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Paule Guivarch (Traducteur)
EAN : 9782070388745
132 pages
Gallimard (05/04/1994)
3.17/5   38 notes
Résumé :
Lawrence Durrell a toujours été attiré par le taoïsme et par le mélange de philosophie et de règles de vie sur lequel repose cette religion souriante, voire narquoise. À travers la théorie d'un mouvement global des processus naturels où alternent le yin et le yang, il perçoit une esthétique de l'univers qui, pour lui, est poésie. C'est donc le taoïsme qui unifie les deux parties de ce livre où les souvenirs ressortent sous l'interrogation philosophique : deux rencon... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Difficile d'en vouloir aux braves qui veulent transmettre ce qu'ils ont compris de l'inconnu. Encore tous frais et jeunes chiots dans leur connaissance, ils préparent leur picotin avec des ingrédients pas assez mûrs et le font cuire au four à micro-ondes. C'est chaud rapidement mais ça ne dure pas longtemps.


Aucun doute que Lawrence Durrell a senti son âme palpiter après avoir reçu la visite de Jolan Chang, un érudit venu droit de Chine pour lui enseigner les rudiments du taoïsme. Il y a là quelque chose qui s'éveille en lui, en témoigne le besoin immédiat d'écrire un bouquin pour en instruire le monde entier. On croyait pourtant que l'initiation représentait le parcours d'une vie. Pourrait-elle en fait se résumer à une rencontre de trois jours avec un moine taoïste (surtout lorsque celui-ci s'abaisse finalement à obtempérer aux moeurs occidentales avec un plaisir honteux, quoiqu'encore pudique : c'est qu'il ne faudrait pas détériorer immédiatement l'affirmation de supériorité orientale) ? Dans la seconde partie du livre, le moine dégage, vite fait remplacé par une jolie pépée qui s'intéresse à Nietzsche avant de se dessaper pour une partie de sexe tantrique qui s'étend toute la nuit (mais monsieur ne s'intéressait qu'au bleu outremer dans le regard tantrique de sa partenaire).


Cet empressement à balancer l'expérience paraît drôle mais je vous assure qu'il n'y a pas beaucoup d'humour dans ce témoignage d'illumination. Si Lawrence Durrell avait assumé pleinement le côté déconnade de son récit, on aurait ri avec lui de ses considérations sur le sexe envisagé du point de vue du taoïsme. Première étape : je m'instruis auprès du moine taoïste –ces hommes-là sont bien supérieurs à nous parce qu'ils ne considèrent rien dans la perspective de l'utilitarisme. Deuxième étape : j'utilise les acquis de cette rencontre pour m'inscrire mieux et plus efficacement sur le marché de la consommation sexuelle –en m'inscrivant toutefois comme avant-gardiste sexuel, non-plus homme de la jouissance immédiate mais toujours reportée, toujours prolongée, maintenue jusqu'à l'épuisement du désir. Durrell fanfaronne comme un adolescent maladroit qui aurait réussi, pour la première fois, à faire jouir sa partenaire. Il insiste que l'amour ne doit pas être considéré comme une compétition entre deux individus mais on retombe dans la valeur marchande de la collectionnite lorsqu'il conclut sa démonstration par cet exemple éloquent : « Chang lui-même avait adopté cette très ancienne technique. Il se limitait à un seul orgasme pour une centaine de rencontres amoureuses et réussissait à faire l'amour avec plusieurs femmes dans la même journée ! »


A côté du bien-baiser, Durrell s'instruit également du bien-boire et du bien-manger. le taoïsme, visant à accomplir l'immortalité terrestre, souligne l'importance d'un régime ascétique agrémenté de quelques breuvages aux bonnes plantes de la pharmacopée… asiatique. Durrell, jusqu'alors du genre alcoolique, se descendant jusqu'à deux bonnes bouteilles de rouge bordeaux par jour, s'émerveille de sa rencontre avec l'homme frustre. Les récits de leurs dinettes s'étendent sur plusieurs pages au cours desquelles Durrell se montre de plus en plus moralisateur, heureux de bien-manger et bien-boire par fierté narcissique seule.


Durrell ! Tu semblais pourtant avoir compris qu'il y a des choses qu'on ne peut pas vraiment expliquer littéralement. Tu écris : « C'est ça le taoïsme, et dès que l'on tente de l'expliciter, on l'abîme ; comme un papillon rare que l'on essaierait d'attraper avec les doigts ». Et aussitôt, tu te sens obligé de tout faire foirer en ajoutant : « L'on est ici dans le domaine du ni-ceci - ni-cela des Indiens », et les ailes du papillon se cabossent. Je pense malheuresement à Frédéric Lenoir en lisant ce Sourire du Tao, sans doute parce lui comme l'autre se ressemblent dans mes souvenirs, m'ayant tous les deux fait goûter d'un plat corrompu, tous les plus fins ingrédients brûlés vifs par les micro-ondes, emballé sous-vide et recouvert d'une étiquette rigolante où un personnage, dans une petite bulle, te racole : « Viens, on s'amuse trop avec moi ! ». Ce qui n'est même pas vrai.
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Les premiers chapitres consacrés à la rencontre de l'auteur et du taoïste Jolan Chang sont les plus réussis. le lecteur fait connaissance avec les principes de ce chinois sexagénaire d'une manière sympathique et très vivante. Mais suivent deux chapitres dont les liens avec le sujet sont de plus en plus ténus. le premier est consacré à la visite de Durell dans le collège monastique du château de Plaige, non loin d'Autun, à l'occasion du nouvel an tibétain. Malheureusement son séjour est écourté par des ennuis mécaniques et Durrell en est réduit à parler beaucoup plus de la météo que du taoïsme. Heureusement ce chapitre reste agréable à lire. Quand au dernier chapitre il s'agit d'un souvenir, celui d'une jeune femme, Vega, avec laquelle il partage à ce moment un centre d'intérêt (Nietzsche et Lou Salomé). C'est passionnant, mais le lien avec le taoïsme est encore plus ténu. Ensuite, Durrell revient plus sérieusement vers le taoïsme dans «Le Tao et ses glose », mais de mon côté j'avais passablement décroché. le style de cet ouvrage est plutôt agréable, mais je ressors de cette lecture en ayant l'impression de ne pas avoir appris grand-chose sur le taoïsme et de ne pas saisir où voulait en venir Durrell.
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Je ne connais à Lawrence Durrell que d'éminentes qualités.
Son pedigree britannique lui a conféré des gènes qui marient l'élégance anglaise à la la fantaisie irlandaise. Son éducation a fait le reste: la famille a juste ce qu'il faut d'excentricité pour lui permettre de devenir diplomate et voyageur, écrivain brillant, après avoir été pianiste de jazz. Je ne serais pas étonnée d'apprendre qu'il fit aussi de l'espionnage au service de Sa Majesté, ou qu'il parlât couramment le grec, le sanscrit et l'arabe.

Il nous dit qu'il se découvrit taoïste comme M. Jourdain faisait de la prose. Une évidence pour un garçon imprégné de culture indienne, féru de philosophie comme de poésie, ouvert à la spiritualité des lamas tibétains.
Fort heureusement, ce cher Lawrence ne cherche pas à nous convaincre, encore moins à nous convertir à quelque doctrine. Pour lui le Tao est une démarche, une expérience, un mode de vie, un mystère qui échappe à toute définition; et de même que les mots ne peuvent décrire une fresque de Giotto ou une toccata de Bach, le Tao ne s'explique pas. Il se pratique, il nous habite, il se trouve dans l'eau d'une source, le regard d'un bébé, dans une pierre ou le vol d'un oiseau. Il est là quand nous sommes unis avec la nature, avec les pensées d'un ami, avec l'amour d'autrui, avec l'infini du ciel.

Laissons lui la parole pour conclure:
"Mais les confusions ont-elles bien disparu? Quelle sotte conclusion que celle-là, puisque, tant que j'écris, je dois continuer de supposer qu'elles existent. A des milliers de kilomètres de Kasyapa au sourire énigmatique, je travaille encore à faire le point et à tenir mon humble journal de bord. La Poésie, elle, crée de limpides impératifs comme: ne pas penser trop fort, ou: laisser les battements de son coeur briser le chiffre enchâssé dans les voyelles. La quête continue, poème après poème....."
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Je pense que ce livre est à lire plusieurs fois pour bien en comprendre la substance et arriver à entrer dans la pensée développée par l'auteur.
J'ai apprécié la première partie où Lawrence Durrell raconte son expérience avec Jolan Chang. J'ai aimé cette approche de la vie de ce chinois sexagénaire aux allures adolescentes qui montre que la "vie éternelle est possible" à condition d'avoir une hygiène de vie en accord avec son propre corps.
Cela rejoint les principes du Yin et du Yang qui est important dans la culture taoiste.
En revanche, la partie dédiée à Véga et aux recherches sur Nietsche a été beaucoup plus obscure et j'ai eu du mal à comprendre où voulait en venir l'auteur.
Un bilan en demi-teinte pour moi sur cette lecture.
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Dès leur première rencontre lors d'un déjeuner dans la maison de Lawrence à Sommières, Durrell et Jolan Chang, philosophe taoïste, ont développé une relation durable basée sur l'exploration spirituelle mutuelle.
La rumination autobiographique de Durrell sur leur amitié et sur le taoïsme raconte les réflexions existentielles de l'auteur, à commencer par son introduction au mystique et énigmatique "sourire dans l'oeil de l'esprit".
On parle de la parcimonie des désirs, de cuisine, dee yoga, de poésie, de Pétrarque et Nietzche, tout cela avec légereté et bonne humeur.

Le sourire du Tao est un charmant récit de l'éveil spirituel et philosophique d'un écrivain.
Lien : http://holophernes.over-blog..
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Le mot taoïsme (…) a toujours exercé sur moi la plus vive séduction, bien que, mis à part le grand poème qui est un peu leur Bible, je connaisse peu les taoïstes et leurs croyances, Mais du jour où mes yeux tombèrent sur le Tao-tö king, œuvre d’une grande beauté et d’une merveilleuse précision qui renferme une énigmatique description du grand moteur de l’univers et de son fonctionnement, je m’aperçus que c’était là ce en quoi je croyais – ou choisirais de croire si je découvrais un jour que croire m’était devenu nécessaire.
Mais, attention : que signifie pour moi le verbe « croire » ? Voilà un mot qui ne souffre point qu’on le traite ainsi à la légère, sans au moins essayer d’en saisir le sens exact. A mes yeux, chaque croyance, quelle qu’elle soit, requiert un certain degré de circonspection car elle se fige bien vite en dogme si, de provisoire, elle devient absolue. Par contre, le mot Tao évoque pour moi différentes attitudes (toute vérité étant relative), un état de disponibilité totale et de total abandon, une conscience totale, exhaustive et sans réserve de cet instant où la certitude pointe le nez, tel un poisson au bout de l’hameçon. C’est alors que l’esprit est en parfait accord avec la grande métaphore du monde – celle du Tao.
La réalité, alors souveraine, se libère de l’encombrant appareil conceptuel de la pensée consciente. C’est le point crucial où l’esprit se fond dans la création tout entière. Cette poésie, c’est le Tao.
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[FEMME - Poème chinois du IIIe siècle]

Quelle tristesse d’être femme !
Rien sur terre n’a moins de valeur ;
Les garçons, eux, se penchent à la fenêtre
Tels des dieux tombés des cieux.
Leur cœur embrasse les Quatre Océans,
La poussière et le vent de dix millions de lieues.
Mais nul ne se réjouit lorsque naît une fille.
D’elle sa famille fait peu de cas.
Devenue grande, elle se cache dans sa chambre
Effrayée à l’idée de regarder un homme.
Personne ne pleure –sauf elle- lorsqu’elle quitte la maison.
Rapide comme le nuage quand s’arrête l’averse,
Elle baisse la tête, se compose un visage
Ses dents mordent sa lèvre rouge, elle salue, s’agenouille,
O tant de fois ! Devant les serviteurs même elle s’humilie.
Son amour est bien loin, plus loin que les étoiles.
L’héliotrope pourtant se tourne vers le soleil.
Son cœur est divisé comme le feu l’est de l’eau.
Mille maux l’accablent ; son visage qui reflète
Le changement des ans porte amplement son âge.
Son Seigneur trouvera d’autres trésors.
Ceux qui, jadis étaient comme l’arbre et son ombre
Sont maintenant éloignés comme Hu l’est de Chi’in [deux noms de lieux]
Ou comme Ts’an l’est de Ch’en [deux étoiles].


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Le taoïsme est une branche si privilégiée de la philosophie orientale que l'on a raison de la considérer comme une vue esthétique et non purement institutionnelle de l'univers. Le taoïste est le joker du jeu de cartes, le poète du foyer. Son attitude dépend d'une proposition bien simple, à savoir que ce monde est un paradis et qu'il est de notre devoir de le rendre le plus présent possible avant de le quitter. Le grand impératif, en cette affaire, c'est de ne supporter aucun gaspillage, si minime soit-il, dans ce grand festin de vie innocente. Obscurément, le concept de bonheur humain immortel s'est infiltré dans l'esprit des taoïstes. Ils ont décidé d'abandonner aux hautes sphères de la hiérarchie religieuse la grande question de la félicité suprême, de la parfaite béatitude pour s'en tenir au monde réel ; tel, du moins, semble être leur message. Mais comment faire naître cet état si désirable d'immortalité ici-bas ? Pas question de ne faire du monde qu'une bouchée, se serait risquer l'indigestion spirituelle. Non, la plus exquise délicatesse de jugement, le plus grand raffinement d'intention doivent remplacer les automatismes brutaux à l'aide desquels nous vivons tous, au jour le jour, embourbés, tels des animaux préhistoriques, dans la vase de notre in-conscience.
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Les taoïstes ne s’appuyaient sur aucun élément extérieur tel que temples, rituels, uniformes, etc. Rien ne les désignait donc à la persécution : « Les vrais taoïstes n’avaient aucun trait distinctif excepté, si l’on veut, un certain regard – le regard du Tao ! Le regard de l’âme, en quelque sorte ! On ne peut tout de même pas persécuter un simple regard ! » Ce disant, Chang me décocha un échantillon du regard taoïste et je saisis tout de suite le sens de ses paroles. C’était un petit regard, mais quel regard ! plein d’insolente espièglerie, d’ironie et de gaieté. Un sourire de complicité sardonique empreint de la conscience amusée et oblique du prix de l’ineffable. C’était comme le premier lien entre des êtres humains reconnaissant leur rôle dans le processus de vie universel.
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Le taoïsme est une branche si privilégiée de la philosophie orientale que l'on a raison de la consdérer comme une vue esthétique [...]. Son attitude dépend d'une proposition bien simple, à savoir que ce monde est un Paradis et qu'il est de notre devoir de le rendre le plus présent possible avant de le quitter. Le grand impératif, en cette affaire, c'est de ne supporter aucun gaspillage, si minime soit-il, dans ce grand festin de vie innocente. [...]. Ils [les taoïstes] ont décidé d'abandonner aux hautes sphères de la hiérarchie religieuse la grande question de la félicité suprême, de la parfaite béatitude pour s'en tenir au monde REEL ; tel, du moins, semble être leur message. Mais comment faire naître cet état si désirable d'immortalité ici bas ? Pas question de ne faire du monde qu'une bouchée, ce serait risquer l'indigestion spirituelle. Non, la plus exquise délicatesse de jugement, le plus grand raffinement d'intention doivent remplacer les automatismes brutaux à l'aide desquels nous vivons tous, au jour le jour, embourbés, tels des animaux préhistoriques, dans la vase de notre in-conscience.
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1965 Intimation BBC
>Histoire, géographie, sciences auxiliaires de l'histoire>Biographie générale et généalogie>Biographie des écrivains (238)
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