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Critique de GeorgesSmiley


Quel style ! de jolies formules … « à même le trottoir, des pauvres vendaient à des pauvres toute sorte de pauvre sorte d'objets de troisième main »…
…D‘autres qui percutent tant on entend le narrateur hausser la voix et même hurler la fin de la phrase « Hubert Coste est plus grand que Lou Tausk, plus élancé, plus souriant, plus bronzé, plus musclé, plus tout ce que l'on peut concevoir et nous ferons grâce de sa putain de très jolie femme et de ses saloperies de merveilleux enfants. »….
…Des apartés prenant le lecteur à témoin pour lui délivrer des informations aussi hors de propos que savoureuses … « On se retrouve devant le Mandarin pensif, on y entre, on est guidés vers la table habituelle de Tausk, près de l'aquarium dont Hyacinthe considère les occupants. Ceux-ci ne lui rendent pas son regard, l'évitent ou peut-être même le fuient, l'ayant repéré comme un ancien expert en halieutique – lorsque dans sa jeunesse Hyacinthe affrontait les vagues au large des mangroves de Sassandra, à bord de sa pirogue en bois d'iroko propulsée à la voile et à la pagaie, pêchant les poissons du coin tels que le rason polygame dont le harem, désemparé quand le mâle lui est soustrait par l'hameçon, désigne la plus grosse femelle qui se dévoue pour changer de sexe*, la saupe dont on se méfie car elle se nourrit d'algues hallucinogènes, l'inconsommable uranoscope, le pagre combatif ou l'aveugle beaux-yeux. »…
…Des situations habituellement dramatiques (un enlèvement avec demande de rançon) qui deviennent loufoques… « Hubert a froncé un sourcil : ça devient emmerdant cette histoire, tu es bien sûr que c'est son doigt ? Tausk a avancé pour preuve la présence, sur ce doigt, du vernis 599, mais Hubert s'est montré réservé : Bien sûr mais enfin ça se bricole, un vernis. Ils vont continuer, a prédit Tausk, la prochaine fois c'est aussi bien un oeil que je reçois. Non, l'a calmé Hubert, ils n'iront pas jusque là. Mais ça devient plus sérieux, tu es sûr que tu ne pourrais pas payer ? Quand je dis payer, je dis payer un peu, pas forcément tout ce qu'ils demandent. Pour voir. Non mais tu ne te rends pas compte, a soupiré Tausk, après tout ce qu'elle m'a déjà coûté. »…
…Ou bien des barbouzes tout droits évadés de la série « Au service de la France » chargés de « veiller » sur l'épouse kidnappée… « Nature brute, air limpide, pollution minimum, ça me donnerait presque envie de m'installer (ici, en Creuse). Tu dis ça parce qu'il fait beau temps, c'est un climat dur en hiver, dans ces coins, c'est très humide et froid. N'empêche, argumente Christian, tu as lu Thoreau ? Il s'en tape complètement du climat, Thoreau, ça fait partie du truc. Il vit sa vie, c'est tout. Il est content Thoreau. Laisse tomber, disait Jean-Pierre, on arrive. »
J'ai vraiment apprécié ce brillant et loufoque pastiche de roman d'espionnage, en mesure d'emporter l'adhésion du béotien de lecteur que je suis, ouvrant pour la première fois un ouvrage du Maître. Ce sera suffisant pour me donner envie de continuer l'exploration de son oeuvre que je compte mener en parallèle d'un abonnement au Pêcheur français afin de capitaliser pleinement sur l'initiation érudite aux merveilles de la mer dont l'épisode de l'aquarium du mandarin pensif évoqué plus haut était la porte d'entrée.
*J'ai vérifié, c'est vrai…confirmé dans un article de Corse Matin.
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