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EAN : 9782917191156
240 pages
Berg International (15/11/2008)
4/5   1 notes
Résumé :
Par sa conception, son organisation et ses effets, la traite atlantique ou traite européenne fut un phénomène sans précédent dans l'histoire de l'humanité: Commencée dans l'amateurisme et l'anonymat au XVe siècle, elle culmina au XIXe siècle dans une maîtrise et un raffinement qui accentuèrent d'autant la marque qu'elle imprima au continent africain. La traite atlantique apparaît encore aujourd'hui comme une plaie mal refermée au flanc de l'Afrique tant elle imprégn... >Voir plus
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Que lire après La traite des Noirs et ses acteurs africains : du XVe au XIXe siècleVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
La traite atlantique porte à son bilan un nombre impressionnant de morts et de déportés. Mais comment les africains ont-ils réagis à ces ventes massives ? Comment se sont-ils organisés face à la traite ? Bien qu'étant centré sur l'Afrique, l'essai parle de la traite atlantique au sens large, puisque les modifications de comportement des puissances européennes entraînaient automatiquement des changements sur les côtes africaines.

Plusieurs points m'ont particulièrement intéressés. L'essai a détruit l'image que j'avais d'une Europe victime de ses préjugés raciaux, et qui a fini par abolir l'esclavage après une difficile prise de conscience. Au contraire, les premiers esclaves qui ont posé le pied en Europe ont été immédiatement libéré, et les négriers vivement critiqués. Avec l'essor des colonies et leur cruel besoin de main-d'oeuvre, le discours change: les vendeurs d'esclave critiqués quelques années plus tôt sont maintenant reçu en grande pompe, et se voient accorder avantages fiscaux et soutien de la marine de guerre pour favoriser leur commerce. Mais d'un autre côté, les rares esclaves qui parviennent à poser le pied sur le sol européen deviennent automatiquement des hommes libres. L'hypocrisie est parfaite : les grandes puissances libèrent les esclaves sur leur sol au nom de la morale, tout en favorisant leur envoi par dizaine de milliers dans les colonies.

En Afrique, la situation évolue avec la demande toujours croissante de main-d'oeuvre bon marché. Après les razzias, les puissances européennes passent des contrats avec les rois africains : de l'alcool, des étoffes, et surtout des armes contre des hommes. Les voisins sont alors obligés de s'adapter pour obtenir les mêmes armes : soit pour fournir plus d'esclaves, soit pour se défendre et éviter de devenir esclave à leur tour. « Les Africains commencèrent par donner aux Européens de la poudre d'or contre de la poudre de fusil, puis des hommes contre des armes pour se combattre et se détruire, afin de fournir plus d'hommes pour avoir plus d'armes. » Économiquement parlant, le cercle vertueux serait parfait, s'il n'impliquait pas des êtres humains dans les transactions.

L'abolition est aussi une histoire complexe. La Grande-Bretagne, alors maîtresse des mers et plus grande fournisseuse d'esclaves du moment, change soudainement de comportement pour promouvoir l'abolitionnisme et tente de l'imposer au monde. Les résistances sont multiples : de la part des puissances européennes, mais aussi des grands royaumes africains. L'économie de ces derniers a été totalement dévastée par l'importation des biens étrangers, et l'esclave est la seule « ressource » qu'ils peuvent proposer au commerce. Ces royaumes s'effondreront d'ailleurs avec la fin de la traite.

Les précédents essais que j'ai lus sur l'esclavage était très partisan, et uniquement à charge d'une population, ou au contraire destinés à en exonérer une autre. le livre de Diakité ne souffre d'aucun de ces défauts. Au contraire, chaque chapitre est richement fourni en extraits de carnets de bord, de rapports, de documents administratifs d'époque. L'auteur cherche à expliquer plutôt qu'à accuser, et c'est ce qui fait toute la force et l'intérêt de son livre.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Pour toutes les nations européennes, l'Afrique représentait le grand marché libre et ouvert, idéal pour écouler les productions de leurs champs et leurs manufactures avec la garantie d'y réaliser le meilleur profit possible. La liste serait longue de ces produits ainsi que des pays de provenance. [...] Certaines sources font état de plus de 200 produits divers dans le seul comptoir de Elmina en 1628, provenant de plus d'une trentaine de pays, de régions ou de villes d'Europe.

Cette accumulation d'objets de toute nature et de toute provenance, cet amoncellement impressionnant de fripes et de nippes, ainsi que de marchandises de qualité, était pour l'industrie européenne un stimulant favorisant la diversification de la production industrielle et l'intensification du commerce entre les différentes nations du continent que les rivalités politiques et économiques n'entamaient guère.

Alors que l'industrie européenne se nourrissait ainsi de la traite, l'Afrique fermait ses ateliers du fait de cette même traite et n'offrait qu'un seul produit : ses habitants, leur force de travail, leurs potentialités de création et de production matérielle, bref, ses promesses d'avenir.
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Les digues élevées contre le commerce d'esclaves noirs en Europe, ici en Angleterre, là en France, ailleurs aux Pays-Bas ou au Danemark étaient-elles suffisamment solides et sûres au point de pouvoir résister à la demande grandissante de la traite atlantique au début du XVIIe siècle ? Un vent s'était levé, soufflant des rives du Nouveau Monde en passe de devenir le point de mire et d'attraction principal des nations d'Europe. Après sa découverte, sa mise en valeur devenait un objectif pour plusieurs nations. Des colonies ou des Empires coloniaux fondés par l'Europe aspiraient à se développer pour le bien de leur métropole. Des plantations : coton, tabac, café, canne à sucre, des mines : or, cuivre, argent requéraient une main-d'œuvre abondante, des hommes robustes, résistants, adaptés au climat. Ce besoin de main-d'œuvre devenait précisément aigu au début du XVIIè siècle, la population autochtone d'Amérique succombant à l'intensité physique et aux exigences du travail servile. De plus, les profits générés par le commerce d'esclaves, pratiqué depuis le XVè siècle par le Portugal et l'Espagne, poussaient les autres nations à s'y adonner.

Peu à peu, les digues dressées au nom de la morale craquèrent de toutes parts.
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L'existence de relations commerciales anciennes entre les États côtiers et ceux de la savane (entre la Côte-d'Ivoire et l'Empire du Mali ou l'Empire de Gao) entre États et peuples (entre Côte-de-l'Or (Ghana) et Côte-d'Ivoire, entre Achantis et Fantis...) est établie de façon sûre. Ce commerce était alimenté par des produits divers, en particulier du tissu et des étoffes de tous genres, de toutes les teintes, des objets en fer ou en cuivre ouvragés de toute sorte. L'introduction des produits européens et la traite des esclaves lui portèrent un coup fatal. L'insécurité qui régnait, entretenue en permanence par les guerres, les raids et les razzias suscités délibérément, désorganisa l'artisanat. Les industries locales perturbées finirent par disparaître ou par s'appauvrir considérablement, même si quelques objets importés inspirèrent certains artisans africains qui tâchèrent de les imiter. Les métiers à tisser abandonnés, les forges traditionnelles éteintes, les produits locaux se faisaient de plus en plus rares, il n'y avait plus de tissu que le tissu européen, plus de fer que le fer européen, bref le seul commerce qui vaille était celui fait avec les Européens. Ce commerce devenait à la fois industrie et mode d'existence. La traite allait ainsi devenir, pendant de longues années, la seule forme de rapport entre peuples et entre individus sur laquelle des générations entières modelaient leur existence.
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Quoiqu'il en soit, l'«abolition» et l'«abolitionnisme» sont avant tout le fait des Européens voulant proscrire un phénomène vieux de quatre siècles et demi et qu'ils avaient eux-mêmes initié.
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Le second effet [de la traite] est aussi permanent que pernicieux : la dégradation durable de l'Africain et du Noir en général, devenu au fil des ans cet être singulier, mi-animal mi-objet, vendu à la criée, par paquets, ou sur les marchés au milieu des chevaux et des bibelots. L'expression «traite négrière» ou «trafic négrier» en est la vivante démonstration car les rois africains n'étaient pas plus estimés des Européens que leurs sujets qu'ils vendaient. Ils furent par conséquent victimes des mêmes préjugés, d'où la dénomination si expressive de «roitelets nègres» associée à «traite négrière.» Cette dévaluation morale finira par rejaillir sur l'Afrique entière et constituer un des multiples rémanents de la traite. Cela ne s'arrêtera pas avec la fin officielle du trafic esclavagiste qui portait en germes tous les préjugés antinoirs.
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Video de Tidiane Diakité (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Tidiane Diakité
Audrey Pulvar reçoit Tidiane Diakité Historien, professeur agrégé d'Histoire et Chevalier de l'Ordre des Palmes académiques à l'occasion de la sortie de 50 ans après, l’Afrique aux Editions d’Arléa paru le 24 mars 2011
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