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Native des montagnes arides de Kabylie, Djura fut élevée par sa grand-mère, remarquable femme qui lui transmit ses valeurs de force, d'honnêteté. Elle émigra en France avec ses parents, comme bon nombre de ses compatriotes à cette époque.
Dans une autobiographie courte mais puissante, l'auteure raconte la découverte d'une autre culture, le choc initial faisant vite place à une soif d'émancipation et de liberté.

La jeune femme décide de conquérir cette liberté par le chant, en fondant un groupe, Djurdjura. Elle permet ainsi la diffusion et le partage de la richesse du registre kabyle. Tombée amoureuse d'un Français avec qui elle a un enfant, elle se heurte à la colère et à la violence de sa communauté d'origine. Sa famille et ses proches refusent son envol et qu'elle puisse vouloir aimer librement, en dehors de ses racines et de ses traditions. A l'opprobre se joint une condamnation à mort. Coupable d'amour hors les sentiers prévus... Terrible intégrisme que celui des racines. Et de frapper la femme émancipée, trop belle et lumineuse pour ses sordides âmes enténébrées.

J'ai lu cette autobiographie il y a une vingtaine d'années, le livre étant à l'époque déjà relativement ancien. Je n'ai pu oublier le portrait de cette belle jeune femme chaleureuse, grande dans son désir d'allier ses origines à son pays d'accueil, et qui se retrouve en butte aux préjugés et un refus de se mêler. C'était bien avant la médiatisation sur le communautarisme islamiste. Pourtant l'opprobre était déjà présente pour toute femme velléitaire. Un ouvrage fort et instructif, qui sait transcender les difficultés pour partager la beauté.
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N°59 – Mai 1991.
LE VOILE DU SILENCE- DJURA - Éditions n°1

Dans ce livre émouvant, Djura évoque ce que fut la vie d'une petite fille kabyle en Algérie, puis celle d'une jeune fille émigrée en France, avec, en toile de fond des ghettos, le racisme, la fatalité de l'islam, la fierté de l'Arabe et la condition de la femme qui commence parc celle de la petite fille qu'on rejette dès sa naissance pour la seule raison qu'elle n'est pas un garçon. Elle parle de la prédominance de l'homme, qu'il soit père, frère ou mari, qui, dans la société maghrébine a tous les droits sur la femme, taillable, corvéable, réduite à la condition d'esclave, humiliée, étouffée par la cellule familiale, avec la complicité même de la mère, surveillée, battue, répudiée, parfois assassinée, mariée contre son gré parce que la tradition veut qu'on n'ait d'égards que pour l'homme alors que la femme ne sert qu'à perpétuer la famille. C'est qu'une femme n'est rien et doit être soumise, asservie à l'homme et à sa dictature. Sur elle pèse encore plus lourdement le poids des traditions ancestrales auxquelles il ne peut être dérogé, avec en prime la conjuration du silence.

C'est la condition de la femme arabe que Djura a choisi de dénoncer et sa révolte est à la mesure de son engagement, à contre-courant des coutumes. Elle dit quelle a été sa volonté d'en sortir, malgré les épreuves et les interdits au sein d'un monde hostile, même à l'intérieur de sa propre famille au point que le suicide ait pu, un temps, constituer une délivrance. Elle analyse aussi ce que fut son ouverture à la culture française, la découverte de sa personnalité, de son originalité, de sa vie de femme, de sa valeur, de sa générosité aussi puisqu'elle avait choisi d'aider tous les membres de cette famille qui furent aussi ses bourreaux. Ce livre est un pas vers l'émancipation de la femme algérienne de sa reconnaissance en tant qu'être humain. Les occidentaux ne détiennent pas la vérité et il reste chez nous encore beaucoup à faire, mais ce phénomène de libération de la femme , même s'il est cyclique et lent est aussi irréversible... Sous toutes les latitudes « la femme est l'avenir de l'homme ».

Djura est aussi scénariste, auteur, compositeur-interprète, poète, comme les êtreS qui ont beaucoup souffert et qui puisent dans leurs plaies et dans la sanie qui s'en écoule la force d'exister, malgré la peur et la mal de vivre. L'écriture et la musique sont un exorcisme.
Ainsi, après s'être battue contre sa condition, découvrit-elle, grâce sans doute à la vie en France, l'union libre, ce qui est impensable pour une algérienne, mais aussi la joie du spectacle. Ce fut « Djurdjura », un groupe de chanteurs et de musiciens qu'elle fonda où la volonté de vulgariser la culture et la musiques berbères le disputait à la poursuite de son combat pour l'émancipation de la femme maghrébine. « Celui qui ne sait pas d'où il vient ne peut savoir où il va » disait Gramsi.
Comme toujours le succès populaire était au rendez-vous, mais la censure officielle algérienne entrava la marche de Djurdjura. Elle se heurta aux problèmes du quotidien mais surtout au système du parti unique au pouvoir. Ainsi la lutte politique finit-elle par prendre le relais , avec en, contre-point la nécessaire relecture du Coran, véritable ciment du monde arabe. Là aussi, il y avait un combat à mener et qui était à la mesure de son énergie. du coup, la voilà rangée dans la catégorie des opposants politiques et à ce titre mise à l'écart comme d'autres avant elle. Mais qu'importe, elle s'est assigné un but, dire, dénoncer et faire changer les choses, essayer !

Malgré les lassitudes, les déceptions, les épreuves, il lui reste la musique et les êtres qu'elle à choisis pour siens, pas ceux du clan ancestral mais une véritable famille unie par les liens de l'amour. Il lui reste aussi l'écriture... Ce livre plein d'émotions est là qui en témoigne. Il mérite l'attention du lecteur.



©Hervé GAUTIER – Mai 1991 - http://hervegautier.e-monsite.com
Lien : http://hervegautier.e-monsit..
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La lecture du Voile du silence m'a troublé. En effet, le titre annonçait une énième thèse sur l'aspect liberticide ou au contraire libérateur ou libertaire du voile islamique. Or, il n'en est rien…ou presque. Ce témoignage sincère d'une Algérienne désabusée démontre que le voile en tant qu'objet est loin d'être l'unique moyen d'enfermer et de soumettre le corps des femmes issues d'Etats théocratiques comme l'Algérie à la violence d'un système patriarcal qui n'a que trop duré et qui dure toujours.
Le père, le frère et la mère de Djura ne lui ont pas imposé uniquement un voile sur ses cheveux, mais un voile sur sa voix, son corps, son coeur, sa vie, ses désirs, son amour, sa passion pour l'art, le cinéma, la poésie, la philosophie et la chanson. Elle a malgré tout lutté pour faire entendre la voix des « femmes maghrébines » des années 60 (qu'elles soient en France ou en Algérie). Ce témoignage nécessaire démontre le destin des Algériennes oubliées, de ces éternelle colonisées, ces éternelles dangers à abattre, à battre jusqu'à la mort, au moindre doute sur leur chasteté.
A travers ce témoignage, l'auteure traite d'une question fondamentale dans la culture et le culte musulman : celle du statut de la femme dans une société (ici) algérienne connue pour son aspect révolutionnaire mais qui revendique l'émancipation des seuls hommes. Les femmes peuvent certes revendiquer des droits, mais seulement si ces droits (ex : le droit de porter le voile) coïncident avec leurs intérêts de mâles dominants.
Cette société algérienne post-indépendance que nous raconte Djura est une société où la naissance, le mariage, la descendance et la mort des femmes appartiennent à la seule volonté des hommes. Avant de devenir étrangère en France, la petite Djura avait déjà gouté au gout amer de l'étrangeté. Nourrisson, la petite fille a vécu ce que tout étranger vit dans son pays d'accueil : le rejet. Or, Djura n'a pas été rejetée par des étrangers mais par sa propre mère. Et sa propre mère ne l'a pas rejeté parce qu'elle ne voulait pas d'enfant, mais parce qu'elle ne voulait pas de fille. Sa mère ne voulait donc pas voir grandir un risque pour l'honneur de son époux et de son cher premier fils. Et elle avait raison d'avoir peur. Car cette petite fille a elle aussi rejeté le rejet de son corps et a réussi à briser la chaine de la reproduction de la soumission volontaire des femmes à la tyrannie des pères, des frères, des époux et même de fils qui n'ont que la violence comme mode d'expression avec les femmes insoumises.
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Dans le voile du silence, on plonge dans l' histoire de Djura qui revient sur sa vie, son adolescence rebelle à se battre avec une double culture : une culture ancestrale Vs une culture contemporaine occidentale, une culture entre prison et liberté. Puis on suit, avec Djura l'intensité de ses sacrifices, qui ne sont malheureusement pas reconnu. On suit le courage de cette femme, jeune femme dans l'histoire qui n'a pas l'air d'avoir de rancoeurs malgré tout le mal qu'elle se donne à arranger les choses et surtout malgré tout le mal que se donne ceux qu'elle aide pour la détruire. C'est encore une histoire qui m'a révolté au niveau de la place de la femme et sur le comportement que sa mère aura envers elle. Pour une mère, je trouve que c'est très décevant pour ne pas dire révoltant. J"honore la force que Djura a eu et je conseille vivement ce livre.

Dans le voile de silence, on lit également les problèmes que rencontre un couple mixte envers leur famille et surtout comment le frère et la nièce de Djura en sont arrivée à frapper à sang la grande soeur, la tante qu'est Djura
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Excellent livre car l'auteur fait parler son coeur tout en ayant une attitude de remise en cause de soi. Son histoire et celle de sa famille montre que c'est la petite fille (et non point la femme qui est "l'avenir de l'homme. Djura aeu la chance d'être élevée par une femme merveilleuse: sa mère adoptive"Setsi" Fatma. D'où son courage, son honnêteté et sa générosité qui contrastent avec les caractères de ses soeurs (aussi de ses frères) et de sa mère biologique. Pour mieux comprendre comment la personnalité des adultes dépend de l'amour et de la compréhension qu'ils reçoivent quand ils sont de jeunes enfants, je vous conseille de lire les livres de la psychanalyste suisse dissidente Alice Miller.
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Le poids de la tradition dans certaines familles peut gâcher des vies... Nous avons ici le combat d'une femme qui veut vivre sa vie comme elle l'entend mais qui fera tout ce qu'elle peut pour aider sa famille et gagner leur amour... sans succès !
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Livre très fort et encore d'actualité sur les violences faites aux femmes car femme.
Mais aussi sur les difficultés de sortir de codes dits ancestraux, d'insertion dans un pays différent tout en gardant son identité d'origine ...
Témoignage poignant.
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Un livre fort sur un theme actuel:sans juger je vous conseille de lire ce livre tres bien ecrit et documenté sur le theme,sans prejuge ni cliche un vrai bel ouvrage à decouvrir !
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Trés beau livres , plein d'émotions et une histoire hors du commun ,et surtout du respect pour cette kabyle qui a subie toute cette misere, je te passe un grand azul dun de tes frere kabyle .
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Le récit poignant de la fondatrice du groupe de chanteuses kabyles Djurdjura mise au ban de son groupe social pour avoir été la compagne d'un français. Une évocation bouleversante de la condition des femmes immigrées.
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