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Critique de BazaR


Je ressors de cette biographie avec une sensation d'amertume… non pas parce que je suis déçu, mais parce que Catherine Dufour a trop bien fait son boulot.

Car oui, je l'avoue, j'aime bien avoir des époques passées une image romantique que j'aime à croire vraie. Et ma vision du 19ème siècle anglais était toute en positif, à tout le moins pour les hautes classes. Un effet Jane Austen, entre autres.
Catherine Dufour débarque et vous dit tout de go qu'il est temps d'arrêter de croire au Père Noël. Ces hautes classes au vernis impeccable ne sont qu'un cloaque d'hommes médiocres et de femmes traitées comme l'ombre de leurs chaussures, pour rester poli.
Avec son ton sarcastique si efficace – qu'elle avait déjà employé pour démol… biographier Alfred de Musset – elle nous joue un ballet des horreurs comportementales. Rares sont les hommes qui échappent à ses fourches caudines. Ces nobles gens du « monde » cherchent à marier des dots faites femmes, dépensent au-delà du possible au jeu, s'enfuient en Europe quand ils n'ont plus les moyens, trompent allègrement leurs épouses et ne s'intéressent guère aux enfants qu'ils créent. Lord Byron est rhabillé pour l'hiver (quel brave homme). Ceux qui en réchappent ne sont pas tous d'adorables canaris, comme le mathématicien Charles Babbage au caractère impossible.
Le sort des femmes est à pleurer. Oh on les éduque, mais juste pour que leur culture leur serve de robe. Faire carrière est une gageure. Celles qui y parviennent, comme Mary Somerville, ont une volonté d'adamantium. Elles doivent surtout être « ladylike ». Il leur arrive de prendre amant, mais surtout éviter le scandale. le traitement de leurs époux, violent en parole et parfois en acte, en fait des êtres traumatisés qui propagent cela à leur descendance.

Et Ada Lovelace dans tout ça ? Elle entre bien dans ce canevas. Mais on découvre une femme aux grandes capacités mathématiques et au pouvoir d'extrapolation étonnant. A partir de la machine à différence de Babbage, elle va développer les concepts de base qui seront exploités au siècle suivant pour créer l'informatique. Sa contribution à cette science est cruciale ; Catherine Dufour le décrit très bien. Oh elle a aussi ses « défauts » comme une énorme confiance en ses capacités (elle a le melon quoi). Elle devient dépendante du jeu aussi. Et ce n'est pas la meilleure mère du monde (sa propre mère Annabella est infernale). Mais elle fait partie de ces gens du « monde » couverte de handicaps dès la naissance du fait d'être femme et qui va secouer le cocotier pour se faire un nom.

Cette biographie est courte et son ton est à l'opposé de la neutralité. Elle est profondément documentée, l'auteur employant des citations de lettres et d'autres biographies au sein de ses propres phrases, comme des munitions de mitraillette. Elle est drôle et accablante à la fois, et vous offre une peinture de ce 19ème siècle mondain et anglais que vous n'oublierez pas.
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