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Critique de Nastasia-B


Je trouve ce livre absolument éblouissant et ce n'est pas par erreur qu'il s'est glissé parmi mes livres pour une île déserte, sachez-le. Cet essai est à la frontière entre biologie, archéologie, histoire et sociologie. C'est probablement ce qui fait son intérêt, à savoir, faire des liens entre des informations pas nécessairement corrélées par des spécialistes d'un domaine particulier.

Son but est de découvrir les raisons des différences criantes qui existent entre les hommes de par le monde, sachant que les hommes sont partout un peu les mêmes, ni plus rusés, ni plus talentueux. Son constat est que, premièrement, tous les hommes n'ont pas pris possession en même temps de leur environnement (1ère différence, l'avantage temporel de certains).

Ensuite que les environnements colonisés n'offraient pas la même disponibilité en plantes et animaux domesticables que d'autres (2ème différence, les régions méditerranéennes et chinoises offraient bien plus de candidats domesticables que l'Afrique par exemple).

Troisièmement, la forme même des continents, allongés Nord-Sud pour les Amériques et l'Afrique et Est-Ouest pour l'Eurasie offre l'avantage de pouvoir transmettre facilement les avancées obtenues à des lieux différents mais sur une même latitude alors que la succession des types climatiques du nord au sud ne le permet pas pour l'Afrique ou les Amériques.

De même, d'autres éléments d'ordre logique sont à prendre en considération, comme la prolifération de virus en zone très peuplée (donc déjà favorisée) entrainant des résistances plus précoces aux mêmes maladies qui devinrent un avantage incalculable lors, par exemple, de la conquête des Amériques.

Enfin, des hasards historiques, comme la prise de pouvoir par les eunuques en Chine à l'époque où celle-ci jouissait d'un avantage sur l'Europe et d'une grande avance quant à l'exploration maritime et qui se traduisit par un repli sur elle-même.

De L'Inégalité Parmi Les Sociétés (traduction surprenante de Guns, Germs, And Steel) est à mettre en parallèle avec son essai suivant, Effondrement. le premier étant le "pourquoi certains ont réussi", le second "pourquoi certains ont échoué". Toutefois, je trouve celui-ci plus intéressant et mieux structuré que le suivant.

Les idées proposées par Diamond ne sont pas nécessairement nouvelles (voir Leroi-Gourhan dans le geste et la parole, par exemple) mais ont le mérite d'être exposées clairement et en relation, les unes avec les autres. À ceux qui l'accusent de déterminisme et de justifier l'état des différences (notamment entre pays du nord et du sud) je répondrais simplement que Diamond a cherché à honnêtement comprendre l'origine des différences, notamment en se plaçant souvent dans la peau d'un Américain (au sens presque d'Amérindien), c'est-à-dire dans la peau d'un non favorisé initialement par l'environnement comparativement au bassin méditerranéen.

On peut certainement critiquer comme trop "simpliste" son explication universelle. Mais, selon moi, la valeur d'un livre réside dans le fait qu'elle nous invite à réfléchir sur des choses auxquelles nous n'avions jamais réfléchi auparavant, réside dans son pouvoir à faire évoluer la façon dont on perçoit le monde, et, en ce sens, je me répète, je trouve ce livre exceptionnel.

De plus, les lecteurs de Jared Diamond ne s'arrêteront pas en si bon chemin et iront creuser par eux-mêmes, feront des passerelles avec des gens comme Gould, l'évolutionniste, Braudel, l'historien, Todd, le démographe, Claval, le géographe ou Boyer, l'archéologue et neurologue des religions. Je conseille donc ce livre à 300 %, mais ce n'est bien sûr que mon avis, inégal par nature, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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