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EAN : 9781409282709
203 pages
lulu.com (30/06/2009)
3.25/5   4 notes
Résumé :
Maints états d'un livre, on les refusa. Et l'on fit bien puisque celui-ci vint enfin au jour. Publiable. Où, dans une langue aigre-douce, il est question de publication justement, d'autorité, d'écriture. De sérénité. Où comment la forme excédant le fond apparent finit par créer son propre fond. Un double-fond, donc, comme à un tiroir. Un tiroir doublé, en somme. On le publia.



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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
[note de lecture écrite en 2011... et laissée inexplicablement au fond d'un tiroir bureautique !]

"J'avais dans un tiroir une pleine liasse de fragments à quoi manquerait pour toujours la moindre idée associative."
A la fin de Tiroir, tiroir, le narrateur tire cette amère conclusion et renonce au projet de toute une vie : écrire et être publié.

Mais heureusement, celui de Dominique Drouin est un tiroir à double fond (tiroir, tiroir). Les idées ne lui ont pas manqué pour tisser la trame, le fond, l'histoire d'un wannabe pathétique, d'un grimaud touchant.
[wannabe : contraction argotique pour "want to be" ; personne qui a l'ambition de devenir ce qu'il n'est pas.
grimaud : autrefois, élève ignorant ; mauvais écrivain, barbouilleur de papier]

" La forme excédant le fond apparent finit par créer son propre fond. ", écrit Dominique Drouin en 4ème de couverture. C'est dire qu'il est difficile voire illusoire, dans Tiroir, tiroir, de vouloir démêler, le fond de la forme, l'histoire du style.

La préciosité d'un style ne me rebute pas quand il y a du rythme, du phrasé, du swing. Je ne déteste pas, de temps en temps, d'avoir à relire une longue phrase que je n'ai pas comprise à la première lecture. Je ne m'offusque pas de l'utilisation de noms et d'adjectifs peu usités, de l'inclusion de digressions jusqu'à l'intérieur d'une phrase. C'est suffisamment rare chez un auteur contemporain vivant pour être intriguant, attirant, marquant.

J'ai été très gâtée avec le roman de Dominique Drouin, fan absolu de Proust et de Joyce ! Bon des fois, il exagère (exprès, je pense), comme par exemple avec " l'odeur piriforme des tilleuls qui obombraient le jardin " ! Mais une fois encore ce n'est pas Dominique Drouin qui s'exprime dans Tiroir, tiroir, c'est son narrateur... Celui qui dit : " Les phrases trop simples lâchent des vérités trop simples. [...] je fais valoir que le vivant est complexe, que, longues, les phrases sont comme des petits organes doués de leur propre vie, quand trop courtes, elles n'atteignent qu'à une morte minéralité. "

Tiroir, tiroir, c'est donc une sacrément bonne surprise et ce n'est pas loin d'être un coup de coeur de lecture.

Ce soupçon de réserve tient sans doute à ma (trop) grande prédilection pour la fantaisie, l'inattendu, le décalage, voire le mauvais goût... Il m'en a manqué un peu dans Tiroir, tiroir... Mais j'ai été comblée, je dois le dire, par les scènes jubilatoires dans lesquelles le narrateur met en oeuvre des stratégies minables pour attirer l'attention sur son oeuvre en gestation. Toutes échouent misérablement. Dominique Drouin excelle dans la scénarisation d'actions minuscules que son écriture raffinée rend d'autant plus dérisoires et pathétiques. J'ai été moins convaincue par les introspections du narrateur dans les premiers chapitres. Heureusement il y a ensuite les descriptions savoureuses et justes des longues heures d'ennui sordide au bureau, les échappées idéalisées sur une petite île bretonne. Et la belle mais courte histoire de Sonia, femme libérée et positive, qui est un contrepoint solaire à la terne existence du narrateur aigri par son échec.

Et puis il y a le site de l'auteur. Très riche, même si sa présentation m'a parue un peu désuète. Il y a beaucoup d'extraits des travaux d'écriture de Dominique Drouin : les nouvelles, les chroniques, les portraits d'écrivains, le prochain roman. Autant d'occasions d'admirer la souplesse de l'écriture, sa variété, son élégance, son efficacité. Des vidéos, aussi, dont un " Portrait de l'artiste en jeune homme... prétentieux ! " clin d'oeil à Joyce, et des hommages à Proust le 18 novembre de chaque année depuis 2009. de la musique. Mais peu d'éléments biographiques... que j'ai cherché et trouvé ailleurs...

" Il y a une quinzaine d'années, un rapport passionnel s'est instauré entre la littérature et moi. Dont je ne me défis point et qui alla crescendo jusqu'à son état actuel, stable et serein. D'abord, en tant que lecteur admiratif des grands textes, puis m'essayant, lentement, à l'écriture. Signe que je ne me fourvoyais pas vraiment, ma plume devenait plus véloce et, semble-t-il, plus affirmée.
J'écris, donc, à mes heures pleines.
A mes heures creuses, je fais un métier dont je vis : consultant en systèmes d'information. "

En regardant/écoutant la vidéo de présentation de Tiroir, tiroir, on comprend bien ce qui a amené Dominique Drouin à l'autoédition.
Tiroir, tiroir est son premier chantier d'écriture démarré en 2003.

" le seul éditeur (connu) à qui fut proposé ce livre, après dix mois et deux entretiens, m'explicita par écrit son refus en ces termes (je cite):
- Que votre livre soit infiniment supérieur à la quasi-totalité de ce qui se publie aujourd'hui en France, et je ne reviendrai sur aucun des compliments que j'ai pu vous faire, ne saurait suffire à me convaincre. Il faut encore que je me sente en phase, en harmonie, en accord profond.

Et sur ma lassitude, précisant que je continuerai à écrire mais cesserai désormais de proposer mes textes aux éditeurs, toujours par écrit, il me répondit ceci (je cite):
- Que vous fassiez le choix de ne plus rien montrer de ce que vous écrivez me paraît déplorable et désastreux. Mais c'est votre choix."


Lien : http://tillybayardrichard.ty..
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Dans sa course à l'éditeur, un narrateur s'essouffle. Malgré la foi en son oeuvre, il se résigne à ne la voir point publiée. Sur cette courbe déclinante, que viennent rebrousser localement des résistances, où viennent se poser des rencontres de bon conseil, se reposer des amitiés anciennes et bien ancrées, l'ambition littéraire elle-même semble se tarir. Toute proportion gardée, le parcours apparent serait donc à rebours de celui du narrateur proustien : écriture abandonnée, sereine résignation à la vie, en quoi, là encore, narrateur n'est pas auteur ? du moins, pas celui de cette fiction écrite dans une langue très tendue, vivante et jubilatoire, « virtuose » me reprochait un éditeur, faisant jouer la polysémie et les résonances, et où un humour grave point en mains détours.

Mon avis :

Ce résumé rédigé par l'auteur donne le ton de ce livre.
Un narrateur dont on ne sait vraiment s'il est un génie proustien incompris ou un snob imbu de lui-même, voit les refus de son manuscrit croître inexorablement. Son rêve de reconnaissance s'étiole puis s'éteint. Portant un jugement acerbe et pédant sur la vacuité de ses semblables et la banalité mesquine des choses du quotidien, il finit malgré tout par se résoudre à entrer dans le rang. Il accepte un travail rébarbatif mais croit-il roboratif afin de passer à autre chose, tout en nourrissant sa faim d'écrire. Ce n'était que mirager.
Las, il se retirera en Bretagne.

Vous l'aurez compris, le style fait l'essentiel de ce roman. le thème est classique : la douleur d'écrire, de ne pas être reconnu, le sentiment d'impuissance face à des éditeurs tellement débordés par des manuscrits médiocres qu'ils ne voient même plus scintiller une perle dans la pile à lire ou encore l'incompréhension de l'entourage - des béotiens pétris d'impéritie…
Ce qui fait l'intérêt de ce roman est donc le style léché où subjonctif imparfait et vocabulaire rigoureux voire suranné rivalisent. Les exigences stylistiques de l'auteur sont manifestes : pas d'expressions obvies, de formules convenues, rien n'est laissé au hasard. Au point de nous livrer un texte très (trop) travaillé.
J'avoue avoir trouvé le début pédant et m'être forcée un peu à dépasser les cinq premières pages où le narrateur se montre d'une insupportable suffisance. Mais plutôt que de m'en offenser, j'ai pris le parti d'y goûter sans arrière pensée et j'ai fini par trouver le texte jubilatoire.
Je ne lirais pas ce genre de roman à satiété : il faut retenue garder pour mieux jouir des plaisirs ; mais à l'occasion, cela se savoure telle une madeleine.
Hélas, je crains que ce roman ne devienne jamais best-seller. La construction grammaticale de l'oeuvre et son style d'outre-siècle ne séduiront pas les foules. Mais cela n'est certes pas l'ambition de l'auteur chez qui je reconnais un vrai travail de linguiste érudit.
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Rentrant tardivement vendredi soir, anéantie de fatigue par un travail harassant, j'ai craqué et osé commettre une infraction à la tâche qui m'attendait à la maison, j'ai fouillé dans le « Tiroir,tiroir » qui a fait les délices de mon week-end. C'est élégant et intime à la fois : on sent la recherche extrême des mots, mais l'émotion est tellement présente que ça ne vire pas à la préciosité. C'est classique et très moderne à la fois: les rencontres entre les personnages m'ont un peu fait penser à ceux d'Yves Simon.
Bref, en dépit du test j'aime beaucoup ce que vous faites cher auteur et j'ai l'impression de te connaître un peu plus cher ami, même si on sait bien que les romans gardent leur part de mystère.
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Un roman qui présente le mérite de trancher avec la production éditoriale actuelle par son style élégant, classique, presque précieux. Malheureusement, je n'ai pas réussi à m'intéresser jusqu'au bout à l'histoire, peut-être à cause des personnages secondaires qui ne m'ont pas assez captivée. Les écrivains non publiés, les aspirants écrivains et ceux qui ont connu des débuts difficiles avant d'être édités (c'est à dire la majorité ?) se reconnaîtront dans le personnage principal de ce roman pas tout à fait comme les autres.
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
La petite vieille, je ne m'imaginais dans sa peau racornie que comme allant, de mon vivant et propre chef, m'engager dans l'incinérateur, sans cérémonial escamotant mon corps où la mort aurait encore creusé les traits de laideur coiffés d’un scalp éteint, détaché, dont déjà, assis en face d’elle, je ne pouvais qu’avec effort détourner les yeux.
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C'était la mauvaise heure pour se rendormir: mes yeux cillaient déjà sous l'aiguillon de l'aube et, contractée, ma mâchoire craquait sous l’oreiller, de même que l’osier du fauteuil sur lequel s’impatientait ma panoplie: pantalon de coton gris à pinces plié à plat, ceinture de cuir noir enroulée dessus, cravate bleue et chemise blanche cintrée au dossier. Au sol, souliers noirs dépoussiérés et cirés, embauchoirs tendus.
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Les stimulations éteintes, l'époque était plate, alanguie, étale. Au prétexte le plus bête, on se chauffait d’excitations de façade: à Paris, au moindre clin de soleil, dans le jardin de la Place des Vosges, on se vautrait en masse sur les carrés de pelouse, dans une commune insouciance
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Le dépit était à son comble quand me revenait à l'esprit tous les espoirs que j'avais fondés sur ma récente situation d'oisiveté (de la paresse coulant ce bain de cogitations, idéal pour ce à quoi je, en toute modestie, me destine: la création littéraire) qui n'en portait nul fruit.
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J’aurais voulu tirer ma révérence. Mais il fallait être, animer dans la durée cette concrétion de particules ontologiques dont « je » tentait l’unité. Et comme écrire m’était aussi nécessaire que respirer, je ne signais qu’à regret, et dans l’idée de maintenir l’écriture, fut-ce en ce mince filet de râle moribond. (p33)
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Video de Dominique Drouin (II) (1) Voir plusAjouter une vidéo
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