilités.
Mais ce n'est pas un roman, c'est le récit autobiographique d'une jeune fille qui a subi un viol, qui doit ensuite subir un avortement et qui en subira les conséquences au plus profond d'elle même. Elle subit, encore et toujours. Elle accumule les échecs sentimentaux et pense qu'elle n'a plus droit au bonheur : "Je ne parle plus, je mange comme quatre, je commence à grossir... Me faire du mal me fait du bien. Comme une punition que je mérite"... "Une partie de moi s'en est allée avec cet être que, sans le savoir, j'aimais déjà... et que j'attendais."
Mais elle ne veut pas que d'autres femmes vivent le même drame qu'elle a vécu et, portée par sa foi en Jésus, elle s'engage dans un combat contre l'avortement.
Son témoignage est très fort car il parle de culpabilité, mais aussi des conséquences physiques et morales endurées par ces mères suite à un avortement.
Honte, assassinat, crime, autodestruction... que l'avortement soit thérapeutique ou non, voulu ou subi, tel est le ressenti que veut partager Rose Delattre. L'avortement est loin d'être un acte anodin, mais il semble banalisé :"L'avortement n'est pas seulement un droit, il est visiblement, dans notre monde, devenu la réponse à n problème. Plutôt que d'apprendre à gérer les difficultés, on les enlève !"

Je remercie les Editions Salvator et Masse Critique sans qui je n'aurais certainement pas lu ce récit. Bien sûr, c'est un texte fort qui fait réfléchir sur les conséquences d'un avortement, qui peut amener à changer d'avis, mais un je-ne-sais-quoi m'a empêché d'adhérer à cette histoire, même si j'admire la force de caractère de la narratrice pour s'en sortir et essayer de trouver enfin le bonheur auprès de ses enfants.