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Maurice Edgar Coindreau (Autre)
EAN : 9782070368259
507 pages
Gallimard (26/09/1973)
3.77/5   626 notes
Résumé :
Ils durent changer de train à Manhattan Transfer. Ellen avait un gant neuf, en chevreau, dont le pouce avait craqué, et elle ne cessait de le frotter nerveusement avec l'index. John portait un imperméable à martingale et un chapeau mou gris rosâtre. Quand il se tourna vers elle, en souriant, elle ne put s'empêcher de détourner les yeux et de fixer la pluie qui miroitait sur les rails. - Voilà, chère Elaine. Oh, fille de prince, voyez, nous prenons le train qui vient... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (55) Voir plus Ajouter une critique
3,77

sur 626 notes
Le titre " Manhattan Transfer " évoque une correspondance, un noeud ferroviaire, un aiguillage, un carrefour, un hall bourdonnant comme une gare, à la croisée de tous les chemins, où des millions de gens se croisent, se côtoient et s'oublient, enfermés dans leur vie, ignorant le reste, rêvant d'avenir et de réussite.
Ce titre évoque aussi le flot des émigrants, posant le pied en Amérique via New-York, tel un tremplin, où certains resteront, où beaucoup iront vadrouiller ailleurs, toujours l'espoir au ventre de réussir leur toute petite vie dans cette immense Babel de cet immense pays. Une vie où tout est possible, en bien comme en mal, une ville où tous les coups sont permis. Certains sortiront du lot, d'autres seront engloutis par la masse grouillante.
Dans la première partie (le livre en compte trois), par son écriture faite de simples tableaux esquissés, sortes de mini-nouvelles accolées les unes aux autres, Dos Passos reprend à son compte la technique de Joyce dans Dubliners (Gens de Dublin) et essaie de nous faire ressentir l'ambiance, l'atmosphère de New-York dans les années 1890 à 1900, son ébullition, ses travers, la foule des anonymes qui s'y presse.
C'est une écriture impressionniste, toute faite de touches, avec, en retour, ce petit inconvénient que l'on n'a pas le temps de s'attacher aux personnages qui défilent, un peu au rythme des publicités sur un panneau tournant.
Par la suite, après nous avoir fait suivre en pointillés plusieurs personnages, parfois sur plusieurs années, Dos Passos les fait interagir entre eux dans les deuxième (1910-1915) et troisième (1918-1920) parties, tantôt directement, tantôt via des intermédiaires.
L'auteur se contente de nous faire vivre très vite (à l'image de la vie dans cette ville) certains épisodes marquants de la vie de ses personnages : Ellen l'actrice, Jimmy le journaliste, Gus le politicien, George l'avocat, Congo le tenancier de bar (qui tombera par hasard sur la mine d'or de la prohibition).
Quant au propos, il n'est pas des plus flatteurs pour New York, comparée à une grosse ruche bourdonnante tellement brillante qu'elle attire tous les papillons de nuits et dont nombre d'entre eux se brûleront les ailes, avec tous leurs espoirs tombés dans le caniveau. Nouvelle Babylone, qui attirera probablement bientôt les foudres divines par ses excès en tous genres et dont finalement, le salut semble la fuite.
C'est une critique acerbe de la société du " tout argent ", un peu comme dans Gatsby le Magnifique, et où l'ennui est au bout de chaque rue semée de gratte-ciels déshumanisants, car nous faisant tous ressembler à de minuscules nabots anonymes...
Si vous aimez les recueils de nouvelles, vous adorerez Manhattan Transfer, si vous préférez vous attacher, vous identifier à un même protagoniste dans un milieu donné, un peu à la façon de la famille Joad dans Les Raisins de la Colère ou dans la tradition française des Balzac ou Zola, vous risquez d'être un peu déçu par le picorage superficiel de Dos Passos (attention, je n'ai pas dit que le livre était superficiel), plus destiné à faire ressentir qu'à livrer une formule toute faite et bien huilée.
Pour ma part, j'hésite entre 4 et 5 étoiles, 4 parce qu'il m'a manqué quelques points d'accroche, 5 parce que dans son style, c'est vraiment bien fait, mais ceci n'est que pure subjectivité, idiosyncrasie, tout ce que vous voudrez, enfin juste mon tout petit avis, autant dire, pas grand-chose.
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La narration est assez complexe, l'histoire pas des plus simples non plus et, comme je l'ai lu il y a longtemps, je vais me contenter de quelques réminiscences.
Collages : c'est un peu la technique narrative du romancier ; nous apprenons les événements par morceaux, que nous avons parfois du mal à situer, souvent à cause des changements de focalisation.
Le personnage principal est la ville, celle de New York, et c'est à son portrait que s'attache Dos Passos, essentiellement, par petits tableaux et non à la seule description de la vie des personnages. Ce qui caractérise la ville c'est son état de décadence, dont la peinture n'est guère optimiste : le désespoir ou la fuite. Enfin, je me souviens du symbole de la frontière : le rêve américain de Jimmy Herf, qui se trouve sur la route, sans un sou et qui irait n'importe où (à l'Ouest ?).
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Je suis de retour après un voyage dans le temps, un aller retour à New-York, pas la ville que nous connaissons , mais New-York du début du vingtième siècle. Elle n'a pas tellement changé, le même bruissement, le va et vient incessant telle une fourmilière. Dans ce brouhaha John Dos Passos nous fait découvrir un univers "Manhattan Transfer" une ville et des êtres humains. Sur une période allant de la première guerre mondiale au crack boursier de 1929 jusqu'à la prohibition.
John Dos Passos nous raconte à sa manière des vies de femmes et d'hommes, des destins plus ou moins contrariés, moins linéaires que ces rues et avenues.
Nous suivons particulièrement deux personnages Elaine Oglethorpe et James Herf. Deux tranches de vie particulièrement bien décrit par Dos Passos. le point commun de ces deux jeunes gens c'est la solitude, l'ennui, l'éternel insatisfaction, ils trainent leurs mal-être dans les endroits à la mode, rencontrent des personnes pas toujours recommandables dans un début de siècle en pleine effervescence. Elaine est actrice et James Journaliste.
L'écriture de John Dos Passos est particulière, un mélange de nouveaux journalisme à la "Tom Wolfe" et le style "John Steinbeck" c'est mon ressenti. Une belle étude sociologique d'un monde et d'une ville où le " rêve américain" est en train de devenir le leitmotiv d'une société en quête de renouveau. Une belle découverte en attendant de lire sa célèbre trilogie " le 42ème parallèle " suivi de " 1919" et " La grosse galette".
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Manhattan Transfer, la foule américaine y est grouillante et anonyme, en transit. Ça n'est pourtant qu'à quelques uns de ses contemporains que s'intéresse John Dos Passos au fil de cette fresque aux allures de patchwork de vies urbaines, de mosaïque d'histoires citadines, de puzzle de scènettes humaines.

Ils sont une vingtaine, aux conditions sociales variées, débarqués là parfois via le port. De l'avocat au laitier en passant par l'actrice Ellen ou Jimmy le journaliste, le panel de ces bribes de vies est hétéroclite. On les voit en quête d'argent, d'amour, de boisson ou de travail, leurs petites histoires se tissant parfois pour constituer un ensemble plus lisible dans la Grande, la prohibition ou l'avant et l'après 14-18.
Mais si les personnages sont identifiés, le regard porté sur eux se veut neutre et objectif, on pense à une caméra en ville qui les capterait au hasard de leurs discussions, leurs déplacements ou leurs histoires. Ici pas vraiment de psychologie explicite, plutôt des faits, des dialogues (incisifs) ou des descriptions. Pourtant le profil des personnages ne manque pas de prendre du relief au fil d'un temps en ellipse, dilaté sur près de 30 ans, où l'on peut très bien retrouver l'un d'entre eux de retour de guerre quelques années plus tard, ou un autre prêt à se marier après nous avoir quitté enfant quelque chapitre plus tôt. Des personnages qui finissent par se mêler et s'emmêler, pour former l'écheveau d'une narration libre (et heureusement chronologique).

L'espace quant à lui y est immuable. Tout se passe dans cette ville américaine métallique, bruyante et poussiéreuse, rendue omniprésente par des descriptions récurrentes :« Dans la lourde chaleur, les rues, les magasins, les gens endimanchés, les chapeaux de paille, les ombrelles, les tramways, les taxis surgissaient, l'environnaient d'étincelles, l'effleuraient d'éclairs tranchants, comme si elle eût marché parmi des coupures de métal. Elle se frayait un chemin à travers une inextricable mêlée de bruits, rugueux et tranchants, en dents de scie.».
Pour autant, la ville ne semble pas être le personnage principal à elle seule, sans les êtres humains qui la composent, la font, la quittent ou la retrouvent, dont elle voit les générations se succéder : «Si j'ai mon enfant, l'enfant de Stan, il grandira pour être cahoté lui aussi le long de la 7ème avenue, sous un ciel en fer battu d'où la neige ne tombe jamais, et il regardera aussi les fruiteries, les enseignes, les maisons en construction, les camions, les femmes, les petits commissionnaires, les policemen...».
Les êtres se succèdent et la métropole reste, un siècle plus tard on n'a pas trop de mal à reconnaître New-York, ville d'acier et de lumière qui attire ou rejette, engloutit et oppresse. La description qu'en fait Dos Passos est invariablement sombre, sinistre, avec une succession d'incendies, de meurtres ou de suicides en arrière-plan.

Ce roman de 1925 est pour le moins édifiant dans sa construction en forme de mosaïque. Avec un côté moderne, intemporel. Un air d'évidence aussi, un je ne sais quoi de « mais oui bien sûr », comme on pourrait se dire d'un grand roman. Une première lecture qui m'a captivé, malgré les efforts d'attention qu'elle m'a demandé par moments... Et qui appelle sûrement à une seconde, pour une meilleure appréhension.
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Une histoire de gens venus d'horizons totalement différents, et d'un lieu, la ville cannibale de New-York au début du XXe siècle.
Le titre vient de ce que l'écartement des rails entre le continent américain et l'île de Manhattan n'était pas le même et qu'il fallait aux voyageurs changer de train. Les employés du chemin de fer criaient alors : « Manhattan transfer ».

« Manhattan transfer » résonne comme le nom d'un hall de gare où les gens se croisent, inconnus les uns des autres, mélanges d'existences bigarrées. C'est un roman fourmilière.
Ecriture cinématographique, mouvement perpétuel des protagonistes, croisements de trajectoires de vie, multiplicité des acteurs font vite perdre le fil et transformer le déroulement de l'action en une symphonie cacophonique. le bruit est un élément essentiel dans ce roman. Si l'on y est pas préparé, ce « grouillement » de vie, ce bouillon de culture, peut vite dérouter. le secret est qu'il ne faut surtout pas s'attacher à tel ou tel personnage, bien au contraire, il faut les regarder passer, chacun avec leur propre petite histoire. Il n'y a ni début, ni fin, c'est un peu comme si l'auteur avait décrit un ciel constellé d'étoiles filantes.
Immédiateté, jaillissement, absence d'horizon. le regard ne porte jamais sur l'avenir mais reste fixé sur l'instant présent dans ce qu'il a de plus spontané.
La ville de New-York est le prétexte pour John Dos Passos pour faire jaillir cette multitude d'existences.
L'auteur expérimente le style « courant de conscience », tout comme son contemporain William Faulkner, qui consiste à transmettre les pensées personnelles du personnage, notion de monologue intérieur, en les écrivant, noyées dans le corps de l'histoire, encadrées par une ponctuation adéquate. Il est l'annonciateur des « cut-up » de William S. Burroughs.
C'est un style qui participe largement à la difficulté de la lecture. C'est une oeuvre que l'on n'aborde pas comme les autres. On n'entre pas dans un roman de John Dos Passos comme dans un moulin à vents.
Traduction de Maurice-Edgar Coindreau, professeur de littérature du XVIe siècle à Princeton de 1922 à 1961 et découvreur de talents comme Steinbeck, Hemingway, Faulkner, Flannery O'connor, Truman Capote ou Dos Passos qu'il présente à son ami Gaston Gallimard.
Editions Gallimard, Folio, 505 pages.
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critiques presse (2)
Telerama
07 mars 2023
C’est en 1925 que parut Manhattan Transfer, quatrième roman de l’écrivain américain, et celui par lequel, quelques années avant sa trilogie U.S.A. (42e Parallèle, 1919 et La Grosse Galette), il s’imposa comme une voix majeure de la littérature américaine.
Lire la critique sur le site : Telerama
Telerama
17 janvier 2022
Aléatoire et elliptique, sinuant dans les rues et les avenues, sautant sans prévenir d’un borough à un autre, d’une situation à une autre, le fil narratif court sur près de trois décennies et s’attache plus particulièrement à quelques-uns des personnages — disons une quinzaine.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (89) Voir plus Ajouter une citation
Devant le Cosmopolitan Café, au coin de la 2e Avenue et de Houston Street, un homme vocifère perché sur une caisse à savons. " ... Ces individus, camarades... esclaves du salaire comme je l'étais moi-même... vous empêchent de respirer... vous retirent le pain de la bouche. Où sont toutes les jolies filles que je voyais autrefois arpenter les boulevards ? Allez les chercher dans les cabarets des bourgeois... Ils nous pressurent, amis, camarades, esclaves devrais-je dire... Ils nous volent notre travail, nos idéals, nos femmes... Ils construisent leurs hôtels Plaza, leurs clubs pour millionnaires et leurs théâtres qui coûtent des millions de dollars, et leurs bateaux de guerre, qu'est-ce qu'ils nous laissent ? ... Ils nous laissent la tuberculose, le rachitisme et un tas de rues sales, pleines de seaux à ordures... Vous êtes pales, camarades... Vous avez besoin de sang... Pourquoi ne vous mettez-vous pas un peu de sang dans les veines ? ... Là-bas, en Russie, les pauvres gens... pas beaucoup plus pauvres que nous... croient aux vampires, des choses qui viennent vous sucer le sang la nuit... Voilà c que c'est que le capitalisme... vampire qui vous suce le sang... jour... et... nuit."
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 Ils remontaient lentement la 2è Avenue par un soir de brouillard. Il a les cheveux roux, une figure de juif, fine, aux joues enfoncées et à la peau blafarde. Il a les jambes arquées des tailleurs. Les souliers d'Anna sont trop petits pour elle. Sous les yeux elle a de grands cernes. Le brouillard est plein de passants qui parlent yiddish, russe, anglais avec l'accent juif. De chauds courants de lumière sortent des charcuteries et des débits de boissons non alcooliques, et font ressortir le pavé miroitant.

   " Si je n'étais pas toujours  fatiguée, murmura Anna.

   - Allons prendre quelque chose... Un verre de lait caillé te fera du bien, Anna.

   - Ça ne me dit rien, Elmer. Je prendrai un soda au chocolat.

   - C'est le meilleur moyen de te donner mal au cœur, mais si tu y tiens... ( Elle s'assit sur l'étroit tabouret cerclé de nickel. Il resta debout près d'elle. Elle s'appuya légèrement contre lui. ) Le plus grand défaut, chez nous autres travailleurs...( il parlait d'une voix basse, impersonnelle...) Le plus grand défaut est que nous ne savons rien, nous ne savons pas manger, nous ne savons pas vivre, nous ne savons pas comment défendre nos droits... Bon Dieu, Anna, je voudrais bien que tu réfléchisses à ces chose-là. Ne vois-tu pas que nous sommes en pleine bataille, comme pendant la guerre ?"

   De sa longue cuiller collante, Anna pêchait des bouts de glace dans le liquide épais et mousseux de son verre.
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Il a dit qu'il n'y aurait plus d'autorité quand, après la Révolution, il n'y aurait plus personne pour exploiter le travail des autres... La police, les gouvernements, les armées, les présidents, les rois... tout ça c'est l'autorité. L'autorité, c'est pas réel ; c'est de l'illusion. C'est le travailleur qui invente tout ça parce qu'il y croit. Le jour que nous cesserons de croire à l'argent et à la propriété, ce sera comme un rêve, quand on se réveillera. On n'aura pas besoin de bombes ni de barricades... La religion, la politique, la démocratie, tout ça, c'est pour nous tenir endormis... Chacun doit aller dire aux autres : "Réveillez-vous."
(...)
Votre Commune en France a été le commencement... Le socialisme a échoué. C'est aux anarchistes de frapper le prochain coup...Si nous échouons... Il en viendra d'autres...
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Le matin vibre au passage du premier tram aérien, dans Allen Street. La lumière pénètre à travers les fenêtres, secoue les vieilles maisons de brique, éclabousse de confetti l'armature du tramway aérien.
Les chats délaissent les boites à ordures. Les punaises délaissent les membres en sueur, le cou crasseux et tendre des petits enfants endormis, et rentrent dans les murs. Hommes et femmes s'étirent sous les couvertures et les couvre-pieds, sur les matelas dans le coin des chambres. Des caillots d'enfants se désenchevêtrent pour crier et gigoter.
Au coin de Riverton, le vieillard à barbe de chanvre qui couche on ne sait où installe son étalage de condiments. Cornichons, piments, écorces de melon, pickles répandent en vrilles tordues et froides un parfum humide et poivré qui s'élève comme un jardin de primeurs, parmi les odeurs musquées de lits, et le vacarme rance de la rue pavée qui s'éveille.
Le vieillard à barbe de chanvre qui couche on ne sait où est assis au milieu, comme Jonas sous son calebassier;
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Ed Thatcher, au piano, penché sur le clavier, en extrayait Mosquito Parade. Un soleil de dimanche après-midi ruisselait en raies de poussière à travers la dentelle des lourds rideaux, rampait sur les roses rouges du tapis, emplissait le salon en désordre de taches et d'éclaboussures de lumière. Nonchalante, Susie Thatcher, assise près de la fenêtre, regardait son mari de ses yeux trop bleus pour sa figure pâle. Entre eux deux, posant soigneusement ses pieds parmi les roses, sur le champ ensoleillé du tapis, la petite Ellen dansait. Des feuilles du journal du dimanche traînaient par terre telles qu'elles étaient tombées de la table. Ellen commença à danser dessus, déchirant les feuilles sous ses petits pieds agiles. Ed Thatcher avait entamé la Barcarolle. Ellen y adaptait sa danse, balançait les bras et déchirait le papier de ses pieds agiles. Il abaissa ses doigts en un accord languissant.
"Chérie, il ne faut pas faire ça, papa n'a pas fini de le lire." Ellen continua. Du haut de son tabouret, Thatcher fondit sur elle et la posa sur ses genoux où elle se débattait en riant.
"Ellen, il faut toujours écouter quand maman te parle, et il ne faut rien abîmer ma chérie. Il a fallu beaucoup d'argent pour faire ce journal et beaucoup de personnes y ont travaillé, et papa est allé l'acheter, et il n'a pas fini de le lire. Ellen comprend maintenant, n'est-ce-pas ? Ce qu'il nous faut en ce monde, c'est de la con-struction et non de la de-struction".
Puis il reprit la Barcarolle, et Ellen se remit à danser, posant soigneusement ses pieds parmi les roses, sur le champ ensoleillé du tapis.
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Vidéo de John Dos Passos
Paru en 1929, grand succès de librairie, aussitôt traduit en plusieurs langues et adapté à la radio et au cinéma, Berlin Alexanderplatz d'Alfred Döblin est un monument de la littérature allemande au temps de la République de Weimar. Visiblement inscrit dans le sillage d'Ulysse de Joyce (1922) ou de Manhattan Transfer de Dos Passos (1925), même si l'auteur a contesté s' être inspiré d'eux, il participe du renouvellement moderniste du genre romanesque et le procédé du « montage », à l'époque tour à tour exalté et décrié, semble y servir une exploration nouvelle du monde urbain. Pourtant, écrivain prolixe et passionné de questions philosophiques, Döblin n'en était pas en 1929 à son coup d'essai et l'intérêt de Berlin Alexanderplatz dépasse peut-être aujourd'hui celui d'un grand « roman de la ville ».
Retrouvez sur notre webmagazine Balises, le dossier "Berlin Alexanderplatz, portraits d'une ville" en lien avec la rencontre : https://balises.bpi.fr/dossier/berlin-alexanderplatz/
Suivre la bibliothèque : SITE http://www.bpi.fr/bpi BALISES http://balises.bpi.fr FACEBOOK https://www.facebook.com/bpi.pompidou TWITTER https://twitter.com/bpi_pompidou
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