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Roger Giroux (Traducteur)
EAN : 9782253932130
377 pages
Le Livre de Poche (01/04/1994)
3.96/5   70 notes
Résumé :
Citrons acides ou la chronique du quotidien, de la vie comme elle va, dans une île chargée d'histoire, dont le présent -les années 50- annonce les convulsions de la modernité, les luttes pour l'indépendance de 1955 à 1959.
Ce qui fascine Durrell : la simplicité, l'élégance, l'authenticité des êtres qu'il côtoie, la beauté des paysages, la richesse et la diversité d'une nature exubérante, chaleureuse, vibrante de soleil. Quand un artiste se promène au pays des... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Quiconque est déjà allé à Chypre n'a pu qu'en tomber amoureux. Il y a des temples face à la mer, des forteresses perchées sur des éperons rocheux, des mosaïques antiques, des églises aux incroyables fresques. Il y a des petits villages dans les montagnes, des chevauchements de collines, la grande plaine fertile de la Mésorée… Et au milieu, comme une balafre, une hideuse ligne de barbelés hérissée de miradors, coupée de check-points et peuplée de soldats. Au sud, un pays européen moderne et prospère. Au nord, un pseudo-état pauvre et sale aux allures de dictature militaire, où l'on croise beaucoup de bâtiments en ruine, de soldats et de statues d'Atatürk. La Turquie tient la zone, et ne compte pas la lâcher.

Lawrence Durell, le célèbre auteur du ‘Quatuor d'Alexandrie', y passa quelques années. C'était avant l'indépendance, quand l'île était alors une colonie anglaise. Une époque révolue, une sorte d'âge d'or à certains égards, pour lequel son talent de conteur peut se donner à sa pleine mesure. Mais c'était également un diplomate émérite, qui analyse finement la situation, et expose comment le manque de moyens et l'inertie du gouvernement britannique menèrent à la catastrophe. Qui pouvait croire qu'un lieu aussi paradisiaque pouvait sombrer dans la violence et le chaos ? Personne, pas même lui. Quand les premières bombes explosèrent, que les premières personnes furent assassinées dans la rue, le réveil fut dur.

Les montagnes de Kyrenia, le village de Bellapais et son antique abbaye, les paysans avec lesquels il buvait un vin noir et sucré, les champs de citronniers… Tout cela n'est plus. La lutte dressa l'une contre l'autre la population grecque, qui réclamait le rattachement à la Grèce, et la minorité turque, qui ne voulait pas en entendre parler. La haine se prolongea après l'indépendance. La Turquie envahit alors le nord de l'île, où ne vivaient que peu de chypriotes turcs mais où se trouvaient toutes les ressources exploitables, et y créa un état fantoche. 150 000 grecs et 35 000 turcs furent déplacés de force et Ankara, pour faire bonne mesure, y adjoignit une centaine de milliers de colons venus des régions pauvres d'Anatolie.

Un livre où s'exprime toute la beauté de Chypre, et tout l'amour de Lawrence Durell pour la culture hellénistique.
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Après avoir lu plusieurs livres de Gérald Durrell, son frère, à l'humour ravageur, j'ai eu envie de connaître un des écrits de Lawrence Durrell. le récit ne se situe pas à Corfou, cette fois-ci mais à Chypre. Et j'ai aussi rit à la lecture de certains passages.
Ce n'est pas Justine, le plus célèbre, mais j'ai beaucoup apprécié les descriptions poétiques, l'analyse des caractères plus ou moins belliqueux des autochtones, ainsi que l'évocation pertinente de la grande Histoire.
L'auteur, en effet, ayant choisi de vivre quelques année dans ce petit paradis méditerranéen, finit par occuper un poste de conseiller auprès du consulat britannique, lui qui a su se faire de nombreux amis sur l'île, jusqu'à ce que la politique, le terrorisme et le désir d'indépendance s'en mêlent.
Chaque fois que j'ai ouvert ce livre, dans les files d'attente ou les jardins publics, j'ai été transportée bien loin de la grisaille lyonnaise ; (oui, j'ai un bouquin différent pour chaque moment de la journée et celui-ci, personnel donc que je n'ai pas crains de salir m'a accompagné un certain temps dans mon sac).
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En 1953 Lauwrence Durrell est parti vivre à Chypre. Il ne supportait pas la vie anglaise, adorait la Méditerranée, et des conditions de vie précaires ne lui faisaient pas peur. Ce livre est le récit des 3 ans qu'il a passé dans l'île, avant que les événements politiques ne l'obligent à la quitter et à abandonner ses amis et sa maison.

Le style, l'écriture de Durrell sont tout simplement merveilleux, baroques, flamboyants, très poétiques. Il décrit à merveille des sensations, des plaisirs simples mais d'une grande intensité, l'émerveillement devant la beauté d'un paysage, la caresse du soleil sur la peau, un repas simple, tout peut devenir source de plaisir. Visiblement un véritable épicurien. Et puis il sait parfaitement décrire les gens, simples et pittoresques qu'il croise sur l'île, et cela parfois avec un humour irrésistible, la scène où il achète sa maison est hilarante par exemple.

Mais j'aime moins la partie du livre où il aborde les problèmes politiques de l'île. Déjà tout cela est bien ancien et n'a plus le même intérêt de nos jours. Ensuite, Durrell est d'avantage quelqu'un qui ressent les choses qu'un analyste qui les pense, et donc ses explications sont répétitives et quelque peu confuses.

Mais dès qu'il abandonne la politique et la situation internationale, cela redevient complètement magique. Et la fin est d'une beauté poignante. Il sait qu'il est sur le point de quitter l'île définitivement. Il passe une journée avec son ami Panos, une journée merveilleuse, enchanteresse, très simple à la fois, un voyage pour aller chercher des fleurs, une baignade, un repas en plein air. En  un mot un concentré de toute la beauté et l'harmonie qu'il avait trouvé à un moment donné dans cet endroit. Sauf que, juste avant de nous décrire cette journée il a mentionné que quelques jours après Panos serait assassiné. Rien de plus que cette simple mention, et toute cette journée magique n'en paraît à la fois que plus belle mais aussi plus terrible. Toute cette beauté, douceur de vivre et harmonie sont si fragiles et peuvent voler en éclats en une seconde à cause de la haine et de la violence des hommes
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Paradis perdu
« Pour Whitehall aussi, le point de vue changeait car ici, à Londres, Chypre n'était pas seulement Chypre : elle était un maillon de la fragile chaîne de centres de télécommunications et de ports, la colonne vertébrale d'un Empire qui s'efforçait de résister à l'usurpation du temps. Si l'on abandonnait Chypre, que deviendraient Hong Kong, Malte, Gibraltar, les iles Falkland, Aden... autant de rocs ébranlés mais encore fermes dans le dessin général ? La Palestine et Suez avaient été des problèmes de souveraineté étrangère. D'un point de vue géographique et politique, Chypre faisait partie de cette colonne vertébrale de l'Empire. Ne fallait-il pas, dans ces conditions, la garder à tout prix ? »
Lawrence DURRELL, Citrons acides (Bitter Lemons), Libretto, 1957, p. 258

Alors que pour l'auteur tout est désormais accompli et qu'il repose depuis 1990 en terre de France, à Sommières, c'est toujours le miracle et le pouvoir de l'écrit, de la littérature, de nous restituer intact et grouillant de vie tout un pan de son existence, de ressusciter sa rencontre avec le peuple et les personnages hauts en couleur de l'île de Chypre, à Bellapais dans ce village dominant Kerynia, où sur les hauteurs on retrouve encore sa maison Bitter Lemons - les tractations toutes théâtrales de son marchandage, un régal - ou l'Arbre de l'Oisiveté Tree of Idleness au coeur du bourg, tout près des superbes ruines de l'abbaye de la Belle Paix. Dans cette île où la nature étale ses splendeurs, « Et quand nous effleurions le tapis de fleurs, les tendres tiges claquaient contre nos chaussures et leurs pétales se refermaient sur nous comme si elles voulaient nous entraîner dans le monde souterrain d'où elles avaient surgi, nourries des larmes et des blessures des immortels. »
Mais les années 1950 de son séjour coïncident aussi, en contraste, avec le moment décisif de l'histoire de l'île, la lente montée des dangers, l'irrésistible aspiration à l'indépendance des Cypriotes, soutenus par la Grèce soucieuse de récupérer pour elle-même ces terres qu'elle estime siennes. Tout débute alors pianissimo par les manifestations bon enfant des lycéens et des grèves pour s'achever par le fortissimo des attentats, des assassinats et du fracas des bombes, intervention des forces armées et le paroxysme de l'exécution d'un révolutionnaire, devenu martyr de la cause de l'organisation indépendantiste, EOKA, sous le regard réprobateur des peuples du monde.
Dès lors tout bascule. La chaude tradition de l'amitié et de l'hospitalité entre voisins, la cohabitation des communautés grecque et turque vont peu à peu se muer en distance, froideur et méfiance mutuelle dans ce récit des occasions ratées - mais avons-nous fait mieux alors avec nos corps expéditionnaires ? - la crise aurait pu trouver une issue pacifique par la mise en place d'un référendum d'autodétermination. On se retrouve alors avec un peuple schizophrène obligé de s'opposer à des Anglais dont il apprécie la culture, l'intégrité et, paradoxalement, la démocratie, « Oui, poursuivit-il d'une voix lente et assurée, la voix d'un vieux sage de village, oui, même Dighenis, qui combat les Anglais, il les aime vraiment. Mais il va être obligé de les tuer - avec regret, et même avec affection. »
Et ce sera pour Lawrence Durrell, et pour nous, le départ et la fin de toute une époque, celle de l'Empire britannique, dans ce captivant récit historique et rempli d'humanité d'un éden perdu.
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Hélas, le livre intitulé "Citrons acides" de Lawrence Durrell s'est avéré être une apologie de la politique coloniale britannique. Cet écrit raconte la lutte de Chypre pour s'émanciper du joug anglais dans les années 50. Lawrence Durrell se trouvait alors sur l'île, qui n'était pas encore divisée en deux États et appartenait officiellement à l'Empire britannique. L'écrivain a été témoin des événements qui sont devenus essentiels dans l'histoire de Chypre.

Lawrence Durrell a écrit un livre dans lequel une pensée simple est tracée comme un fil rouge : les Chypriotes vivent mieux sous la botte de la Grande-Bretagne, par essence, ils aiment les Britanniques, même s'ils les tuent.

Ô Angleterre, règne sur les mers ! Lawrence Durrell est l'exemple guindé de l'Anglais typique de la classe supérieure, disposé avec snobisme envers les autres peuples et si confiant dans l'infaillibilité du principe de contrôle impérialiste des colonies, qu'on en est étonné. Aucune des humeurs progressistes du siècle dernier ne semble avoir touché l'âme de ce voyageur amoureux de l'Antiquité et de la Méditerranée. Il n'y a rien de plus fort que l'éducation, ce sentiment de supériorité que les classes dirigeantes insufflent dans l'âme de leur progéniture.

Les mérites du livre sont dans le style de Durrell, original et intéressant, ses descriptions de la nature de Chypre sont impeccables.

Au final, j'ai imaginé un croquis qui sera bien compris des connaisseurs de Don DeLillo. Il résonne avec les paysages méditerranéens, comme une énigme donnée par la nature elle-même :

- Je t'aimerai toujours...

Couleurs du coucher du soleil.

Master-card. Visa. American Express
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critiques presse (1)
L’écrivain, sensible à l’hospitalité puis à l’amitié des rudes habitants de l’île, décrit la lente mais irrésistible progression du sentiment antibritannique, vécu aussi comme un déchirement par les Chypriotes grecs […].
Lire la critique sur le site : LeSpectacleduMonde
Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
La femme releva la tête avec mépris, et prenant à son tour la clef, la reposa violemment en s'écriant:
"Ce n'est pas vrai.
- Si ! " (Sabri abattit la clef.)
"Non ! " (Elle frappa la clef sur le bureau à son tour.)
" Si ! " (Bang!)
"Non ! " (Bang !)
Tout cela ne se situait pas à un niveau intellectuel très élevé, et je commençais à me sentir mal à l'aise. Je craignais aussi qu'à force de frapper cette clef sur le bureau, elle ne se finît par se tordre et qu'on ne puisse plus entrer dans la maison.
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Si tu viens à Kyrenia
Ne franchis pas les murs.
Si tu franchis les murs
Ne reste pas longtemps.
Si tu restes longtemps
Ne te marie pas.
Si tu te maries
N’aie pas d'enfants.
(CHANSON TURQUE)
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Il était manifestement doué de cette merveilleuse qualité musulmane que l'on appelle kayf - La contemplation qui vient du silence et du bien-aise. Ce n'est pas la méditation ou la rêverie, qui sont la détente d'un esprit conscient: c'est quelque chose de plus profond, un insondable repos de la volonté qui ne se pose même pas la question: "Suis-je heureux ou malheureux?"
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Comme le génie, les voyages sont un don des dieux. Mille circonstances diverses les préparent en secret, et quoi que l'on en pense, il est rare qu'ils soient entièrement le fait de notre volonté.
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En outre, les relations avec la presse sont toujours délicates, car la presse constitue une franc-maçonnerie mondiale, et rien ne pouvait influencer plus vite l'opinion publique dans un sens ou dans l'autre que l'attitude de la presse.
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Videos de Lawrence Durrell (8) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Lawrence Durrell
1965 Intimation BBC
>Histoire de l 'Asie>Histoire du Moyen-Orient>Histoire de l'est méditerranéen (66)
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