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Le quatuor d'Alexandrie tome 4 sur 4
EAN : 9782702016442
280 pages
Buchet-Chastel (01/02/1996)
4.12/5   48 notes
Résumé :
Alexandrie, cette ville qu'il trouvait âpre et terrifiante, réaffirme son emprise sur Darley quand il y revient après son exil volontaire dans une île grecque. Mais il la voit maintenant telle qu'elle a toujours dû être : un port modeste sur une lagune. Rien n'a changé que Darley lui-même et son optique du monde. Mélissa s'est effacée de sa mémoire. Justine tant aimée n'était qu'une illusion, « fondée sur l'armature défectueuse de paroles, d'actes et de gestes mal i... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Clea vient clore le cycle romanesque du Quatuor d'Alexandrie initié avec Justine. Clea, Justine, deux figures féminines qui se répondent en s'opposant. Si pour Darley, le professeur et l'écrivain, Justine pourrait être la figure de l'anéantissement et de la stérilité créative, Clea représenterait la promesse d'un avenir et la naissance d'une oeuvre.
Darley quitte l'île où il s'était réfugié avec l'enfant de Melissa et regagne Alexandrie à la demande de Nessim. La guerre fait rage et il trouve un emploi de bureau à la censure. Il n'y a pas vraiment de retrouvailles avec Nessim et Justine qui sont cantonnés à la campagne à la suite du complot auquel ils ont été étroitement mêlés. Mountolive, le diplomate, demeure distant : amoureux de Liza Pursewarden, il craint le scandale qui mettrait fin à sa carrière si la nature des liens entre Liza et son frère était révélée. Les relations entre les personnages du Quatuor se recomposent et se recentrent autour de Darley et Clea, la femme peintre.
L'essentiel du roman s'attache à comprendre le processus de la création artistique sous ses différentes formes. La création poétique incarnée par Pursewarden – créateur maudit car son génie se nourrit de l'interdit – s'ancre dans l'esthétisme d'une beauté foudroyante qui n'est totalement accessible qu'aux intéressés, Liza et son frère. D'ailleurs, l'oeuvre la plus aboutie de Pursewarden sont ses lettres à sa soeur mais elles finiront au feu car elles échouent à remplir la condition même du chef-d'oeuvre : l'universalité. La création littéraire est personnifiée par Darley et Keats. le journaliste apparaît au départ comme un nécrophage, celui qui va révéler le scandale en avilissant l'oeuvre d'un autre, Pursewarden. Mais Keats a subi l'épreuve des combats et il a compris que le livre à écrire n'était pas une biographie sulfureuse mais une matière travaillée par son expérience de la guerre. Pour Darley, le chemin vers la création est encore plus tortueux puisqu'il passe par la solitude, l'éloignement, la décantation des expériences et des erreurs. Quant au processus créatif chez Clea, il est encore plus radical puisqu'il passe par la mutilation et la souffrance : elle ne peint plus, c'est sa main-prothèse qui crée. le dévoiement de la création s'illustre chez Capodistria. Là, l'oeuvre n'est que le résultat de l'alchimie, c'est-à-dire la combinaison de différents éléments dans un processus magique : les créations – et créatures – sont vouées à disparaître car elles ne sont pas maîtrisables par l'homme.
Alexandrie, embrassée dans une dernier été incandescent, peut s'effacer dans ce qu'elle avait de plus mortifère pour ressusciter, dans l'esprit apaisé de Darley, ailleurs, sous une forme mythologique : « Il était une fois... » La cité n'est-elle pas toute entière pétrie par les mythes ? La bibliothèque, le phare, le tombeau d'Alexandre sont des souvenirs fabuleux qui ont fini par appartenir au merveilleux. Alexandrie reste alors la ville alchimique par essence, celle qui a opéré toutes les transmutations et transformé un policier alcoolique et travesti (Scobie) en saint (El Scob) ?
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@Cléa est le dernier tome de la rhapsodie Durrellienne d'Alexandrie.

Darley redevient le narrateur mais non plus de la mémoire mais du présent. Mnemjan est venu les chercher sur l'île, lui et l'enfant. Alexandrie les accueille sous le feu d'artifice d'un bombardement. C'est la guerre, et pour la première fois Darley ne scrute plus uniquement le même passé, l'histoire progresse, le temps a fait son oeuvre, les traces de la déchéance sont visibles : Nessim a perdu un oeil, la beauté de Justine s'est flétrie, Balthazar n'est plus que l'ombre de lui-même. La mélancolie est omniprésente.

Certaines énigmes trouvent leurs réponses grâce au journal intime de Pusewarden ou par les confessions de Cléa.

Mais comme le cours du temps a repris, d'autres histoires s'écrivent : la réhabilitation de Balthazar, le nouveau nez de Samira, le mariage de Mountolive avec Liza.

Darley et Cléa deviennent amants mais hantés par le passé ils se séparent et Darley fait ses adieux à cette Alexandrie qu'il perd et retourne sur son île. L'histoire se termine et recommence avec l'écriture du récit par Darley.

C'est avec une grande mélancolie que je laisse derrière moi l'Alexandrie de Durrell, ce ne fut pas un voyage de tout repos avec ses nombreuses ellipses mais quel voyage dans la relativité littéraire de Durrell. Tout simplement sublime !

Challenge Multi-Défis
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Si À la recherche du temps perdu s'achève sur le Temps retrouvé, on peut dire, en paraphrasant Pursewarden, figure de l'écrivain lucide et un brin cynique, alter ego romanesque de Lawrence Durell, que Cléa, ultime opus du quatuor d'Alexandrie, est le Temps délivré.

Ce dernier volume est d'un contenu conceptuel plus riche avec ses considérations sur la littérature, par le biais d'extraits du carnet de Pursewarden, ultime pirouette de ce personnage qui a eu le bon goût de quitter ce théâtre d'ombre en s'administrant fort proprement une dose de cyanure . Et en effet à part l'ultime mouture amoureuse entre le narrateur des deux premiers volumes et l'héroïne éponyme, qui a endossé à son tour le rôle de déniaiseuse auprès de ce dernier, lui révélant les ultimes turpitudes qu'il ignorait, les personnages principaux qui supportaient toute cette architecture n'apparaissent plus que comme de furtives ombres, le courant de la narration s'amenuisant progressivement, tel un modeste cours d'eau qui se perdrai dans les sables du désert qui enserre la ville cosmopolite d'Alexandrie.

Avec Cléa, le Quatuor d'Alexandrie s'achève dans un certain essoufflement. Il semblerait que l'auteur projetait un cinquième volume ayant comme figure principale Capodistria, dont la mort apparente ne cachait qu'une fuite face à ses débiteurs et qui dans son nouvel exil s'adonnait fébrilement aux prestiges de l'alchimie. En l'absence de ce volume putatif, le lecteur reste assez désemparé eu égard à l'effort qu'a demandé cette grande machine qu'est le Quatuor, comme un ambitieux château de cartes qui s'effondre. C'est le coeur de cette tétralogie qui remporte le suffrage de votre serviteur à savoir, Balthazar et Mountolive.
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"Cléa" est le quatrième mouvement du "Quatuor" et sans doute le plus achevé et le plus important pour la compréhension de l'histoire . Cette fois , l'auteur se met plus franchement en scène et rapporte le début , l'accomplissement et le délitement de son amour pour Cléa , l'artiste peintre , la secrète , archétype de la femme aussi belle que créatrice .
Bien sûr Alexandrie est toujours présente , mais l'époque n'est plus à l'insouciance . Nous sommes en pleine deuxième guerre mondiale . Les combats que l'on devine en toile de fond marqueront la fin d'un monde et le départ des occidentaux vers l'Angleterre , mais aussi vers la France . Mountolive sera nommé à Paris . Darley ( alias Durrell ) y retrouvera peut-être , mais on en doute , Cléa à Paris .
Dans ce livre Durrell excelle toujours dans les descriptions de paysages , de situations et de sentiments . Les personnages familiers de la saga réapparaissent ( Balthazar ) .On y parle beaucioup de Pursewarden , l'écrivain irlandais par le biais de sa soeur aveugle , qui cherche à mieux le comprendre au delà de la mort . Et puis surtout Scobie , le vieux marin alcoolique , béatifié maintenant par les musulmans au point de lui avoir consacré une journée de commémoration avec derviches tourneurs , baignoire sacrée et dévotes hystériques en mal d'enfants . Dans ce cas , comme dans celui des "homoncules" , Durrell va un peu trop loin dans la fantaisie , mais on lui pardonne bien volontiers car il a commis une grande oeuvre , une sorte de monument littéraire .
Lien : http://www.etpourquoidonc.fr/
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Je globalise ma critique aux quatre tomes que j'ai lus reliés en un seul volume, chez Buchet Chastel, 1997, 1029 pages. En reprenant l'ensemble afin de me remémorer les sensations éprouvées il y a une bonne vingtaine d'années, j'ai renoué avec l'incandescence romantique, l'exotisme d'une Égypte révolue, les passions exacerbées ou rentrées, la beauté d'une écriture dense, évocatrice et charnelle. L''envie est là de relire, mais n'est-ce pas du temps perdu...
Si je relis, je partagerai mes impressions nouvelles.
Lien : http://cinemoitheque.eklablo..
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Au moins quatre brasses, me dis-je, et prenant une profonde inspiration je me laissai couler comme une pierre. C'était d'une beauté fascinante. On avait l'impression de plonger dans la nef d'une cathédrale dont les vitraux laissaient filtrer le soleil à travers des centaines d'arcs-en-ciel. Les bords de l'amphithéâtre — car la fosse s'évasait progressivement vers le large — semblaient avoir été sculptés par quelque artiste fatigué de l'ère romantique en une douzaine de galeries inachevées, bordées de statues. Certaines de ces formes ressemblaient tellement à de véritables statues que je crus un instant avoir fait une découverte archéologique. Mais ces cariatides brouillées étaient le fruit des vagues, avaient été pressées et moulées, par le hasard des houles, en déesses, en nains et en clowns. Une fine algue marine aux reflets jaunes et verts les avait dotées de barbes — transparents rideaux visqueux que balançait doucement la houle, qui s'écartaient et se refermaient, comme pour mieux révéler leurs secrets, puis les masquer à nouveau.
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Je me laissais aller à méditer ainsi, nonchalamment, étendu sur une roche plate au-dessus de la mer, grignotant une orange, parfaitement enveloppé dans une solitude qui serait bientôt engloutie par la ville, par le rêve torpide d’une Alexandrie se chauffant, tel un vieux reptile, dans la lumière pharaonique du grand lac cuivré. Les maîtres sensualistes de l’histoire abandonnant leur corps aux miroirs, aux poèmes, aux troupes frôlantes de jeunes garçons et de femmes, à l’aiguille de la seringue, à la pipe d’opium, à la mort vivante des baisers sans désir. Parcourant de nouveau ces rues en imagination, je redécouvrais qu’elles mesuraient, non seulement l’histoire humaine, mais toute l’échelle biologique des affections du cœur – depuis les extases de Cléopâtre peintes sur les fresques (étrange que ce fût ici, près de Taposiris que la vigne ait été découverte) jusqu’à la bigoterie d’Hypatie{1} (feuille de vignes racornies, baisers de martyr). Et d’étranges visiteurs : Rimbaud, étudiant du Sentier Abrupt, a passé par ici, sa ceinture gonflée de pièces d’or. Et tous ces onirocrites{2}, ces politiciens et ces eunuques bistres étaient pareils à une volée d’oiseaux à l’éblouissant plumage. Pris entre la pitié, le désir et la crainte, je revoyais toute la ville dépliée devant moi, habitée par les visages de mes amis et personnages. Je savais que je devais l’éprouver à nouveau, et une fois pour toutes.
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Elle savait déjà nager comme une jeune loutre. De la roche plate dominant l’eau où j’étais allongé, je n’avais pas de mal à reconnaître en elle les yeux intrépides, légèrement obliques sur les bords, de Melissa ; et, à certains moments, comme un grain de sommeil oublié dans les coins, le regard sombre et hésitant (suppliant, inquiet) de son père, Nessim. Je me rappelai la voix de Clea disant un jour, dans un autre monde, il y avait longtemps de cela. » Observez bien : si une fille n’aime ni danser ni nager, elle ne saura jamais faire l’amour. » Je souris et me demandai si cela était vrai en regardant la petite créature plonger en douceur dans l’eau claire et glisser gracieusement vers la cible comme un phoque, les pieds joints, les orteils pointés vers le ciel. La lueur du petit mouchoir blanc entre ses jambes. Elle saisit la mandarine entre ses dents et remonta à la surface en décrivant une spirale parfaite.
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Et le temps s’écoulait, par un hiver de vents et de gelées plus mordantes que les chagrins, et par un bref printemps, pressé semblait-il, de laisser la place à ce dernier et splendide été. Il arriva par de somptueux détours, comme de quelque latitude longtemps oubliée que l’Éden aurait longuement savouré en rêve avant qu’il éclose miraculeusement parmi les pensées dormantes de l’humanité. Il fondit sur nous, tel une nef fabuleuse, jeta l’ancre devant la ville et replia ses voiles blanches comme les ailes d’une mouette.
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En méditant sur ces terribles lettres, je découvris aussi tout à coup le véritable sens de mes rapports avec Pursewarden, et à travers lui, avec tous les écrivains. Je vis, en fait, que nous les artistes, formons l’une de ces pathétiques chaînes humaines qui se passent des seaux d’eau pour éteindre un incendie, ou qui aident à charger un canot de sauvetage. Une chaîne ininterrompue d’humains nés pour explorer les richesses intérieures de la vie solitaire pour le compte de la communauté indifférente et impitoyable, unis par le même don comme par des menottes.
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