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Critique de brigittelascombe


"Petits dimanches de famille, petits dimanches d'autrefois,petits dimanches d'aujourd'hui, le temps balance en ostensoir au bout d'une ficelle brune".
C'est le rapport au temps, décrit de manière fort poétique (comme ici le paquet de gâteaux, gourmandise-bonheur à savourer), qu'évoque Philippe Delerm dans cet essai composé de nouvelles "entre deux âges" où l'on est "les deux âges" à la fois, tissé de sensations reliées à des émotions intenses, rattaché à des souvenirs magiques, souvent nostalgiques,doté du pouvoir magique d'abolir le temps.Ce sont des "plaisirs minuscules", mais ils sont joie réincarnée, comme cette première gorgée de bière "la seule qui compte" avant de retrouver "la désillusion d'un semblant de pouvoir": d'où le titre La première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules.
Les sens exacerbés, le velouté "sensuel" des petits pois, écossés à deux, devient "rite" et "connivence"; le croissant moelleux ou le loukoum dégusté sur le trottoir, délicieux pêché de gourmandise, donne un sentiment de "liberté"; la cueillette des mures entre amis se fait douce; le Tour de France est communion; l'invité surprise est adopté par la famille comme la vie; les lectures sur la plage ramènent à l'adolescence avec mélancolie; le bain du dimanche soir est un "bien être palpable"; l'écran de cinéma permet l'envol voluptueux dans l'imaginaire; le pull d'automne enrobe le corps d'une bulle douillette;les tomates du jardin ont la "sensualité penchée"; le journal du petit déjeuner offre le luxe de savoir que le monde est en guerre, alors que l'on est soi-même à l'abri de tout; le kaléidoscope renvoie au "bonheur sage"; le vélo incite à la flânerie....
La première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules mérite amplement le prix Grandgousier 1997 qui lui a été attribué, car nous retrouvons ici les petits flashs de la vie de tous les jours d'Enregistrements pirates (sans les portraits pris sur le vif qui s'y rattachent), nous retrouvons aussi la poésie de Sundborn ou les jours de lumière (prix des Libraires 1997), mais surtout nous retrouvons la nostalgie de l'enfance qui nimbe Dickens barbe à papa.
Cet essai sur le bonheur et l'abolition du temps, dans une prose parfois proche de Colette (ex: "les grappes hésitent entre l'or pâle et le vert d'eau,entre l'opaque et le translucide") est un pur....bonheur... car le lecteur s'identifie aux souvenirs vécus et ressent, à travers mots (d'où le talent de Philippe Delerm), l'instant (dégusté,tactile,visible,écouté,senti), qui bien qu'éphémère, devient ETERNITE.
Philippe Delerm, écrivain,romancier,essayiste est un Grand de Grand!!!
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