Quand il me faut des jours pour lire un roman, c'est mauvais signe.
C'est exactement ce qui s'est passé pour ce livre, 1ere oeuvre de Mme du Maurier. J'avais lu «
Rebecca », j'en avais gardé un souvenir ébloui, mais celui-ci m'a plutôt éteinte.
Bien sûr, le style de Daphné du Maurier est déjà là, il illumine les descriptions de la nature. le village de Plyn, pas loin de Plymouth en Cornouailles, dominé par la petite colline, couronné par les champs au-dessus desquels retentit à heures régulières la cloche de l'église, les ruelles descendant vers le port et le chantier naval, les petites maisons bien confortables, et la mer, gardienne de ces humbles gens...Cette description paradisiaque (trop paradisiaque ? ) d'une campagne enchantée par l'air de la mer s'oppose au Londres du 19e et du début du 20e siècle, noir, puant, hermétiquement clos sur lui-même et à la mentalité si obtuse. Descriptions joliment enlevées, mais par trop dichotomiques, me semble-t-il.
Aïe ! J'ai commencé à énoncer mes griefs, je vais devoir continuer.
L'histoire de la famille Coombe à travers 4 générations est dans la droite ligne de l'opposition ville-campagne. Je veux dire par là que les personnages sont soit gentils, soit méchants. Mais alors, bien méchants.
Ensuite ils ont TOUS une curieuse propension à préférer un de leurs enfants au détriment des autres. Et cet amour me parait tellement exagéré, tellement possessif, tellement quasi incestueux (je pense à l'un d'eux en particulier : le vilain Joseph qui adore sa mère Janet) qu'à la place d'être attendrie comme il se devrait, j'en suis dégoûtée. du désespoir, des larmes, de l'amour sirupeux à souhait... Il n'y a que la jeune fille de la quatrième génération qui échappe à cela , c'est qu'elle a du caractère, et elle me plait.
Et puis que de répétitions ! On le saura que Janet aimerait être indépendante et se lancer sur la mer, comme un homme, mais qu'elle sera clouée à terre, vouée aux tâches ménagères et à l'éducation de ses enfants ; on le saura qu'elle partage avec son enfant préféré, Joseph, son amour du large, et qu'elle l'aime, qu'elle adore... On le saura que Joseph est méchant, égoïste, dur avec tout le monde sauf avec sa mère. On le saura que Christopher, le fils de Joseph est un enfant mal-aimé par son père parce qu'il ne suivra pas le chemin tout tracé vers la mer. Il n'y a que Jennifer, mais ça je l'ai déjà dit, qui se détachera de cette chaine d'amour ( d'amour?) sirupeuse.
Bref, j'oublierai au plus vite ce premier roman qui par moments m'a bien plu, surtout par son style, surtout pas pour son choix de narration à la focalisation hasardeuse ni pour sa pointe de surnaturel tout à fait incongrue.
« La chaine d'amour » ne passera pas par moi !