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EAN : 9782290019320
217 pages
J'ai lu (14/04/2010)
3.5/5   14 notes
Résumé :
Physiquement, je ne l'approchais pas. Le soir, comme un rituel, je m'allongeais près de lui, le temps qu'il plonge dans ce pays qui ne m'appartenait pas. J'avais pris goût à son sommeil, j'aimais écouter son souffle se briser comme une vague contre les murs de ma chambre. J'aimais attendre, allongée à côté de lui, que son esprit m'échappe et qu'il devienne inoffensif et faible.

Le portrait d'une femme pas comme les autres qui, à l'aube de la soixanta... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Voilà deux mois que j'ai terminé ce livre et que son histoire, poisseuse, lourde, redoutable, me hante. Voilà deux mois qu'Eugénie ne cesse de se détruire encore et encore dans ma tête, et que les mots d'Audrey Diwan poursuivent leur ronde infernale - et étrangement, si belle.

Eugénie a 58 ans, un mari, Georges, qui l'a quittée pour une autre, une fille, Hermine, qui la méprise un peu, sans doute parce qu'elle a très peur de finir comme elle. Elle fréquente des amies qui l'utilisent tantôt comme faire-valoir, tantôt comme simple réceptacle à confidences, un corps qu'elle est triste de voir vieillir et souvent l'impression de faire tapisserie. Elle n'est pas si fade que cela pourtant, il lui reste une envie réelle de jouir de la vie, de prouver qu'elle n'en a pas fini avec l'aventure et les sensations, les vraies. Un jour, lors d'un déjeuner au restaurant avec ses amies Marissa et Laure, son regard accroche un jeune serveur qu'elle décide d'appeler Arnaud. Peu après, à la suite d'un énième rappel à son âge, à sa condition de femme vieillissante, Eugénie retourne au restaurant et, sur un coup de tête, propose à Arnaud de passer un an avec elle, moyennant rémunération. Elle ne le lui révèle bien sûr pas, mais le montant qu'elle lui propose représente la totalité de sa fortune personnelle.

Tout d'abord incrédule au point de ne même pas lui répondre, Arnaud comprend qu'Eugénie est sérieuse. Il finit par accepter l'improbable marché, au prix d'une compensation mensuelle et d'une somme finale faramineuse une fois les douze mois de cohabitation écoulés. L'accord se résume en quelques mots : Arnaud passera ses nuits avec Eugénie, simplement à lui tenir compagnie, sans la moindre ambiguïté sexuelle, et sera libre la journée.

L'ambiance est tout d'abord étrange, fébrile, empreinte de malaise, et Eugénie plonge dans la panique à l'idée de s'être couverte de ridicule. Petit à petit cependant, cliente et prestataire s'amadouent, se trouvent des points communs. Eugénie le désire, mais elle a si honte d'elle qu'elle s'interdit ne serait-ce que de se formuler cette attirance, et prend l'habitude de dormir dans le salon. Petit à petit, alors que le désir enfle, que le mensonge s'épaissit et que les mystères d'Arnaud s'assombrissent, l'arrangement glisse sournoisement du pacte à l'emprise, sans qu'il ne soit vraiment évident de déterminer qui d'Eugénie ou d'Arnaud manipule le plus l'autre...

Sombre, vénéneux, magnétique, de l'autre côté de l'été entraîne son lecteur dans une ronde hypnotique de destruction et de désirs coupables, dont le rythme lancinant ne lui laisse aucun répit, et crée un tunnel émotionnel qui le mène tout droit à un dénouement d'une intensité remarquable. le personnage d'Eugénie, fascinant dans sa construction, est une narratrice formidable, qui raconte tout sans avoir à tout dire, et dont les compromissions et les mensonges sont d'autant plus saisissants qu'elle ne les formule jamais vraiment de façon explicite. La quinquagénaire se présente comme une femme simple dénuée du moindre intérêt, de la moindre qualité remarquable, mais ce n'est que pour mieux révéler une complexité, une tortuosité, une sensibilité exacerbée qui font d'elle un pur personnage de littérature, à mi-chemin entre Emma Bovary, Mrs Robinson et la marquise de Merteuil. Arnaud, lui, est un Solal des Solals/Julien Sorel fascinant lui aussi, qui se veut machiavélique, manipulateur même, maître de sa propre vie et capable de dominer Eugénie comme il l'entend, mais se révèle bien moins assuré qu'il ne le prétend.

Chacun des personnages du récit agit comme révélateur des failles des autres, dans un jeu de miroirs inversés fascinant et brillamment exécuté : les amies d'Eugénie révèlent son insécurité, tandis qu'elle-même les met face à leur vacuité ; Georges réveille la cruauté d'Eugénie, tandis qu'elle expose sa veulerie, son côté pathétique ; Arnaud prend plaisir à humilier Eugénie et à moquer sa faiblesse, ses addictions, ses peurs, mais c'est auprès d'elle qu'il vient trouver son réconfort et, à la fin des fins, un amour vrai.

La structure du récit, linéaire certes, n'en est pas moins complexe et parfaitement orchestrée, avec une vraie générosité de la part de l'autrice qui livre, scène après scène, de grands moments de tension, d'ambiguïté, de destruction, de subtilité émotionnelle, et ne s'égare jamais dans la moindre digression psychologisante. Page après page, elle se maintient dans le clinique, la chair, la vérité de ses personnages, les creuse couche par couche et en extrait quelque chose de très simple et de foudroyant : ce sont là des êtres aussi sublimes que méprisables. Aussi galvaudé que cela puisse sonner, elle touche à un universel, à une angoisse de mort, à un appétit de destruction partagé par tous, et qui revêt chez chacun une forme différente. On assiste, écoeuré, époustouflé, au lent saccage d'Eugénie de sa propre existence, avec le sentiment de voir opérer une métamorphose nécessaire, un chant du cygne aussi admirable que stérile. Dans la destruction, Eugénie se révèle, accède enfin aux richesses qu'elle avait étouffées toute une vie durant : son obstination, sa force d'âme, sa détermination, que ce soit dans la médiocrité ou dans le balayage de toutes les conventions.

On retient de ce roman une plume incroyablement maîtrisée, qui parvient à déployer des atmosphères vivaces sans jamais se disperser dans des fioritures, et à allier une structure chirurgicale une mélodie envoûtante. On se souviendra également de son côté faustien, avec ce pacte initiatique conclu entre Eugénie et Arnaud, la mécanique tragique qui s'enclenche aussitôt, et le ballet furieux dans lequel se succèdent les étapes ultérieures de leur relation. A mi-chemin entre le théâtre, l'épopée et le drame psychologique, de l'autre côté de la nuit est un fascinant moment de littérature, qui invente un monde tout en parvenant à chaque instant à le rendre intelligible et sensible pour le lecteur.
Lien : https://mademoisellebouquine..
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Eugénie Mars a 58 ans, elle est divorcée, ne s'entend pas avec sa fille adolescente et surtout elle réalise avec terreur qu'elle vieillit. Un soir où elle dîne au restaurant avec ses copines (deux harpies langue-de-vipère), elle craque sur un jeune serveur qu'elle appelle Arnaud. le lendemain, elle revient en lui faisant une proposition : contre une forte somme d'argent, il lui tiendra compagnie pour une année… Et le jeune homme (un beau gosse ténébreux à la mèche rebelle et la guitare en bandoulière) accepte.

Le choix de la première personne du singulier nuit énormément à ce roman : difficile de croire à ce personnage vieillissant qui n'a rien de tangible et qu'on ne « voit » pas d'un bout à l'autre du texte. Passée une scène de sexe d'une sensualité agressive plutôt bien écrite entre Eugénie et Arnaud (qui malheureusement arrive trop tôt et ne se reproduit pas), le reste du roman manque d'épaisseur et les coups de théâtre horripilants qui le ponctuent ne peuvent le sauver. La fabrication d'un mensonge était raté, de l'autre côté de l'été est juste moyen.
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Il y a des livres dont on sait que l'on ne les oubliera pas, celui-ci en fait parti.

A 59 ans, Eugénie est seul, son mari l'a quitté pour une plus jeune, sa fille lui parle avec mépris, elle est presque transparente ; et un jour, elle s'élance, demande à un jeune homme de venir vivre 1 an avec elle contre un chèque ; n'y croyant pas trop ; et pourtant il accepte.

Cette relation bâti sur le respect sera belle, malgré les apparences, au fond, s'il était né à la même époque, il se serait aimé sans retenu, sans cette différente d'âge, qui leur interdit l amour.

Je ne vais pas vous raconter cette année de vie commune et des bouleversements que cela va engendrer,avec ses amies, son ex mari et sa fille, lisez le, et vous verrez comment on peut vous regarder autrement, il suffit d'osez.
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Intéressant car la pensée sonne juste, les phrases sont belles et bien balancées et le sujet bien maîtrisé !
A pousser plus loin l'analyse, j'ai éprouvé une certaine pitié pour cette femme qui finalement, même si elle parvient à réveiller en elle toute une palette de sentiments et de sensations oubliés, s'achète un bonheur factice. Parce que finalement, si on y regarde de plus près, cette sexagénaire ne fait qu'essayer de rattraper une jeunesse perdue en se payant un gigolo. Elle en a les moyens, elle choisit et elle paye !
Pas très morale tout ça pour un écrivain de cet âge ! Mais me direz-vous qu'est-ce que la morale vient faire en littérature ?
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L'émouvant portrait d'une femme de presque 60 ans qui décide de s'acheter pour l'année la compagnie d'un jeune homme.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Il faut connaître l'histoire des gens pour savoir ce qui peut leur faire mal.Avec les inconnus tous les mots sont des risques non estimables.
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Le désir qu'on suscite chez les autres peut vite devenir une drogue dont on ne peut plus se passer.
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Toute privation involontaire d'une denrée,quelle qu'elle soit,réveille l'envie,jusqu'à créer le manque.
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A mes yeux,il était un puzzle en morceaux.J'aurais voulu une image.
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Le silence accidentel est une marque de mépris,le silence volontaire est l'exact contraire.
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