AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782264015334
10-18 (20/11/1998)
3.98/5   25 notes
Résumé :
Dans ce texte écrit en 1880, Eça de Queiroz reprend un thème récurrent de la tradition littéraire : le pacte avec le diable. Teodoro, fonctionnaire d’État, mène une vie banale à Lisbonne, faite d’habitudes bien ancrées, de courbures d’échine face à ses supérieurs, de repas servis à l’heure et de prières automatisées, sa vie médiocre prend un nouveau tournant lorsque lui apparait dans un livre un message aussi troublant qu’attirant. Le diable lui-même lui propose de ... >Voir plus
Que lire après Le MandarinVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Quand j'ai vu ce livre proposé par Masse critique de Babelio, c'était évident qu'il était pour moi. Je lorgne sur cet auteur portugais du XIXe siècle, depuis plusieurs années ; je voulais commencer par « le crime du Padre Amaro » mais je ne le trouvais pas… J'étais pratiquement sûre d'être sélectionnée pour le recevoir car il était noyé dans une grande liste de romans attirant l'oeil… Et Bingo !

José-Maria Eça de Queiroz (ou Queiros ) nous propose un conte philosophique, qui tutoie le fantastique Teodoro, ce petit homme ordinaire qui signe un pacte avec le diable : il suffit de tirer sur une sonnette et à l'autre bout du monde un mandarin chinois meurt, et il hérite de ses biens. Bien sûr, il provoque la mort mais, c'est si loin que cela a moins d'importance, après tout, il ne le connaissait pas, ce vieil homme, juste son nom : Ti Chin-Fu.

Teodoro profite de ses nouvelles richesses, quitte la pension de famille (qui rappelle la pension Vauquier dans « le père Goriot ») pour emménager dans un hôtel particulier où tout le monde vient se prosterner à ses pieds pour entrer dans ses bonnes grâces : du Clergé en passant par les politiques, les pauvre, toutes les classes de la société. « Pendant ce temps-là, tout Lisbonne se traînait à mes pieds… » peut-on lire P 40

Mais, la conscience de Teodoro n'est pas tranquille et le regret, voire le remords s'insinue peu à peu, lui faisant perdre le goût à sa nouvelle vie : « l'oeil était dans la tombe et regardait Caïn ». Et il commence à voir le mandarin mort partout :

« Allongé à travers de la couche, sur le dessus-de-lit, gisait la silhouette ventripotente d'un mandarin foudroyé, vêtu de soie jaune, avec une grande natte qui pendait, et, dans ses bras, il tenait un cerf-volant de papier qui semblait mort lui-aussi » P 35

Qu'importe, il va aller visiter Paris pour se changer les idées, jetant un clin d'oeil à « L'Assommoir » et Zola au passage ;

« Puis je voulus descendre encore plus bas, m'encanailler, m'abandonner aux turpitudes alcooliques de « L'Assommoir » ; combien de fois, revêtu d'une blouse, la casquette sur la nuque, donnant le bras à Mes Bottes ou à Bibi-la-Gaillarde, n'allai-je pas, dans un charivari d'ivrogne, tituber sue les boulevards extérieurs en rotant et en hurlant : « allons enfants de la patrie-e-e… » P49

Mais cela ne suffit pas, il a besoin de réparer et s'embarque pour la Chine tenter de retrouver la famille du Mandarin…

J'ai adoré ce petit roman, d'une centaine de pages, d'une écriture remarquable; je rends hommage au passage à l'excellent travail de traduction de Michelle Guidicelli.

José-Maria Eça de Queiroz connaissait Paris, les autres capitales d'Europe car il était diplomate, mais il n'a jamais mis les pieds en Chine, alors il a lu beaucoup d'ouvrages, sur la culture, la géographie et tracé un vrai itinéraire de son périple en Chine, seule la ville de Tien-Ho a été inventée de toutes pièces.

Il nous livre, à travers son héros, Teodoro, profondément athée malgré son nom, (Encore une facétie !), ses réflexions sur Dieu, l'Église, la politique, l'argent qui rend tout puissant et les relations des hommes entre eux.

Il était proche du mouvement naturaliste au départ et peu à peu, il l'a trouvé trop rigide, (trop « trash » dirait-on de nos jours) et il s'est orienté vers plus de fantaisie, de fantastique, pour le plus grand bonheur du lecteur. On retrouve des allusions fréquentes à Zola, Rousseau ; on pense aux « Tribulation d'un Chinois en Chine » mais aussi à « La peau de chagrin », ce roman De Balzac que j'adore, et bien sûr, comment ne pas penser aussi à « crime et châtiment » ….

J'aime énormément le style de José-Maria Eça de Queiroz, ce roman est un véritable coup de coeur, et un coup de foudre pour l'auteur.

Il semblerait que j'ai bien fait d'attendre car « le crime du Padre Amoro » semble ressembler beaucoup à « La faute de l'abbé Mouret » écrit dans sa période naturaliste… je vais donc privilégier les romans qui ont suivi : « Les Maïas » « le cousin Bazilio ».

Je remercie vivement les éditions Chandeigne qui m'ont offert ce roman et envoyé leur catalogue, (ainsi que des marque-pages) qui propose des livres portugais, en version bilingue (j'ai repéré ainsi deux livres de Fernando Pessoa…) mais aussi des livres de langue portugaise : Brésil, Cap Vert, Mozambique….

J'aime beaucoup la postface de Michelle Guidicelli car elle propose une analyse très pointue du texte, je me suis contentée de dire mon ressenti…

J'espère vous avoir vraiment donné envie de lire ce roman-nouvelle, car il est magistral. J'ai fait durer le plaisir au maximum, tant l'écriture est belle et je n'exagère pas (malgré cette envolée lyrique) car José Luis Borges considérait José-Maria Eça de Queiroz comme « un des plus grands écrivains de tous les temps ».

Vous l'aurez compris : un livre à découvrir absolument….
Et encore merci à Babelio et aux Editions Chandeigne
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
Commenter  J’apprécie          526
Je ne connais pas du tout la littérature portugaise. Lorsque j'ai vu ce titre dans la sélection de la dernière masse critique je me suis dit que c'était là une bonne occasion de découvrir cette littérature. D'autant plus que Eça de Queiros semble être considéré comme un auteur important au Portugal. Et puis le résumé très Faustien de ce "Mandarin" me plaisait bien. J'étais donc ravie d'avoir gagné ce livre.

En fait, plus qu'à "Faust", "le mandarin" m'a fait penser à tout un pan de la littérature française. L'oeuvre de Eça de Queiros en est très imprégnée. L'auteur fait très souvent référence à la France et à ses grands écrivains. D'ailleurs le point de départ en lui-même prend sa source dans la littérature française. le postulat de départ est une variation autour du thème du "bouton du mandarin". Cette métaphore qu'on trouve chez Balzac qui l'a lui même emprunté à Rousseau ou Chateaubriand pose ce questionnement : que ferait un individu qui pourrait à distance et sans être suspecté tuer un vieux mandarin de Chine dont la mort lui apporterait la richesse ?
A partir de cet argument, Eça de Queiros propose un conte moral et social teinté de surnaturel. L'aspect fantastique est très ténu mais ajoute un charme inquiétant au récit, tout comme le côté exotique de la partie chinoise de l'histoire.
Mais ce qui est le plus saisissant dans "le mandarin" c'est la peinture de la société et des hommes et femmes qui la composent. L'auteur se montre assez acide lorsqu'il dépeint les travers des uns et des autres. Que ce soient les cohortes de flagorneurs qui viennent s'aplatir devant Teodoro devenu riche en espérant qu'il leur jettera quelques pièces ou les diplomates de l'ambassade de Russie en Chine, ridicules de superficialité, ils sont tous méprisables. Tout comme Teodoro lui-même dont l'auteur dresse un portrait peu flatteur. Dans ces descriptions au vitriol, Eça de Queiros fait preuve d'un sens de l'humour caustique assez savoureux, ce qui n'est pas sa seule qualité. L'écriture est élégante, fluide et évocatrice. On a là tout ce qui fait l'excellence de la littérature du 19ème siècle.

J'ai donc passé un très bon moment. "Le mandarin" est un récit intelligent, subtil, divertissant, bien écrit et plein de charme.
L'éditeur a eu la bonne idée de joindre son catalogue à l'envoi du livre. Spécialisé dans la littérature lusophone ainsi que dans les récits de voyage, Chandeigne propose un catalogue très alléchant. Cette opération masse critique m'aura donc permis de découvrir un très bon auteur et un éditeur intéressant. Je remercie Babelio et les éditions Chandeigne pour cette double découverte.
Commenter  J’apprécie          404
S'il suffisait pour hériter d'un mandarin riche comme deux rois de le supprimer dans la certitude de l'impunité, qui hésiterait à faire le geste ?
Sur ce thème (ancien) Eça de Queiroz relate avec un brio incomparable les aventures de son héros Teodoro, ses méprises, ses hésitations, les tracas que lui donne la fortune de Ti-Chin-Fu dont il a hérité.
Car l'assurance de l'impunité ne protège pas contre le remords et bien mal acquis...
D'Eça de Queiroz;., né à Povoa de Varzim en 1849 est mort à Paris en 1900, qui reste aujourd'hui la gloire des lettres Portugaises, le Mandarin est un chef-d'oeuvre.
(Antonio coimbra Martins - Quatrième de couverture de l'édition 10-18)
Commenter  J’apprécie          50
Un conte sous forme de nouvelle: l'occasion de traiter le thème du pacte avec le diable. Un texte très court qui laisse un goût d'inachevé car sans surprises, malgré un sujet alléchant. Cependant l'écriture d'Eça de Queiros est encore une fois remarquable et sa description d'une Chine qui semble le fasciner, est en particulier un plaisir. Ravie d'avoir pu découvrir ce texte de ce grand écrivain portugais grâce à Masse Critique et aux Editions Chandeigne.
Commenter  J’apprécie          60
Ce petit livre est un conte philosophique original sur le thème des accords qu'un homme peut passer avec le Diable, et ce qui s'en suit ...
La mise en place est savoureuse, avec une description de la société lisboète du 19ème siècle, sa hiérarchie, ses moeurs. le personnage principal Teodoro est sympathique, on le pense lucide et détaché, un peu jouisseur, jusqu'à ce qu'on le découvre bossu, supportant un surnom un peu moqueur. Pour moi, cela a changé brutalement son image, dissociant sa vision du monde où il idéalise sa position, et la réalité de ce qu'il vit.
Le pacte faustien est on ne peut plus classique et les suites se passent "bien" jusqu'à l'apparition du fantôme du mandarin (on ne parlera de l'homme qu'il était et de sa famille potentielle que plus tard), qui pousse Teodoro à un voyage pour tenter de réparer une partie des dégâts collatéraux qu'il aurait causés.
J'ai trouvé une construction classique à ce récit, un style agréable (il faut aimer la littérature du 19ème siècle, mais on n'est pas noyé de descriptions interminables), et beaucoup d'originalité dans les péripéties de la vie de Teodoro suite à son choix initial. Un voyage entre Lisbonne et la Chine de l'époque aux premières loges !
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Bossu, malheureusement, à force d’avoir courbé l’échine à l’université en reculant comme un moineau effrayé devant ces messieurs les professeurs et de m’être incliné jusqu’à terre devant mes supérieurs. C’est d’ailleurs une attitude qui sied aux bacheliers en droit : elle maintient la discipline devant un état bien organisé, et en ce qui me concerne, elle m’assurait des dimanches tranquilles. P 14
Commenter  J’apprécie          232
Il se peut bien que cet homme, inutile en tant que mandarin de l’Empire du Milieu, devienne utile sous d’autres cieux, métamorphosé en rose parfumée ou en chou délectable. Tuer, mon fils, revient presque toujours à équilibrer les besoins universels. P 22
Commenter  J’apprécie          200
"Et puis, je n'ai jamais été excessivement malheureux parce que je manque d'imagination."
Commenter  J’apprécie          520
Enfin, reconnaissant que ma conscience était en moi comme un serpent irrité, je décidai d’implorer l’aide de Celui dont on dit qu’Il est supérieur à la conscience parce qu’Il dispose de la grâce. P 45
Commenter  J’apprécie          220
Et pourtant, au moment où j'expire, une idée me console prodigieusement, celle de savoir que, du nord au sud et d'est en ouest, de la Grande Muraille de Tartarie aux vagues de la mer Jaune, dans tout le vaste empire chinois, aucun mandarin ne resterait en vie su tu pouvais aussi facilement que moi le supprimer et hériter de ses millions, toi, lecteur, créature improvisée par Dieu, mauvaise œuvre faite d'une mauvaise argile, toi, mon semblable, mon frère !
Commenter  J’apprécie          30

Video de José-Maria Eça de Queiros (1) Voir plusAjouter une vidéo

Eça de Queiroz : Alves et compagnie
Olivier BARROT présente, depuis les Chais de Porto (Portugal) le livre de Eça de Queiroz "Alves et Cie".
autres livres classés : littérature portugaiseVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (67) Voir plus



Quiz Voir plus

1 classique = 1 auteur (XIX° siècle)

La Chartreuse de Parme

Stendhal
Alfred de Vigny
Honoré de Balzac

21 questions
566 lecteurs ont répondu
Thèmes : classique , classique 19ème siècle , 19ème siècleCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..