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sur 4911 notes
Aujourd’hui, j’ai fait une découverte incroyable : j'ai terminé Rebecca de Daphné Du Maurier, et c’est incontestable, j’aime ce livre passionnément. Quelle intensité ! Quelle puissance des mots !

Déjà, j’ai toujours adoré les histoires dans lesquelles les démons du passé ne peuvent disparaître et hantent les personnages, j'aime quand ces derniers sont tourmentés, et quand les silences et autres secrets indicibles deviennent insoutenables, et là, je dois dire que j'ai été comblée ! L’atmosphère pesante, que tous les lecteurs ressentent et soulignent lors de cette lecture, est brillamment dépeinte, l’intrigue extrêmement bien menée. L’écriture de Daphné du Maurier sert admirablement le récit, j’aime l’angoisse dans laquelle s’englue le lecteur, en même temps que les personnages, et elle m’a rappelé la plume d’une autre auteure que j’admire beaucoup, à savoir Emily Brontë (avec ce côté noir, presque cynique et où les passions sont destructrices et les destins fatalement tragiques.)

Maxim de Winter est un personnage qui m’a immédiatement intrigué, et tout son être si secret et énigmatique m’a absolument séduit. J'ai aimé le fait qu'il soit extrême dans ses émotions, aussi tendre que froid et distant, aussi calme qu'autoritaire et colérique... Pourquoi semble-t-il souffrir autant et que cache-t-il ? Attendez-vous à des révélations vertigineuses. Il est, en tout cas à mes yeux, un personnage grandiose qui me hantera longtemps encore.
Et puis il y a la narratrice... Elle aurait dû m’énerver car ce n’est pas du tout le genre d’héroïne à laquelle on rêve de s'identifier : une fille assez quelconque, sans talent, sans esprit, trop timide, trop passive. Et c'est cette petite créature sans importance qui a l'audace de vouloir remplacer, effacer le souvenir de la grande Rebecca ? D'ailleurs, pour montrer son insignifiance par rapport à Rebecca, qui en plus de donner son prénom à l'histoire et d'être citée à longueur de pages, l'auteure ne nous livre même pas son prénom, c'est dire son degré d'importance... Et bien malgré tout cela, et outre le fait qu'on ne peut que compatir et souffrir avec elle – elle semble aimer un homme qui en aime une autre, elle n'a que des désillusions, elle vit dans une maison dont tout lui rappelle qu’elle n’a pas sa place ici (aussi bien les objets qui tous portent la marque de l’importance de la défunte, que les humains, avec Mrs Danvers, une domestique fidèle à Rebecca au-delà de la mort), elle va se révéler toute autre, nous surprendre, être forte et revêtir un rôle capital dans l’histoire, bref s'imposer et enfin devenir quelqu'un.

Vous l'aurez compris, même si elle est morte, Rebecca est toujours la vedette, elle est partout, comme en témoigne notamment la fameuse - et cruellement douloureuse - scène du bal. Tout le monde ne parle que d'elle, tout le monde la regrette, tout le monde l'aime. Enfin c'est ce qu'on croit. Mais il serait dommage d'en dire plus…
Je veux juste ajouter qu'il y a véritablement UN évènement dans le livre, et qu'à partir de là, il va vous être très très difficile de lâcher le roman...

Voilà, une histoire originale et prenante, une plume empreinte de passion et d'angoisse, des personnages attachants et intriguants, ce qui ne peut donner qu'une rencontre littéraire magnifique. A découvrir absolument !

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Rebecca foudroie les yeux et les coeurs ; Elle passe inaperçue.
Rebecca fascine ; Elle voudrait tellement plaire.
Rebecca à le monde à ses pieds ; Elle est tellement timide et effacée qu'en racontant sa troublante histoire, Elle préfère rester anonyme.
Rebecca s'amuse des hommes ; Elle aspire à être une bonne épouse.
Rebecca est fougueuse ; Elle est placide.
Rebecca est tellement spirituelle et drôle ; Elle est gaffeuse, un tantinet nigaude aussi…
Rebecca est forte et hardie ; Elle est cagnarde et craintive.
Rebecca est morte, et sa vie brève a laissé des souvenirs flamboyants ; Elle est en vie, et se traîne ici-bas, aussi maladroite et pusillanime qu'on peut l'être.
Auréolée de sa jeunesse et de son inexpérience, Elle est tellement heureuse et fière de son mariage-surprise avec M. de Winter, un riche aristo anglais, si intrigant et environné d'ombres, veuf de la fameuse Rebecca.
Pour Elle, la vie va commencer. Mais pas celle à laquelle Elle s'attendait…
A peine arrivée dans la somptueuse propriété de Maxim de Winter, à Menderley, qu'Elle est humiliée par le fantôme de Rebecca. Mais comment pourrait-Elle combattre un fantôme figé dans son éternelle jeunesse et toute sa splendeur ? Tout Menderley est un cantique, une symphonie en l'honneur de Rebecca. Des rangées de rhododendrons dans le jardin, les bibelots dans le boudoir, les tableaux accrochés aux murs, tous ces meubles si artistement disposés, ne vivent et ne respirent que pour Rebecca. Son souvenir hante les serviteurs ; les invités ne peuvent s'empêcher de faire la comparaison entre les deux femmes et de se montrer impitoyable pour Elle. Quant à Maxim, il vit en enfer depuis la mort de Rebecca, et c'est à peine s'il remarque sa jeune épouse.
Pas un jour sans qu'Elle ne sente la main glacée de Rebecca sur ses épaules. Elle survit tant bien que mal dans ce monde hostile qui la rejette, la raille, la méprise. Dans ce combat inégal, sa victoire – si victoire il y a – prend un goût terriblement amer.
Si les deux héroïnes du livre sont magnifiées, la première dans sa splendeur passée, la deuxième dans sa détresse et sa vaine résistance, les hommes, eux, sont proprement étrillés. Pochtrons, lâches, calculateurs, suffisants : pas un pour racheter les autres, à l'exception peut-être du fidèle Franck.
La lecture de ce roman magistral est souvent rendue difficile par la véhémence des sentiments qui ébranlent nos quatre personnages principaux : Elle, Rebecca, Mme Danvers et Maxim de Winter. Derrière le classicisme et la limpidité du style, se cache un torrent de violence et de brutalité qui laisse pantois.
Et puis cette petite musique qui trotte dans ma tête : qui n'a pas ressenti au moins une fois dans sa vie les angoisses de Elle en se retrouvant dans un environnement dont on ne comprend pas les codes et qui nous met gentiment de côté ?


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Un livre envoûtant qui vous obsède jusqu'à la dernière page.
Une femme vénérée, adorée, adulée par tous dont l'ombre plane tout au long du roman.
Une atmosphère : Manderley
Une jeune épouse d'apparence insignifiante qui fera preuve de belles qualités pour échapper au fantôme de Rebecca et devenir la seule madame de Winter.
Je l'ai lu, il y a fort longtemps, et dès la première phrase du livre, j'étais piégée. La magie d'une seule phrase toute simple a suffit : J'ai rêvé que je retournais à Manderley...
Daphné du Maurier a écrit un roman sur le pouvoir, l'emprise et l'empreinte que nous avons sur notre entourage de notre vivant et qui parfois perdure par-delà la mort. Comment la mémoire d'une morte peu perturber, obséder, détruire ceux qui l'ont connue et les contraindre à vivre dans le souvenir. La nouvelle madame de winter va devoir lutter contre cette femme idéalisée, toute en apparence. Une femme qui va s'avérer capricieuse, égoïste, n'aimant qu'elle et qui en réalité ne méritait pas l'amour que son mari lui portait et lui porte encore malgré son remarriage.
Bien évidemment, c'est un livre que j'ai adoré sur les apparences et la force de caractère dont certains font preuve alors qu'on ne s'y attends pas de leur part car on les croit trop effacés.
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Je viens de terminer la lecture de Rebecca, j'ai donc enfin découvert la plume de Daphné du Maurier.

Quel couple improbable que Maxim de Winter et cette jeune fille qui fait office de narratrice et dont on ne connaît pas le prénom. Lui est riche et veuf après avoir perdu Rebecca, sa femme, morte par noyade un an plus tôt. Elle est demoiselle de compagnie pour Mrs van Hopper, une excentrique commère. Issue d'un milieu modeste, la jeune fille est plutôt gauche et insignifiante à cause de sa timidité excessive.
Nos deux protagonistes se rencontrent à Monte-Carlo, Maxim éprouve un vif intérêt envers cette jeune fille solitaire et effacée. Elle, tombe amoureuse de cet homme différent des autres qui porte sa tristesse sur le visage.
D'une manière improbable, alors qu'elle doit partir à New-York avec sa patronne, Maxim la demande en mariage et la prie de vivre avec lui à Manderley, le manoir qu'il possède en Angleterre.
Après un voyage de noces idyllique, notre narratrice va enfin découvrir la demeure de ses rêves en pensant y trouver le bonheur auprès de son mari. Rejetée d'emblée par Mrs Danvers, la gouvernante de Rebecca, qui lui témoigne hostilité et cruauté, la jeune fille va vite découvrir à ses dépends que malgré la mort, l'ex-femme de Maxim est toujours omniprésente, adulée, regrettée... Dans cette grande demeure ou elle se sent inutile, de plus en plus renfermée sur elle-même, elle la vivante, est réellement considérée comme le fantôme. Au milieu des non-dits et des secrets que cache donc la mort de Rebecca?

Je me suis vite laissée entraîner par ce roman très sombre. L'ambiance est oppressante et les émotions sont palpables dans chaque mot, chaque phrase. Je n'ai pu m'empêcher de souffrir pour cette jeune fille qui se retrouve au milieu d'un véritable sac de noeuds. Condamnée à ne pas poser de questions à ce mari qu'elle aime plus que tout, tyrannisée par cette affreuse gouvernante qui va faire monter la cruauté à un degré inimaginable, je ne me suis pas sentie à ma place non plus dans cette maison ou la vie semble s'être arrêtée. Malgré un début long à démarrer, une fois le couple arrivé à Manderley on découvre vite l'envers du décor et la lecture s'avère très agréable. La plume est fluide et l'auteure déploie des trésors d'ingéniosité pour maintenir l'attention du lecteur.
J'ai adoré ce roman qui était le préféré de ma mère et de ma grand-mère et je ne regrette pas de l'avoir lu pour sa finesse psychologique et la perfection de son intrigue. Si un jour le coeur vous en dit, pourquoi ne pas aller faire un tour à Manderley, ce lieu ou même la mort est vivante. A lire et à découvrir !
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Yes !

Moi qui me disais que Daphné du Maurier, c'était une auteure pour lectorat féminin (avec tous les sous-entendus que cela implique, et je vous laisse y réfléchir) donc que je ne la lirais jamais (oui, je suis une femme, mais le lectorat exclusivement féminin...je n'en dis pas plus)...
Et puis, une, deux, trois lectrices m'ont parlé de ce roman, et je me suis laissé tenter. Après tout, Hitchcock en a fait un film en 1940, et ce n'est pas une femme, à ce que je sache. Il parait d'ailleurs que son film est angoissant à souhait (je viens d'aller voir la bande-annonce...cucul la praline, donc ne vous y fiez pas !).

Donc, je reprends, car je me rends compte que je me perds, comme se perdait la toute jeune narratrice et héroïne dans Manderley, le domaine immense de son mari. Un manoir immense, des couloirs immenses, un parc immense entouré de bois, et la mer immense, là tout près.
Nous sommes dans la campagne anglaise, 1ere moitié du 20e siècle. Une société de castes, où les riches, dont fait évidemment partie Maxim de Winter, n'ont rien d'autre à faire qu'administrer leurs biens, prendre le thé selon un cérémonial immuable, recevoir leurs voisins et amis, organiser des réceptions très codées.
Notre toute jeune narratrice, ancienne dame de compagnie d'une vieille Américaine snob, rencontre par hasard ce Maxim de Winter à Monte-Carlo, et la romance peut commencer.

Stop !
Romance, oui, peut-être, mais relatée avec toutes les nuances psychologiques d'une Charlotte Brontë dans « Jane Eyre ». Car le beau et riche mari a été marié une première fois, et sa femme Rebecca, femme belle, intelligente, éduquée, est morte noyée quelques mois auparavant...Je vous laisse deviner les tourments dans lesquels est plongée la nouvelle jeune mariée, d'autant plus qu'elle est obligée de composer avec une gouvernante revêche et même plus...

Et puis il y a des secrets, de plus en plus inavouables, qui mènent tout droit à un drame de premier choix.

Oh my God, que j'ai adoré ce roman ! Un cocktail anglais explosif : amour, non-dits, tourments intérieurs, mystères avec révélations progressives, tragédies, le tout dans une nature éclatante. Et quel naturel, quelle spontanéité dans l'écriture, à la fois sombre et éblouissante !

« J'ai rêvé l'autre nuit que je retournais à Manderley » : c'est la première phrase de ce roman, que je fais mienne, totalement.
La nostalgie m'envahit, et je vais m'endormir, espérant rêver de Manderley.
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Quel suspens !
L'univers corseté de la bourgeoisie anglaise n'est pas vraiment ma tasse de thé, et a priori pas le contexte idoine pour me happer dans un bon thriller, mais j'avais envie de réactiver les souvenirs brumeux du film d'Hitchcock vu quand j'étais gamine et comprendre pourquoi il m'avait fait si peur.
Mais contre toute attente, j'ai dévoré ce roman en deux jours car tous les ingrédients d'un bon thriller sont là : le climat qui s'obscurcit peu à peu, l'atmosphère pesante, les révélations distillées au compte-goutte, l'accélération progressive de l'action…
Si Daphné du Maurier réussit le tour de force de nous tenir en haleine de bout en bout, je crois que cela tient pour beaucoup à l'angle de narration choisi, à savoir un récit à la première personne par la frêle et timide héroïne, naïve mais cependant lucide sur son statut de victime, et dont la tragédie va révéler la personnalité au fil de l'intrigue.
Plus hitchcokien, tu meurs ! Pas étonnant que le grand maître se soit approprié cette oeuvre de manière symbiotique. Des premières scènes sur les routes estivales de la Riviera à l'étrangeté insidieuse de Manderley, j'ai ressenti sa présence derrière chaque scène, avec l'impression troublante de « lire un film » ou de « voir un livre » qui trente ans plus tard, fait toujours peur !
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J'ai essayé de ralentir au maximum ma lecture tant j'ai été envoutée par l'écriture de Daphné du Maurier. Je remercie Mind The Gap de m'avoir ouvert les yeux sur cette romancière qui n'a pas son pareil pour nous tenir en haleine. Pourtant, je dois bien l'avouer, je partais avec un préjugé (complètement idiot, comme à chaque fois), pensant que ce devait être le genre de bouquin qui avait mal vieilli. Pas du tout ma brave dame ! Bon alors, de quoi parle ce roman ?

Nous sommes en Angleterre, au début du XXe siècle. Maximilien de Winter, veuf d'une quarantaine d'années, fait la connaissance, à Monte-Carlo, d'une demoiselle de compagnie, qui sera la narratrice. Cette dernière tombe amoureuse de ce charmant aristocrate, mais leur différence d'âge fait qu'elle n'ose y croire. Pourtant, lorsque la patronne de celle-ci, Mrs van Hopper, décide de quitter ce quartier de Monaco, M. de Winter propose à la jeune employée de l'épouser et de vivre avec lui en Cornouailles. Elle accepte sans écouter les recommandations de Mrs van Hopper. Mais lorsqu'elle arrive dans la grande propriété de son époux, Manderley, elle doit faire face à la terrible Mrs Danvers, la gouvernante, ainsi qu'à l'ombre de l'épouse décédée, Rebecca.

J'ai eu des frissons en lisant ce livre et je comprends à présent pourquoi Alfred Hitchcock s'en est inspiré. Nous sommes dans un pur thriller psychologique qui joue avec nos nerfs. Des livres comme celui-ci, j'en redemande !!!
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Emballons-nous : peut-être le roman le plus fascinant et le plus beau jamais écrit, à part les Hauts de Hurlevent.
A chaque relecture, à chaque âge de la relecture, une nouvelle vision, une nouvelle histoire, de nouveaux personnages. Ils mûrissent avec nous, notre regard change sur eux.
D'abord, une histoire d'amour improbable entre une jeune fille effacée et un beau et triste lord anglais(Maxim de Winter), veuf de Rebecca, la femme parfaite, plus belle que belle, la grâce incarnée, inoubliable. Comment l'égaler ? Et sa demeure, Manderley (en réalité celle de Max de Winter), comment y vivre, l'habiter, se tenir aux mêmes endroits que la splendide et défunte Lady ? Puits de détresse sans fond où s'abîme la nouvelle épouse. Rebecca est partout, elle l'obsède, elle la hante, elle se tient à ses côté, bien plus que son propre mari bien vivant, qui, au fur et à mesure des lectures, nous paraît de plus en plus trouble, étrangement absent, lui. Et si peu de paroles échangées. Comme s'il voulait, c'est ce qui me semble à présent, maintenir sa femme-enfant dans cette soumission.
Mais il ne faut pas trop en dire pour laisser la magie faire son oeuvre... Lisez-le, c'est une des plus belles choses écrites.
Et j'ajouterai, tabou chez les snobs, que l'adaptation d'Hitchkock, à part la scène où Mrs. Danvers fait visiter à la narratrice la chambre de Rebecca, est loin d'égaler le texte. D'abord parce que l'actrice minaude trop, qu'elle est trop belle, et qu'elle a un nom, ce qui n'est pas le cas dans le livre, et qui est fondamental. Ensuite parce que l'image fixe les caractères à leur superficie, et qu'on ne retrouve pas cette profondeur du texte qui les rend évolutifs. Enfin parce qu'il nous donne à voir ce qui devrait ne relever que de l'imaginaire, Manderley, ses couloirs, son espace qui séquestre, qui se tend et se distend, la plage, le bruit de la mer, les jours sombres. Et puis certaines scènes demandent de violentes couleurs. Et puis le début mythique, si beau "j'ai rêvé cette nuit que je revenais à Manderley..." évidemment, ce n'est possible que dans un roman. Donc rendons à César ce qui lui appartient : "Rebecca", ce n'est pas Hitchkock, c'est Daphné du Maurier.
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Un nouveau de coup de coeur !

J'ai été totalement conquise par ma lecture de Rebecca ! Quelle grande oeuvre, véritable merveille de la littérature...
Que dire de ce chef-d'oeuvre ? Mystère est le mot qui, selon moi, caractérise le mieux ce magnifique roman de Daphné du Maurier...Mystère par rapport à l'identité de la narratrice de cette histoire, jeune fille en vacances à Monte-Carlo avec Mrs van Hopper qui doit s'occuper de son éducation, et, qui, finalement, va se retrouver la maîtresse de maison de Manderley ; mystère quant au comportement bizarre de Maxim de Winter, le nouveau mari de la jeune femme, veuf depuis peu ; le mystère est prédominant dans cette histoire alléchante où Rebecca, la défunte épouse, hante tous les habitants de Manderley...
Quelle magie ! J'ai été emportée par ce brillant récit, me retrouvant à la place de la jeune épouse intimidée, confrontée aux domestiques pas toujours sympathiques de la vaste demeure, à l'image de Mrs. Danvers, la gouvernante restée profondément attachée à Rebecca ; également confrontée à des doutes, des craintes, des humiliations ; et j'ai partagé avec elle tous les moments de son existence à Manderley, en tant que nouvelle Mme de Winter, jusqu'à la dernière page, où la paix est enfin trouvée...

Je n'ai rien d'autre à ajouter, à part que ce livre me marquera à jamais, majestueux roman qui nous permet, en même temps que l'héroïne, de nous remettre en question ; et qui devient désormais, bien évidemment, l'un de mes romans préférés...

A lire absolument !!
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J'ai rêvé l'autre nuit que je lisais ce livre.
Cela faisait longtemps que je rôdais autour de ses pages.
Longtemps je me suis trouvé à la lisière de son récit, j'hésitais à en pousser les grilles, les énormes portes de ce monument. À chaque fois, j'avançais d'un pas et je reculais de deux. Je ne sais pas pourquoi.
D'où venait sinon ma peur, mon appréhension ?
Ce roman est tout simplement beau. Je le sais maintenant.
Beau, d'une beauté gothique, ténébreuse, vertigineuse...
Une beauté intemporelle.
Non, ce n'est pas une inconnue rencontrée dans une librairie qui m'a pris par la main pour me guider à tâtons vers les étagères où sommeillait ce livre. Je vous avoue l'avoir trouvé tout simplement dans une boîte à livres... Mais ces endroits appelés bêtement boîtes à livres, comme on parlerait de boîtes à chaussures ou de boîtes à tabac, sont en vérité de petites citadelles qui ressemblent à des îles où il est bon de venir s'échouer, qu'il faut ouvrir au grand jour, dépouiller sans cesse et nourrir avec satiété. Il arrive aussi qu'on n'y trouve que des livres neuneus... J'en connais une par exemple, c'est à croire qu'on lui a jeté un sort... Ce livre-là n'en est pas un, bien au contraire. Demain, j'en ferai autant, je le ramènerai à son chemin initial qu'il poursuivra vers d'autres mains, d'autres chavirements.
Elle, je voudrais l'appeler L. je ne sais pas pourquoi. Elle, c'est la narratrice. J'aurais voulu connaître son petit nom de baptême, j'aurais voulu être le seul à le connaître. Comme un secret qu'elle m'aurait confié rien qu'à moi, dans un rêve.
J'ai rêvé l'autre nuit qu'elle me révélait son prénom. Certains personnages continuent de vivre après les livres.
Elle s'approchait tout doucement de mon oreille, elle avait posé les mains formant le creux d'un coquillage dans lequel on s'apprête à chuchoter. Je vais t'avouer un secret : celle qui tremblait de peur en arrivant à Manderley, celle qui s'effrayait de la présence de Mrs. Danvers et de l'absence de Rebecca tout aussi présente que jamais, celle que tu découvres dans ces premières pages avait un prénom et un nom avant de s'appeler Mrs. de Winter ou plutôt avant qu'on dise d'elle la nouvelle Mrs. de Winter... Je m'appelle...
C'est alors qu'un volet claqua dans la nuit, je me réveillai, la belle s'enfuit. Je ne saurai jamais son prénom, ni son nom. Elle sera éternellement la nouvelle Mrs. de Winter, qui épousa là-bas sur la Côte d'Azur ce jeune veuf fringant et un peu énigmatique, Maxim de Winter, avant de regagner au bras de son époux la demeure de Manderley sur la côte nord-ouest de l'Angleterre...
C'est terrible d'avancer dans une histoire, sans avoir de nom, sans presque exister ainsi. Jusqu'à en perdre l'identité. D'être écrasée par l'autre, là-bas. D'être effacée par celle qui s'appelle, qui s'appelait, qui s'appellera toujours Rebecca.
Sur la jaquette du roman que j'ai encore sous les yeux, il y a Joan Fontaine dans le rôle de la nouvelle Mrs. de Winter, elle semble perdue entre désarroi et fatalité et Judith Anderson dans le rôle de la sombre et froide Mrs. Danvers penchée derrière elle, le regard menaçant. Une fenêtre donnant sans doute sur le vide les encadre... Je crois deviner à quelle scène du livre cette image se rapporte... J'en ai encore des frissons rien que d'y penser.
Ah ! Comme j'aimais cette actrice hitchcockienne, pour moi ma préférée parmi toutes celles que le grand maître du suspens avait invité dans la lumière des projecteurs. Ma mère sur des photos où elle était jeune ressemblait à Joan Fontaine. Ma mère avait toujours un sourire un peu figé sur les photos, avec cette lèvre légèrement retroussée qui lui donnait à la fois un air inquiet et désinvolte. Elle n'avait que neuf ans de moins que Joan Fontaine...
J'ai rêvé l'autre nuit que ma mère tournait dans un film d'Hitchcock. Non, je déconne... Je ne l'ai pas rêvé. Mais j'aurais très bien pu le rêver... du moins, j'aurais tant voulu le rêver... Et puis après tout, à quoi cela aurait-il servi de le rêver ?
J'ai imaginé qu'en franchissant les grilles de Manderley, elle avait aussi ce même sourire figé, elle.
Celle qui arrive fraîchement mariée à Maxim de Winter dans l'immense demeure de Manderley n'a rien de commun avec tout ce qui s'est passé dans ces lieux avant elle. Je l'ai ressenti déjà en la précédant sur les lieux, mais je voulais lui garder la surprise...
Je l'ai suivie dans les allées sombres du parc, je l'ai suivie découvrant les rhododendrons, la roseraie, le reste du jardin où sans doute venaient le soir les libellules et les lucioles dans des vols insolites, je l'ai suivie jusqu'à cette autre aile de la demeure qui restait comme un lieu secret, un lieu interdit, dominant la mer, le vide, si proche du vertige... Plus tard je l'ai suivie encore descendant vers la petite crique en contrebas...
Je m'imprégnais de chaque lieu comme elle, j'avais envie de lui prendre la main, de lui dire de faire attention à ne pas trébucher...
Pourtant, j'ai aimé aussi ce brouillard blanc empli d'une odeur de sel et d'algues, comme ici près de chez moi...
Jamais livre ne m'avait ainsi obsédé avec autant d'entêtement.
Je voyais bien que la force narrative de Daphné du Maurier était de m'entraîner dans les dédales de ce livre comme on jette quelqu'un dans le labyrinthe d'une maison, puis qu'on verrouille à double-tour en prenant soin de jeter la clef au fond du puits.
Rebecca, c'est une splendide construction aussi imposante, aussi solide qu'une demeure.
Il est des livres qui ressemblent aux demeures qui les habitent.
Je m'étais posé devant ce vieux secrétaire au style victorien, dans ce bureau de l'aile ouest de la maison, là où il ne fallait pas mettre les pieds. Mais au moins, j'étais tranquille, personne ne viendrait me déranger...
Je pensais à Rebecca. Comment une femme qui avait disparu pouvait autant habiter, incarner ce lieu ? Ce livre ? On sentait sa présence, son ombre, sa respiration à chaque couloir, à chaque page. C'est peut-être là que réside la force littéraire de Rébecca, dans cette évocation.
Rebecca avait le don de gagner la sympathie des gens.
Rebecca omniprésente.
Rebecca qui n'avait peur de rien.
Rebecca qui prenait possession du lieu, du monde, du coeur des gens. Jusqu'où fallait-il craindre Rebecca ?
Rebecca, qui serait là toujours présente dans cette maison tant que cette maison serait debout.
Rebecca qui ne vieillirait jamais, qui resterait éternellement jeune.
Daphné du Maurier a réussi à nous tenir en haleine avec un personnage féminin qui n'est plus là, ou plutôt, si, elle est là tout le temps- là.
Il y avait toujours Mrs. de Winter ceci, Mrs. de Winter cela...
Elle, la nouvelle Mrs. de Winter, on l'examine de la tête aux pieds. Les gens la regardent sur toutes les coutures, d'un oeil soupçonneux la comparant inévitablement à Rebecca.
Et si Rebecca n'avait rien à voir avec l'image parfaite qu'elle renvoyait ? Après tout...
Tandis que la nouvelle Mrs. de Winter n'avait à opposer elle que bonté, timidité, sincérité. Je le savais.
Les fantômes ont la peau dure. C'est fou, ces fantômes qui n'existent que par la volonté diabolique des seuls vivants !
Daphné du Maurier avait réussi ce coup de génie de la faire être sans cesse présente, plus que tout autre personnage.
J'étais là à me battre avec ma chronique sur des feuilles de brouillon éparpillées que j'avais couvertes de lignes, quand tout d'un coup il y eut un courant d'air. La fenêtre s'ouvrit avec violence faisant entendre le rugissement de la mer. La porte du bureau était grande ouverte et elle se tenait là sombre et droite dans sa stature figée et glaçante, Mrs. Danvers. Elle s'avança vers moi d'un air menaçant.
Qu'est-ce que vous écrivez là ? Vous parlez de Rebecca, c'est cela ? Vous êtes en train de dire du mal d'elle ? Vous n'avez de pensées respectueuses que pour l'autre là-bas, l'insignifiante, celle qui devrait repartir d'ici au plus vite, ça se voit sur votre visage. Elle s'était approchée de moi, du secrétaire, voulait s'emparer des feuilles, il y eut un autre courant d'air et les feuilles s'envolèrent par la fenêtre. Me penchant à travers celle-ci, je les voyais partir dans le vent, elles allèrent vers les rhododendrons. Je descendis aussitôt les escaliers, je courus dehors. Je voyais les feuilles voler parmi les libellules et les lucioles du soir et je me disais qu'il y avait comme une grâce dans ce mouvement. Mais brusquement une pluie venue de nulle part se déversa sur le paysage comme un seau d'eau, effaçant les libellules, les lucioles, l'encre sur les feuilles... C'en était fini de ma critique, tandis que derrière la fenêtre du salon je voyais le visage narquois de Mrs. Danvers savourer sa victoire...
La paix à Manderley reviendrait-elle un jour ?
J'ai rêvé l'autre nuit que je retrouvais les pages de ma critique.
Puis les mots sont revenus, il suffisait de fermer les yeux. Attendre que le coeur s'apaise après cette lecture envoûtante.
Que dire de plus ? Que j'ai été conquis par cette incroyable construction, un subtil édifice romanesque d'une structure classique, associant avec grâce et habileté un récit sentimental, un thriller haletant, dans une atmosphère jouant sans cesse avec l'étrangeté comme au bord d'un royaume mi réel, mi-rêvé, entre les vivants et les morts.
Rebecca, c'est un puzzle qui se construit pièce par pièce.
La belle mécanique est si parfaitement huilée qu'on ne s'attend jamais à voir surgir l'instant où le récit va basculer de l'autre côté de l'histoire et nous happer dans sa nasse, nous rincer comme un bateau pris dans les tenailles d'une tempête et nous rejeter harassé sur le bord du rivage...
J'ai rêvé l'autre nuit que je retournais à ce livre.
Il est des romans qui vous habitent à jamais comme des maisons.
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