Un grand merci à la masse critique Babelio et aux Éditions du Rocher de m'avoir fait découvrir « Zeina, Bacha Posh ».
Cécilia Dutter nous raconte Zeina, sa jeunesse en tant que bacha posch, son refus de se soumettre à la loi de sa famille , sa fuite lors d'une visite avec une ONG en France, sa recherche d'une nouvelle vie dans les rues de Paris, sa découverte par un photographe qui découvre en elle sa beauté et la projette dans le milieu du mannequinat. Elle y démarre une carrière brillante qui la met sous les feux des projecteurs. Mais elle ne sent pas plus libre d'elle-même qu'elle ne l'était à Kaboul, malgré une situation matérielle plus que suffisante. Elle n'arrive pas à trouver son identité propre, son bonheur de femme. Un homme la mettra sur la voie, un engagement profond pour son pays la rendra heureuse, mais avant d'en arriver là, elle aura vécu une partie de sa vie sous l'influence des hommes, tout en les manipulant. Une sorte de vengeance pour elle.
Mais le bonheur, elle s'en rendra compte n'est que dans le dépassement de soi, et l'aide qu'elle apportera à plus démunis qu'elle, lui redonnera ce que son enfance lui a pris.
Très beau livre. J'avais déjà lu quelques livres sur les Bacha Posh, et en connaissait déjà la signification. Cette histoire nous en parle évidemment au début, car le problème de Zeina est celui d'avoir été élevée comme un garçon avec tous les privilèges qui vont avec, en Afghanistan. Le choc est très rude lorsqu'elle doit reprendre son identité de fille et la construction de sa personnalité en souffrira .
On voit ensuite la confrontation avec notre société, qui considère la femme comme libre, mais qui la soumet quand même à d'autres diktats, celui de l'apparence, de la beauté, dans ce milieu professionnel extrêmement dur qu'est la mode. Tout cela fait un effet détonant, et Zeina mettra de nombreuses années avant de trouver son équilibre.
J'ai beaucoup aimé l'écriture de Cécilia Dutter, rapide, nerveuse et pleine de sensibilité qui nous parle avec sincérité de femmes de notre temps.
Commenter  J’apprécie         70
Zeina est une jeune fille qui a vécu toute sa vie en tant qu'homme, c'est une bacha posh. Grâce à cela, elle a pu acquérir certaines libertés, elle a goûté à la supériorité qu'on leur donne et lorsqu'on lui dit qu'elle doit redevenir une femme, elle refuse et s'enfuit de chez elle. Elle trouve alors refuge dans une association installée à Kaboul qui milite pour le droit des femmes en Afghanistan. Grâce à cette association, elle va faire un séjour en France pour parler de sa condition mais au moment de retourner dans son pays, Zeina décide de s'enfuir.
Nous la suivons alors dans les rues de Paris, puis au cours de rencontres clés qu'elle a fait et son ascension dans le monde de la mode. On la retrouve enfin 10 ans plus tard avec ses doutes et ses interrogations.
Quand on débute ce livre, on ne s'attend pas à ce qu'on va y découvrir. On s'attend à une femme qui se défait de ses traditions et qui lutte pour sa condition. C'est le cas, mais d'une manière assez différente de ce qu'on pouvait imaginer.
Zeina subit une pression constante. Sa vie débute à Kaboul et ce sont les règles des hommes qui dirigent sa vie. Puis elle arrive en France, elle se fait repérer, et quand on imagine qu'elle peut enfin être elle-même c'est les diktats du monde occidental et de la mode qui l'emprisonnent. Elle passe du statut de bacha posh à celui de top model. Elle est prisonnière d'une autre manière et ne s'affranchit d'aucune règle.
Et enfin, elle retourne aux sources. Cela la sauve tout en la conduisant dans un chemin tout tracé, elle est dans cette lutte à laquelle on la prédestinait. C'est alors qu'on s'interroge sur la liberté qu'elle recherchait. Sauf quelques rares exceptions on a l'impression que la jeune femme s'est conformée à ce qu'on attendait d'elle, on observe qu'elle a elle-même accepté de se brider.
Nous avons là un livre intéressant qui se lit très facilement, Zeina a de la chance, beaucoup de chance dans son malheur. Elle arrive au final à s'émanciper mais cela d'une manière un peu trop romancée. Pourtant, c'est un roman plaisant qui peut nous permettre de nous faire une idée de l'environnement de ces femmes, par la biais de la fiction.
Commenter  J’apprécie         10
Un livre passionnant, qui se lit très vite.
L'auteur évoque la coutume afghane des bacha posh, ces petites filles qu'on déguise en garçon. On suit le parcours de Zena, une jeune fille en quête d'identité et d'émancipation, d'abord en Orient puis en Occident.
Je le recommande vivement à tous ceux pour qui le statut de la femme est aussi important que celui de l'homme.
J'ai beaucoup aimé la façon dont cette histoire est racontée. C'est très émouvant. le thème est d'une actualité criante.
Commenter  J’apprécie         70
Il y a des chouettes pages, un bon début pour cette histoire d’une basha posh – ces filles déguisées en garçons par leurs familles, en Afghanistan, là ou les femmes ne peuvent sortir seules – et qui réussi à fuir son pays.
Et puis ça devient convenu, mièvre, bancal. Les hommes font souffrir les femmes et, en même temps, ce sont eux qui les sauvent...
Et pis cette numérologie, purée, ça vient foutre quoi là dedans?!
Commenter  J’apprécie         41
On s’extasie devant le Panthéon et le jardin du Luxembourg en remontant le boulevard Saint-Michel. En prise directe avec le flux des voitures, motos, vélos, passants, les cinq étrangères ressentent la pulsation parisienne. Les gens vaquent à leurs occupations. La plupart des femmes marchent seules dans les rues. Visage découvert, cheveux au vent, jambes gainées de bas noirs, juchées sur des talons, elles déambulent le long des artères. La mémoire enregistre les plans-séquences s’offrant aux regards ébahis : couples bras-dessus, bras-dessous, adolescentes délurées riant, une canette de bière à la main, trentenaire pressée pédalant cuisses nues sur un Vélib, SDF étendu sur une bouche d’aération, grappes humaines sortant du métro, files d’attente devant les cinémas. L’esprit s’émancipe, brise ses fers, s’inventant une existence affranchie où seul le désir ferait loi.
« La liberté de la femme afghane se gagnera par l’accès à l’éducation. Mais il nous faut des moyens pour scolariser les petites filles. À l’heure actuelle, quatre-vingts pour cent d’entre elles ne le sont toujours pas. Certes, des progrès ont été enregistrés, notamment dans la capitale. Mais trop peu de lieux existent pour les accueillir. Dans les campagnes, les filles marchent des kilomètres pour rejoindre les écoles. Les familles hésitent à les y inscrire car les petites se font souvent harceler sur le chemin. Les talibans font régner la terreur. Dans la province de Kandahar, on a rapporté plusieurs cas de jets d’acide sur des écolières. On parle aussi d’empoisonnements par l’eau dans certains établissements. Les images de collégiennes de Takhar, évanouies sur des civières et transportées d’urgence à l’hôpital, ont fait le tour du pays… »
À l’école, j’avais beaucoup d’amis. J’avais peur qu’ils découvrent la vérité mais heureusement, personne ne s’est jamais douté de rien. Je m’habillais et me conduisais comme mes copains. Je jouais avec eux et parfois, je me battais quand on m’embêtait. J’allais où je voulais dans la ville. Pour gagner des sous, je ramassais des papiers dans la rue et je les vendais aux recycleurs. C’était dur de devoir mentir tout le temps, mais je n’avais pas le choix, il fallait bien faire manger ma famille… Quand je voyais mes sœurs, cloîtrées à la maison, je me disais que j’avais de la chance. Je voulais en profiter. Je savais que, comme toutes les bacha posh, à l’adolescence, quand je ne pourrais plus cacher mes formes, je serais obligée de redevenir une fille et on me marierait alors à un homme de mon ethnie…
« Quand les talibans ont pris le pouvoir, j’ai eu l’impression d’entrer dans un tunnel. Mon existence s’est éteinte. Durant cinq ans, j’ai dû stopper mon activité. Heureusement, en 2002, à peine quelques mois après la chute du régime et la création de l’autorité intérimaire dirigée par Hamid Karzai sous l’égide de l’ONU, j’ai pu lancer le mensuel Jasmina avec le soutien de notre homologue français Femme active. Grâce à la création de ce nouveau magazine, dont la mission est de défendre la dignité et les droits des Afghanes, j’ai apporté un peu de lumière aux sœurs de mon pays. Aujourd’hui, l’État français finance nos locaux et rétribue nos six salariés. Sans relâche, nous nous employons à dénoncer les inégalités dont nous sommes victimes. »
Elle a beaucoup appris durant ces derniers mois. La précarité, le froid, la solitude, le déracinement lui ont forgé une volonté d’acier. Elle s’est accrochée à son rêve et la providence lui a tendu la main. C’est ainsi qu’elle interprète le miracle de son sauvetage in extremis. Comme un encouragement céleste. Il est loin désormais le Dieu des talibans qui réduit les femmes à des fantômes. Il est loin Celui au nom duquel on a bafoué son identité. Son Dieu n’a pas de nom, pas de frontières, pas de rites. Une chose est sûre : Il est à ses côtés.
Camille de Peretti est lauréate du Prix des Romancières 2024 pour son roman "L'Inconnue du portrait" paru aux éditions @calmann_levy
A l'occasion du 25e Prix des Romancières, distinction remise chaque année dans le cadre du Forum du Livre de la @villedesaint-louis9907, Livres Hebdo a accueilli Michèle Kahn, présidente du jury, Cécilia Dutter, vice-présidente du jury et Anne Ghisoli, directrice de la librairie Gallimard, pour la remise du Prix à l'autrice Camille de Peretti.