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EAN : 9782918767473
160 pages
Asphalte (02/10/2014)
3.38/5   13 notes
Résumé :
Marek a quitté Prague au début des années 2000 pour vivre le rêve américain. Il a laissé derrière lui les ivrognes des faubourgs est, les premiers flots de touristes occidentaux sur le pont Charles et les junkies de la place Venceslas.

Jakub, son meilleur ami, est resté. L’ancien roi de la nuit praguoise n’est désormais plus qu’une épave qui erre d’un bar à l’autre, délaissé par Katarina, celle que Marek et lui ont tous les deux aimée.

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Avec son livre, « PRAGUE, FAUBOURGS EST », Timothée Demeillers a voulu montrer l'évolution de Prague des années quatre-vingt-dix à aujourd'hui, et le passage de la fin du communisme avec cette espèce d'effusion de joie intense qu'amenaient le capitalisme et la société de consommation, mais aussi avec toute cette déception et cette nostalgie qui se développaient, et avec notamment tous ces laissés-pour-compte, des gens qui finalement n'ont pas pris le bon train vers le capitalisme et qui se retrouvent un peu abandonnés. C'est en s'emparant des fantasmes sordides des touristes à coups de trafics douteux que les laissés-pour-compte de Prague gardent la tête hors de l'eau !

Timothée Demeillers a depuis longtemps une passion pour l'histoire de l'Europe centrale et cela l'a amené à poursuivre des recherches sur les populations Roms de Slovaquie et de République tchèque. Après avoir été guide touristique et s'être lancé dans de longs voyages à travers l'Europe de l'Est, en tant que journaliste, il a vécu pendant plus de trois ans à Prague, qu'il trouve fascinante par certains aspects.

« PRAGUE, FAUBOURGS EST », c'est l'histoire de trois personnages : Marek, Jakub et Scott.
Marek revient à Prague après avoir passé sept ans d'un exil aux USA, où il pensait vivre le rêve américain. Mais Prague a bien changé ! On dilapide la ville qu'il a aimé. Les touristes occidentaux l'ont envahie et gangrénée durablement.
Jakub, l'ancien compère de Marek, est un prince de la nuit pragoise, qui a énormément de charisme.
Marek le retrouve complètement déchu, car il est tombé dans l'alcool et la drogue, et il est devenu très amer par rapport à la personne qu'il était avant. Jakub tente de combler ce paradis perdu à coups de paradis artificiels qui le détruisent.
Scott, lui, est un touriste américain, sans foi ni loi, qui arrive à Prague pour trois jours de fêtes, de sexe et d'alcool !
Trois récits se mélangent. Ces trois personnages vont se rencontrer, et vont alors émerger des réflexions sur les visions que l'Est portait sur l'Ouest et vice-versa. Notamment dans cette espèce d'orientation où plein de gens viennent à Prague dans ce tourisme de masse pour à la fois revivre le communisme au moment où Prague tente de s'en échapper et à l'inverse pour des bières et des filles pas chères, et des fêtes sans limites. Cette espèce d'image de l'Est, et cette image de rêve américain ou de rêve d'Eldorado sont très présentes dans ce livre.

Timothée Demeillers apprécie beaucoup un écrivain polonais, Andrzej Stasiuk, qui écrit de façon nostalgique sur l'époque des peuples de l'Empire Austro-Hongrois, qui vivaient côte à côte et dans des sortes d'endroits qui aujourd'hui sont gagnés par une forme de tristesse et par le nationalisme.
Timothée Demeillers, pour écrire ce livre, a été aussi influencé par Bohumil Hrabal, par ce monde des déshérités, de cette sorte de société tchèque un peu souterraine et marginale, qui vivote dans des bars de banlieue et qui boivent des chopines de bières…
Il a été influencé également par la nouvelle vague du cinéma tchèque des années soixante, avec cet état d'esprit désireux de liberté artistique.

Il porte au travers de ce roman un regard lucide sur un pays qui avait fondé tant d'espoir avec sa Révolution de Velours, et il dénonce les dérives du régime post-révolution… policiers corrompus, qui profitent des faiblesses du régime, augmentation du nombre de pickpockets, avec les arrivées en masse des touristes en mal de pittoresque, etc. Pour l'auteur, la vague d'insouciance et d'optimisme que cette révolution amenait, est révolue.

Son style est direct, et fait mouche ! Il y a des phrases très « hard », écrites avec des mots très crus, d'un registre sexuel aussi. Mais vu le contexte, je trouve que ce ne sont ni des mots, ni des phrases écrits de façon gratuite. C'est sombre, mais c'écrit aussi avec des notes d'ironie et d'humour.
J'ai trouvé que son style d'écriture est assez ressemblant à celui de l'écrivain tchèque contemporain Jaroslav Rudiš, notamment dans son livre « Avenue Nationale ».

Marek et Jakub ont Prague dans la peau, mais ne savent plus comment se la réapproprier.
On les sent guidés par la question du sentiment d'appartenance : qu'est-ce que se sentir chez soi ?
Dans ce livre, Timothée Demeillers écrit un spleen urbain. Ses réflexions sont sans concession. Elles nous guident à travers les voyages intérieurs des exclus du monde moderne.
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Après quatre années d'existence, les éditions Asphalte publient enfin leur premier roman français. Il aura fallu du temps avant que les éditrices trouvent en France la perle rare collant au plus près à leur ligne éditoriale, à savoir une littérature urbaine, cosmopolite ou du voyage.
Timothée Demeillers a il est vrai l'avantage de coller à ces trois acceptions. Auteur français il met en scène des personnages tchèques, américains, et tchèque émigré aux États-Unis dans une Prague à la marge des circuits de l'Office du tourisme.

Les destins croisés de Marek, qui a quitté sa ville à l'aube des années 2000 pour l'Amérique, de Jakub son meilleur ami resté sur place et a fini par sombrer dans la drogue et l'alcool et de Scott le touriste américain attiré par la bière pas chère et surtout les filles faciles sont l'occasion pour Demeillers de dresser le portrait âpre d'une ville passée trop vite de derrière le rideau de fer au capitalisme triomphant et à ses corolaires : explosion des mafias se livrant à la traite des femmes, tourisme sexuel de masse, enrichissement d'une minorité au détriment d'une majorité qui prend de plein fouet un libéralisme sauvage qui au lieu de la sortir comme elle pouvait l'espérer d'un statut d'esclave du régime l'a simplement fait esclave d'un autre.

Prague, faubourg est sans doute avant tout le récit par Marek de cette désillusion, de la perte progressive de l'espoir d'une vie meilleure dans son pays natal et, en fin de compte de la distance qu'il a prise vis-à-vis de ce dernier et de son ancienne vie. Et avec cela aussi, une certaine forme de mépris pour ce qu'il a été, pour ce que son ami et son pays sont devenus en même temps qu'une réelle nostalgie d'une jeunesse qui, s'il a cru la vivre à fond, lui a peut-être aussi échappé au bénéfice de Jakub dont la déchéance suscite elle aussi des sentiments contradictoires ; une sorte de tristesse, certes, mais peut-être aussi une certaine forme de revanche.
Au milieu de cela, Scott et ses amis incarnent cet Occident triomphant et sûr de sa supériorité qui a fait de la république Tchèque sa putain. Une putain qu'ils ne veulent voir que comme consentante pour éviter d'avoir à se regarder en face.

Roman du désenchantement et du renoncement, Prague, faubourg est révèle une plume acérée et précise qui sait dire la grisaille des âmes et des espoirs déchus d'un avenir radieux. Concis sans pour autant être dépouillé, il frappe fort et juste quand bien même on pourra regretter la trop allusive présence du personnage de Katarina et de son importance dans la relation entre Marek et Jakub. Bref, un auteur et un livre que l'on gagne à découvrir.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Ce livre est un récit du désespoir. Pas le désespoir pur et dur à la suite d'une tragédie, non, le désespoir chronique, à la suite de la perte de tout ce qui avait permis d'espérer.
Nous sommes en république Tchèque, l'une des deux nations qui formaient autrefois la Tchécoslovaquie. Il est loin, le printemps de Prague – et personne ne semble s'en souvenir. Surtout pas les touristes, pour qui Prague n'est qu'une étape. Il ne s'agit pas de visiter les monuments, les musées, de déguster des spécialités locales. Disons que cela dépend ce que l'on appelle "des spécialités". A l'Est, on peut découvrir des filles qui ne savent pas encore ce qu'est le féminisme, des filles "faciles", dirait-on, et des touristes tout aussi faciles à embobiner.
Et les Tchèques, dans tout cela ? Tous n'ont pas la chance d'avoir profité de l'ouverture des frontières, comme Marek. Est-ce vraiment une chance que d'être Marek, ce personnage désabusé, désincarné, qui n'est plus d'ici, mais d'ailleurs ? Qui ne retrouve ni la ville telle qu'il l'a connue, ni ses amis ? de Katarina, son grand amour, il est à peine question. Nous la croisons, silhouette désincarnée, au détour d'une rencontre avec un touriste, moins vivante que dans les souvenirs de Marek ou dans les désirs de Jakub. Lui aussi a beaucoup changé – dégringolé devrai-je dire, tant il est ravagé par l'alcool, la drogue, la perte de ses rêves et de son amour. Dans sa déchéance même, il est pourtant le personnage dont je me souviendrai le plus, fantôme errant dans une ville uniformisée.
Prague Faubourg est un premier roman désenchantée.
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Ah! Prague ! La ville aux cent clochers !
Arpenter ses rues est comme un enchantement : La place Venceslas, l'Hôtel de Ville, le château, le pont Charles, les façades colorées, rien que çà pour vous en mettre plein la vue. Comme beaucoup le disent, Prague est un Musée à ciel ouvert.
Pour les touristes, oui... pour d'autres moins. En effet, si on gratte un peu le crépis de la ville idyllique, on se rend compte qu'il y règne (notamment dans les marges du centre-ville) un système de débrouille, une économie souterraine faite de drogue, de filles faciles et une petite délinquance notoire.
Aux éditions Asphalte (et comme son nom l'indique), on aime à dénicher des auteurs qui vous donnent à voir la vie citadine en dehors des clichés habituels. Chez eux, on est plus proche du trottoir et du pavé que des beaux immeubles chics et des lieux branchés.
Dans le présent ouvrage, l'auteur Timothée Demeillers, nous guide vers une sorte de mélasse Pragoise avec Marek, revenu en Tchéquie après un long séjour Etasunien. Il vient retrouver son ami Jakub, et revoir ces lieux qui au début des années 90 avaient un avenir radieux. La situation n'est donc plus la même aujourd'hui. Les codes occidentaux sont devenus la norme, et les espoirs hérités du renouveau post-soviétique sont tombés bien bas.
Peu de perspective, donc, dans cet ouvrage qui rebuterait le moindre touriste souhaitant s'y rendre.
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Avant tout, merci aux Editions de l'Asphalte et à Masse Critique pour cette lecture.

Je suis déjà allée plusieurs fois à Prague, et c'est une ville que j'apprécie énormément, alors quand j'ai vu un livre avec cette ville comme lieu d'action, j'ai été vraiment tentée.

Je dois dire que j'ai beaucoup apprécié le style de l'auteur, Timothée Demeillers, qui était facile et agréable à suivre.
Aussi, le choix de suivre plusieurs personnages permet de voir les choses sous des angles différents, comme ils se croisent tous à un moment où à un autre, même brièvement, ce qui rend l'histoire plus dynamique.

En revanche, j'ai beaucoup moins apprécié l'histoire. Je l'ai trouvé un peu trop prévisible et entendue.
Marek revient au pays dans l'espoir que tout le monde le fête et que Katarina le suive : le doux rêveur déçu.
Pour Jakub, la fin était vraiment trop prévisible.
Scott : un personnage un peu anecdotique, qui nous permet de savoir ce que ses copains ont fait. Comme je n'aime pas trop le principe du tourisme qu'il fait avec ses copains, j'ai eu du mal à le trouver attachant.

En fait, je n'ai trouvé aucun des personnages vraiment attachant. Marek est mélancolique, Jakub crache sa colère et sa haine à la face du lecteur, et vit dans un passé qui ne reviendra plus, Scott... vient pour faire la fête et dépenser son argent dans cette '"zone pauvre de l'Est".

Il est vrai que quand je vais à Prague, je me comporte comme ces touristes décris dans le livre, à admirer les beautés de la ville et à ne pas trop réfléchir à ce qu'il y a derrière. Mais je trouve que Jakub, qui représente le tchèque déçu par la Révolution, est tout de même dans la caricature du type qui n'a pas su évoluer. Soit on est en marge de l'évolution du pays, soit on est bouffé par l'américanisation ? Ce livre ne donne pas vraiment d'aperçu d'un entre-deux modéré.

J'ai fait plusieurs pause dans ma lecture, car du début à la fin, je n'ai pas réussi à me laisser emporter par le flot de l'histoire, et à me balader le long des belles rues de Prague...
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
D’ailleurs, malgré l’alcool, j’ai rencontré quelqu’un, j’ai rencontré une femme, une vraie de vraie. Une histoire pas possible, mieux que tous les shoots d’héroïne. J’étais dans le tram. Les mêmes tramways crasseux, poussiéreux, de notre temps, ceux remplis de ces déchets postcommunistes, de cette amertume qui nous hante, de ce mauvais goût capitaliste, de ces affiches publicitaires qui collent mal sur les parois d’acier froid. J’étais assis derrière un de ces galvaudeux, qui s’enracinent au plastique des sièges, dorment, chient et meurent dans les trams, le regard porté sur la nostalgie d’un passé qui semble radieux et d’un futur déjà macchabé, qui voient le tableau déprimant des Mercedes noires, chauffeurs gominés, gourmette au poignet gauche et petites minettes pas majeures au poignet droit, défiler devant leurs yeux délavés. Sortes d’animaux sauvages des temps capitalistiques, grignotant les miettes des McDonald’s et s’excitant sur les nanas à poil des tickets d’entrée de cabarets.
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J’étais parti. Quand tout était devenu trop confus dans ma tête. Une sorte de déserteur. Déserteur au temps du fleurissement de la nation. À l’arrivée des magnats allemands, des investisseurs américains, des émissaires européens, du vent de la liberté, des foules libérées en costume-cravate, des grosses berlines, des crédits à la consommation, des Tesco ouverts vingt-quatre heures sur vingt-quatre, j’étais parti. Alors que tout se colorait. Mes camarades avaient risqué leur vie pour fuir le régime et moi je m’échappais quand tout le monde célébrait la victoire sur l’Histoire et l’arrivée de la liberté. Peut-être juste que je moisissais. On ne peut pas toujours rattacher la destinée d’un homme à celle de sa nation.
Ici, dans ma ville natale, j’avais dû prendre une chambre d’hôtel. Le type à la réception m’a accueilli en anglais et demandé mon passeport. Il s’est amusé de mon nom tchèque : « You know, you have Czech name, sir! » J’ai feint la surprise et l’ai remercié. En anglais. Sept ans que j’étais parti, que mon passeport avait changé de couleur et j’étais devenu étranger.
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VLEEL 224 Rencontre littéraire avec Timothée Demeillers, Jusqu'à la bête, Éditions Asphalte
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