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EAN : 9782072688874
256 pages
Gallimard (03/01/2017)
3.85/5   26 notes
Résumé :
Plusieurs secondes ont passé durant lesquelles Bernard s'est efforcé d'ordonner les mots qu'il venait d'entendre et qui s'enchevêtraient dans son esprit : Sousse, la Tunisie, un attentat, ce matin, Véronique - tout cela n'avait aucun sens. Monsieur, vous m'entendez ? a articulé la voix, tandis que de l'autre côté, Bernard se mettait à trembler, écrasant sa main gauche sur la tablette du téléphone; ici les chiens, qui avaient perçu son état, se sont approchés, avant ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Voici un ouvrage qui nous entraîne dans les drames de ce début du vingt et unième siècle : Bernard et Véronique forment un couple heureux malgré les petits accrochages banals du quotidien , lui plutôt silencieux,,tout à ses rendez- vous de travail : il est plombier , dépanne tout, elle : caissière dans un supermarché.
Elle a des copines qu'elle reçoit à la maison, ouverte et rieuse,féminine, coquette, liseuse de blogs sur la beauté , toujours amoureuse de son mari , elle gagne un cadeau de retraite, une semaine de vacances en Tunisie , dans un bel hôtel, sur la plage de Sousse, avec une amie ......
Ils se disent au revoir dans le métro , lui rejoint ses deux chiens et sa passion pour les petits trains et les locomotives , surtout la Jouef HJ 2136, d'origine SNCF , son atelier d'aéromodélisme, à la maison , son "hobby solitaire" , que Véronique respecte , bien que cela ne la passionne guère ...
Ils ont une fille Alexia , qui apporte ses repas à Bernard pendant l'absence de sa mére...
C'est un quotidien simple pour ce couple comme tant d'autres , mais pétri de tendresse , l'auteur le décrit minutieusement .....
Soudain tout bascule, une voix administrative des affaires étrangères annonce à Bernard, sidéré que Véronique fait partie des victimes d'un attentat sur la plage de Sousse , le 26 juin 2015....
Nous allons suivre l'hébétement de Bernard, la douleur brutale, le gouffre sans fin , l'horreur invraisemblable qui met fin à leur bonheur :" Qu'est- ce qui est arrivé à ma femme "?
En parallèle nous suivons le quotidien de la famille du terroriste, le récit oscillera entre les deux familles , Seifeddine , l'auteur de l'attentat vient d'une famille modeste , étudiant , ses parents ont été douloureusement touchés par la mort de leur autre fils foudroyé ...
Comment un étudiant peut- il devenir un tueur?

Il tombe amoureux de Sophie, étudiante belge, il n'obtient pas ses papiers.......
L'auteur avec maestria exploite ce sujet délicat grave, douloureux , contemporain avec précision.
"Soldat de Dieu, "Futur martyr, "l'auteur montre une connaissance aiguë de ce fanatisme religieux , la lutte mortelle contre les "mécréants " et "les impurs" ....l'intoxication mentale et l'embrigadement.......

C'est le grand mérite de cet ouvrage , la tragédie se déroule ... N'en disons pas plus!
Les phrases sont trés longues mais le verbe est prenant et facile, le lecteur n'est pas gêné .
Un roman bouleversant bien documenté , éprouvant , qui nous prend aux tripes par l'attitude de Bernard que la douleur rapproche de sa fille et qui , de la prostration à l' hébétude désirera se venger ...l'auteur nous donne à voir les ressorts de ce drame ,une tragédie contemporaine , à l'aide d'une plume alerte qui fourmille de détails , sans jamais juger ....
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Le nouveau roman d'Arthur Dreyfus est une plongée dans notre 21ème siècle. L'auteure s'empare des questions qui bousculent et questionnent le monde d'aujourd'hui et la société française en particulier : la guerre contre le terrorisme et la radicalisation.

Tout commence comme une belle histoire, celle de Bernard et Véronique, un couple uni par un amour fou, presque fusionnel.
Lui est artisan plombier, elle caissière de supermarché vient de recevoir comme cadeau de départ à la retraite, un séjour d'une semaine au soleil Tunisien qu'elle va partager avec une amie.

Ils se séparent dans le métro parisien. Lui va retrouver son quotidien, ses chiens, son travail. Et elle, une liberté qui l'effraie presque.

Dans la première partie, l'auteur passe au crible ces vies sans importance, où le quotidien est fait de ces petits riens, tellement ordinaires, mais qui parfois portent le nom de bonheur.

Le roman bascule lorsqu'une voix anonyme apprend à Bernard que Véronique fait partie des victimes de l'attentat qui vient d'être perpétré sur la plage de Sousse en ce 26 juin 2015.

Le récit va suivre parallèlement le calvaire de Bernard, qui face à l'horreur décide de se venger et d'en tuer « au moins un ».

L'auteur s'attarde également sur le profil du terroriste et essaie de comprendre comment un jeune étudiant brillant peut devenir un tueur.

En s'emparant d'un sujet aussi délicat, Arthur Dreyfus a sans aucun doute pris un énorme risque, mais il le fait magistralement.

Les phrases sont longues, jusqu'à six ou sept pages, mais le style est fluide et ce procédé d'écriture parfaitement maîtrisé, ne m'a à aucun moment paru pesant.

Je remercie Babelio et les Editions Gallimard qui m'ont permis de faire cette découverte dans le cadre de Masse Critique.

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Arthur Dreyfus Sans Véronique roman nrf Gallimard
( 252 pages - 19,50€ )

Après La correspondance indiscrète échangée avec Dominique Fernandez.
Arthur Dreyfus renoue avec le fait divers, comme pour Belle famille.C'est en Tunisie que la tragédie se déroule, inspirée par l'attentat sur une plage de Sousse (juin 2015).
En prologue, l'auteur nous indique les musiques dans lesquelles il a baigné pendant l'écriture de ce roman et suggère de le lire avec ce même fond sonore.

Le titre, puis la première phrase : «  La dernière fois qu'il l'a vue vivante... » préfigurent la défection, la morsure du manque. C'est alors que le narrateur, après un travelling sur les passagers du métro, braque sa caméra sur un couple amoureux, sur le point de se dire au revoir,de se séparer, chacun prenant une direction différente.
Le lecteur sait donc qu'un destin funeste attend Véronique, mais pas son «  homme ».

Le style change, beaucoup de passages en italiques (dialogues), et la ponctuation est inhabituelle. Ces phrases interminables surprennent, toutefois le lecteur n'en ressent pas la pesanteur. Qu 'apprend -t-on de Véronique ? Pourquoi sa présence en Tunisie ?

On accompagne Bernard dans son retour à Thomery. On s'interroge sur sa crise de tachycardie au passage de Bois-Le-Roi, mais les lieux ne sont-ils pas mémoires ?
La vie de ce couple se déroule par flashback, depuis leur rencontre.
Quel lien affectif cultive-t-il avec Véronique ?
La solitude dominicale lui pèserait-elle à ce point pour surfer sur les sites de rencontres et ne pas hésiter à tromper sa femme ? Une disparition éphémère qui affole sa fille Alexia, avant qu'elle ne débarque lui remplir son frigo.
Arthur Dreyfus explore la relation père/fille qui ne fut pas toujours des plus amènes.Devant l'adversité, un rapprochement spontané se dessine.

Le récit tourne au tragique. Un coup de fil fatidique et tout bascule pour Bernard. le voilà prostré, dans le déni, l'incompréhension. Carence d'informations.
L' auteur sait nous communiquer la commotion qui frappe ce mari, trop cabossé pour se révolter. Paroxysme de l'émotion quand les familles se retrouvent au Quai d'Orsay : le protocole, la cellule psychologique. Que dire à son entourage ?

Cette situation n'est pas sans rappeler la poignante lettre d' Antoine Leiris, les livres de Maryse Wolinski, et plus récemment de Gabrielle Maris Victorin. Si ces êtres fracassés ont eu recours aux mots pour exorciser leur douleur, Bernard choisit une toute autre direction, bien plus dangereuse.L'auteur filme son départ dans toute sa détermination, alors que sous le choc il avait oublié les gestes du quotidien.
«  C'est avec la volupté d'une émancipation que Bernard a claqué sa portière ».

Au tiers du récit, un nouveau personnage entre en scène, même procédé d'annonce : «  L'image qui frappe Seifeddine au moment de mourir, lorsque la balle tirée par un militaire.. ». On se doute qu'il y a un lien avec Véronique. Mais lequel ? Voici le lecteur tenu en haleine. Par alternance, le récit oscille d' une famille à l'autre.
La famille de Seifeddine est modeste, meurtrie par la mort du fils foudroyé.

C'est sur le campus universitaire que Seifeddine tombe amoureux de « la blanche » Sophie. On suit leur relation naissante, leurs projets initiés par Sophie qui doit regagner Bruxelles, dont présenter celui qu'elle aime à sa famille. Seifeddine s'active pour obtenir ses papiers, en vain, le visa manque. Désillusion double qui le plonge dans les bras de ses nouveaux frères, donc «  dans les bras d'Allah ». Et c'est un professeur désarmé, désemparé qui prend conscience de la dérive de son élève si « brillant et inventif ». N'a -t-il pas détruit son outil de travail dans un accès de colère ?
Et à nouveau la narrateur cameraman zoome sur un couple se disant adieu, des baisers à la Depardon, qui choque la génération âgée. Se reverront-ils ?

Le second chapitre est centré sur Seifeddine et Bernard, récit en flashback, dense.
On plonge dans le cheminement des pensées des deux protagonistes. le rythme s'accélère. On perçoit le glissement de celui qui faisait la fierté du père.On assiste à l'engagement du «  soldat de Dieu », futur «  martyr » ; à la confrontation avec son père, dépassé, impuissant ; à son entraînement intensif.
La scène du carnage est décrite, comme en direct, avec un tel réalisme ( onomatopées) qu' elle peut raviver chez les âmes sensibles l'horreur des événements successifs que les chaînes d'info ont moulinés. D'autant que le narrateur ne nous épargne pas le côté « gore ».

Arthur Dreyfus montre une parfaite connaissance de ce fanatisme religieux, des méthodes d'intoxication, d'embrigadement et en rend compte avec moult détails.
Il rend palpable cette menace constante dans le chaos du monde.

Dans ce roman, l'auteur explore la relation du couple fusionnel où l'enfant n'a pas de place. Bernard a-t-il pensé à Alicia, quand mû par ce besoin de vengeance, il part ?
Ses tribulations nous réservent des surprises, nous tiennent en haleine. Certaines situations nous font même sourire ( dans l'avion, ou dans le taxi d'Antioche),l'humour du narrateur es t là en filigrane. Celui-ci adopte un ton reporter de guerre quand il décrit le délabrement d'Alep et pointe «  la folie destructrice des hommes ».
Le romancier aborde le problème de la sécurité depuis les menaces .
Il souligne l'impact des réseaux délivrant leur propagande morbide, glaçante. Certains termes propres à cette culture : «  kahba, kouffar, kafir, kamis » ou à l' histoire «  une ville irrédente » peuvent dérouter le lecteur qui aura à coeur de chercher leurs sens.

Arthur Dreyfus nous touche d'autant plus que la succession d' actes terroristes nous a profondément horrifiés, crucifiés, déclenchant ces scènes bouleversantes de recueillement collectif à grande échelle devant la barbarie. Il dissèque, comme' dans Belle famille, la part de monstruosité contenue dans les deux protagonistes. Il évoque le statut de la femme: selon les islamistes, se dénuder c'est insulter la culture musulmane.
Dans ce roman,l'auteur livre un vibrant témoignage d'amour à travers Bernard : «  Un seul être vous manque, et... » et aborde la façon d'affronter la disparition de l'être aimé.
Il questionne les prémices de cette odieuse tragédie, avec une maîtrise magistrale.
Il signe un roman éprouvant qui secoue le lecteur, serre la gorge. Si la culture de Vincent,le doctorant «  force le respect », celle d'Arthur Dreyfus force l'admiration.
Mais «  il n'y a pas de ticket de rationnement » dans ce domaine !
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Méfiez-vous des écrivains. Ils peuvent faire leur miel d'une situation banale et, sans le savoir, vous vous retrouvez au coeur d'un roman passionnant. À entendre Arthur Dreyfus, venu présenter son nouveau livre la semaine passée à Mulhouse, la scène d'ouverture de Sans Véronique s'est déroulée exactement telle que décrite : assis dans le métro, il croise le regard d'un couple au moment où le mari et la femme se quittent. Ils sont à l'âge de la retraite, mais leur amour ne semble pas usé. Dans leurs gestes, dans leur attitude, on sent l'affection qu'ils se portent.
Ils s'appellent Véronique et Bernard. Elle est caissière à Intermarché, il est plombier. Sils se retrouvent sur la ligne 11, c'est parce que Véronique part pour la Tunisie. Ses patrons lui ont offert une semaine en Tunisie, «ça ne valait sans doute pas une fortune à l'échelle d'Intermarché, mais ils l'avaient fait, c'était important de retenir la gentillesse, avait souligné Véronique, parce que c'est pas tous les jours.»
Huit jours, cela passe vite. Mais en rentrant chez lui, Bernard a immédiatement senti le vide, cherché à le compenser en «s'occupant». Pas avec sa maquette de train miniature, mais en allant se promener du côté des prostituées. À son retour, il constate que son épouse et sa fille Alexia ont cherché à le joindre et que ses deux heures d'absence ont déjà semé un vent de panique, sa fille s'apprêtant même à signaler sa disparition à la police.
Le temps de rassurer tout le monde, il se seul chez lui, entouré de ses chiens. Il fait le constat amer que la voix, la présence de Véronique lui manque. Aussi est-il déjà psychologiquement fragilisé quand le Ministère des Affaires étrangères l'appelle pour lui apprendre dans ce jargon diplomatique que sa femme figure parmi les victimes de l'attentat qui vient d'être perpétré en Tunisie.
Tout s'effondre. Après l'incrédulité, il faut bien se rendre à l'évidence, suivre le policier venu l'escorter jusqu'à la cellule de crise du quai d'Orsay. Se retrouver avec les autres familles, avec Alexia, avec cette douleur d'autant plus incompréhensible qu'elle frappe la plus innocente des victimes.
Arthur Dreyfus divise alors son roman en deux, nous offrant de suivre ces deux trajectoires qui n'auraient jamais dû se rencontrer, celle de Véronique et celle de Seifeddine. le jeune tunisien qui rêvait d'un avenir meilleur et qui, comme son frère, travaille bien à l'école, rêve de liberté, d'un «océan de désirs». Ses professeurs le voient déjà ingénieur, il fait la connaissance de Sophie, une étudiante Belge spécialiste du pilotage des réseaux industriels avec laquelle il goûte à l'amour et échafaude des rêves d'avenir.
Mais alors comment va-t-il basculer dans le terrorisme ? À cette question cruciale, on serait tenté de répondre Inch'Allah, tant les circonstances qui font basculer un jeune vers le terrorisme tiennent – dans ce cas-ci – du destin et de circonstances fortuites. le frère de Seifeddine est foudroyé lors d'un orage, ce qui entraîne un fort traumatisme et une remise en cause de sa manière de vivre. Ajoutons un refus de visa pour la Belgique et on y trouvera le ferment d'une révolte attisée d'une part par un sentiment de trahison, car Sophie ne lui répond plus, et d'autre part par les «amis» de la mosquée qui sentent le jeune homme prêt à devenir le prochain martyr de leur cause. Son professeur de mathématiques et son père vont bien essayer de le raisonner, mais déjà Seifeddine est «hors de portée», prêt à « frapper l'Occident dans son coeur, là où on insultait le plus effrontément la culture musulmane, dans un hôtel pour Blancs, une station balnéaire où les femmes se dénudaient, où les Tunisiens étaient réduits en esclavage, témoins forcés d'actes de mécréance ».
La grande force du roman tient dans le parallèle fait par l'auteur entre cette dérive et celle de Bernard, lui aussi est bientôt «hors de portée». Après la prostration, l'hébétude, vient cette envie d'agir qu'il va assouvir en prenant un billet pour la Turquie et de là partir se venger en Syrie.
Bien loin de toute propagande ou d'une démonstration manichéenne, Arthur Dreyfus met le doigt sur le point le plus sensible… et ne nous laisse guère d'illusions sur l'évolution du conflit. La violence va continuer d'entraîner la violence. le terrorisme va perdurer. Cette tragédie contemporaine est éclairante.
Lien : https://collectiondelivres.w..
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Véronique était sans doute la plus patiente des caissières de l'Intermarché de Thomery ( village pas si riant que ça de la grande banlieue parisienne). L'heure de la retraite a sonné et elle profite du cadeau de départ de son entreprise, à savoir une semaine dans un club de vacances à Sousse en Tunisie, sans Bernard son mari, resté à la maison avec ses chiens. C'est sans doute la première fois qu'ils sont séparés aussi longtemps depuis plusieurs décennies de mariage. Mais ils ne se reverront plus, Véronique périra sous les balles d'un attentat terroriste. Une mort gratuite, révoltante, que son mari d'abord anéanti, décidera de venger en se rendant en Syrie.
Retour au romanesque pour Arthur Dreyfus où, comme dans ses récits précédents la mort tient une grande place. Alors, je vois déjà des sourcils se froncer, l'envie de fuir peut être vous gagner, car vous en avez soupé des attentats, de la Syrie. Vous voulez du divertissement, oublier un peu ce quotidien bien sombre. Pourtant si vous snobez ce roman, vous passerez sûrement à côté de ce qui fait la force de la vraie littérature surtout quand elle est écrite par quelqu'un de brillant. En s'emparant d'un sujet d'actualité brûlant, sur lequel on entend tout et n'importe quoi, le romancier le ramène à sa dimension humaine la plus simple, le plus brute et donc la plus à même de toucher le lecteur. En focalisant son récit autour de deux anonymes, personnages assez lambdas, Bernard le mari plombier de Véronique et épisodiquement Seifeddine le futur terroriste, nous sommes plongés au plus près des pensées de ces deux hommes. Nous vivons avec eux ces événements, la perte d'une femme aimée et la lente radicalisation d'un brillant étudiant. Et sous la plume alerte et précise, bienveillante et frontale d'un romancier, jeune, parisien et intello mais capable de se glisser avec une stupéfiante aisance dans la peau d'un plombier sexagénaire, le récit devient aussi le véritable portrait d'une famille française moyenne, celle que la littérature snobe souvent. Il y a longtemps que je n'avais lu des pages aussi pertinentes, aussi sensibles, sur la vie de citoyens dans un petit pavillon où derrière la belle simplicité de la mise ou de la pensée, se cachent aussi des êtres qui aiment, s'aiment, se taisent, s'engueulent, se cherchent. En partant d'une intrigue très actuelle, le roman déploie toute une myriade de détails qui donne au récit une densité incroyable, oeuvre d'un très sensible observateur tout autant que d'un fabuleux styliste à l'écriture déliée et rapide, mise en valeur par la construction très particulière de son roman qui contient autour d'une petite quarantaine de phrases sur 250 pages. Et là, je revois les sourcils qui se froncent, les " pfff, quand est-ce qu'ils vont faire court les auteurs ! " . Pas de panique, à la lecture, on ne s'aperçoit nullement que certaines phrases courent sur 5 ou 6 pages, tellement le verbe est facile et prenant...
La fin sur le blog
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
La dernière fois qu’il l’a vue vivante, c’était dans le métro parisien, quelques secondes après la fermeture des portes à l’arrêt République ; un garçon de vingt ans assis face à eux les a observés se dire au revoir, il a été touché par leur affection imperceptible et, bien qu’il fût monté à la station précédente, il avait compris avant le moindre échange de paroles, de regards, que ces deux-là formaient un couple – son intuition était due, estimait-il, à leur apparence : on s’approchait de Beaubourg, de l’Hôtel de Ville, après les arrêts Jourdain, Goncourt, et Belleville; la plupart des voyageurs connaissaient la mode, une jeune femme à la frange parfaite et chatoyante avait inscrit sur son sac en toile my chanel is at home, il y avait aussi un garçon africain aux cheveux rasés d’une façon très stylisée, dont la chemise était boutonnée jusqu’au col, qui écoutait une musique au tempo lent, il y avait deux adolescentes vêtues de leggings roses et parées.
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tout le monde disait Véronique et Bernard, et non pas la famille Florestan, car au fond il y avait deux types de couples: ceux qui se rencontraient, qui s'appréciaient, qui s'ennuyaient, qui s'étaient vite tout dit et qui, pour renouveler les sujets, faisaient des enfants; puis d'autres, les couples d'évidence, ceux pour qui l'univers s'était plié en deux, afin qu'ils se rencontrent, et eux ne s'ennuyaient jamais, le miracle était d'être ensemble présent au monde, et si des enfants tombaient du ciel, on les aimerait quand même, mais on les élèverait en marge d'un amour qu'ils importuneraient toujours, tel était le couple que formaient les parents d'Alexia, elle l'avait conçu à la longue, et en avait pris son parti, ...
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[...] Pour le premier, elle n'était qu'une passagère, pour le second une épouse, toutefois, en dépit des liens sacrés, était-on autre chose qu'un passager dans la vie des gens ? Il se trouvait toujours un soir où l'autre traversait le salon sans qu'on détourne les yeux du téléviseur, un soir où l'on s'endormait sans se dire bonsoir, et où cela aurait valu la peine de se concentrer davantage, d'éteindre le poste et de fixer une vraie image, de respirer un parfum, d'effleurer la main d'une paume, parce que cette image, ce parfum, cette main accéderaient bientôt au titre de reliques [...] p. 21
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" Je ne peux te fuir qu'en toi " . ( énigme immuable de l'amour) ....

Proverbe soufi.
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C'est un beau couple, voilà ce qu'on se disait en contemplant Véronique et Bernard, lui le rude, elle la délicate, l'image était banale, digne d'Epinal, mais quand deux coeurs s'aiment ils s'aiment pour tous les autres, je veux dire: pour ceux qui ne s'aiment pas ou pas assez.
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Lecture magique et musicale par l'auteur accompagné de Philippe Beau, ombromane Festival Paris en toutes lettres
Première Guerre mondiale dans la région de Besançon, un garçon de 14 ans est sous le feu des bombes. Blessé, il se réveille dans la cave de son « sauveur », un savant fou qui pratique des greffes abominables. Or le jeune homme découvre une proéminence qui sort de son nombril… Une main ! Récit fantasque et fantastique, aussi drôle que troublant, fable sur la différence et la monstruosité, ce roman-journal est mené tambour battant dans une langue riche et raffinée. Ce soir, Arthur Dreyfus nous invite dans son livre d'une drôle de façon : par une lecture accompagnée de musique, de magie et d'ombres chinoises proposées par les merveilleuses mains de l'ombromane Philippe Beau.
« Cette troisième main, qui va mener mon personnage vers le pire comme le meilleur, sauver sa vie puis l'anéantir, incarne cette bête tapie en chacun, dont nous avons besoin pour vivre et pour créer, et qui demeure notre seul véritable et inévitable ennemi. Elle est invisible. J'ai voulu lui donner un corps. » Arthur Dreyfus, La troisième main
À lire – Arthur Dreyfus, La troisième main, P.O.L, 2023.
Son : Axel Bigot Assistante lumière : Hannah Droulin Direction technique : Guillaume Parra Captation : Claire Jarlan
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