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Bertrand Ogilvie (Auteur de la postface, du colophon, etc.)
EAN : 9782952930215
253 pages
L'Arachnéen (02/10/2008)
4.83/5   3 notes
Résumé :

L'Arachnéen et les textes qui l'accompagnent ont été écrits par Fernand Deligny (1903-1996) dans la deuxième moitié des années 1970. Il vit alors dans les Cévennes, depuis 1968, date à laquelle il a créé un " réseau " de prise en charge informelle d'enfants autistes. Ce réseau est plus qu'un lieu de vie : un milieu entièrement créé à partir d'une réflexion sur le mode d'être autistique. Qu'est-ce qu'un espace perçu hors langage ? Quelle est la forme d'un... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Un livre magnifique de poésie et de vérité, à ne pas manquer. du grand Deligny, loin de la technique éducative, très proche du sens de la proximité, du commun et de ce qui habite le bonhomme...
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
L’enfant comblé - extrait.
     
… Alors, « les comprendre », ces enfants-là ? Leur manifester une compréhension qui serait comme une embrassade d’intention généreuse ? On se doute bien que c’est le premier élan qui nous vient ou plutôt nous est venu, et puis cet élan vague s’est retiré, comme il en est d’une marée. Noyés par cette vague, ils l’étaient déjà, ou quasiment. Restait, à découvert, entre nous et eux, le là : topos.
     
Quand je dis : entre, je ne veux pas évoquer une barrière, mais, au contraire, que nous avions au moins, en commun, topos, l’aire de séjour, dehors.
     
Un élan de compréhension qui se heurte à cette désinvolture qui est commune aux « enfants » autistes, et qui fait drame à la maison, à tendance à s’accroître pour submerger l’obstacle. Nous aurions pu être portés à un surcroît de compréhension, et c’est souvent ce qui leur arrive, à ces enfants-là, dont on dit d’ailleurs qu’ils comprennent tout, ce à quoi il faudrait ajouter : et le reste. Car il y a un reste.
     
Un peu lassés de cet excès de compréhension dont il était flagrant que l’enfant n’en pouvait plus, d’être compris, et alors c’était de l’invivable qui se faisait jour, nous nous sommes mis à penser que topos pouvait être le lieu du reste, c’est-à-dire de ce qui semble réfractaire à la compréhension qui, ne l’oublions pas, sous couvert d’embrassade, nous parle de ces idées qu’un signe représente. Dire que la compréhension ne peut s’exercer qu’en supposant une signification fait apparaître qu’il y a du sup-posé. Or, ce « sup » qui vient se poser sur l’autre ou à sa place est bien l’à-faire, l’apport de cette compréhension qui redouble quand elle se heurte à du réfractaire : nous avons donc, délibérément, fait le sacrifice du « sup », nous l’avons déposé hors des aires de séjour, afin que topos reste propre et permette une recherche que nous menons, le plus proprement possible, depuis dix ans, ce qui est vraiment fort peu de temps. Quant aux nombre d’« enfants autistes » qui ont vécu là de la même vie que nous, il doit friser la soixantaine. Nous nous sommes mis à transcrire, sur des feuilles transparentes, les trajets des uns et des autres, lignes d’erre, et puis ces lignes, ces traces, nous les avons gardées et regardées, et nous les regardons toujours, par transparence ; certaines datent de dix ans, et d’autres sont de la semaine dernière. Pour la plupart, il y a bien longtemps que nous avons oublié le de qui sont-elles, ces traces. Cet oubli nous permet de voir « autre chose » : le reste, réfractaire à toute compréhension.
     
Loin d’en être déçus, nous en étions plutôt soulagés. Cette espèce d’embrassade laissait la place à un respect que nous trouvions de meilleur aloi. Respect de quoi ? D’une évidence qui va se précisant. Nombreux sont les « chevêtres » qui apparaissent dans la transparence des feuilles où sont transcrites les lignes d’erre, les « chevêtres » étant des là où les lignes d’erre se recoupent, s’entrecroisent, dans l’espace et à travers le temps. Il est manifeste que, par bien des aspects de leurs manières d’être, transcrites en trajets, ces enfants-là ne font qu’un, manière de dire qui pourrait prêter à confusion ; disons qu’apparaît ce qu’ils peuvent avoir de commun.
     
[…] Je vais prendre un exemple on ne peut plus simpliste : un caneton est pourvu, de manière innée, d’un nager latent. S’il n’ y a pas d’eau dans les environs, nager n’a pas lieu – topos – et reste nul et non advenu. Et, pour ce qu’il m’en semble, il en est ainsi de ces agir communs qui, bien que réitérés, sont d’initiative puisqu’il n’y va pas de faire comme, agir(s) qui, sans topos, n’ont pas lieu. Il est plus facile de penser, à propos d’un gamin quelque peu demeuré : « Mais qu’est-ce qui lui manque, qu’est-ce qui lui a manqué »  – qui serait par exemple, de l’ordre de l’amour – que de se dire : mais qu’est-ce qu’il Y manque, là, maintenant », Y étant le caractère qui convient pour évoquer cette eau dont je parlais dans le topos du caneton.
     
[…] Ceci dit, que la mémoire ethnique s’affaire, depuis toujours, à pomper l’eau du caneton, pour la mettre en bouteille, ça n’est que trop vrai. Les avantages indéniables de la domestication (symbolique) de l’homme par l’homme sont à ce prix et s’exercent – depuis toujours – au détriment de la mémoire spécifique, privée de ce qui serait son topos, et, du coup, il faudrait qu’advienne des enfants qui ne sont pas, réfractaires à l’inéluctable de cette domestication de l’homme par l’homme, pour qu’apparaissent des bribes, des traces manifestes de cette mémoire spécifique pour peu que l’aire environnante s’y prête et propose d’autres détours que celui du pérorer, où un certain « tout » se conjugue.
     
Il y va, bien sûr, de notre part, d’une bonne dose de parti pris pour lequel j’ai trouvé cet infinitif de mécréer, ce qui peut vouloir dire esquiver les croyances, et surtout les plus répandues, ou créer quelque chose d’autre que ce qui a lieu.
     
     
Quand le bonhomme n’y est pas (p. 139-144).
     
Note : « L'enfant comblé », texte paru dans la Nouvelle revue de psychanalyse, n°19, printemps 1979 ; repris sous le titre « Bambini autistici » dans I Bambini e il Silenzio, et sous le titre « Enfants autistes » dans les Enfants et le Silence.
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Videos de Fernand Deligny (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Fernand Deligny
Titre : Traces et cartes : aires et erres chez Fernand Deligny Colloque 2017-2018 : le rêve des formes : Arts, sciences & cie
Colloque du 05 septembre 2017. Intervenant(s) : Catherine Perret, professeure d'esthétique et de théorie des arts, Université Paris 8
Retrouvez les vidéos du colloque : https://www.college-de-france.fr/site/alain-prochiantz/symposium-2017-2018.htm
Chaire du professeur Alain Prochiantz : Processus morphogénétiques (2007-2019)
Retrouvez les vidéos de ses enseignements : https://www.college-de-france.fr/site/alain-prochiantz
Colloque organisé par : Alain Prochiantz, Titulaire de la chaire Processus morphogénétiques, Collège de France et Alain Fleischer, Directeur, le Fresnoy - Studio national des arts contemporains.
Une oeuvre d'art est, presque toujours, l'oeuvre d'un artiste, même s'il s'agit d'un« ready made », et celui qui la perçoit le fait aussi en tant que sujet. Ce qui rend toute oeuvre d'art inépuisable. C'est même peut-être à cela qu'on la reconnaît. On ne voit, lit, entend jamais deux fois la même oeuvre. La question est différente pour les scientifiques qui, depuis Galilée et le « grand livre de la nature écrit en langage mathématique », déchiffrent ledit livre sans que le sujet n'intervienne autrement que par son habileté de déchiffreur. La vérité est dévoilée et existe indépendamment du sujet qui la dévoile puisque c'est la nature qui se dévoile. L'allégorie a traversé le xixe siècle et reste bien vivante. Même si, on le constate très souvent, le voile montre parfois plus que le dévoilement. Alain Prochiantz
Qu'est-ce qu'une forme et pourquoi s'y intéresser aujourd'hui ? Si l'on se réfère au sens commun, une forme est un ensemble de traits caractéristiques – visuels, sonores, tactiles – qui permettent à une réalité physique d'être conçue, puis perçue. S'adressant à nos sens ou se constituant dans notre imagination, parfois à notre insu comme lors des rêves, les formes semblent être des entités premières, auxquelles ont à faire tous les champs du savoir et de la création. Les formes se meuvent, se déforment, s'érodent, se régénèrent. Nombreux et difficilement définissables sont les passages de la forme au difforme, du difforme à l'informe. Existe-t-il des formes qu'on ne peut nommer ? Et, à l'inverse, la langue est-elle capable d'émettre des énoncés qui n'évoquent aucune forme ? À quoi nous font rêver les formes ? À quelles formes rêvons-nous ? En interrogeant ainsi le rêve que peuvent susciter les formes, peut-être serions-nous tentés d'anticiper le moment où celles-ci, libérées de leur référent, devenues des signes dépourvus de sens, se mettraient elles-mêmes à rêver. On pourrait se demander alors : « À quoi rêvent les formes ? Quel est le rêve des formes ? » Alain Fleischer
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